Chapitre 18


Le cours se termine et je range mes affaires, sans tenir compte du regard assassin de Miss Pouf. Je crois que je ne me suis pas fait une amie. Mais c'était plus fort que moi. Des filles comme elle, j'en ai croisé tout mon adolescence. Le genre de filles superficielles et foncièrement méchantes, qui s'abreuvent du malheur de jeunes filles effacées, au look de garçon manqué, qui veulent juste passer leur scolarité en toute tranquillité. Elles m'en ont fait baver jusqu'à que Josie pointe le bout de son nez et me prenne sous son aile.

Mon sac de sport sur l'épaule, je me dirige vers l'escalier menant à la route. Je suis assez fière de moi. J'ai réussi à rester concentrée sur le yoga et non sur le torse luisant de Christian. Comme quoi, je suis plus forte que je ne le pensais. Je sais que j'ai dit à Jo que je prendrai un autre rendez-vous, mais elle n'est pas obligée de savoir que je ne l'ai pas fait. Il suffira que je lui dise que c'est arrangé ou que mon thérapeute estime que je n'en ai plus besoin et voilà.

- Michelle !

Et merde. J'y étais presque. Je prends une grande inspiration avant de me retourner. Christian court dans ma direction. Et ma libido repasse aux commandes. Ses mouvements souples, ses muscles qui travaillent sous l'effort et son sourire charmeur, tout ça enclenche une alarme dans mon cerveau : « Dieu du sexe en approche ! Envoyez le max d'hormones ! » Et je redeviens l'ado mal dans sa peau.

- Salut.

Ma voix tremblote. Pourquoi, mais pourquoi me fait-il autant d'effet ?

- Tu vas bien ?

- Oui. Pas de problème. Tout va bien.

Félicitations, Mlle Muller, tu vas passer pour la folle de service. Les sourcils de Christian se froncent, il n'a pas l'air de me croire.

- Pourquoi ? j'ai l'air d'avoir un problème ?

- Eh bien, la semaine dernière, quand tu es sortie de chez moi, je t'ai trouvé bizarre. Alors j'ai voulu t'appeler...

Oh ! Mais c'est qu'il semble vraiment ennuyé. Il est trop chou ! Il s'est inquiété pour moi.

- ... Sauf que je me suis rendu compte que je n'avais pas ton numéro, alors j'ai appelé ta copine. Et elle m'a tout raconté.

Je crois que j'ai dû me transformer en fantôme instantanément. Putain, Josie, qu'est-ce que tu as fait ? Je te jure que si tu lui as tout balancer, je vais venir te hanter jusqu'à la fin de tes jours. Mais avant, je dois mourir de honte sous ses beaux yeux de mon thérapeute.

- Ben heu... je veux dire que...

- Tu n'as pas à avoir honte. Ce n'est pas de ta faute.

Ses deux grandes mains se sont posées sur mes épaules, dans un geste réconfortant. Mais moi, ça me fait l'effet d'un porc-épic se frottant amoureusement contre moi. Je me raidis.

- Peut-être, mais je me sens mal. Ce n'est pas vraiment une réaction à avoir.

Je suis juste mortifiée. J'aimerais être n'importe où qu'ici. Peut-être sur une île perdue au milieu de l'océan, sans aucun moyen pour qu'il ne me retrouve et m'oblige à affronter ce moment de honte incommensurable.

- Je trouve que tu as très bien réagi au contraire. Ce mec est un connard fini. Et si j'avais été là, je lui aurais mis mon poing dans la figure. On ne manque pas de respect à une femme de cette manière.

Je relève des yeux surpris vers lui.

- Quoi ?

- Tu es tombée sur le mauvais numéro mais tu ne dois pas t'arrêter à ça. C'est super que tu t'ouvres à nouveau aux autres. Alors ne te laisse pas décourager par ce genre de gars. Il ne mérite pas que tu sois malheureuse à cause de lui. Crois-moi, je sais de quoi je parle, j'ai été comme lui.

Cette fois-ci, j'ouvre carrément la bouche en grand. Christian, un connard ? Non, ce n'est pas possible. Il n'a pas pu être comme ça. Pas lui, si parfait, si beau.

- Tu déconnes !

Je le vois soupirer et son bras passe autour de mes épaules tandis qu'il continue à avancer vers les escaliers.

- Viens, je vais te raconter un peu ma vie et tu comprendras.

Je me contente de hocher la tête, abasourdie par ses révélations. Arrivés à la dernière marche, nous tombons sur le groupe de harpies. Quand elles nous aperçoivent, elles cessent leur bavardage insupportable. Christian me tient toujours plaqué contre son torse et de loin, nous devons ressembler à un petit couple. La grande blonde a même porté sa main à la bouche. Et moi j'affiche un sourire de victoire. Prends ça dans les dents, connasse. La chute de ton petit nuage doré doit bien faire mal. Je jubile. Cette petite vengeance efface d'un coup toutes les crasses qu'ont pu me faire les pouffiasses qui ont croisé un jour mon chemin.

Christian m'invite à entrer chez lui, mais au lieu de s'arrêter dans le salon, il m'emmène jusqu'à la cuisine. Il sort deux verres et un pichet d'eau fraîche, et se dirige vers sa terrasse baignée de soleil. Il installe le tout sur une table basse et me propose de m'asseoir à ses côtés. Je me sens incroyablement légère, carrément euphorique parce qu'il m'a invité chez lui, de manière tout à fait informelle. Je ne suis pas une cliente, juste une amie avec qui il a envie de parler. Enfin, c'est ce dont je me persuade. Mais qu'importe, là, tout de suite, je suis bien trop heureuse pour qu'un détail aussi insignifiant vienne me gâcher mon plaisir.

Christian prend son verre, avale une gorgée et se lance dans la contemplation de l'océan. Ses yeux ont pris une teinte sombre. Ma joie se fane un peu. Je ne veux pas le voir triste.

- Tu sais, Michelle, les gens ne sont pas toujours comme on les imagine. Je n'ai pas toujours été un mec sympa comme tout le monde semble le croire. J'ai même été une véritable ordure. Un mec arrogant, égocentrique et imbuvable. Alors je sais comment fonctionnent les mecs comme celui que tu as rencontré. Ils ne savent pas ce qu'est le respect, ni la valeur de l'amour. Ils croient juste que tout leur est dû.

Franchement j'ai du mal à l'imaginer comme ça. Tout son être transpire la gentillesse et la bonté. Il est le type même du mec trop parfait et totalement hors de portée pour les filles comme moi. C'est pour ça que mon esprit tordu fantasme à ce point sur lui.

Christian,je sais que tu essaies de me remonter le moral, mais soyons clairs, tu n'as pas besoin de faire semblant. Quand tu me dis que tu as été quelqu'un de ce genre,j'ai beaucoup de mal à te croire. Tu parais tellement... parfait.    

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