Chapitre 35


Christian boit une longue gorgée. Et alors ? pas de réaction ? Merde, il s'en fiche. Un long frisson très désagréable dévale dans mon dos. Il reste fidèle à ce qu'il m'a dit : juste un ami et rien d'autres. Franchement qu'est-ce que je croyais. Après une longue minute de réflexion, Il pose sa bouteille et regarde toujours au loin.

- Et toi, il te plait ?

Mon cœur fait un bond dans ma poitrine. Son ton était plus sec, ou j'ai rêvé ? Un regain d'espoir me réchauffe et me donne du courage. Allez, il ne faut pas que je me dégonfle. Je tente de prendre un ton énigmatique.

- Hé bien... Il est pas mal.

Ses sourcils se froncent.

- Et ?

- Et je ne sais pas. C'est encore tôt. Mais, comme tu l'as dit, il faut que je m'ouvre aux autres. Il faut que j'aille de l'avant. Alors je me dis que je pourrais envisager quelque chose.

Je ne suis pas sûre qu'il comprenne le sous-entendu. Mais vu son visage grave, il n'apprécie pas trop la tournure que prend la conversation. J'ai envie d'effectuer une danse de la joie. Il n'aime pas que je lui parle d'un autre mec. J'en tape cinq à ma libido, même si ma raison agite la tête de droite à gauche en signe de désapprobation. Quelle rabat-joie, celle-là !

- Tu as sans doute raison, se rembrunit-il. Mais prends le temps de le connaitre avant de te lancer. Ok ?

Il s'est levé, la bouteille à la main, et me tourne presque le dos. Je peux tout juste apercevoir son profil. Sa mâchoire se contracte, de temps à autre. J'essaie d'envoyer valser ma conscience au loin, à grands coups de pied. J'ai envie de croire que c'est à cause de moi. Son changement d'attitude est indéniable. Mais est-ce parce que je lui plais ou joue-t-il son rôle d'ami un peu trop à fond ? Merde, conscience, lâche-moi un peu. Cependant, il y a une autre ombre au tableau, une question qui me brûle les lèvres et que je dois lui poser. Parce qu'elle déterminera si mes efforts en valent la peine. Elle déterminera si j'ai réellement des chances avec lui. Je fais rouler dans mes mains la bouteille encore glacée, avant d'oser ouvrir ma bouche.

- Christian, je peux te poser une question un peu personnelle ?

- Evidemment, répond-il, un sourire en coin. Je crois qu'on a dépassé ce stade-là.

Je lui rends son sourire timidement. Sauf que là, je m'apprête à entrer dans un espace totalement inconnu et outrageusement intime. J'essaie de trouver mes mots et finis par bafouiller.

- En fait.... Je me demandais si... Tu as une petite amie ?

Il fait volte-face et ancre son regard au mien. Ses yeux émeraude tentent de sonder mes pensées. Je me crispe légèrement. J'ai dépassé les bornes, c'est ça ? Vite, vite, trouve quelque chose !

- C'est juste que... bredouillé-je, en rougissant. On passe pas mal du temps ensemble. Je ne voudrais pas poser de problèmes si jamais... enfin tu vois.

- Ne te fais pas de soucis, répond-il d'une voix douce. Je n'ai pas vraiment de copine. Je sors de temps à autre avec une fille. Je ne suis pas un saint, non plus. Mais ça s'arrête à là.

Cette annonce me remplit d'une nouvelle joie. Il n'a pas de copine, et ça l'agace que je puisse envisager de me mettre avec un mec. Il me reste plus qu'à trouver le moyen pour qu'il se décide à passer au-delà de cette nouvelle amitié.

- Vraiment ? Aucune jolie fille n'a réussi à te plaire assez pour que tu tentes quelque chose avec elle ?

Son joli sourire disparait. Il se détourne et hausse les épaules.

- Sans doute que je n'ai pas encore trouvé la bonne.

Outch ! ça fait mal. Comment faire écrouler mon monde joyeux et plein d'enthousiasme en une seule phrase. Eh bien, voilà ma réponse. Je n'ai aucune chance avec lui. Je baisse la tête pour cacher ma déception.

- Mais je ne perds pas espoir, poursuit-il.

- Tu as raison. Un jour, tu finiras par la trouver.

Cette phrase m'arrache la gueule. Je sens le chagrin refaire surface. Ma raison affiche une mine contrite. J'ai juste envie de la boxer. J'avale d'une traite le reste de la bière. Tout ça commence à me vriller le bide. Il faut que je parte avant de faire ou dire quelque chose que je regretterais. Je pose la bouteille sur la table basse et me lève.

- Il faut que j'y aille. J'ai besoin de prendre une douche et de me poser un peu.

Mon ton est légèrement agacé. Mais Christian ne semble pas le détecter, bien trop perdu dans ses pensées.

- On se voit plus tard, dis-je en me dirigeant vers la sortie.

- Euh... Oui. C'était sympa de se voir. A la prochaine.

Je marmonne un au revoir peu convaincant et le salue d'un geste de la main, sans même me retourner. Je suis bien contente qu'il n'insiste pas pour continuer cette discussion. J'ai la gorge tellement serrée que j'aurais pu difficilement camoufler mes émotions. J'ai le cafard et je veux juste rentrer pour me foutre sous une douche bien chaude.

Sur le chemin du retour, j'envoie un message à Jo.

« C'est mort. De toute évidence, je ne suis pas la bonne pour lui. Autant laisser tomber »

Deux minutes plus tard, un bip m'indique que j'ai reçu une réponse.

« Il a réagi comment quand tu lui as parlé de Mike ? »

« Il n'était pas très chaud que je tente quelque chose avec lui. »

« Ben alors ! Tu vois ! Il y a de l'espoir. C'est juste que ce mec est pire que toi. Il a des œillères en fer forgé. Il faudra taper fort pour qu'il réagisse. »

Je soupire en lisant le message. Je suis beaucoup moins optimiste qu'elle.

« Et tu suggères quoi ? »

« Couche avec Mike et dis-le à Christian. »

Quoi ?

« Tu es folle ? »

« Ben quoi ? Il lui faut un électrochoc à cet imbécile. »

« Oublie ça. C'est hors de question. »

« Tu n'es pas drôle. »

« Ça te le savait déjà. On en reparlera. Laisse-moi un peu de temps pour y réfléchir. »

Je range mon portable. Je crois bien que je suis au pied du mur. Christian n'a pas l'air d'apprécier que j'envisage quelque chose avec Mike. Pourtant, il n'éprouve pas pour moi autre chose que de l'amitié. Je crois plutôt que sa réaction est due au fait qu'il veuille me protéger. Peut-être croit-il que mon coach est le même genre d'hommes qu'il était, il n'y a pas si longtemps.Peut-être veut-il seulement m'éviter un autre chagrin d'amour. Cette idée me broie le cœur. Michelle, il faut que tu te fasses à cette idée. Christian ne sera jamais autre chose qu'un ami.     

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