Amara

Mon lit me manque déjà, alors que je viens à peine de le quitter. Hier encore, je n'ai pas beaucoup dormi à cause de mon planning. Le prochain événement sur notre liste, c'est un mariage. Pas n'importe lequel, mais celui de la fille du maire, Élisabeth Nelson. Ce n'est pas du gâteau, car Élisabeth est plutôt agitée et ces demandes ne sont pas tout à fait cohérentes. Étant donné que c'est son père qui prend en charge les dépenses, je crois qu'elle n'a pas de soucis à se faire pour ce qui concerne le budget. Je m'efforce de lui organiser un très beau mariage, et j'y arriverai même si elle ne me facilite pas la tâche.

Je suis au téléphone avec Marthe, ma fleuriste, elle commence à perdre patience étant donné que c'est la quatrième fois qu'Elisabeth appelle pour changer ces bouquets. Elle est totalement indécise, je me dis que c'est probablement dû au stress. Je sais de quoi je parle, car j'ai organisé plus d'une dizaine de mariages.

Conversation téléphonique

- S'il te plaît, Amy, il faut que tu lui parles, elle va finir par me rendre folle.

- Ne change rien pour l'instant, Marthe, je te rappelle plus tard.

Je raccroche en lui promettant d'arranger ça, c'est moi l'organisatrice et j'ai ma façon de faire. Je vais devoir appeler Élisabeth, mais d'abord, je prends le café que m'apporte Isie.

- Merci, Isie... Qui y a-t-il ?

- Euh... Tu te souviens que je t'ai parlé d'une certaine mademoiselle Forbs, une assistante qui n'a pas arrêté d'appeler pour un rendez-vous ce matin ?

- Isie...

- Je sais, je lui ai dit mille et une fois que ce n'est pas possible, mais elle ne veut rien entendre et

- Je suis désolée, Isie, mais je ne peux pas la recevoir en ce moment.

- Son patron s'est déplacé.

- Quoi ?

- Oui. Il est à l'accueil et il demande à s'entretenir avec toi.

- Isie, je suis assez débordé là.

- Je sais, mais ce n'est pas de ma faute. J'ai été très claire, tu peux me croire.

- D'accord, il peut entrer. Il a 5 minutes, pas plus.

C'est quoi cette histoire encore ? Pourquoi s'est-il pris la peine de se déplacer alors qu'Isie a déjà tout expliqué à son assistante ? Il pense peut-être m'impressionner en m'imposant sa présence, mais moi, je ne vais pas me laisser faire. C'est fou ce que certaines personnes se croient tout permis.

Mon café dans une main, je prends une gorgée avant de rediriger mon regard vers l'écran de mon ordinateur. Ce mariage, qui arrive exactement dans trois jours, je le prépare depuis des mois et il me reste encore beaucoup à faire. J'entends la porte de mon bureau s'ouvrir et au même moment, une odeur de parfum enivrant m'anime soudainement. Je lève mes yeux de mon écran et mes fesses suivent le rythme, me sortant de mon confort sur ma chaise. Un homme dans un costume fait sur mesure se tient en face de moi, et non d'un chien, c'est quoi ses yeux ?

- Mademoiselle Oliphant, je suis Oliver... Oliver Hale.

- Bonjour, je suis enchantée, Monsieur Hale. Je réponds en lui serrant la main qu'il me tend. Mettez-vous, je vous prie.

- Merci... Votre agence est vraiment très bien décorée.

- Je vous remercie. Mon assistante a dû sûrement vous le dire, je n'ai pas beaucoup de temps, je suis en plein préparatif d'un mariage, alors monsieur Hale, dites-moi, je vous écoute, comment puis-je vous aidez ?

- Je m'excuse de débarquer à l'improviste comme ça. Je ne vais pas vous faire perdre plus de temps. Voilà, bientôt, ce sera l'anniversaire de ma mère. Je veux que ce jour soit un jour spécial pour elle, qu'elle passe un moment inoubliable. Et c'est justement pour cela que je veux faire appel à votre agence pour l'organisation de cet événement.

- Monsieur Hale, je suis. Comment dire Flattée. Mais malheureusement, ce n'est pas comme cela que nous procédons. Comme mon assistante l'a si bien expliqué à la vôtre ce matin, c'est trop tard, je ne peux rien faire pour vous.

Nous avons beaucoup de demandes, les gens appellent pour prendre rendez-vous dès le début de l'année. C'est loin d'être facile, mais je connais mon boulot. Cet homme débarque dans mon bureau comme ça en s'imaginant que je vais accepter d'organiser l'anniversaire de sa maman alors que d'autres font déjà la queue pour l'année prochaine. Non, mais pense-t-il sérieusement me faire flancher avec ses magnifiques yeux ?

- Comme vous le voyez, mademoiselle Oliphant, je me suis moi-même déplacé, du coup, je n'accepterai aucune réponse négative.

- Monsieur Hale, pourquoi vouloir choisir Andrea's agency ?

- Voyez-vous, Mlle Oliphant, je suis un homme qui sait ce qu'il veut. Je veux le meilleur et d'après ce que j'ai pu constater, vous êtes la meilleure dans ce domaine... Ne vous en faites pas pour le budget, vous aurez carte blanche pour les dépenses.

- Je vous remercie du compliment, Monsieur Hale. Mais ce n'est pas une question d'argent. Du coup, je suis dans l'obligation de rejeter votre demande. Je choisis les événements des mois à l'avance parce que pour moi comme pour les clients, chaque petit détail compte. Ce mariage est le dernier de ce mois-ci.

- Votre plus grand record s'élève à combien ?

- Trois événements en un mois.

- Et bien, voyez-le comme un challenge.

- Permettez-moi de vous dire que je ne suis en compétition avec personne, Monsieur Hale.

- Qui a parlé de compétition avec les autres ? Le meilleur et le plus grand challenge ne se fait qu'avec soi-même.

Il est doué, très doué même. Mais je ne me laisserai pas avoir ni par son allure ni par ses yeux hypnotisants. Aucun homme ne devrait avoir d'aussi beaux yeux. Ce n'est vraiment pas juste. Ceci dit, je ne vois pas comment je peux accepter. C'est notre troisième événement et le mois prochain est déjà complet, tout comme les autres mois de l'année d'ailleurs.

- Même si je pouvais le faire et je ne dis pas que j'accepte de le faire, cela me prendrait des jours pour avoir la confirmation des différents corps.

- Je ne me fais pas de soucis de ce côté-là, vous m'avez l'air d'être quelqu'un de responsable, donc vous saurez gérer.

- Quand est-ce que ce sera exactement ?

- La semaine prochaine...

- Pardon ? Ce qui veut dire quatre jours après le mariage. Personne n'arrivera à organiser quoi que ce soit en si peu de temps. C'est totalement impossible.

- Pas pour vous. Vous n'êtes pas une dégonflée quand même ? Me défie-t-il avec un regard qui ferait fondre n'importe qui en plus d'un beau sourire.

Il commence vraiment à m'agacer. Moi, une dégonflée ?

- Ce mot n'existe pas dans mon dictionnaire, M. Hale. Je vais avoir besoin de quelques informations sur la fête, histoire de refléter sa personnalité lors de l'événement.

- Très bonne décision. Je suis content de faire affaire avec vous, mademoiselle Oliphant. Je sens que ça va être l'événement de l'année.

Je me lève pour lui serrer la main à nouveau. Ce n'est que lorsqu'il ferme la porte derrière lui que je réalise le pétrin dans lequel je viens de me fourrer. Mais qu'est-ce qui m'a pris ? Je suis sûre que c'est à cause de ses yeux. La porte s'ouvre une nouvelle fois, mais cette fois-ci, c'est Isie qui rentre dans mon bureau avec son fameux classeur en main.

- Oh mon Dieu. Comment est-ce possible ?

- Tu as raison, Isie, je viens de faire une belle connerie.

- Quoi ? Non, je parle du beau mec canon qui vient de sortir de ton bureau. Oliver Hale.

J'arque les sourcils, signe que je ne vois pas où elle veut en venir et encore moins qui est cet Oliver Hale.

- Attends ! Ne me dis pas que tu ne l'as pas reconnu ?

- Pourquoi aurais-je dû le reconnaître ?

- C'est Oliver.

- Et alors ?

- Amy, c'est Oliver Hale.

- Ouais, et ça ne sert à rien de répéter son nom cinquante fois, dis-moi plutôt où tu veux en venir.

- C'est le PDG d'Hale Corp.

- Hale Corp ? C'est quoi ?

– Amy, c'est une grande entreprise d'architecture, Oliver a été élu l'héritier le plus riche du pays, et il est célibataire en plus. Bon, il faut dire aussi qu'il est dans le collimateur des tabloïds et les médias ne le considèrent pas comme un enfant de cœur non plus.

Isie n'est pas ce genre de fille. Je veux dire une groupie toujours en train de courir derrière des célébrités, mais le fait de la voir en train de s'extasier devant cet homme, ça me surprend.

- Ah, je comprends.

- Je n'arrive pas à croire que je l'ai rencontrée en personne.

- Isie, ressaisis-toi...

- Oui, patronne.

- Sors-moi toutes les informations que tu trouves sur sa mère.

- C'est déjà fait. Dit-elle en me donnant son classeur

- Tu as été très rapide, dis-donc.

- J'en ai profité pendant que vous discutiez.

- Comment t'as su que j'accepterais sa demande ?

- Oliver est très éloquent.

- Et toi, comment tu sais cela ?

- Eh bien, je fais partie de ses millions d'abonnés sur Facebook, Instagram, Twitter...

- C'est bon, j'ai compris.

- Ça va être la meilleure fête d'anniversaire de toute sa vie.

- Enfin, si j'arrive à trouver les autres.

- Je vais prévenir tout le monde.

Je suis consciente que j'en demande beaucoup parfois. J'espère vraiment qu'ils répondront tous présents. J'adore mon équipe, ils sont sérieux et organisés. Ce sont des personnes de confiance. Mais je ne peux pas leur imposer ça. Je n'aurais peut-être pas dû rentrer dans le jeu de M. Hale

Oliver

En me dirigeant vers ma voiture, je ne fais pas trop attention aux gens qui s'arrêtent sur mon passage. Des jeunes demoiselles qui sourient, alors que moi, j'ajuste simplement mes lunettes de soleil sur mon nez pendant que Georges m'ouvre la portière. Ensuite, je m'installe sur le siège passager en attendant qu'il démarre.

- Comment ça s'est passé, Monsieur ? Demande Georges en mettant le contact.

- Je dois dire que j'ai été très surpris. Je la croyais plus âgée Et en même temps, elle n'a aucune idée de qui je suis.

- Dieu du ciel. Se moque-t-il derrière le volant.

Pour la première fois, je rencontre une personne qui ne sait pas qui je suis. Qui ne me colle pas l'étiquette du riche héritier milliardaire, et à vrai dire, ça m'a fait quelque chose. Je ne croyais pas cela possible avec toutes les âneries que les médias racontent sur moi. Pas un seul jour ne passe sans que quelqu'un ne publie quelque chose sur moi, que ce soit sur les réseaux sociaux ou dans le journal. Amara Oliphant fait peut-être partie des 5 % de personnes à ne pas être accro à ces choses-là. Je sens que je ne vais pas regretter mon choix.