11. d é c h i r é e

Tout se jouait donc entre Harry et moi. Il m'épiait certainement mais je n'osais pas le regarder après ce qu'il m'avait fait. Comment avait-il fait pour une fois de plus me retrouver ?

"Avant toute chose, allons dans un endroit plus calme." Il me fit signe de le suivre. J'hésitai un instant. Et si, après notre discussion, j'en ressortais plus blessée qu'avant ? Mais de quoi allait-il me parler ? Il se retourna et je le suivis en faisant abstraction de mes doutes. Nous sortîmes du jardin de la maison, passant près d'un garçon en train de vomir et d'un couple en train de se masser la langue. On marcha en silence jusqu'à arriver dans le parking d'un supermarché. Nous n'entendions presque plus la musique de la maison située non loin de-là. Sa voiture était garée devant nous. Galant, il m'ouvrit la portière et je rentrai à l'intérieur. Il contourna sa voiture, ouvrit la portière du côté conducteur et s'asseya à côté de moi. "Tu veux que j'allume la radio ?" me demanda-t-il. Quelle question stupide. Je suis venue ici pour entendre tes mots pas ta putain de radio. Mais à la place de ça, je ne fis que hausser les épaules. Il appuya sur un bouton et une musique démarrait justement. C'était "Say Something" de A Great Big World. Quelle chanson idéale pour une situation idéale. La voix fatiguée du chanteur atteignit mes oreilles et je fermai les yeux. "Je m'en veux pour ma réaction de ce matin. Je n'aurais pas du te dire qu'il s'agissait d'une erreur, je ne voulais pas te faire de m--"

"Harry, tu sais là où j'pense que tu devrais mettre tes excuses alors s'il te plaît, ne gaspille pas ta salive pour ça." Je rouvris mes yeux vides et ses yeux blessés rencontrèrent mon regard faussement indifférent. Aïe, alerte noire.

"Je tiens encore à toi." m'avoua-t-il. Sa main prit la mienne. Je fixais sa main comme s'il s'agissait d'un poison. Cela me faisait peur, l'épiderme de ma main picotait.

"Tu m'as toujours dit que je t'étais indifférente." murmurai-je. Il passa son autre main dans ses boucles désordonnées.

"J'ai... J'ai toujours cru que c'était le cas mais... tu bouleversais mon quotidien et envahissais mes journées. Je croyais que je détestais cela mais au fur et à mesure, je m'attachais à... à toi. Lorsque, dès fois, tu ne me courais pas après, j'avais l'impression que ma vie retournait à la normale et j'avais ce constant vide en moi. Je ne voulais pas me l'avouer mais te savoir près de moi me rendait différent. J'étais plus... gentil et moins froid que je ne l'espérais." Il tritura l'une des bagues qu'il portait à ses doigts.

"Mais Harry, c'est trop tard. Tu m'aurais dit cela une année plus tôt et nous n'en serions pas là où nous sommes aujourd'hui. Nous serions peut-être ensemble, en couple et plus heureux que jamais." soufflai-je puis je retirai ma main de la sienne en avalant douloureusement la boule de sanglots qui menaçait de sortir. "Mais je ne suis plus celle que j'étais, je ne t'aime plus."

"Aime-moi de nouveau, je t'en prie bébé." Je secouai la tête, les larmes aux yeux.

"Ha-Harry, je ne pourrai pas, pas après tout ce que j'ai subi. Tu m'as ruinée. Tu as fait de moi celle que je suis aujourd'hui. Je ne vais pas bien Harry. Pourquoi est-ce que tu n'es jamais venu lorsque j'étais à la limite du coma éthylique et que je t'appelais en hurlant ? Pourquoi ne venais-tu pas ? Pourquoi n'étais-tu pas celui qui ramassait les morceaux ? Pourquoi n'étais-tu pas celui qui me prenait dans ses bras lors de mes crises ? Où étais-tu quand j'étais dans l'incapacité de me nourrir sans tout rejeter l'instant d'après ? Où étais-tu quand je me suis -- pour la première fois -- réveillée dans un lit avec un inconnu à mes côtés ? Où étais-tu Harry ? Hein, dis-moi, où étais-tu ?" lui hurlai-je, en me retenant de toutes mes forces pour ne pas pleurer. Il ne dit rien mais de toutes façons, il n'avait rien à dire. "Mais tu sais quoi ? Le pire, ce n'est pas ça Harry. Le pire c'est que tu reviens dans ma vie et que tu crées de nouveaux problèmes là--" Je pointai mon coeur du doigt. "-- e-et là." Je montrai ma tempe du doigt. "Je ne sais plus qui je suis Harry mais je sais ce que je ne suis pas. Je ne suis pas ton jouet. Tu n'as pas à m'utiliser, pour ensuite me jeter quand l'envie te prend. J'ai des sentiments Harry ! Des putains de sentiments qui ne réclament que la paix !"

Ma voix se brisa au dernier mot et je mordis ma lèvre. Ne pleure pas, je t'en prie Anzel, me suppliai-je. Harry ne sembla pas supporter la douleur que je ressentais et il me tira vers lui pour me prendre dans ses bras.

"Je te demande pardon." chuchota-t-il faiblement à mon oreille alors que je peinais à ne pas fondre en larme. Il resserra son étreinte, enfouissant ma tête dans le creux de son cou et m'attirant contre lui. Il continua de répéter en boucle cette phrase alors qu'une discrète larme s'évada et coula lentement le long de ma joue. Elle roula jusque mon menton juste avant de s'écraser sur la chemise d'Harry. Les autres larmes ne vinrent pas. Elle était la seule qui me restait. La dernière chose qui finit, elle aussi, par s'éloigner de moi.

"Je suis seule, Harry. Je n'ai plus personne. Ma mère va se remarier, Matthew est parti, Isabella ne veut plus me voir et les autres n'ont jamais eu l'intention de rester auprès de moi. Je n'arriverai pas à vivre toute seule, sans personne pour me guider sur le droit chemin. Je ne vais pas le supporter." Une expression emplie d'une infinie tristesse prit place sur mon visage. Harry secoua la tête en reniflant. Sans pour autant desserrer son étreinte, il se recula en arrière pour son visage soit face au mien. Il colla nos fronts l'un contre l'autre puis attrapa mes joues. Il me força à le regarder dans les yeux.

"Je serai toujours à tes côtés. Jamais je ne te quitterai." N'y croyant pas, je secouai la tête, mes lèvres tordues en un sourire douloureux mais il me ramena contre lui. "Je tiens à toi Anzel. Je tiens trop à toi pour partir. Lorsque tu m'as quittée, je suis devenu hors de contrôle et complètement fou. Je te voyais partout, je ne souhaitais que te revoir. J'ai ravagé tout ce qui se trouvait sur mon passage. Puis te voilà, plus confiante que jamais, plus lumineuse que le soleil d'autrefois. Et tu l'as bien vu, je ne pouvais plus te lâcher une fois que je t'avais retrouvée. J'avais beau ne pas avoir le droit de le faire, je n'arrêtais pas de me dire à quel point tu es magnifique. Je n'avais pas arrêté de me demander "mais pourquoi est-ce que tu l'as laissé partir Harry ?" Et même maintenant, je ne peux que m'en prendre à moi-même pour avoir laissé filer la seule fille qui m'aimait mais qui ne méritait pas le connard que je suis mais que j'essayerai de ne plus être." me murmura-t-il. Ses yeux verts brillaient. Il me scrutait comme jamais il ne m'avait regardée auparavant. Ma lèvre inférieure tremblait, j'étais toute retournée et complètement perdue. Puis, c'est alors que je fis la chose la plus inattendue et incroyable qu'il m'eut donnée de faire.

Je déposai un doux baiser sur ses lèvres. Pris au dépourvu, son expression exprima de la surprise puis il mordit sa lèvre inférieure avant de picorer à son tour mes lèvres. Nos bouches se retrouvèrent une fois de plus dans un rythme désespéré. Nos respirations affolés et nos battements de coeur irréguliers se synchronisèrent. On mettait toute nos émotions mitigées dans ce baiser maladroit. De la haine, de la colère, du désir, de la douleur, de la jalousie, de la tristesse. Il allongea le siège de la voiture et on se mit sur la banquette arrière de sa voiture. Nos habits finirent au sol, nos baisers devinrent plus fougueux, nos gémissements se noyèrent dans le fruit de notre désir. Nous rentrâmes chez lui en vitesse puis nous continuâmes de faire l'amour jusqu'à ce que nos coeurs brisés s'étreignent et s'imprègnent l'un de l'autre.

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