CHAPITRE 49
— Il n'y a pas à dire, tes parents sont vraiment adorables.
— Tu trouves ? Je pense surtout qu'ils sont un peu bizarres sur les bords...
— Tu sais de qui tenir, alors !
Elijah tira la langue à son compagnon d'un geste tout à fait puérile avant de cracher le dentifrice qu'il avait dans la bouche. La fraîcheur de la menthe était la bienvenue après toutes les victuailles qu'il avait mangé durant la soirée. Surtout le gâteau. Une sorte de pièce montée avec plusieurs cakes surprises. Il y en avait trois, un pour chacun des hommes, et Elijah était presque tombé dans celui au cœur coulant de caramel au beurre salé. Il s'en était littéralement fait péter le ventre.
— Si tu ne vomis pas cette nuit, tu auras de la chance, remarqua Archie.
— Je ne suis jamais malade, mon cher ! répliqua fièrement son compagnon.
— Parlerait-on d'il y a un mois ?
— Je n'ai aucun souvenir de cette période !
— Bien sûr que non, tu dormais comme un loir toute la journée !
Un rire moqueur lui parvint alors que le blond s'effondrait dans le lit moelleux du châtain. Cette sensation de douceur ravit son corps après la dure journée qu'il venait de passer. Du moins, la dure journée et une partie de la matinée qu'il venait de passer. La dernière fois qu'il avait vérifié l'heure, cela sonnait les quatre heures. Au bord de la piscine, il ne s'était pas rendu compte que le temps passait aussi vite. Peut-être parce qu'il avait toute son attention sur le corps de son partenaire ? Ses muscles qui se bandaient lorsqu'il renvoyait le ballon de plage. Son mouvement de tête pour rejeter ses cheveux en arrière. Ses fesses moulées dans son...
— Tu es écarlate, ça va ?
— Laisse-moi revoir des choses en paix, s'il te plaît.
— C'est un truc cochon ? voulu immédiatement savoir Elijah.
— Quoi ? Non !
— Alors pourquoi tu ne me le dis pas ?
Un silence. Elijah roula sur le ventre pour faire face au blond qui avait glissé dans les épaisses couvertures. Dehors, il ne faisait pas encore assez chaud pour se passer de tout cet attirail. Et puis, le professeur devait avouer qu'il adorer faire le sushi entre les couettes qui sentaient la lessive.
— C'est un fantasme alors ?
— Mais non !
Si. Peut-être. Il fallait dire que le fessier d'Elijah était à se damner.
— Allez, dis-moi ! S'il te plaît, s'il te plaît !
— Tu es plus chiant qu'un moustique, ma parole.
— Certes, mais moi je te suce autre chose que le sang...
— Purée Eli, tu ne peux pas ranger ta queue deux secondes ?
— Ha ouais, même quand je te...
Deux mains se plaquèrent sur sa bouche alors qu'Archibald atteignait une nouvelle teinte de pourpre. Le contraste était assez saisissant entre ses mèches platines et la couleur flamboyante de ses joues. Elijah se demandait s'il n'allait pas devenir une torche humaine. Décidément, il avait un peu trop bu, ce soir.
— Heurk, mais tu es dégueulasse !
Archie retira précipitamment ses mains en les secouant alors que le châtain tirait une nouvelle fois la langue pour le narguer. Archibald se repositionna dans le lit, un peu plus loin de son compagnon qui ne voulait pas de cette distance, donc il vint encore plus près de lui, enserrant son bras des siens pour le piéger.
— Tu es vraiment impossible, soupira le blond.
— C'est pour ça que tu m'aimes, non ? taquina l'autre.
— Peut-être...
C'était même sûr. Il aimait Eli, avec tout ce qui allait avec. Ses petites manies, son shampoing et son gel douche au monoï, ses blagues douteuses, sa tendresse presque envahissante à certains moments, sa façon de tout laisser traîner dans le salon et même ses petites danses lorsqu'il s'ennuyait à la cuisson des pâtes. Il n'avait pas tout de lui, mais il savait trouver des avantages dans les défauts. Il savait voir de la lumière où les autres ne voyaient que la nuit. Comme les fois où il lui demandait avec anxiété si cet homme ou cette femme lui plaisait. Certains trouveraient de la jalousie alors que lui voyait son attachement et sa peur de l'abandon.
Et Archie avait complètement raison.
Malgré les apparences, le châtain avait une incertitude constante face à ses capacités. Il avait peur d'en faire trop, alors qu'il redoutait seulement le moment où le blond comprendrait qu'il y avait meilleur amant que lui.
— Tu imagines, ça fait deux mois que nous sommes ensemble.
Sur son bras, Elijah traçait machinalement des ronds avec le bout de ses doigts, comme une lente et hypnotique danse pour penser à quelque chose de plus joyeux. Il suivait le chemin de ses mouvements, la joue enfoncée dans l'oreiller rose. Il s'était passablement excusé en disant que c'était une parure de sa sœur. Archibald s'en fichait éperdument. Même dans des draps arc-en-ciel, il pouvait dormir dix heures.
— Et dire qu'on aurait pu fêter tellement plus.
— N'importe quoi. Il faut laisser le temps au temps, comme on dit.
— Oui, mais si j'avais été plus réactif...
Un baiser coupa ses paroles. Il soupira lorsque le châtain embrassa de façon volatile ses joues pour revenir sur ses lèvres. Le blond éclata de rire sous cette douce torture. Il repoussa un peu Elijah, sachant que cela allait déraper. Cependant, ils savaient tous les deux qu'ils n'étaient pas dans leur meilleure forme.
— Je m'en fiche. Savoure ce qu'on a et n'y pense plus, d'accord ?
— Ouais, je vais faire ça.
Un nouveau rire. Cette fois-ci, il fut beaucoup plus fatigué que celui éclatant d'il y avait quelques secondes. Contre lui, Elijah s'endormait doucement, ses mouvements se faisaient de plus en plus faibles et paresseux. Archie remonta la couverture jusqu'à ce qu'elle recouvre les ondulations châtaines et embrassa son front. Un grognement lui répondit alors que le psychologue se blottissait un peu plus contre lui.
Décidément, Archibald était l'homme le plus heureux d'au moins la planète.
— Bonne nuit kjære, je t'aime.
***
— J'ai mal au crâne.
— Je t'avais dit que tu avais trop bu, tête de nœuds.
— Je vais te noyer dans la piscine, tu vas voir.
— Ho, pardon ! Essaye déjà d'aligner deux pas corrects, okay ?
Arthur ricana avant de grimacer face aux vibrations qui résonnaient dans sa tête en beaucoup trop fort pour être sain. Archibald et Elijah avaient rejoint leurs amis pour partager un petit-déjeuner et un repas avec eux avant de repartir. Le lendemain, Milo devait travailler au garage, alors le couple allait devoir partir en milieu d'après-midi et les autres avaient suivi le mouvement.
Là, maintenant, ils étaient autour de la table à l'extérieur, partageant des croissants et des pains au chocolat pour étancher leur faim. Les maîtres de maison s'étaient éclipsés depuis une heure pour aller tenir compagnie aux parents d'Elijah. Ils disaient de leurs enfants, mais tous les quatre étaient inséparables. Cela les ravissait de voir leurs fils aussi proches.
Il était dix heures lorsqu'Andy émergea des tréfonds du manoir, en compagnie d'Aurore qui baillait, encore embrumée par la fatigue. Ils apportaient des nouvelles carafes d'eau et de jus d'oranges car certains en avaient vraiment besoin pour se remettre de leur soirée à cavaler partout. Dans la piscine, les bouées étaient en train de flotter paisiblement, même si la part de pizza géante s'était un peu dégonflée.
— Qu'est-ce qu'on a de prévu aujourd'hui ? demanda Marius.
— Qui te dit que tu fais partie des plans ? répliqua Elijah.
— Toi, je te préfère quand tu te fais noyer par Milo.
— Quoi, tu as peur de la vérité ?
— Faudrait déjà que ça soit vrai, non ?
Les deux hommes continuèrent leur joute verbale amicale sous les encouragements des autres. Traitreusement, Morgan s'était allié à son meilleur ami alors que Marius tentait de gagner la sympathie de son deuxième frère. Ulysse n'osait trop rien dire, mais riait lorsque Marius se mit à bouder et demander son réconfort. Le rouquin le lui offrit avec plaisir, l'entourant de ses bras.
— Je propose qu'on paresse sur la terrasse.
— He ben, nous voilà sauvés par ta sagesse, Morgan ! plaisanta son frère.
— Va crapahuter où tu veux mon gars, mais je ne bougerais pas d'ici. Je suis vraiment claqué, et je crois que je n'aurais pas d'énergie pour faire une balade dans les champs et les prés, rétorqua le concerné, amusé par le manque d'envie de Marius.
— Je vote pour, j'ai eu une sacrée semaine de merde, renchérit Elijah.
— Pourquoi je m'en doutais ? Bon, je prends le flamant alors !
— Ho non, tu ne m'auras pas une deuxième fois ! ricana Aurore. Il est à moi !
— Il y a ton nom dessus ? renchérit l'autre.
— Ha ouais, tu veux parier ? Passez-moi un stylo, on va y remédier !
Milo farfouilla dans le sac en plastique qui avait été délaissé contre le mur de la maison, au cas où si l'une des décorations s'était détachée pendant la soirée. Il trouva un marqueur noir, et se demanda pourquoi il faisait partie des fournitures de survie.
— Réfléchi bien Marius, elle m'a menacé d'une grève du sexe...
— Ouais, mais j'en ai rien à faire ! Lys ne ferait jamais ça... Hein ?
Il adressa un regard incertain à son partenaire qui lui sourit de toutes ses dents. La réponse n'était pas évidente à discerner, mais Marius fit signe à son frère de reposer le marqueur et Aurore eut une mine triomphante.
— Souviens-toi, j'ai des alliés partout.
— Je savais que tu étais une démone dès le premier jour !
Un rire général secoua l'assemblée devant la mauvaise foi de Marius. Il se rassit et croqua sauvagement dans un croissant, l'air boudeur. Face à lui, sa belle sœur était radieuse avec sa victoire en tête. Elle le narguait un peu alors que le brun lui répliquait qu'elle était une sorcière qui manipulait les esprits.
— Tu vois avec qui j'ai grandi... Tu ne te poseras plus de questions, hein ?
— Ho, je préfère ignorer cette partie de toi !
— Hé ! s'indigna Elijah en tapant l'épaule d'Archie de la sienne.
— J'ai tout accepté, tes bizarreries, ton amour et tes peurs, avoua le blond.
Il s'était penché vers l'oreille de son compagnon pour un peu plus d'intimité pour cette confession. Même s'ils étaient au milieu d'une dispute amicale entre Marius et Aurore pour une histoire de flamant rose géant gonflable, ils trouvèrent ce moment parfait. Ils étaient dans leur bulle et occultaient le reste.
— Merci, souffla Elijah, sur le ton de la confidence.
Archibald vint cueillir ses lèvres avant de se détourner lorsqu'Arthur l'appela pour lui demander pour la dixième fois s'il était toujours d'accord pour être son modèle. Cette fois, il demanda également à Andy, louant la beauté de son visage fin et de ses longs cheveux tout à fait atypiques. Arthur était comme ça ; il n'aimait pas capturer les silhouettes parfaites pour mieux se faire voir. Non, lui, ce qu'il voulait, c'étaient ces beautés venues de loin ou qui attiraient l'attention.
— Mais j'ai changé d'avis. Pas de shootings professionnels, comme beaucoup préfèrent, mais la capture du moment présent. Ces petites choses qui font pétiller les yeux ou qui font sourire. Le vent dans les cheveux, tout ça... Vous me suivez tous dans ce projet ? Je voudrais représenter l'émotion de la plus pure des façons.
Ils ne se concertèrent même pas pour donner leur réponse.
— Ouais, nous sommes carrément partants.
— Merci les gars. Je pense que ce book sera incroyable.
— Evidemment ! répliqua Milo, déjà emballé par l'idée.
Ils continuèrent de manger les viennoiseries alors qu'Arthur leur expliquait plus en détail son projet. Ce serait quelque chose de personnel, que seul lui aurait sous la main pour sa collection. Les images ne seraient rendues publiques que s'ils le voulaient, bien entendu. Le bouclé parlait avec ses mains alors que ses fossettes ressortaient lorsqu'il parlait presque trop vite pour être comprit.
— Je pars du principe que chaque personne est unique, et tout ce qui est « générique » est tout à fait différent chez l'un ou chez l'autre. Par exemple, si je vous demande de prendre un sourire gêné, personne n'aura le même, et c'est ce qui est absolument magnifique dans le genre humain. Nous nous ressemblons tous mais finalement, personne ne nous ressemble !
Il continua ses explications, alimentées par les questions que posait Andy, heureux de faire la connaissance d'un photographe professionnel. Il ne comptait pas en vivre, mais il adorait voir la vision du monde d'un autre.
— C'est pour ça qu'on aime tous Arthur, avoua Eli à Archie.
— Parce qu'il croit en ce qu'il dit ?
— Non, parce qu'il à ce pouvoir de nous rassembler, tout simplement.
— C'est beau, ce que tu dis... murmura le blond.
— Je sais, j'ai raté ma vocation de poète de peu.
Une œillade complice.
Alors que le photographe expliquait quelque chose de précis à l'étudiant, son portable sonna sur la table, face contre le ciel. Un nom apparu avant qu'il ne se jette dessus et qu'il ne décroche.
— Yes sweetheart, what...
Une voix grave résonna dans le combiné. Arthur grimaça avant de regarder autour de lui pour s'apercevoir que toute l'attention était rivée sur lui. Il fallait dire que sa voix perçait le silence depuis de longues minutes. Il regarda une nervure qui courait le long de la table pour échapper à ce poids invisible. La voix monta d'intensité, avant que le bouclé ne rétorque sur le même ton. Il se leva pour s'éloigner de la tablée, afin d'être certain que personne ne pouvait écouter sa conversation mouvementée.
— J'ai... pas compris ce qu'il vient de se passer... dit Marius, sans tact.
— Je crois que c'était une dispute, non ? osa Aurore.
— Il a appelé son interlocuteur sweetheart, non ? renchérit Morgan.
— Dis Archie, qu'est-ce qu'il a presque gueulé ? demanda doucement Milo.
— Quelque chose comme un « Putain mais lâche moi la grappe, OK ? ».
— Une engueulade, alors ? tenta Andy.
— Je pense que oui. Rien n'est jamais parfait, au final.
Un peu plus loin, le concerné faisait les cent pas, le téléphone vissé à l'oreille, l'air plus furieux qu'autre chose. Ils ne pouvaient pas entendre ce qu'il se passait, mais même Jaïko couru loin de lui lorsqu'il manqua de lui écraser la patte arrière. Quelques minutes plus tard, il revint, l'air défait.
— Tu as une mine dépitée, fit remarquer Elijah.
— Dis que j'ai une sale gueule, ce sera plus simple !
— Non, c'est pas ça. Comment ça va, avec ton mec ? demanda le châtain.
C'était le seul de l'assemblée qui avait eu le courage de se lancer dans le grand bain. Archibald regarda son compagnon, comme s'il était devenu fou, mais finalement, cela ne le choquait même pas.
— C'est une sacrée période. Il n'y a pas à s'alarmer.
— Période de merde ? demanda Morgan.
— Ouais, légèrement...
Mais ce que le bouclé n'osait pas dire, c'était que cette période durait depuis presque quatre mois, et qu'il ne trouvait pas de solution pout les sortir de là. Elijah se leva pour l'entourer de ses bras afin de lui donner un peu de réconfort. Puis, lorsqu'ils furent un peu trop près du bord de la piscine, Arthur bascula pour entraîner son ami dans la chute.
— Encore ? Mais ça devient une habitude ! hurla le châtain.
— Tu sais bien que je suis autant attachant qu'imprévisible !
— T'es surtout un caille-couilles de première !
Ce fut comme la veille, les triplés se jetèrent dans la piscine pour essayer de couler leurs amis. La bataille fut beaucoup plus rude que dans le noir, car ils savaient parfaitement où toucher leur adversaire pour le faire plier. Comme juste derrière le genou de Milo quand Marius essaya de le faire descendre de son dos.
Quelques temps plus tard, les trois derniers comparses les rejoignirent, avec un maillot de bain en bonne et due forme. Arthur en profita pour se sécher avec l'une des serviettes de la nuit et sortir son gros appareil photo de son sac à dos. Il modifia quelques boutons et en tourna un avant de braquer son objectif sur la scène.
Loin de cette mécanique bien rodée, Elijah attrapa Archibald par les cuisses pour le hisser sur ses hanches, un air taquin. Le professeur plongea ses yeux bicolores dans ceux de son compagnon, ignorant les éclaboussures que créaient Aurore et Milo en se battant comme des enfants. Les mains pâles passèrent sur les joues légèrement rougies par l'effort d'Elijah.
Leurs lèvres se scellèrent, comme si c'était leur place la plus naturelle.
Plus loin, un déclencheur d'appareil photo retentissait, capturant l'instant.
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Hey vous !
Voici un nouveau chapitre !
Des avis ? :)
Bisou sur votre joue gauche,
Rheexus
PS : il ne reste que quatre chapitres avant la fin ! :)
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