Chapitre 93


Comme promis, Christian s'est levé avant moi et est allé m'acheter un petit déjeuner de princesse. S'il continue comme ça, je vais devoir doubler mes séances de sport. Nous avons mangé en tête à tête, comme n'importe quel couple. J'étais aux anges. Ensuite, il a fallu que j'aille au travail mais il en avait décidé autrement. J'ai eu droit à un deuxième round contre la porte d'entrée. J'en étais toute déboussolée. Une partie de jambes en l'air avant d'aller bosser, ça a le don de te donner la pêche.

C'est donc tout sourire que j'arrive au bureau ce matin. Max a même droit à deux bises bruyantes. Il est d'ailleurs en train de me dévisager en se demandant quelle mouche m'a piquée. Je m'installe devant mon poste pour me mettre tout de suite au travail. Il me reste à fignoler la présentation 3D pour la rénovation du restaurant. J'attrape ma souris et commence à rectifier l'orientation de quelques points de lumière.

- Bonjour, Mademoiselle Muller.

Je sursaute en reconnaissant la voix grave qui m'interpelle. Jared se dirige vers moi d'un pas décidé. Je me redresse aussitôt sur ma chaise. Mais au lieu de s'arrêter à mon bureau, il continue vers celui de ma patronne. Avant d'y pénétrer, il se tourne vers moi et me lance un clin d'œil.

- Je serais à vous dans une vingtaine de minutes. Gardez-moi tout ça au chaud.

Je n'ai pas le temps de répondre qu'il disparait derrière la porte. Ok ! Il m'a comme qui dirait snobé. Mais je ne vais pas m'en plaindre. Je préfère qu'il s'occupe de ma boss que de moi. Tandis que je reviens à mon dossier, je ne peux m'empêcher de jeter des coups d'œil curieux en direction de l'office. J'entends quelques murmures. Il est sûrement en train de lui faire son numéro de charme. Elle sera rassurée en voyant qu'il n'a d'yeux que pour elle et non pour la modeste employée que je suis. Au bout de dix minutes, je trouve leurs échanges étonnamment silencieux. Michelle, arrête de te prendre la tête avec ça. Quand il sortira d'ici, il va revenir à la charge. Alors apprécie ce moment d'accalmie.

Enfin au bout d'une demi-heure, le verrou de la porte tourne. Elle était verrouillée ? Pourquoi donc ? Qu'avaient-ils de si privé à se dire ? Ce n'est que quand Jared sort que je comprends. Un sourire narquois accroché aux lèvres, il s'avance vers moi, tout en remettant en place sa chemise. Ne me dis pas que... J'ose jeter un coup d'œil derrière moi. Mademoiselle Madden apparait dans l'embrasure de la porte, lissant son carré plongeant et passant une main nerveuse sur sa jupe. Bordel ! Ils se sont envoyés en l'air dans son bureau. Je n'en reviens pas. Il s'arrête devant moi, avec un air ravi.

- Ferme la bouche, princesse. Je pourrais prendre ça pour une invitation.

Ma mâchoire claque et je fronce les sourcils. Il m'énerve à toujours trouver comment me déstabiliser.

- Mademoiselle Muller, prenez la salle de conférence pour faire votre présentation. Nous ferons un point après.

La voix enjouée de ma patronne me hérisse les poils. Comment ont-ils pu faire ça alors qu'à quelques mètres de là, il y avait tous ses employés ? Je décide d'ignorer la mine satisfaite de l'homme au regard acier assis sur la tranche de mon bureau. Je ferme le programme et récupère ma clé USB avant de le contourner pour me diriger d'un pas rapide vers la salle du fond. Jared me suit de près. Alors que j'ouvre la porte, il se penche vers moi pour me susurrer à l'oreille.

- Ne sois pas jalouse, princesse. Je te l'ai proposé plus d'une fois. C'est toi qui a refusé.

Je me dégage de sa présence envahissante et entre rapidement dans la pièce. J'insère la clé dans l'ordinateur mis à notre disposition, lance l'application et fait le tour de la table pour me planter devant elle, le stylet dans la main.

- Voici ce que ça donne en trois dimensions. J'ai dû modifier quelques détails en relisant mes notes, mais dans l'ensemble, c'est fidèle au plan d'origine.

Jared s'installe à mes côtés, s'appuyant sur la table. Il est un peu trop près, mais je ne réagis pas. Il risque de le prendre comme une invitation pour continuer son petit jeu vicieux.

- J'aime bien m'envoyer en l'air de bon matin. Ça donne tout de suite le ton de la journée.

Je frissonne mais continue mon exposé comme si je n'avais rien entendu.

- Nous avons opté pour le zinc et l'ardoise. Il va falloir passer la commande rapidement. Il y a un certain délai pour obtenir les matériaux.

Il se penche et son nez vient frôler mes cheveux.

- On dirait qu'on a les mêmes habitudes. Ce parfum masculin et cette odeur de sexe sur toi, j'avoue que ça me titille vraiment les sens.

Cette fois, je m'éloigne d'un bon mètre et le fusille du regard.

- Maintenant, ça suffit. J'en ai ras-le-bol. Tout ce petit jeu, ça ne sert à rien. Jamais je ne coucherai avec toi. Je suis amoureuse de Christian et je n'ai pas l'intention d'aller voir ailleurs.

Jared se met à ricaner.

- Je finirais bien par trouver un moyen d'y parvenir. Je lui ai bien volé Caitlyn.

Mon corps se met à trembler de rage. J'ai supporté les attaques de sa sœur. Je ne vais pas me coltiner les siennes ce matin.

- Je ne suis pas Caitlyn. Je ne te laisserai pas détruire ce qu'il y a entre nous.

- En effet, elle n'avait réussi à mettre hors-jeu Maxine. Tu es une adversaire beaucoup plus redoutable.

Un frisson glacé dévale le long de ma colonne vertébrale. Ce mec est complètement cinglé.

- Mais, bon sang, qu'est-ce qu'il t'a fait pour que tu lui en veuilles autant ?

Son sourire machiavélique s'efface. Ses yeux prennent la teinte d'un ciel orageux.

- Il m'a tout pris. Alors, je ne le laisserai jamais goûté au bonheur qu'il m'a enlevé.

Je secoue la tête devant son attitude fermée.

- Je ne te laisserai pas faire. Il faut que tu passes à autre chose, Jared. Laisse le passé là où il est. Toi et Maxine devez apprendre à oublier et pardonner.

Il se redresse dans un mouvement rapide qui me met aussitôt sur mes gardes. Bien qu'on soit sur mon lieu de travail, je ne suis pas sûr qu'il soit capable de contrôler sa colère. Ses poings se serrent avec force contre ses cuisses et son regard se fait assassin.

- Si je n'arrive pas à vous séparer, alors je vous détruirai tous les deux.

Il détourne les talons, avant d'ajouter d'un ton sec.

- Je valide le projet. Rendez-vous demain matin au restaurant pour continuer à parler des travaux. Neuf heures et ne soyez pas en retard.

Il claque violemment la porte derrière lui et je reste là, comme une idiote, toute seule devant l'écran géant.    

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