潜行者 Stalker (part2)

    Faits réels à la fin du chapitre
 

    Quand j'ouvre les yeux à l'aurore, je me rends compte que je suis entre les bras de Zhan, la tête au creux de son cou. Nous nous sommes assoupis dans le canapé. Je me frotte le visage et constate que des larmes ont coulé dans la nuit. Je les essuie à la va-vite, plus ou moins honteux envers moi-même ; mon compagnon serait le premier à comprendre et je sais qu'il ne me jugerait jamais, mais mon égo le tolère mal.

— Hmm... Di Di, est-ce que ça va mieux ? marmonne-t-il, ensommeillé.

    Il ne relève pas mon geste – bien qu'il l'ait parfaitement vu – et préfère me caresser les cheveux. A l'idée de repartir, je soupire. Ce matin, je vis l'une des séparations les plus compliquées. Mon estomac se tord.

— Ouais. De toute façon, comme toujours, ça doit aller...

    Zhan pince un sourire contrit et dépose un baiser sur mon front. Je ferme les yeux, m'enivre de son odeur et m'imprègne de sa tendresse une dernière fois. Je dois partir à Shenzhen aujourd'hui pour coanimer Day Day Up, comme tous les samedis. A quand notre prochaine rencontre ?

    Les nerfs au ventre, je file en quatrième vitesse à ma moto. A la fébrile clarté du ciel pourpre, je tente de repérer la voiture noire de l'homme, mais elle a disparu du parking. Dieu merci ! il a dû partir. Du haut de son balcon, j'aperçois Zhan. Il a l'air anxieux. Son regard se baisse derrière moi, son sourire s'estompe. Je frémis, mais décide de faire abstraction et démarre comme si j'allais me faire surprendre par un fantôme d'un instant à l'autre. Je dois retourner à l'hôtel. Si ce type a posé un tracker sur ma moto comme l'a fait le premier, je ne dois plus la prendre jusqu'à nouvel ordre. En a-t-il mis aussi sur ma voiture ?


    En coulisse de l'émission, mon collègue animateur et ami se soucie de ma paranoïa. Du haut de ses trente-sept ans, il est comme un frère bienveillant pour moi. Et il sait tout de ma vie. Mon histoire avec Zhan, mes problèmes de santé, les épreuves que j'ai dû traverser dans ce monde de requin depuis mes quinze ans...

— Tu dois trouver ce foutu tracker, Yibo, me murmure-t-il, anxieux. Tu auras une preuve et tu pourras ensuite contacter les autorités. Et ton agent la fermera pour de bon...

— La police...

Je me pince l'arête du nez.

— Si j'appelle la police, ce type est capable de balancer des photos de Zhan Ge et moi, susurré-je en regardant autour de moi.

Mon ami me dévisage, contrarié. Il sait que j'ai raison.

— Bon, allons-y, c'est l'heure, me dit-il en passant un bras autour de moi. On va trouver une solution, ne t'en fais pas.

    L'émission me change les idées ; pour un court moment. Une fois terminée, j'attrape une bouteille d'eau et lis la mauvaise nouvelle que je viens de recevoir par texto : mon équipe et les gardes du corps que nous partageons officieusement avec Zhan n'ont rien trouvé sur ma moto. Je suis à bout. Mes collaborateurs me recommandent, pour ne pas craquer, de me changer les idées – sous-entendu de leur part d'aller retrouver mon compagnon au plus vite.

    Dans deux jours, il fera une halte improvisée à Shenzhen. S'il faut, je traverserai toute la ville pour aller le rejoindre dans un hôtel discret. Pourvu que les fans ne l'apprennent pas.


    Ce soir, il fait froid. Peu de monde dans la rue autour de l'hôtel. Un bon choix de la part de mon homme. Je monte jusqu'à la chambre qu'il m'a renseignée, mon identité gardée secrète sous mon attirail habituel – masque et casquette noirs. A peine la porte ouverte, il m'accueille dans ses bras. Son étreinte me réchauffe déjà le cœur.

— Sincèrement, j'avais besoin de te voir, moi aussi.

— Journée de merde ?

— Ça commence à peser depuis deux jours...

— Si je comprends bien, c'est à moi de te faire décompresser ?

    Zhan me sourit, mais pas de son air taquin habituel lorsqu'il attend plus. L'envie n'est pas présente.

    Je referme la porte et l'attire contre moi pour nous laisser tomber sur le lit. Moi au-dessus de lui, nous nous embrassons avec amour. Nos langues se câlinent dans une danse lente et tendre. Il glisse ses doigts dans mes cheveux. Son souffle tiède a un goût de fraise. Notre étreinte langoureuse s'éternise et fait naître le désir dans mon bas-ventre – et le sien, aussi.

— Bo Di, je suis fatigué...

— Mais tu en as envie autant que moi...

    Il ferme les yeux et se pince les lèvres. L'épuisement entre en conflit avec nos pulsions, mais l'envie de le toucher est plus forte. Je faufile une main sous son tee-shirt et lui retire pour l'envoyer valser au sol.

— On n'est pas obligé d'aller jusqu'au bout, Ge Ge...

    Son doux sourire me laisse entendre que ma proposition lui convient. Il baisse ma braguette tandis que je me débarrasse de son pantalon et dégage nos sous-vêtements par les pieds, puis nous caressons nos deux membres, serrés aux creux de nos mains. Nous entamons ensemble des mouvements lents, resserrons chacun notre emprise sur nos hampes durcies.

    Zhan se mord la lèvre, alangui, et me fixe de son regard mi-clos tout en gémissant.

— Bo Di...

    Un bruit me fait relever la tête.

— Wang Yibo.

    Nous sursautons brusquement. Au milieu de la chambre, un homme se tient debout. L'homme. Je manque de m'étrangler. Zhan tire les draps pour nous couvrir aussitôt. Il se recule sur le lit, affolé. Moi, je suis sous le choc. Le stalker avance, je lui hurle dessus et tend une main devant moi pour l'arrêter.

— N'approchez pas !

— Wang Yibo, Xiao Zhan est malsain.

    Nous échangeons avec mon compagnon un regard effaré. Mon sang ne fait qu'un tour.

— Putain de cinglé ! Tu me traques, tu pénètres dans ma chambre d'hôtel ! C'est toi le seul taré malsain, ici !

    L'accusé me fixe, placide. Je note toutefois une pointe d'irritation dans le regard qu'il pose sur mon Zhan.

— Il s'est détruit tout seul l'année dernière, il t'attirera encore des ennuis.

— Dégage !

— Si tu prenais quelqu'un de discret qui n'est pas constamment épié, ta vie serait meilleure.

— J'ai dit : dégage !

    Je me lève, me fichant totalement de ma nudité. Ce fou a pénétré dans ma vie intime à un point tel que mon sexe n'est plus un problème.

— Ge, appelle la sécurité.

    Zhan a un temps d'arrêt, mais obéit sur le champ et s'empare du téléphone à disposition sur le chevet. L'homme se rue aussitôt sur l'appareil et lui arrache des mains pour le fracasser au sol. Il le piétine avec force et projette les morceaux à travers la pièce. Mon amour recule précipitamment vers moi. A ce moment-là, je comprends qu'il n'est pas juste obsessionnel, mais aussi dangereux.

    Nous nous agrippons l'un à l'autre, crispés de tous nos membres. Les poings du quarantenaire se serrent à en trembler de rage. Entre deux rire nerveux, il prend une profonde inspiration dans le but d'apaiser ses nerfs ; j'en profite pour récupérer mon pantalon. Je tire Zhan à moi pour le pousser à enfiler son jogging. Nous devons courir à la porte. Le reste est secondaire. Je paierai le silence de tout l'hôtel, s'il le faut, et poursuivrai en justice le premier qui ouvrira la bouche.

— Wang Yibo, si ce soir encore je ne t'avais pas su avec... lui, articule le stalker, dédaigneux, je serai resté dans l'ombre. Mais ça fait quatre ans que ça dure. Quatre ans !

     Je n'attends plus. Je saisis Zhan par la main et fonce vers l'entrée. Le temps d'y arriver, l'autre nous rattrape et nous bloque la route.

— Laisse-nous passer ! Espèce de malade !

    Zhan me serre le bras pour m'inviter à me calmer. Comme toujours, il a l'espoir de pouvoir tempérer les choses.

— Écoutez, dit-il doucement à l'homme, si vous vous expliquez, peut-être que nous pourrions nous...

— Je n'ai rien à entendre de ta part, Xiao Zhan ! Il t'a suffi de jouer les gentils garçons aux moues adorables pour l'attraper dans tes filets. Tu crois qu'on ne voit pas clair dans ton jeu, hein ?! Tu joues l'innocent pour arriver à tes fins. Pour te faire aimer, te faire plaindre. Comme quand ton grand-père est mort et que tu nous a fait un joli dessin, il y a quelques mois, pour attendrir les réseaux. Tu es le pire d'entre tous. Tu es faux ! Faux, faux, faux !

    Zhan déglutit et recule d'un pas, agressé par ses cris, mais aussi touché en plein coeur. A son expression choquée, j'en déduis qu'il ne s'attendait pas à une telle violence. Cet homme n'a aucun scrupule. Je me sens acculé. La seule solution serait la manière forte, mais qui me dit qu'il ne cache pas une arme dans sa veste ?

    Il avance vers nous.

— Tu es aveuglé, mon cher Yibo. Mais ne t'en fais pas, moi, je suis là pour toi.

    Je dois gagner du temps.

— Ça veut dire quoi, ça ?

— Ça veut dire que je vais te sauver, dit-il en lorgnant Zhan.

    J'ouvre un regard agrandi.

— T'es en train de le menacer devant moi ?! Si tu oses faire quoique ce soit, je te jure que je te tue.

— Mon petit Yibo...

— Ferme ta gueule ! Je ne t'appartiens pas ! Je ne t'appartiendrai jamais, c'est clair ?!

    Il sourit, serein.

— Détrompe-toi. Nous sommes liés, toi et moi.

    A nouveau, je tombe des nues. Je lâche un rire halluciné.

— Pauvre cinglé...

— Non. Tôt ou tard, tu aurais compris, m'assure-t-il. Tu aurais réalisé l'évidence de notre lien. Tu es mon paysage, Wang Yibo. Tu es le sens à ma vie, la raison pour laquelle je me réveille chaque matin. Tu es l'air que je respire. Un jour... oui, un jour...

    Je le fixe tandis qu'il s'égare dans ses fantasmes. Je me vois dans son regard exorbité par le vice. Dans son esprit malade. Je me vois dans le film effrayant qui défile sous ses yeux. La gravité de la situation me saute au visage.

— Peut-être... peut-être qu'il n'est pas trop tard... murmure-t-il, l'œil pétillant.

    Une sueur froide me fait trembler. Depuis le début, cet homme comptait m'enlever. Cette réalité m'ébranle. Zhan perçoit mon malaise et m'attire contre lui. Geste qui fait entrer le fou dans une colère noire.

— Écarte-toi de lui ! aboie-t-il.

    Il fonce sur Zhan avec une haine effroyable. Nous bondissons aussitôt sur le lit pour le contourner et réussissons à gagner quelques précieuses secondes lorsqu'il s'empêtre dans les draps. Zhan tape le code, nos cœurs battent à tout rompre. Le clic de déverrouillage.

    Nous fonçons dans le couloir au moment où le fou m'attrape l'avant-bras ; c'est presque s'il me déboîte l'épaule. Je me retourne et lui envoie un coup de pied dans le ventre. Il lâche prise. Nous nous précipitons dans les escaliers ensemble, à moitié débraillés, la menace sur les talons. A bout de souffle, nous débarquons dans le hall et hurlons à l'aide.

— Wang Yibo !

    Avant qu'il ne m'attrape à nouveau, la sécurité de l'entrée accourt et lui fait à présent obstacle.

— Arrêtez-vous !

    Les deux agents le saisissent et le plaquent au sol. L'un d'entre eux dégaine sa matraque tandis que l'autre contacte des renforts. Nous sommes totalement à découvert, mais cela m'est égal. Je n'ai jamais eu aussi peur de toute ma vie. Je serre fort la main de Zhan.

    Lorsque le fou se fait menotter par les nouveaux arrivants, je respire enfin. Entre deux hurlements, il s'acharne encore.

— Wang Yibo ! Tu ne comprends pas ! Je t'aime ! Yibo !

    Je couvre ma bouche, réprimant un haut-le-coeur. Je me détourne du stalker et me dirige vers la réception avec Zhan. C'est là que je réalise qu'il est à demi-nu, en public ; lui qui est si pudique... Les bras en croix contre sa poitrine, il grelotte tant de peur que de froid. Je retire mon tee-shirt et lui enfile avant de m'adresser au personnel.

    L'équipe paraît aussi choquée que nous. Les trois femmes de l'accueil réalisent vite qui nous sommes, et lorsqu'elles comprennent le genre de relation que nous entretenons, elles restent bouches bée. Je les convaincs tant bien que mal de garder le silence, entre pot-de-vin et menaces de créer un scandale autour d'un manque de sécurité qui ferait couler l'établissement (réputé pour accueillir de grands noms). Argumentaire efficace.

    Confondues en excuses – et soucieuses de ne pas perdre leurs emplois –, elles m'affirment qu'aucun témoin de la scène ne dévoilera ce qui s'est produit ce soir. Elles nous reconduisent dès lors dans une suite de luxe et nous font porter diverses compensations culinaires avec promesses de gratuité à chacune de nos futures venues (comme si j'allais revenir !)


    Après un bon bain brûlant, je me plante devant l'immense baie vitrée, le regard perdu sur la constellation de buildings. Et si je ne m'étais pas retourné pour repartir à ma moto chercher mes clefs, ce type aurait-il surgi dans mon dos ? Serais-je déjà entre ses mains ? ou mort par manque de coopération ? Je frémis. Tout ce que je crains est qu'il ne soit pas enfermé. Après tout, celui qui m'a traqué la première fois n'a reçu qu'une amende, qui me dit que cet homme-là sera neutralisé ?

    Zhan m'enlace par derrière et dépose un chemin de chauds baisers dans ma nuque.

— Ils ont retiré le tracker de ta moto, Lee me l'a confirmé.

— Et l'autre sera relâché d'ici peu.

— Di Di...

    Il me retourne vers lui et glisse ses bras dans mon dos.

— Il est fiché, maintenant. Augmente ta sécurité pendant un temps par tes propres moyens, d'accord ?

— Toi aussi. Si ce malade s'en prenait à toi...

— C'était toi son obsession. S'il tentait quoique ce soit, il serait immédiatement soupçonné et arrêté, ne t'en fais pas.

    Nos bouches se retrouvent, se cajolent. Ce baiser interrompt le flux de mes angoisses.

— C'est terminé, susurre-t-il à fleur de mes lèvres.

    Il attire ma tête au creux de son épaule et me serre contre lui. Entre ses bras, je retrouve mon refuge. J'étouffe un sanglot dans son cou. Vaincu. Il me berce doucement, entre deux murmures, une main protectrice recouvrant ma nuque.

— Je ne laisserai personne te faire du mal, Yibo. Je t'en fais la promesse.
 

FAITS RÉELS

En 2020, un homme a posé un tracker sur la moto et la voiture de Yibo. Au fil du temps, Yibo a senti sa présence. Les trackers ont été retrouvés (peu d'infos sur le reste).

En 2021, quelqu'un a de nouveau posé un tracker sur son véhicule. Deux hommes l'ont suivi en voiture. Le staff a tenté de les écarter de sa voiture (où il se reposait) mais ils ont continué de rouler et ont manqué de renverser son équipe. La police a été contactée, ceux-là ont été poursuivi par l'équipe juridique de Yibo.

Ci-dessous, message posté par Yibo lorsqu'il a craqué - supprimé rapidement.

"J'ai travaillé très dur, je ne peux pas dormir un peu dans la voiture ? mon personnel se tient devant ta voiture, comment oseez-vous avancer ? Après avoir été longtemps dérangé à ma porte d'hôtel par des inconnus au milieu de la nuit, la voiture était truffée de traceurs. Où que j'aille, les gens me suivent sans cesse... Je n'en peux plus ! Je ne peux vraiment plus le supporter."


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