Epilogue
Je tire une longue bouffée sur ma cigarette, tout en scrutant avec intérêt la maison de l'autre côté de la rue. Ça fait une semaine qu'ils sont rentrés de voyage. Une semaine que je me demande si j'ai bien fait de les laisser s'en tirer. Soudain, une tête brune que j'ai appris à reconnaitre fait son apparition sur le palier. Sa queue de cheval se balance quand elle se retourne vers l'homme qui la suit. Ma mâchoire se contracte avec force. J'exhale la fumée par les narines. Rien que de voir son air satisfait quand il la prend dans ses bras me donne envie de sortir mon téléphone et tout balancer à Fierro. Ce serait si facile et tellement jouissif. Mais le sourire de la jolie brune qui se détache enfin de ce salopard m'en empêche.
Je la regarde s'avancer dans l'allée de la jachère qui sert de jardin à cet enfoiré. Ses courbes si appétissantes, ses lèvres pulpeuses que j'ai tant de fois voulu croquer et ses grands yeux caramel qui lui mangent tout le visage et lui donnent cet air si innocent. Je ne peux pas la condamner. S'il n'y avait que Christian dans l'équation, j'aurais été ravi de danser sur son cadavre. Il ne mérite que ça après ce qu'il m'a fait. Me prendre tout ce qui était important dans la vie. Ma sœur, la femme que j'aimais. Il avait même réussi à prendre ma place auprès de mon père, place que j'ai dû défendre chaque seconde de mon existence. Cette enflure aurait mérité de crever comme un chien.
Mais il y a Michelle. Cette femme a réussi à m'attendrir. J'ai même cru un moment que quelque chose aurait pu se passer entre nous. Mais j'aurais dû me méfier de son air de vierge immaculée. Derrière tout visage angélique, se cache toujours une salope qui se terre. Et elle me l'a démontré au moment où je pensais avoir réussi à la faire changer d'avis. Cette petite pétasse a réussi à me prendre à mon propre jeu. Je me suis fait enculer. En beauté. Quand elle a sorti les photos et la copie du contrat avec Fierro, j'ai cru halluciner. Comment j'avais pu me tromper à ce point-là sur elle ? Et pourtant, je ne pouvais nier la réalité. Elle m'avait bien eu.
J'écrase le mégot sous ma chaussure. Michelle descend vers l'arrêt du tram, comme chaque matin. Ensuite, elle ira en centre-ville rejoindre son nouveau lieu de travail. Travail que je lui ai dégoté. Encore une erreur stratégique de ma part. Je pensais qu'en jouant les gentleman, elle tomberait dans mes filets. Mais de toute évidence, cette fille a plus de couilles qu'en aura jamais son petit copain. Cela me tire un sourire. Je crois bien que c'est ce que j'appréciais chez elle. Son côté rebelle. Malheureusement, il était enfoui très profondément. Mais quelques piques bien senties suffisaient à le faire remonter.
Elle me faisait penser à moi, il y a longtemps de cela, quand j'étais encore naïf et que je croyais qu'il suffisait de beaucoup de volonté et de ténacité pour obtenir ce qu'on voulait. Je voulais briller auprès de mon père, le rendre fier. Je voulais protéger ma sœur, être le grand frère idéal. Je voulais le petit ami idéal pour Caitlyn, attentionné, attentif et prêt à tout pour la satisfaire. Mais il a suffi que Christian foute un coup de pied dans tout ça pour faire exploser mon monde. Maintenant, j'ai ouvert les yeux. Fini le gentil mec. La vie n'est qu'une putain avec lesquelles on ne peut jouer à armes égales. Alors j'enfreins les règles, les bafoue pour obtenir ce que je veux. La gloire, le fric, la jouissance sous toutes ses formes.
Christian a toujours été le grain de sable dans le rouage de ma vie. Je faisais tout pour pourrir la sienne. Et j'aurais pu faire ça éternellement. Jusqu'à ce que la solitude le pousse à commettre l'irréparable. Que la culpabilité le détruise, comme il a détruit Caitlyn. Elle est morte parce qu'il l'a bousillée après me l'avoir enlevée. Malheureusement, je ne peux plus l'atteindre. Je me refuse de commettre deux fois la même erreur. Michelle ne peut pas subir ce que Caitlyn a vécu pour sa faute. Pour une fois dans sa vie, ce connard réussit à rendre heureux quelqu'un. Alors je vais laisser les choses comme elles sont. Je vais juste les effacer de ma vie, de mes souvenirs.
Je la regarde monter dans le tram pour la dernière fois. Elle va me manquer. Mais je dois la laisser partir, car ma revanche restera inachevée parce qu'il reste, au fond de moi, encore de la compassion, malgré tous mes efforts pour l'éradiquer.Elle me perdra sûrement un jour. Comme elle m'a déjà broyé le cœur. Je retourne à ma voiture, garée quelques rues plus loin. Mes doigts caressent avec amour la carrosserie rouge vif de ma petite chérie. Putain, ce que j'aime cette caisse. Rageuse, rapide, dangereuse. Tout ce qui me fait bander. Il suffit d'effleurer la pédale d'accélérateur et elle me procure un shoot d'adrénaline. Je tourne la clé et écoute son moteur rugir. Ma main agrippe avec force le volant avant de laisser les chevaux sous le capot faire parler d'eux. L'asphalte défile à vive allure. Je slalome entre les trainards du lundi matin. Mon petit bijou et moi sommes attendus chez Dieu le père. Je ne sais pas encore ce que me prépare mon paternel, mais c'est toujours une épreuve de force que de discuter avec lui.Mais j'ai appris à me forger une carapace et une réputation qui impose du respect. Alors, à présent, je n'ai plus peur de lui. Je veux juste prendre ce qui me revient de droit, c'est-à-dire notre empire. Et je compte bien ne laisser personne se mettre en travers de mon chemin.
FIN
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