1x06 : Ça ne s'oublie pas quand c'est la première fois
Musique/Vidéo : Emmanuelle - Premier baiser
Quand je me réveille le lendemain, la première chose que je fais est d'appeler Élise. Elle attend que je lui raconte tout de la soirée et il y a trop de choses à dire pour en parler en simples textos.
- Allo, ma belle ?
- Alors, comment ça s'est passée ? Raconte-moi tout.
- Et bien accroche-toi car je ne suis pas prête d'oublier cette soirée...
- Vas-y raconte !
- Okay. Alors la mère d'Arnaud est adorable, là-dessus rien à dire. Mon père et ma grand-mère étaient biens. Mais alors ma mère...
- Ah... (je devine son air déconfit au téléphone même sans la voir), elle a fait quoi ?
- Elle a été odieuse. C'est limite si elle ne l'a pas traité de sale gosse alors qu'il a eu un comportement exemplaire. A un moment tu vois, j'en ai eu marre. J'ai gueulé sur ma mère et elle m'a giflé.
- Ta mère t'a giflé ? La vache, c'était violent.
- Je ne te le fais pas dire. Elle a été comme ça à cause de mon ex bien sûr. Elle ne comprend pas qu'il n'a rien à voir avec lui.
- J'espère quand même que ça s'est bien passé avec Arnaud.
- Oui heureusement il ne m'en veut pas. Et ma belle ?
- Oui ?
- Je l'aime. Je n'ai plus de doutes là-dessus. Je suis amoureuse de lui.
- Je le savais ! Mais ta mère...
- Ma mère ne veut pas que l'on sorte ensemble...
- Tout de même, ma belle, tu as quinze ans. Tu as parfaitement le droit de sortir avec des garçons. Tous ne sont pas des gros cons comme Marc, ta mère ne veut pas comprendre cela.
- Oui tu as raison. Mais ça dépend aussi d'Arnaud : et si lui ne veut pas ?
- Arrête de te faire des films. Il te dévore des yeux, tu le dévores des yeux. Faut juste que tu lui parles, c'est qu'une formalité.
- Oui... tu as raison. Il est temps d'en parler. Je l'aime tellement, je ne peux pas continuer à faire comme s'il n'y avait rien.
- Je t'encourage de tout mon cœur. Raconte-moi surtout.
Quand je descends le lundi matin suivant dans la cuisine pour déjeuner, seule maman est présente – papa est parti conduire Lili à l'école avant d'aller travailler – et est en train de boire son café. A en juger par son regard en me voyant, je comprends qu'elle m'attend et qu'elle va poursuivre la soirée. C'est que je porte encore la marque de sa main sur ma joue – à peine celle-ci a-t-elle diminué malgré le maquillage.
- Enfin te voilà, Mathilde. J'ai à te parler.
Son ton ne présage rien de bon. Elle est tout à fait capable de me dire qu'elle a changé d'avis et m'interdit d'aller à la soirée.
- Oui quoi ? dis-je tout en me préparant un chocolat chaud
- Assieds-toi d'abord.
Après avoir mis le bol dans le micro-onde, j'obéis. On attend qu'il soit chaud, que je l'aie sorti du micro-onde pour que maman reprenne la parole.
- Après ce dîner... mémorable, j'ai bien réfléchi, dit-elle.
- Oui.
- J'ai pris une décision définitive : si tu veux fréquenter ce garçon, c'est d'accord.
Je m'apprête à sauter de joie car je n'ai espéré que cela, mais je me dis que c'est une mauvaise idée et préfère rester de marbre.
- Okay d'accord, maman.
- En revanche, je veux être claire sur un point : je n'ai rien contre Arnaud, mais je sais très bien à quoi pensent tous les garçons de ton âge.
Oh non dites-moi que je rêve... je préfère encore quand elle me gifle pour lui avoir crié dessus... cette fois-ci par contre je ne peux pas retenir une réaction.
- Tu ne vas pas recommencer, maman ! répliqué-je d'une voix lasse. Il faut te le dire en quelle langue ? Je-n'ai-au-cu-ne-in-ten-tion-de-cou-cher-main-te-nant-et-lui-non-plus !
- Tu n'as peut-être « aucune intention » comme tu dis, mais je sais comment sont les garçons, ils sont tout à fait capables de te convaincre !
- Mais c'est quoi le problème enfin ? Qu'est-ce qu'Arnaud a de mal ?
- Rien justement, ce n'est pas là le problème. Mais bref c'est non. Il est hors de question que tu fasses... tu-sais-quoi avec lui. Est-ce que je me fais bien comprendre ?
- Oui, maman.
Et comme pour tenter d'apaiser les tensions, maman se penche vers moi et, me prenant par la main, elle me dit avec bien plus de douceur :
- Je sais que je suis sans doute trop sévère, chérie. Mais crois-moi, je veux juste ton bien.
Une fois mon chocolat chaud avalé, je suis bien heureuse de sortir de la cuisine.
- Je te jure, ma belle, j'en ai marre de ma mère, me confié-je à Elise sur le chemin du lycée. Tu te rends compte de ce qu'elle m'a encore dit ? Comme si j'allais coucher avec lui alors que l'on n'est même pas encore ensemble ! C'est limite si elle ne m'a pas traité du mot en « P » !
- C'est sûr que c'est ridicule quand on te connait, ma belle, mais tu sais je la comprends quand même un peu... je veux dire, elle s'inquiète pour toi.
- Je sais bien, on n'arrête pas de me le répéter « qu'il faut la comprendre »... et les tiens, ils disent quoi au sujet de... ce-que-tu-sais ?
- Tu veux dire au sujet du cul ?
Je sais que les Dubonpied sont très ouverts d'esprit mais il n'est pas certain que cela puisse aller jusque-là. Élise est leur fille unique et leur plus précieux trésor.
- On n'en parle pas vraiment, répond ma meilleure amie avec un air curieusement absent. Honnêtement, ça ne m'intéresse pas pour l'instant. J'ai même pas demandé à ma mère pour la pilule.
Je retrouve Arnaud à la première pause-récréation de la journée. Nous étions assis l'un à côté de l'autre en Français mais ayant un devoir sur table, il ne nous a pas été possible de discuter du dîner.
Quand arrive la récréation, Élise décide de nous laisser parler en privé et m'adresse un sourire encourageant. Je fais face à lui et je tremble. Je l'aime tellement. Rien que de regarder ses yeux fait battre si fort mon cœur. Comment puis-je sérieusement renoncer à des sentiments aussi forts ?
De ce fait, je n'arrive pas à trouver les mots.
- Tout va bien, Mathilde ? demande Arnaud avec inquiétude comme s'il pensait que j'étais malade.
- Je... je dois te parler de...
- C'est à propos de ce fameux dîner ? Je te l'ai dit ce n'est pas si grave. J'en ai parlé avec ma mère et on est content d'être venus
- Non... enfin oui, ça a un rapport mais... bref voilà. En fait...
- Ta mère ne veut pas que l'on sorte ensemble c'est cela ? Elle ne veut vraiment pas on aille ensemble à la soirée d'Halloween ?
- Si justement, elle a donné son accord et pour de bon...
Je n'arrive même pas à évoquer le fait que l'on est passé à l'étape suivante avec maman tellement je suis gênée.
- Ce que je veux te dire, c'est que...
- C'est que...
- C'est que... je suis amoureuse de toi.
Voilà au moins ça c'est dit. Le plus dur est fait. Certains diront que ce n'est pas si difficile justement mais ça l'est quand même un peu...
Arnaud reste silencieux un moment. A quoi peut-il bien penser ? Difficile de le deviner. Ce stress, cette attente, ça m'est insupportable. Je décide de prendre les choses en main.
- Dès que je t'ai vu pour la première fois entrer dans la classe, j'ai su qu'il y avait quelque chose, je n'étais pas indifférente et c'est pour cela je suis allée te parler. Tu occupes mes pensées, tu occupes mon cœur, j'ai envie d'être avec toi, de prendre ta main, d'être dans tes bras. Bien sûr si tu ne partages pas mes sentiments, je ne t'en voudrais pas. Je comprendrais et j'accepterais tu préfères on reste amis mais au fond de moi je le sais, je ne peux pas. Je suis trop amoureuse pour cela et...
- Mathilde, coupe-t-il.
- Quoi ?
- Je suis amoureux de toi moi aussi.
Je manque de pleurer. Là encore cela parait évident mais l'entendre de sa bouche est si différent. Jamais ses yeux n'ont été aussi beaux...
- Mais le problème...
Non, s'il vous plaît, non...
- ... c'est que je vois bien comment ta mère n'est pas très enchantée, et je ne veux pas être la cause d'un conflit entre elle et toi. La mienne a été très peinée quand tu as été giflée.
- Je comprends...
Après avoir eu si chaud, j'ai l'impression que mon cœur vient subitement de perdre une quarantaine de degrés d'un coup.
- Ce que je veux dire, continue-t-il et je vois bien qu'il est attristé, c'est que si elle souhaite que l'on s'évite, alors il vaut mieux s'éviter.
Je suis au bord des larmes. Je sais qu'il a raison. Malgré ce qu'elle a pu dire, je sais que maman nous surveille de très près et cela risque de devenir bien trop pesant si l'on commence à sortir ensemble. Elle ne lâchera pas Arnaud d'une semelle, prête à le punir à la moindre incartade.
Et je sais donc que nous ne pouvons rien faire.
- Oui... tu as raison, il vaut mieux s'éviter pour quelques temps, dis-je, plus triste que jamais.
Il me parait alors inutile de prolonger cette pénible scène. Rester auprès du garçon que j'aime me fait trop de mal.
- Bon ben...
- Ben... à plus, Mathilde.
- A plus.
En rentrant le soir-même du lycée, je monte directement dans ma chambre sans dire bonjour à personne, sans même prêter attention à Lili qui voulait que je joue avec elle à Buzz l'Éclair et Jessie L'Écuyère. Je me jette sur mon lit et pleure sur mon oreiller.
Tout le restant de la journée, j'ai fait de mon mieux pour ne surtout pas regarder Arnaud et lui-même a pris soin de ne pas poser ses yeux sur moi. Comme si une barrière invisible était érigée entre nous. Quant à Élise, elle a évidemment tout compris mais sait que je n'ai pas envie d'en parler. Elle ne m'a donc pas questionné et, chose assez rare pour le signaler, le chemin du retour s'est fait en silence.
Je n'ai même pas envie de descendre dîner et je ne prête aucune attention aux réclamations de mon estomac, m'estimant de toutes manières incapable de manger quoi que ce soit. Un bref coup d'œil à mon téléphone, aucun texto ni message Messenger ou WhatsApp d'Élise. Ma meilleure amie sait que j'ai besoin d'être seule.
Je me rends compte maintenant que je n'ai jamais aimé Marc. Je suis sortie avec lui car je voulais juste avoir mon premier copain comme la plupart des autres filles de mon âge. Mais c'était une erreur et je n'ai aucun regret quant à ma rupture avec lui.
Mais Arnaud par contre, il n'y a aucun doute : je l'aime, je l'aime tellement. Et devoir renoncer à mes sentiments et m'éloigner de lui fait tellement mal à mon cœur que je ne suis pas certaine que celui-ci s'en remettra un jour.
C'est avec lui que je veux être et personne d'autre. Sans lui, je suis malheureuse.
Maman m'appelle pour dîner mais je ne réponds pas. Bien évidemment, elle comprend vite qu'il y a un problème et je l'entends monter vers ma chambre. Elle peut se montrer pénible mais elle reste ma mère et si j'ai le cafard, elle est toujours là pour me réconforter.
La porte de ma chambre s'ouvre tout doucement et je découvre alors que c'est papa qui est monté. Alors même que je viens de finir de vider ma réserve de larmes sur mon oreiller, lequel est maintenant aussi trempé que si je l'avais jeté dans une piscine.
Papa s'assoit sur mon lit et me regarde. Il attend patiemment que je lève les yeux et sois prête à parler. Quand je daigne enfin la regarder, Puis il me prend dans ses bras et chuchote :
- Ta mère s'inquiète, elle se demande pourquoi tu ne viens pas manger.
- Je sais, papa, mais...
- Ne t'inquiète pas, je m'occupe de tout. Parle-moi, ma chérie. Raconte-moi ce qui s'est passé.
Je réalise alors que pour la probablement première fois de ma vie, je peux avoir une conversation à cœur ouvert avec mon père. Et cela me touche suffisamment pour consentir à lui parler.
- Papa ?
- Oui, ma chérie ?
- Pourquoi n'ai-je pas le droit d'être amoureuse ?
Papa soupire et me répond :
- Quoi ? Mais enfin, chérie, bien sûr que tu as le droit d'être amoureuse !
- Mais maman ne veut pas...
- Ta mère veut ton bien. Tu sais, cela lui a fait de la peine de te voir si mal à cause de ce garçon. Elle ne veut pas que ça recommence, c'est tout. Les mères sont comme ça avec leurs filles.
- Je sais bien mais Arnaud n'est pas méchant, tu l'as bien vu...
- Je sais ça, je sais ça. Mais tu vois, dit-il avec un petit sourire pas moins chaleureux, quand on est parent d'une fille comme toi, il n'y a pas un jour où l'on n'a pas peur. Tu es une personne magnifique, Mathilde, tu as un cœur pur, on ne peut dès lors supporter l'idée que quelqu'un puisse te faire du mal.
Je m'efforce de sécher mes larmes et regarde papa droit dans les yeux, lui intimant de continuer.
- Je n'ai aucun doute sur le fait qu'Arnaud Leroc est quelqu'un de bien. Et ta mère non plus n'a aucun doute.
- Mais alors pourquoi ne me fait-elle pas confiance ?
Cette fois pour me répondre, papa me tend les bras et je me laisse prendre. Et me laisser bercer me fait du bien. Du réconfort, c'est cela dont j'ai besoin en ce moment.
- Tu sais, ma chérie, je comprends que ta mère est sévère et que cela t'énerve. Mais pour une maman, voir sa fille aussi mal est déchirant pour son cœur.
- Je sais ça, papa.
- Mais tu sais j'en ai discuté avec elle après ce fameux dîner, et tu sais ce qu'elle m'a dit ? Qu'Arnaud et sa maman lui ont fait très bonne impression. Elle le trouve gentil, poli et elle a beaucoup de respect pour sa mère qu'elle admire sur le fait d'avoir élevé seule un si bon garçon. Et je suis entièrement d'accord avec elle. Il est le fils idéal et nous savons qu'il est digne de confiance.
Ainsi donc, maman a fait les louanges des Leroc ? Elle peut être très surprenante je le reconnais.
- Alors ça veut dire...
- Oui. Tu peux non seulement aller à cette soirée mais tu peux sortir avec lui. Tu as notre accord.
Mon moral vient de faire en un coup une remontée spectaculaire.
- Oh ! Merci, papa ! Vraiment !
Et je l'embrasse sur la joue.
- Allez viens, ma chérie, on va dîner. Ton estomac crie famine et on l'entend bien.
Et c'est avec un enthousiasme retrouvé que je dîne avec ma famille. Et bien évidemment, c'est Arnaud qui est le sujet principal de notre conversation. Mais cette fois sans aucun malaise.
- C'est vrai qu'il est très gentil comme garçon, dit grand-mère d'un ton chaleureux. Je suis certaine qu'il est parfait pour notre Mathilde.
- Moi aussi, le trouve mignon ! a couiné Lili, la bouche pleine de spaghettis.
- Lili, tu avales avant de parler ! gronde maman. Mais oui je suis d'accord. Je reconnais qu'il m'a convaincu.
- Et je te rassure une dernière fois, maman, dis-je. Arnaud n'a rien à voir avec Marc. Marc est un crétin inculte qui ne pense qu'à draguer les filles à forte poitrine. Tout le contraire d'Arnaud...
- Attention à ton langage devant ta sœur, Mathilde ! gronde papa.
- Elle en sait déjà beaucoup plus que tu ne l'imagines, tu sais, répliqué-je.
- Lili, va dans ta chambre, s'il te plaît, ordonne maman.
- Mais ai pas fini manger mes spaghettis...
- Monte, s'il te plaît. On te montera ton assiette si tu as encore faim.
Lili obéit avec un air boudeur, sûrement pas à cause du fait d'avoir été interrompue dans son repas. Papa attend simplement qu'elle soit bien entrée dans sa chambre avant de reprendre :
- Finalement ce dîner était une bonne idée avec le recul.
- Papa ? Maman ? Je voudrais vous demander... dis-je car je veux avoir la confirmation ultime.
- Oui ? disent-ils en même temps.
- Pour la soirée d'Halloween, est-ce que l'on pourrait...
- Y aller ensemble ? dit papa. Comme je te l'ai dit tout à l'heure, nous sommes d'accord. N'est-ce pas, chérie ?
Papa jette un regard perçant à maman et je devine que si elle a cédé, maman reste tout de même réticente.
- Et bien... je fais déjà beaucoup d'efforts en les laissant se fréquenter...
- Je ne vois aucun problème moi personnellement, dit grand-mère. Notre Mathilde a bien le droit de s'amuser un peu.
- Papa, maman, dis-je rapidement avant que maman ait pu répondre, je vous jure que tout se passera bien. Ce n'est qu'un bal et maman, ajouté-je en la regardant droit dans les yeux, je te promets qu'il ne se passera rien hors de la soirée. Je te l'ai dit, je ne veux rien faire de compromettant avec lui. Je suis juste amoureuse, je veux être avec lui, j'ai besoin de lui. Et pour l'instant, ça me suffit. Crois-moi, tout ira bien avec lui.
- Faites-lui confiance, Gisèle, dit grand-mère. Mathilde a quinze ans et est amoureuse, quoi de plus normal que cela ?
- Exactement. Je suis amoureuse, c'est tout. Je suis amoureuse.
Je me tais. Cette fois, je pense avoir suffisamment argumenté. Si cela ne suffit pas à convaincre maman, rien n'y fera. J'attends le verdict avec une boule au ventre. Il ne manque que le roulement de tambour. Maman et papa se regardent. Papa lui fait un signe de tête et maman me dit :
- D'accord. Tu peux aller au bal avec Arnaud.
Je mets quelques secondes pour réaliser puis j'ai un grand sourire. Je vais aller au bal d'Halloween avec Arnaud ! Je peux librement sortir avec lui !
- Merci, papa, merci, maman. Merci du fond du cœur.
- Attention, ma fille, ne te réjouis pas trop vite, dit maman en reprenant son habituel air sérieux. Le bal servira de test : Arnaud devra prouver définitivement qu'il sait être un petit ami digne de confiance. Je veux dire par là que j'ai plusieurs conditions à imposer.
- Je t'écoute, dis-je.
Il aurait été très étonnant que maman ne me fasse pas son habituel sermon préventif.
- La première, et cela va de soit, il t'est formellement interdit de boire toute boisson contenant ne serait-ce qu'un centilitre d'alcool.
- Pas de souci. Comme je te l'ai dit l'autre soir, je n'ai aucune intention de boire.
- Deuxièmement, tu pourras échanger avec lui un baiser et un câlin. Mais rien de plus, est-ce clair ?
- Oui, maman, je pense t'avoir suffisamment rassuré à ce sujet, dis-je un peu lasse.
- Sachant que si je ne me trompe pas, ajoute maman, tu ne prends toujours pas la pil...
- Maman ! Je vais devoir te répéter combien de fois que je n'ai pas l'intention de...
- Et troisièmement, continue maman, je te donne un couvre-feu à minuit tapantes. Si pour une quelconque raison tu ne peux pas rentrer au-delà de cette heure, tu appelles et l'on viendra te chercher. Compris ?
- Compris.
C'est seulement une fois remontée dans ma chambre que je laisse enfin éclater ma joie. Et dire qu'une heure plus tôt j'ai versé toutes les larmes de mon corps ! Je peux fréquenter Arnaud, je peux devenir sa copine, on pourra aller ensemble au bal d'Halloween...
Je me connecte sur Messenger pour raconter tout cela à ma meilleure amie.
- Ma belle, je n'arrive toujours pas à le croire : j'ai réussi à convaincre mes parents ! Je vais pouvoir sortir avec lui, oh mon dieu, mon cœur ne tient plus...
- Magnifique, je suis tellement heureuse pour toi et pour vous, ma belle. Vous n'attendiez que ça. Tout le monde a vu comment vous êtes malheureux à vous forcer à rester distant.
- Oh que oui ! Mais attends, et s'il ne veut pas sortir avec moi...
- Oh non, ma belle, tu ne vas pas recommencer ! Tu l'aimes, il t'aime, que vous faut-il de plus franchement ?
- Je stresse à l'avance. Demain je le vois, je pense que l'on va avoir notre premier baiser...
- Je suis de tout cœur avec toi.. Tu le mérites. Vous le méritez.
- Et toi, ma belle ? Toujours pas de mec en vue ?
Curieusement, Élise a mis plus de temps à répondre à ce message-là. Je crains d'avoir gaffé et finalement elle me dit :
- Heu... non, toujours pas. Mais tu sais, les garçons ne m'intéressent pas plus que ça en ce moment...
- Mais tu n'as jamais eu de copain...
- Je sais mais... je ne sais pas, je ne me sens pas prête.
- Je comprends. Tu as raison, il vaut mieux commencer quand on est prêt. Et ça viendra pour toi, ne t'en fais pas.
- L'avenir le dira.
J'ai bien senti, à travers la messagerie instantanée de qu'Élise n'est pas très enthousiaste à parler de ce sujet. Il est vrai qu'elle n'a jamais éprouvé un quelconque intérêt pour les garçons. Non pas que ce soit un problème attention, jamais je ne la jugerai sur ce point. J'ai changé de sujet – Élise m'a fait comprendre par des smileys qu'elle en est soulagée – et nous avons parlé d'Harry Potter et de la nouvelle chanson de Dua Lipa.
Le lendemain, je me rends au lycée presque sinon aussi tendue que le jour de la rentrée. Malgré ce qu'Élise m'a dit, je ne peux empêcher des pensées angoissantes d'envahir mon esprit : et si, malgré la permission de nos parents, Arnaud ne veut toujours pas sortir avec moi ?
Je l'aperçois en entrant dans la cour juste devant le préau. Élise m'adresse comme toujours un grand sourire encourageant et s'éloigne pour nous laisser parler seul à seul. Je me sens devenir aussi écarlate que si j'étais restée allongée toute une après-midi sous un soleil de plomb. En me voyant, lui aussi se met à rougir. Il n'ose pas dire un mot, pensant toujours qu'il nous est interdit de discuter.
- Arnaud ? Je peux te parler ?
- Mmmm ?
- Je voulais te dire... on a le droit...
Il ouvre grand les yeux, comme s'il pensait avoir mal entendu.
- Qu'est-ce que tu dis ?
- On a le droit... ma mère accepte que l'on sorte ensemble. Je t'assure que c'est vrai, on en a discuté hier. Et mes parents sont d'accord aussi pour le bal.
Il est émerveillé. Cela me fait si chaud au cœur quand on sait comment cela faisait si mal de nous forcer à s'ignorer l'un de l'autre...
- C'est vrai ?
- Oui, dis-je en avalant la boule dans ma gorge. Et cela remplit mon cœur de joie. Je veux être avec toi, je veux être ta copine, je veux que tu sois mon copain, j'ai envie d'être blottie contre toi, de...
- Mathilde !
- Oui ?
Tout à coup, Arnaud me prend par la taille.
Et m'embrasse sur la bouche.
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