CHAPITRE 7

— Non, Noora, tu dois aller te coucher maintenant !

— Mais fader ! Je suis même pas fatiguée, grogna le tête en boudant.

Ses cheveux châtains étaient maintenus dans une tresse pour éviter le drame le lendemain matin. Sa tenue de nuit était déjà enfilée et ses yeux se fermaient tous seuls. Pourtant, la petite ne voulait pas aller dans sa chambre. Archibald n'aimait pas faire preuve d'autorité sur elle, mais lorsqu'elle n'obéissait pas, cela le froissait. Surtout à vingt-et-une heure. Elle aurait dû être couchée depuis une bonne demi-heure. Elle avait tout de même réussi à négocier la fin du film d'animation.

— Noora. Tu as école demain. Va te reposer, et soit en forme, d'accord ?

— Pff j'ai hâte d'être grande ! bougonna-t-elle.

Elle descendit du canapé pour aller dans sa chambre. Elle n'osa pas claquer la porte pour témoigner de son mécontentement. Parfois, elle défiait l'autorité de son père afin de tâter les limites, mais cela n'allait pas plus loin. Claquer les portes sous la colère était tout bonnement inadmissible, dans la maison. Elle se hissa sur son lit et attendit que le blond arrive, quelques minutes plus tard.

— Dis fader, ça fait quoi d'être grand ?

Archibald s'assit sur le bord du lit en remontant correctement les draps jusqu'au menton de sa fille. Ses grands yeux noirs brillaient de fatigue. De son pouce, il lui caressa doucement la joue.

— Ce n'est pas aussi chouette que tu le penses, commença le blond. Les soucis s'enchainent les uns après les autres, sans qu'on puisse les arrêter, et dès que quelque chose ne va pas, ça semble être la fin du monde.

— Comme quand Eli il dit que faut payer les factures sinon c'est la cata ?

— Il a dit ça ? s'étonna son père.

— Oui ! La dernière fois qu'on est allés chez lui. Il était pas content.

Lorsqu'elle parlait du psychologue, son sourire se creusait au creux de ses joues d'enfant. Elle saisit la main d'Archibald et planta son regard charbon dans celui incroyable de son père.

— On va le voir ce week-end ? demanda la gamine pleine d'espoir.

— Non, on va à la fête foraine avec Lison, tu as oublié ?

— Ha oui, c'est vrai.

Sur le coup elle avait été tellement heureuse qu'elle avait demandé à faire au moins trois attractions. Elle n'avait encore jamais mis les pieds dans un tel endroit, et l'idée même de passer du temps dans les allées aux odeurs de sucre la ravissait. Le blond n'avait pas eu le cœur de lui dire qu'elle était trop jeune et trop petite pour la plupart. Elle découvrirait cela dans quelques jours.

— Mais il peut pas venir avec nous ?

— Je ne pense pas. Il me semble qu'il est occupé.

— C'est nul. J'aime bien quand il est avec nous.

Archibald regarda sa fille qui jouait avec le coin de la couverture. Elle avait un air contrarié sur le visage, si bien qu'il lui posa la question. La petite releva la tête, comme si la raison était une évidence même.

— Bah ! Il est gentil et il fait des bonnes crêpes !

— C'est une affection intéressée alors ? railla le blond.

— Ça veut dire quoi ?

— Que tu l'aimes bien car il te donne quelque chose.

— Ha !

Noora avait bien comprit ce qu'il lui avait expliqué. Le professeur s'étonnait tout de temps de l'intelligence de la demoiselle. A six ans, elle était dotée d'un incroyable vocabulaire et de sens de déduction. Sa maîtresse disait souvent qu'elle pouvait sauter une classe, mais Archibald lui avait toujours répondu que cela n'allait pas être possible. La petite châtain ne voulait pas quitter ses amis.

— Bon, je vais te laisser. Il est l'heure de dormir !

Un coup d'œil à sa montre lui avait appris que la demie était passée.

— Bonne nuit fader ! s'exclama joyeusement la gamine.

Archibald se pencha pour embrasser son front, mais Noora le prit par surprise en déposant un bruyant baiser sur la joue. Elle s'esclaffa de sa bêtise avant de faire un petit signe de main à son père. En sortant, il éteignit la lumière. La pièce plongée dans le noir, il savait que sa fille n'allait pas mettre longtemps à s'endormir.

Une fois dans le salon, le norvégien apprécia le silence qui y régnait. Il aimait la vie qui accompagnait Noora dans toutes les secondes de sa journée, mais parfois, il n'en pouvait plus. Il était incroyablement fatigué. Il voulait juste dormir et se réveiller quelques années plus tard. Pourtant, il savait que le lendemain, son téléphone sonnerait pour lui faire ouvrir les yeux à six heures trente.

Il soupira en se laissant tomber sur le canapé.

La tasse de chocolat chaud fumait encore sur la table basse.

Pourquoi, à vingt-trois ans, il était déjà lassé de sa vie ?

Pourtant, Lison lui apportait un vent de fraîcheur, avec ses attentions et ses doux sourires. Elle faisait en sorte qu'il ne se perde pas trop longtemps dans ses pensées et qu'il s'en sorte sans encombre. Il appréciait ses petites attentions et cette douceur avec Noora. La petite l'aimait beaucoup. Archibald se demanda un instant si cette amitié ne cachait pas autre chose. Il se savait aveugle à la drague, mais lorsque la femme était proche de lui, cela ne le dérangeait pas. Il se sentait étrangement apaisé lorsqu'elle lui changeait les idées.

[21 : 46] Lison : Hey ! Je me posais la question, tu penses que Noora pourrait apprécier ce bracelet ? Je l'ai retrouvé dans mes affaires en faisant du ménage tout à l'heure. Je ne le porte plus, mais je ne voudrais pas le jeter.

« Quand on parle du loup, on en voit le bout de la queue » disait-on.

Archibald sourit face à sa réflexion. Son portable chargea la photo qui accompagnait le message quelques secondes plus tard. Ledit bracelet était une petite chaîne en argent qui avait vécu pas mal de choses s'il en croyait les petits éclats sur les mailles. Il fut touché par cette attention. Elle n'était pas directement tournée vers lui, mais dès que cela touchait Noora, cela le touchait par ricochet.

[21 : 48] Archibald : Hey ! C'est très gentil de penser à elle, mais ne t'en fais pas, garde-le, peut-être que tu voudras le mettre plus tard ?

En vérité, il était un peu gêné. Il n'avait pas l'habitude de ce genre de propositions. Du moins, il y avait Elijah, mais ce n'était pas pareil. Entre amis, il n'y avait plus aucune gêne depuis longtemps. De toute manière, le psychologue sentait directement lorsque quelque chose n'allait pas et y remédiait.

[21 : 53] Lison : Si ça peut la rendre heureuse ! Je l'emmène ce week-end !

Quelques smileys accompagnaient le message. Archibald s'avoua vaincu et lâcha l'affaire en donnant son accord. Quelque ce que cela pouvait faire, de toute façon ? Si Lison était partante, cela allait faire plaisir à Noora. Le bonheur de sa fille passait avant énormément de choses. Il voyait déjà ses yeux sombres pétiller.

Le chocolat chaud descendait doucement dans la tasse. Bientôt, le nez plongé sur le portable dans sa conversation avec sa collègue, il n'en resta plus. Le blond s'étira pour tenter de détendre ses muscles douloureux de la journée avant de se réajuster sur le canapé. Il aimait converser avec la femme. Elle avait un humour facile et une répartie du tonnerre.

Alors qu'elle lui envoyait une image amusante, Archibald se figea.

Bon sang, était-il en train de s'attacher à elle ?

Il regarda, à droite, à gauche, les yeux un peu fous.

C'était la dernière chose dont il voulait.

L'attachement était une chose. L'amour une autre.

La chute était encore plus rude.

— Putain, souffla-t-il au-dessus de ton téléphone au creux de sa main.

Il découvrit avec un sentiment étrange que cette perspective ne le dérangeait pas plus que cela. Lison était douce et pétillante. Pourrait-il guider Noora comme une femme savait le faire avec une fille ? Archibald faisait de son mieux jour après jour, mais il savait que l'absence de présence féminine manquait à l'enfant. Il avait appris à faire des tresses, à se vernir les ongles et tout ce que la demoiselle aimait, mais il savait que ce n'était pas pareil.

Alexandra leur manquait.

L'affection d'une mère était quelque chose d'important pour un enfant.

Et Noora s'en voyait privée.

Le blond était perdu par le train de ses pensées. Oui, il appréciait beaucoup la femme, mais est-ce qu'il serait prêt à aller plus loin ? Quelque chose au creux de lui criait « oui » alors qu'une autre partie le mettait en garde. Il se refit la liste mentale de tous les échanges qu'ils avaient eu. Il se rendit alors compte qu'il avait oublié beaucoup de choses. Mais parfois, un élément restait ancré dans sa mémoire.

Comme lorsqu'elle posait sa main sur son avant-bras de façon naturelle.

Comme lorsqu'elle proposait de faire des activités ensemble.

Archibald ne savait comment réagir à ses propres pensées.

Elles l'épuisaient et lui donnaient mal au crâne.

Son cœur ne battait pas anormalement, et son souffle ne s'emballait pas lorsqu'il lui parlait. Pourtant, une douce chaleur courait le long de son corps lorsqu'elle lui adressait des sourires timides ou pétillants. Il se sentait léger lorsqu'elle l'embarquait dans une conversation tout à fait délirante.

Il avait franchement besoin de conseils.

Le blond n'avait qu'un seul ami, et il se demanda s'il lui était autorisé de lui poser ses questions. Archibald ne voulait pas ennuyer Elijah avec ses histoires de cœur. Il se fermait toujours lorsqu'ils abordaient le sujet. Pourtant, le châtain répondait à ses interrogations et ses peurs.

Oui, demain, il irait lui parler de ce qu'il se passait.

[22 : 38] Lison : Bon, je vais me coucher, bonne nuit ! A demain. On mange toujours ensemble ? Apparemment, il y aura des frites. J'ai entendu les élèves en parler. Mais bon, c'est comme les licornes, on en parle, mais on en voit pas.

[22 : 38] Archibald : Evidemment ! J'ai entendu la même chose.

Il accompagna son message avec des bonhommes qui pleuraient de rire. C'était un jeu entre eux ; deviner ce qu'ils allaient manger le midi. Généralement, c'était Lison qui gagnait car elle menait l'enquête avec ses élèves. Par soucis d'écologie, les cuisines ne voulaient plus afficher le menu sur la porte. Dorénavant, il était juste transmis par l'application relié au lycée. Archibald n'y allait jamais, sauf pour y écrire les notes et regarder les mails que les élèves lui envoyaient. Fatigué, il se leva afin d'aller faire un tour par la salle de bain.

[22 : 40] Lison : Si je gagne, tu me dois un café mon gars !

Il entendait presque la voix fière de sa collègue. Il imaginait son sourire éclatant car elle était certaine de gagner. Archibald s'en amusa lorsqu'il pressa le tube pour faire sortir du dentifrice. Lorsqu'il fourra la brosse à dent dans sa bouche et que je goût mentholé envahi sa langue, il répondit.

[22 : 43] Archibald : Si tu veux, ce n'est pas cher payé !

Il se rendit compte qu'il pouvait lui parler pendant des heures.

Quelques messages plus tard, le professeur se glissa dans les draps de son lit. Ils étaient froids, si bien qu'il frissonna lorsque la peau nue de ses bras effleura le coton. Bon sang, pourquoi la chaleur ambiante ne pouvait pas réchauffer son lit en même temps ? Il grommela en se retournant. Entortillé dans l'étoffe claire, il se sentait bien. Noora avait pris la même manie que lui de faire « le sushi » comme s'amusait à le dire Elijah. En pensant à lui, Archibald se demanda comment il pouvait aborder le sujet. Le psychologue allait avoir un avis, comme toujours, mais voudra-t-il l'aider ? Il n'avait pas l'air très enclin à la conversation, quelques heures auparavant.

Le blond imagina tout un scénario pour l'accoster entre midi et deux. C'était le seul moment où ils pouvaient se croiser. Les pauses étaient bien trop courtes. Parfois, Elijah passait la journée dans son bureau en ne sortant que pour manger. Certains collègues le trouvaient étrange, mais il était absorbé par son travail.

— Que c'est compliqué, les relations humaines ! grogna-t-il.

Ce fut sur ce souffle qu'ils'endormit, la tête enfouie entre les deux oreillers qui se tenaient compagnie.Ses paupières étaient tellement lourdes qu'elles se fermaient toutes seules. Iln'arrivait plus à lutter.


___________________________________

Hey vous !

Voici un nouveau chapitre !

Des avis ? :)

Je l'ai annoncé sur instagram (d'ailleurs, venez nous rejoindre, je mets un peu de ma vie et pleins d'informations en avant-première de mes projets et des personnages eux-mêmes !), mais pendant quelques temps, les chapitres seront publiés le mercredi :)

Mon pseudo : rheexus (c'est vachement original hein ?)

Bisou sur votre joue gauche,

Rheexus

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top