Les secondes semblent durer une éternité. Mais finalement, le silence se rompt.

- C'est bon tu peux te rhabiller, dit Jade

Zayn ne perd pas un instant pour remonter son caleçon et son pantalon. Baissant les yeux pour le reboutonner, il ose timidement les relever vers ses amis.

- ...A...Alors ?

- Elle est tout à fait normale ta queue Za ! dit Jade sans complexe ce qui le fait rougir d'un coup

Il tourne machinalement la tête vers Liam pour avoir son avis, mais Liam ne dit rien. De toute façon, Jade reprend.

- Mais je sais pourquoi ta sœur a ri. Et t'es con comme mec, t'aurais pu y penser tout seul !

- Quoi ? demande-t-il étonné

- C'est à cause du suçon que t'as.

- Le... quoi ? J'ai pas de...

- Je l'ai vu, lui dit-elle d'un air blasé

- Avec qui ? demande Liam. Non en fait ça nous regarde pas...

- Mais personne ! fait Zayn

- Za on l'a vu, dit Jade

- Mais j'ai même pas de copine ! J'ai rien fait avec personne. J'ai pas de...

Zayn se tait subitement. En fait, il sait d'où ça vient.

- C'est qui ? redemande Liam

- La poignée du meuble de cuisine !

- Hein ? fait Liam surpris

- Mais ouais ! Je me le suis pris dans l'aine l'autre jour et ça m'a fait putain de mal, dit-il en soulevant son haut et baissant un peu son pantalon pour regarder. C'est vrai que ça ressemble à un suçon ?

- Bah ouais carrément, dit Liam

- Bon, puisque le mystère est élucidé, je m'arrache, dit Jade en se levant. Et cherchez pas après Niall, je l'enlève.

Elle part avant qu'ils n'aient eu le temps de répliquer, et lui rappeler qu'ils sont chez Niall, ou plus précisément chez ses parents. Larry reviennent sans attendre et se jettent sur le lit.

- Alors elle est comment la flûte de Zayn ? demande Louis

- Ferme-la, lui répond Liam avant de prendre une manette. On fait une partie et on se tire ?

- Ziam contre Larry ! dit Louis en prenant une manette

- T'as dit Larry ! s'émerveille Harry

- Euh... Ouais... Enfin... fait Louis un peu perturbé par ce soudain fangirlage. Mais on peut aussi faire Lilo.

- Ah non ! Larry c'est bien ! dit Harry en attrapant sa manette d'un geste

- Za tu viens ? appelle Liam

Il l'attrape par la taille et l'assoit à côté de lui. Zayn attrape la manette restante, et ils lancent la partie. Celle-ci s'annonce serrée, Louis étant assez malchanceux à ce jeu mais Harry étant vraiment très doué, et Liam et Zayn étant une équipe complémentaire et soudée.

- Ca va jamais s'arrêter, dit Liam après une quinzaine de minutes

- On va les avoir, dit Zayn

- Non ! ON va vous avoir, dit Louis

Harry lève les yeux, se gardant bien de dire que Louis lui est complètement inutile – c'est vrai, mais il aime quand même l'avoir avec lui.

Contre toute attente, la partie vient finalement à se terminer. Et c'est Liam et Zayn qui ont gagné. Louis, déçu d'avoir perdu encore une fois, se lève dépité, et sort de la chambre sans un mot. Harry sourit à ses amis, leur fait signe, et le suit. Ils partent ainsi, et Liam et Zayn se regardent.

- Bon... dit Liam. C'est quoi le truc que tu voulais nous dire tout à l'heure ?

- Quand ? fait Zayn avant de se rappeler. Ah. Euh... Rien.

- Mais si. T'as dit que t'étais moche.

- Mais... Je...

- Raconte. Je t'écoute. Et y a personne pour t'interrompre.

Zayn fait une sorte de grimace en réfléchissant, puis il se lance.

- Personne m'aime. J'ai pas de copine. Ma sœur se fout de moi à chaque fois que j'essaie de me faire beau. Mon père me regarde bizarrement. Y a un truc qui cloche chez moi !

- Autre que le suçon-pas-suçon ?

- Oui ! Je suis sérieux.

- Y a rien qui cloche Zayn.

- Bien sûr que si. Mes parents sont pas fiers de moi. Je leur fais honte. Ma sœur me cache toujours quand elle fait venir ses copines. Elle aussi je lui fais honte.

- Je sais pas pourquoi tu ressens ça mais c'est faux.

- Ils se fichent de ce que je ressens...

- Pourquoi tu penses ça ?

- Parce que... des fois, j'essaie de leur parler. De choses qui me touchent. Et ils me répondent même pas. Ça compte pas pour eux ce que je peux ressentir.

- C'est... étrange.

- Et ils sont toujours en train de me recadrer. Me dire que je devrais être comme ci ou comme ça. Me dire qu'un garçon normal est...

Il soupire et secoue la tête.

- Normal ? Zayn c'est quoi un garçon normal ?

- Un mec pas comme moi... dit Zayn. Un mec comme toi.

- Je suis tout sauf normal.

- T'es normal je t'assure. Moi non. Je suis petit et moche et tout cloche chez moi. Les gens m'aiment pas et quand j'ai des amis ils s'attachent pas, et quand j'ai des copines elles m'aiment pas. Et... Et je...

- Tu quoi Za ? fait Liam inquiet

- Je vous ai pas tout dit sur moi...

Zayn baisse les yeux tristement. Liam continue de le regarder, curieux de connaitre la suite. Il ne connait pas Zayn depuis très longtemps, mais ça fait quand même un an, et pour lui c'est suffisant pour le considérer comme l'un de ses meilleurs amis. Et de même avec les trois autres. Il pense qu'ils sont un groupe soudé. Il n'imagine pas que Zayn puisse cacher quelque chose.

Et puis, des amis qui ne s'attachent pas ? Ca c'était avant, parce que Liam, lui, il s'est attaché.

- Dis-moi, dit-il alors que Zayn n'a toujours pas annoncé son fameux secret

Zayn relève les yeux avec hésitation.

- Je... je suis pas comme les autres. Enfin, pas comme vous. Enfin... Je suis pas... normal. Enfin...

- Arrête d'employer les mots de tes parents et dis-moi ce que tu veux dire.

Zayn inspire profondément.

- Depuis que je suis petit je sens qu'un truc est pas normal. Quand je suis arrivé au collège je l'ai vraiment ressenti. Plus les années passaient pire c'était. Je me sentais faible, fatigué, déprimé, sensible. J'avais envie de rester dans mon lit tout le temps, et quand j'avais envie de sortir faire une activité, je finissais par m'évanouir de fatigue ou alors, les jours suivants je restais couché. J'ai commencé à me sentir mal intérieurement, déprimé, avoir envie de mourir. J'avais pas d'amis, les gens se moquaient de moi, ils disaient que j'étais moche, ou des conneries du genre. Y en a qui me détestaient tellement qu'ils voulaient ma mort, mais le pire, c'est que ceux-là, je les avais jamais vus de ma vie. J'étais de moins en moins présent au collège parce que j'étais sans arrêt malade, fatigué... J'allais vraiment mal et je faisais des crises d'angoisse. L'arrivée au lycée a été un cauchemar, j'ai eu tellement de stress que je faisais des chutes de tension, j'ai dû me désinscrire et travailler par correspondance. Ça allait déjà plus trop avec mes parents, déjà au collège ils me punissaient à chaque fois que je demandais à manquer l'école, ils mettaient un code sur l'ordinateur, sur la télé, ils prenaient mon téléphone, j'avais plus aucune vie sociale ni aucun loisir à part dessiner et dormir. Avec les cours par correspondance je me suis senti mieux mais je travaillais pas assez alors il y avait beaucoup de tensions entre nous, mais c'était pas le pire. Le pire c'est qu'ils avaient vraiment honte de moi à partir de ce moment. C'était une honte de dire que leur fils était déscolarisé. Avec ma mère, on se parlait presque plus, et mon père, j'évitais parce qu'on était à deux doigts de se sauter à la gorge. J'étais un peu insolent c'est vrai, mais parce que je souffrais. Ils essayaient pas de me comprendre.

Zayn marque une pause dans son long monologue, et Liam attend, sans l'interrompre, qu'il raconte la suite.

- Je suis revenu pour la terminale et c'était un cauchemar. J'étais malade tous les matins avant de venir, je faisais des crises d'angoisse dans le bureau du CPE ou dans les toilettes, mais j'essayais vraiment de tenir pour avoir mon bac. Et je l'ai eu avec mention Bien, à quelques dixièmes de point du Très Bien. Du coup, je pensais que mes parents auraient arrêté d'avoir honte de moi. Je pensais que les tensions s'apaiseraient.

Il marque une nouvelle pause. S'imprégnant douloureusement de ces souvenirs.

- Mais il a fallu chercher une fac où s'inscrire. Et le stress était tellement fort que ça m'en rendait malade. J'avais aucune idée de ce que je voulais faire. Et quand un truc m'intéressait, c'était hors de ma portée. Ça demandait beaucoup trop de confiance ou d'énergie. Alors j'ai... Je me suis pas inscrit. Et au niveau de ma famille, ça a été la déchéance. Ils l'ont pas dit mais ils étaient à deux doigts de me renier. Je le sais, parce qu'ils avaient tellement honte de moi. Ils osaient jamais parler de moi quand ils parlaient de mes sœurs. Aujourd'hui je suis là sans diplôme, sans travail, sans CV, sans rien.

- Za pourquoi tu... C'est quoi le souci ?

- C'est ce que j'essaie de te dire depuis tout à l'heure...

- Dis-le une fois pour toutes.

- Je suis... Je suis malade.

Zayn prononce ces mots, et son regard se vide. Liam reste sans réaction un moment, perplexe, et un peu choqué. Puis, il essaie de comprendre.

- Comment ça « malade » ? C'est un truc qu'ils t'ont mis dans la tête, comme cette histoire de pas être normal ?

- Non, sérieusement... Je suis toujours fatigué, j'ai des douleurs vives qui s'expliquent pas, j'ai des symptômes de gastro sur de longues périodes, j'ai du mal à manger, je suis hypersensible, je déprime facilement, j'ai des maux de tête et des vertiges à peu près tout le temps, je... j'ai des tas de symptômes comme ça et... Avec vous je fais juste semblant de pas les avoir, pour avoir l'impression pendant quelques heures d'être normal.

- Zayn... fait Liam sans voix et sans savoir quoi dire

- Alors je sais que j'aurai jamais la vie d'un mec normal. Je sais même pas si je vivrai aussi longtemps qu'un mec normal. Mais apparemment je suis parti pour, quoi que j'en veuille. Les douleurs disparaitront pas et moi non plus. Je serai toujours moi, toujours le même, toujours dans ce corps de merde qui fonctionne pas bien, ça va faire qu'empirer, et moi j'irai jamais bien, tout ce que je peux faire c'est accepter et faire le deuil de la vie que j'aurais pu avoir. Et j'essaie. Je te jure j'essaie. Mais mes parents... ils arrêtent pas de m'enfoncer, me dire qu'un mec normal aurait son appart et son permis et sa voiture et son métier et que... moi j'ai rien de tout ça. Et...

- Zayn, l'interrompt Liam en le serrant contre lui. T'es pas dans cette norme-là mais ça veut pas dire que t'es un extraterrestre ou que t'es quelqu'un de bizarre. Tu rentres pas dans le moule c'est tout. Et c'est nul ce besoin qu'ont les gens de mettre tout le monde dans des cases ! Tu vis ta vie comme tu l'entends et c'est tout. Sois heureux et vis, et rien d'autre.

- Mais comment je peux quand mes parents font que me rabaisser et m'empêcher d'avancer, dit-il avec une boule dans la gorge. Je te jure j'ai tellement envie de partir.

- De partir ? fait Liam en l'écartant pour le regarder. Partir où ?

- J'en sais rien et c'est pour ça que je suis toujours là, dit Zayn en s'essuyant les yeux. Tu sais je... J'ai passé quelques années très difficiles avant qu'on se connaisse. Il m'arrivait vraiment que des choses négatives, et parfois des choses que tu penserais voir que dans les films. Il m'est arrivé des trucs... que je peux même pas dire tout haut. Et c'est plus ou moins arrivé parce que mes parents m'ont fait perdre toute confiance en moi et m'ont amené à penser que personne voudrait jamais de moi. Alors au fond, plus il me font de mal, plus je sens que je dois partir. C'est eux qui m'enfoncent et qui m'empêchent d'avancer. Mais à la fois je suis rien sans eux. Je sais rien faire, je sais pas me débrouiller, et ma mère fait tout pour moi... Elle me traite encore comme son bébé. Même si c'est contradictoire avec le fait qu'elle me reproche de pas avoir une vie d'adulte. Alors... Je... Je sais que je devrais partir.

- Zayn, fait Liam d'un air perturbé en le fixant bizarrement

- Quoi ?

- Est-ce que c'est du... talc ? fait-il en désignant une zone au-dessus de ses sourcils

Zayn devient subitement aussi rouge qu'une tomate, il se recule d'un coup en se cachant derrière ses mains.

- Sérieusement ? fait Liam en tirant sur son bras. Pourquoi t'as ça sur le visage ?

- Pour rien, dit Zayn très gêné

- Tu peux pas me dire ça. T'as du talc sur la tronche.

- J'ai... Euh... Tu sais qu'aujourd'hui c'était interdit aux garçons chez moi ?

- Oui.

- Mais j'étais là.

- Ouais, t'as dit que tu resterais dans ta chambre.

- J'y suis pas resté tout le temps. Les copines de ma mère me voient comme un bébé alors ça les a pas dérangées de me croiser et elles m'ont dit de rester. Mes sœurs m'ont assassiné du regard mais bon, tant pis, j'étais là alors autant rester. De toute façon le plus dur était passé, elles s'étaient déjà épilé toutes les zones que j'étais pas censé voir. Enfin je crois. Bref, je te passe les détails, mais elles ont fini par m'épiler le dessus des sourcils.

- Hein ? fait Liam perplexe

- Bah, si elles avaient épilé le dessous, ça ferait comme les filles. Alors que le dessus, ça fait net, et ça se remarque pas.

Liam le regarde immobile, puis cligne plusieurs fois des yeux. C'est vraiment Zayn qui vient de parler comme une esthéticienne ? Il secoue la tête pour passer à autre chose, et Zayn se remet à parler.

- C'est pour ça le talc. Me regarde pas comme si j'étais un alien ! Ne me fuis pas. S'il te plait.

- Hein ? Mais pas du tout. Je vais pas te fuir parce que tu t'es fait attaquer à la cire ! C'est quoi cette idée ?

- Bah... Tous les gens que j'ai connus ont fini par me laisser tomber parce que je suis trop bizarre.

- Za. Tu m'as montré ton tuyau d'arrosage aujourd'hui. Même si c'était hyper gênant. Je peux pas te laisser tomber après ça, on est liés.

Zayn rougit en regardant ailleurs. Liam se lève pour ranger le peu de bordel qui a été mis par tous les garçons, puis, il sort de la chambre, en embarquant Zayn, et ils quittent la maison des parents de Niall.

- Je sais pas toi, mais j'ai envie d'un McDo, dit Liam

- Euh... Ma mère va me tuer si je mange pas ce soir.

- Dis-lui que tu manges avec moi, dit Liam en montant dans sa voiture

Zayn, trop choqué pour dire non, monte mécaniquement, et envoie un SMS à sa mère. C'est ainsi qu'il se laisse embarquer pour une soirée dont il n'a pas la moindre idée ; et peut-être que Liam non plus, le connaissant.