Dans les vestiaires, équipé seulement jusqu'à la ceinture de mon équipement de hockey, je fais les cents pas devant mes coéquipiers, perché du haut de mes patins. Dans exactement vingt petites minutes, l'alarme va sonner le début du match et le coach n'est toujours pas là. Il ne s'est pas pointé à quinze heures pour notre entraînement hors glace, j'ai du limiter la casse en gérant moi même la situation. Après ça, on est allé se poser pour quelques exercices de renforcement musculaire, encore là, j'ai du donner les indications et maintenant, c'est l'heure du briefing d'avant match et il n'est toujours pas là !

-Merde mais qu'est-ce qu'il fou ! je lâche en tapant du poing contre un casier.

Je suis tendu à l'extrême. Nous sommes en final de Ligue Magnus, ce soir, se joue le match le plus important de notre saison et je ne suis même pas concentré à cent pour cent dans mon jeu.

-Kurby, y va falloir faire quelque chose non ? On ne peut pas monter sur la glace si le coach n'est pas là.

-Je suis là.

Je relève la tête furibond prêt à lui cracher ce que je pense de son putain de retard à la gueule mais lorsque je vois la mine blafarde du coach, ses cernes violacés sous ses yeux, et son regard vitreux, plus rien ne sort. D'ailleurs, plus personne ne pipe un mot dans le vestiaire, c'est bien la première fois qu'on pourrait entendre un pet claqué.

-Coach.

-Sur la glace bande de tapette, je ne veux rien entendre. Vous avez une victoire à remporter.

Tout le monde sort du vestiaire crosses en main mais moi, je dois finir de m'équiper en quatrième vitesse. Le coach me regarde et je ne peux me retenir de lui balancer ce que je pense.

-Merde coach, c'est quoi votre délire ?!

-Dépêche-toi de t'habiller Kurby, ton équipe t'attend sur la glace.

Je lâche un rire sans joie.

-Vous êtes sérieux ? Ils peuvent bien attendre cinq minutes de plus maintenant j'en ai rien à foutre ! Tant que vous ne m'aurez pas expliqué ce que vous me tramez depuis ses dernières semaines, je ne mettrais pas un patin dehors !

Le coach souffle désespéré comme je ne l'ai jamais encore vu, et passe une main tremblante dans ses cheveux. Sauf que c'est la que je remarque.

-Coach...

Je m'approche de lui, et du haut de mes patins je ne vois que ça. Je fais bien deux têtes de plus que lui et je ne peux pas quitter mon regard du haut de sa tête dégarni ou devrais-je dire, garni de trous vide.

-Vos cheveux coach...

Je tends une main vers sa tête sans le vouloir mais il me dégage d'un coup sec.

-Ne me touche pas Kurby !

-Vous avez un cancer... VOUS AVEZ UN CANCER ?! PUTAIN RÉPONDEZ-MOI !

Il baisse la tête et détourne son regard vers la sortie des vestiaires.

-Pas maintenant Kurby s'il te plaît... Magne-toi de t'équiper et monte sur cette putain de glace !

-Après le match vous... vous avez intérêt de m'expliquer !

-Va jouer ton rôle de capitaine. Gagne moi ce foutu match Kurby, que je puisse prendre ma retraite sur une dernière victoire.

J'enfile mon maillot à la hâte, fixe mon casque sur la tête et m'empare de ma crosse que je frappe d'un coup sec sur le sol avant de la pointer vers lui.

-J'ai intérêt de vous voir sur le banc alors ! je dis avant de sortir des vestiaires déterminé.

*

* *

-OK les gars on y est ! Ce match on l'a attendu toute la saison, on ne change rien pour l'instant, on suit la tactique de d'habitude. On va leur montrer qui c'est qui commande ici !

-OUAIS ! crie mes gars en force.

- On va leur montrer qui c'est les boss parce qu'on est quoi ?!

-On est bon, on est fort, montrons leur les chiens enragés que nous sommes ! récite Barry.

-BULLDOGS !

Nous frappons tous nos crosses en cœur au centre de notre cercle puis nous nous dispersons à nos postes respectifs. Ma ligne reste sur la glace, tandis que les autres vont se placer sur le banc, avec le coach. Je lui donne un dernier regard avant que l'alarme ne sonne le début du match, d'un signe de tête, il me lance toute sa motivation. Il a un putain de cancer et pendant toute ces semaines il ne nous a rien dit... A quel stade peut-il bien être pour avoir voulu affronter ça tout seul alors que toute son équipe aurait pu être derrière lui. Tant de question que je me pose mais que j'écarte dans un coin de ma tête dès que le début du match est lancé et que le palet est lancé.

-Écoutez moi ça les gars : "Les Bulldogs ont battu 4 à 3, une de leur bête noire, les Tigers, qu'ils n'avaient plus dominé depuis ses deux dernières années." nous lit Barry debout sur le banc avec en simple accessoire sa coquille de protection anatomique.

-On les a démonté ! s'exclame Jessi qui a lui aussi offert un but pour la victoire.

-Et vous avez vu cette doublette qu'on leur a mis avec Kurby ?! crie Tecker en re-imitant le moment carrément à poil. Bim - Bim !

-Allez on se calme ici ! Tecker enfile moi un calbut sur le cul, Barry t'attend quoi pour aller te doucher tu sens le fauve !

-Non le tigre coach ! lui répond t-il fier de sa vanne. Le tigre !

On pouffe tous à sa connerie et je souris d'autant plus lorsque je vois que le coach en rit aussi mais lorsqu'il croise mon regard, son sourire s'efface bien vite.

-Kurby, je peux te parler, en privé.

-Bien sûr coach.

-Dans mon bureau.

Un silence plombant vient de tomber dans le vestiaire et tout le monde nous regarde avec un air interrogateur. Nous leur passons devant et allons nous enfermer dans son bureau. Il le contourne pendant que je m'assois, mais lui reste debout derrière son siège. Il serre le dossier entre ses doigts et j'attends qu'il me parle.

-Donc tu as deviné... lâche-t-il.

-Vous perdez vos cheveux...

-Par poignet oui. Ça a commencé en début de semaine. Jusqu'à maintenant je n'avais pas encore eux les retombées mais ça y est. Ma femme va me raser demain. Je pense... Je crois que c'est le mieux, non ?

Il me regarde attendant une réponse. Je me redresse sur ma chaise pas à l'aise du tout. Le coach qui me demande des conseils, à moi ? Putain c'est le monde à l'envers.

-Votre femme, elle tient le coup ?

C'est la seule chose qui me passe par la tête avant de me rappeler que je voulais lui demander :

-Et vous le savez depuis combien de temps ? A quel stade vous en êtes ? On va pouvoir vous soigner ? Pourquoi.. pourquoi à cause de cette merde vous décidez de prendre votre retraite ? Vous avez encore quelques années de carrière devant vous, vous devriez justement utiliser ça comme moyen de vous fait oublier tout ça ! je lève les mains en l'air essoufflé. Excusez-moi coach... c'est, cette nouvelle enfin non ce n'est pas une nouvelle mais...

Il me coupe dans ma tirade pittoresque.

-Ça va Kurby, je sais ce que ça fait. Quand on t'annonce ça, il n'y a plus que confusion dans tes pensées, plus que des questions, des milliers de questions. Vais-je m'en sortir ? Je l'espère car je ne veux pas être tué par cette merde. J'ai une tumeur au poumon de stade 2 qui mesure plus de quatre centimètres. Elle a causé l'affaissement de mon poumon gauche et a provoqué une inflammation des tissus pulmonaire d'une partie de mon poumon.

-Quelle merde ! je marmonne.

-La semaine où je t'ai demandé de me remplacer, j'ai subi en réalité toute une batterie d'examen qui m'a décelé cette saloperie.

-Quel est le traitement ?

-De la chimio radiothérapie.

-Ça craint...

-Je ne te le fais pas dire. Et pour en venir à ma femme, je te remercie de te soucier d'elle.

-C'est normal coach. Alors elle tient le coup ?

-Elle est incroyablement forte et c'est grâce à elle que j'arrive a puisé ce courage d'être là face à toi aujourd'hui.

Ses paroles me touchent, non me percutent même. J'ai trouvé en le coach, une partie qui me rappelle mon père. Celui qui avec ma mère, ne me donne plus de nouvelles depuis que je vis ici à Québec. Aller à l'encontre de leur volonté, suivre mon proche chemin pour ma propre carrière n'a pas été la plus belle annonce que j'ai pu leur faire. Depuis, silence radio. Que grand bien leur fasse, j'ai fais ma part du marché en leur donnant de mes nouvelles, s'ils ne veulent pas faire la leur, alors basta. Mais le coach lui, est là depuis le début dans toutes circonstances, alors apprendre qu'il est victime de cette foutue maladie m'oppresse le cœur.

-Vous savez que je suis là hein coach, si vous avez besoin de quoique ce soit, n'hésitez pas.

-Justement, j'ai besoin d'une chose Dimitri.

-Laquelle ?

-J'espère que ta belle pierre précieuse à décider de rester officiellement résidente ici, car je voudrais que tu accepte de reprendre mon poste à la saison prochaine. Je ne vois personne d'autre que toi, prendre le relais à ma place.

-Ça...ça veut dire arrêter le hockey ?

-Non Dimitri, ça veut dire passer l'étape supérieur, monter un échelon, devenir le boss.

Je reste simplement sans voix face à cette proposition.

*

* *

LES BULLDOGS DOMINENT ENFIN LES TIGERS !

LES BULLDOGS REMPORTENT LE TITRE DE LIGNE MAGNUS !

4 à 3 POUR LES BULLDOGS, MATCH SERRÉ MAIS REMPORTÉ.

LE CAPITAINE KURBY, OFFRE LE BUT DE LA VICTOIRE.

LE COACH ANNONCE SA RETRAITE...

QUI SERA LE LEADER DES BULLDOGS À LA SAISON PROCHAINE, UNE QUESTION QUE TOUT LE MONDE SE POSENT...

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Fin du Chapitre.

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Mon Histoire écrite en collaboration : INKED MEMORIES 1 & 2.

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