nouveaux départ

Clara

En ce matin froid de septembre, ma nouvelle vie commence.

Moi, Clara, à tout juste 30 ans, je prends un nouveau départ, tout recommencer à zéro, tirer un trait sur le passé. Aujourd'hui, c'est le début de ma nouvelle vie et pour ça, rien de mieux que de commencer un nouveau travail et surtout un poste à responsabilité, non ?

Il est à peine 8h que je fais déjà les cent pas depuis plus de vingt minutes devant le bâtiment où je vais occuper le poste de chef de projet. C'est la plus grande entreprise de communication de France, toutes les sociétés font appel à ses services en marketing et publicité.

Ce poste j'en ai rêvé tout ma vie, j'ai travaillé nuit et jour pour ça ! Je ne me serais jamais imaginée obtenir ce poste alors que ma vie ne parte totalement en fumée. La vie peut parfois être une garce!

Je stresse tellement pour ce premier jour qu'en me réveillant j'avais la nausée ! Allez, respire tout va bien se passer, tu le mérites ce job, rien ne peut se mettre en travers de ton chemin.

Sans plus de réflexion, j'entre dans le bâtiment. Comme on dit, moins on pense plus on avance, bon je ne suis pas sûre que se soit ça mais ce n'est pas grave.

Une fois à l'intérieur je me dirige immédiatement vers l'accueil.

Derrière ce bureau, se trouve une secrétaire, brune avec une coupe au carré, vêtue d'un tailleur beige et qui a l'air totalement dépassé par je ne sais quoi. Elle ne me voit pas arriver et me regarde à peine quand j'appuie sur la sonnette. Bon, ce n'est pas le moment de se démonter !

— Excusez-moi, je viens voir Mr Vincent ...

— Si vous n'avez pas rendez-vous, revenez plus tard !

Elle ne me laisse même pas finir ma phrase, le ton de sa voix est dur et froid à la fois. Pas de bonjour ou toute autre forme de politesse relative à son travail, non juste du mépris ou de la panique ! Difficile de dire, mais je ne compte pas me laisser faire, c'est mal me connaitre ma petite ! Sur son badge je peux lire son prénom, Vanessa !

—Excusez-moi, «Vanessa», je dois le voir c'est urgent ! Insistais-je.

—Hé, ma petite dame, me cassez pas les couilles ! C'est encore moins le moment, je vous ai dit que ce n'était pas possible ! Vous n'avez qu'à revenir demain ou l'année prochaine, je m'en fiche, mais aujourd'hui ce n'est pas possible. Hurle-t-elle en me faisant signe de la main de partir.

Elle fait son job, mais quand même, ce n'est pas comme ça que l'on parle aux personnes qui viennent dans l'entreprise. Ce n'est pas très professionnel ! Elle relève la tête et voit que je suis toujours là, que je n'ai pas bougé de place, à attendre qu'elle daigne enfin me prendre au sérieux.

—Vous êtes encore là, vous ? Dans quelle langue faut-il que je vous le dise, ou que je vous le chante peut-être ? Mr Vincent ne peut pas vous recevoir aujourd'hui ! Qu'importe ce que vous voulez faire ou pour je ne sais quelle autre raison, aujourd'hui ce n'est pas possible, car voyez-vous on attend le nouveau chef de projet, Mr Grégoire, et à mon avis, vous n'avez pas d'attribut masculin, j'en déduis donc que vous n'êtes pas un homme.

Quand elle prononce mon nom de famille, la nausée que j'ai depuis ce matin se transforme en une furieuse envie de vomir. Je fais tout pour prendre sur moi, il n'est pas question que je vomisse sur le bureau, quelle impression je donnerais pour un premier jour.

Dire qu'il y a encore peu de temps, je portais ce nom avec fierté. Pendant 10 ans, ce nom était synonyme de bonheur, de joie et d'amour, maintenant j'ai mal, rien qu'à l'entendre ! En peu de temps, les choses peuvent changer. Je me croyais forte, heureuse et en un instant tout a basculé, alors que je croyais que rien ne pouvait m'atteindre, en une fraction de seconde tout a volé en éclat !

Petit à petit je sombre dans des souvenirs qui me font mal ! Comme ces choses qui nous rendez heureux il y encore peu, peuvent du jour au lendemain nous détruire, c'est notre petite furie qui me ramène sur terre. Au moins, je peux lui être reconnaissante de quelque chose !

— Bon vous voulez bien partir maintenant ?

— Je suis Madame Grégoire Clara.

Ma voix est juste un murmure, mais je sais qu'elle a très bien entendu, puisque ma phrase est à peine finie que tout son corps se tend, quand ses yeux reviennent sur moi, la petite furie se fige sur place et d'un coup, elle a l'air beaucoup moins sûre d'elle.

Je pourrais lui dire, « bien fait ma belle ! », mais je ne suis pas comme ça, elle fait simplement son boulot.

—Putain !! Désolée, je pensais que notre nouveau chef de projet était un homme, toutes mes excuses. Vous savez ici ce sont les hommes qui ont des postes à responsabilité. Les seules femmes qu'il y a sont les secrétaires et moi. Je ne suis pas en train de dire qu'une femme est incapable d'être à ce poste ...

Elle me fait rire, chose qui ne m'était pas arrivé depuis des semaines.

— Je m'enfonce là, non ?

— Ne vous en faites pas Vanessa, ça m'arrive tout le temps d'être prise pour un homme, mais dans peu de temps ça sera différent.

Je viens d'en dire trop, mais elle ne relève pas et je lui suis reconnaissante de ne rien dire de plus.

—Et si on reprenait tout depuis le début, vous voulez bien ? Bonjour, je suis Clara Grégoire, la nouvelle chef de projet.

Un sourire se forme sur ses lèvres.

— Bonjour, moi c'est Vanessa, bienvenue chez nous.

— Merci, il me semble que Mr Vincent m'attend ?

— Ho ! Oui bien sûr, suis-je bête ! Prenez l'ascenseur et son bureau est au dernier étage, je vais avertir sa secrétaire de votre arrivée et la prévenir que vous êtes une femme, me dit-elle en me faisant un clin d'œil.

— Merci Vanessa !

— Avec plaisir, si vous avez besoin de moi, je suis ici de 8h à 18h, je ne quitte que très rarement mon poste alors surtout n'hésitez pas !

Au final cette fille me plait bien, on dit bien qu'il ne faut pas juger un livre à sa couverture et c'est pareil pour notre petite furie.

—Vanessa ?

— Oui !

— Je viens de débarquer à Paris, je ne connais pas d'endroits où je pourrais me détendre après une longue journée de travail, vous savez où je pourrais aller ?

Un éclair passe dans ses yeux émeraude, comme si, en disant ces simples mots, je lui avais fait le plus beau des cadeaux.

— Oui, il y a un endroit sympa pas loin d'ici. Ce que l'on peut faire c'est y aller ensemble ce soir comme ça on fera connaissance ! Si ça vous va ? Et puis ce sera une façon pour moi de me faire pardonner le comportement que j'ai eu à votre égard.

— Alors premièrement, pas de vous entre nous, moi c'est Clara, et deuxièmement ça sera avec plaisir.

— Bien, dans ce cas à ce soir Clara, on se retrouve ici a 18h, ça te va ?

— Très bien, à ce soir !

Je file prendre l'ascenseur, ce n'est pas tout, mais mon nouveau boss doit m'attendre !

Quand je rentre dans la cabine, je presse le bouton du quarante-deuxième étage.

Une musique commence à se faire entendre, un air classique mais je ne saurais pas dire lequel, moi et la musique classique ça fait deux ! Je suis plutôt pop et même par moment rock, tout dépend de mon humeur. Après quelques secondes, un ding m'indique que je suis arrivée à destination.

Quand je quitte cette cage de métal, la secrétaire du boss m'attend, elle me désigne la porte, au moins le point positif, c'est que cette fois, on sait qui je suis. Mais vu la tête qu'elle tire on dirait que ça ne lui plait pas. A tous les coups elle devait penser qu'un nouveau mâle arrivait, alors quand elle a su que j'étais une femme, la pauvre, que j'aime ce style, que j'aime ce style de personne, quelle ironie !

Elle ne me donne pas envie de faire amie-amie non plus ! On dirait qu'elle a un balai de coincé dans le cul tellement son visage est tiré, elle s'est maquillée avec une truelle, parce que je suis sûre qu'il doit bien y avoir 1kg de maquillage sur son visage, tout ce que j'aime ! Mais je ne suis pas la pour porter un jugement. Je frappe à la porte.

—Entrez, dit une voix d'homme.

Mr Vincent est assis derrière un grand bureau de verre, il a beau être proche de la soixantaine, il est très impressionnant, dans notre milieu, il est considéré comme un dieu, et dire que je travaille pour lui, c'est un rêve.

—Bienvenue, Clara ! J'espère que vous allez bien, me dit-il en désignant le fauteuil juste en face de son bureau.

—Merci, oui tout s'est très bien passé et l'appartement que vous m'avez trouvé est super, je ne pouvais pas rêver mieux, je vous remercie pour tout ça !

—Non c'est à moi de vous remercier d'avoir dit oui à mon offre, si vous saviez, cela fait des années que je cherche une personne comme vous pour diriger mes équipes.

J'en reste sans voix. Tout le travail que j'ai fait a porté ses fruits, j'en pleurerai presque, même si toute ma vie part en vrille, au moins ça, on ne peut pas me le reprendre.

—Mais vous savez quand je vous ai fait cette offre, on m'a dit que vous ne partiriez jamais de là où vous étiez car toute votre vie était là-bas, alors je suis curieux de savoir ce qui vous a fait changer d'avis.

Que lui répondre à ça ? Dire la vérité n'est pas la solution, j'ai encore du mal à le croire moi-même.

—J'avais besoin de changer d'air, de voir le monde d'une nouvelle façon, puis de nouveaux défis ça fait du bien, ça donne du piment dans la vie ! Pourquoi rester coincé dans un endroit quand de nouvelles perspectives s'offrent à vous ?

Menteuse me crie ma conscience. Tu préférais partir sans te retourner, au lieu d'affronter la situation. Mais on dirait que mon monologue a plu à mon boss.

—Vous m'en voyez ravi, mais Monsieur n'est pas venu vivre avec vous ici ?

Nouvelle pic, on dirait que mon patron sait mettre le doigt là où ça fait mal, mais comment lui en vouloir de poser cette question car quand j'ai rempli le formulaire pour mon contrat j'étais encore heureuse. Je ne savais pas que ma vie était construite sur un mensonge !

—Non, vous savez il a sa vie là-bas, mais ne vous en faites pas.

Et plus il est loin de moi, mieux je me porte, ai-je envie de lui dire.

—Bon il est temps que je vous montre votre équipe, suivez-moi.

Une bonne heure plus tard, j'ai fait le tour de mon équipe qui est composée entièrement d'hommes, pour la plupart, ils m'accueillent avec de grands sourires charmeurs. Il y en a deux que ma présence dérange, je pense que cela vient surtout du fait que je sois une femme. Je sens bien que certains vont m'en faire baver. Une femme de pouvoir qui les commandent peut leur faire peur, mais je saurai me montrer digne de ce poste ! Et s'ils croient qu'ils vont m'avoir, c'est mal me connaitre. Dans mon travail je peux être une vraie lionne, voire pire ! Alors Messieurs, que les choses soient claires, tenez-vous à carreaux ou vous aurez affaire à moi !

Je ne vois pas la journée défiler, il faut dire qu'il y a énormément de dossiers sur lesquels je dois être à jour. Je crois qu'entre les projets qui sont en cours de réalisation et les futurs, il y en a pour au moins six mois de travail et je ne parle pas de ceux qui sont entrain d'être négociés.

Quand je regarde ma montre pour la première fois de la journée, 17h55, je décide qu'il est grand temps de mettre fin à mon premier jour. J'enfile mon trench et prends mon sac à main et mon portable, et juste avant de le ranger je découvre 44 appels en absence, je les efface tous et pars retrouver Vanessa.

Dans l'ascenseur, je me rends compte que les choses ce sont mieux passées que je ne le pensais. J'espère que cette soirée se déroulera tout aussi bien, et qui sait, Vanessa et moi deviendrons peut-être de bonnes amies.

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