Chapitre #3 ☑️

Je suis assise sur le canapé, les bras croisés, tandis que Matthieu tourne en rond devant moi en me jetant des coups d'œil furtifs.

– C'est bon, Chloé, tu vas pas en faire tout un plat...

– Laisse-moi un peu de temps pour faire la gueule, grogné-je. Toi qui essaye de te rabibocher avec moi, on voit pas ça tous les jours. J'attends des excuses.

Malgré moi, je lui ai déjà un peu pardonné. Et je suis vraiment étonnée qu'il me coure après pour qu'on passe à autre chose. En temps normal, il m'aurait lancé des piques et aurait utilisé cette histoire pour se moquer de moi tout le temps. Enfin, il aurait été méchant, comme d'habitude, quoi.

Je le regarde, une lueur amusée dans les yeux. Il finit par s'arrêter et se penche vers moi. Aussitôt, les battements de mon cœur s'accélèrent.

Il me fait une petite moue de chien battu.

– Ok, c'est bon, je suis désolé...

– Ton expression censée être mignonne et m'amadouer te rend ridicule, mais je crois que je te pardonne, dis-je. Par contre, est-ce que tu ne jouerais pas plutôt sur le fait que tu es à quelques centimètres de moi pour espérer me faire craquer? réussis-je à articuler.

Il me sourit.

– Pourquoi, ça te dérange?

– Oui.

Au prix d'un grand effort, je le repousse et me lève.

– À TABLE! crie mon père depuis la salle à manger.

Déjà le dîner? Moi qui comptais aller chez Bea... j'irai demain, alors.

Je porte mon attention sur Matthieu qui m'observe, les yeux mi-clos.

– Quoi?

– Rien, répond-il. Juste, la prochaine fois que tu te sens blessée, évite de foutre mon paquet de cigarettes dans la cheminée et de verser du vinaigre dans mes baskets neuves.

Je pouffe, me rappelant la tête qu'il avait fait quand il avait vu l'état de ses chaussures.

Je prends la parole à mon tour:

– Et toi, évite de déchirer en mille morceaux ma rédaction de français de quatre pages que j'avais passé trois heures -voire plus- à rédiger.

– Tu m'as fait pire, alors te plains pas!

Il sourit. Je me demande comment ça se fait qu'on arrive à rire ensemble deux fois dans la même journée. Tout bonnement incroyable. Même si on continue à faire les pires vacheries dans le dos de l'autre.

– Par contre... commence-t-il

Il dépose un baiser au coin de mes lèvres. Mes joues deviennent brûlantes.

– ... je trouve toujours que tu es une connasse.

– Et moi je trouve toujours que tu es un bouffon, rassure-toi.

Retour à la normale.

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– Matthieu! Euh, je veux dire, bouffon! appelé-je.

La tête de l'adolescent apparaît dans l'encadrement de la porte de la salle de bain.

– Je sors de la douche, là, je suis à poil, pourquoi tu choisis toujours les mauvais moments pour me parler?

– Tu vas où? questionné-je.

– Qui te dit que je vais quelque part?

– Allez, tu ne prends jamais de douche si tu ne sors pas, me moqué-je.

– Serais-tu en train d'insinuer que je suis sale?

– Je te connais mieux que tu ne le crois... mais ne change pas de sujet! l'avertis-je.

– Ok, c'est bon, je vais à une fête, avoue-t-il. S'il te plaît, s'il te plaît, ne dis rien aux parents!

Je cligne des yeux. Je n'aime pas qu'il aille à ces fêtes tout seul. Enfin, même quand je suis là, ça dégénère toujours... il ne peut pas s'empêcher de boire et de finir ivre comme pas possible.

La première fois qu'il m'avait emmenée à une fête, ça avait mal tourné...
( n d a  -  voir tome 1, Bad Brother )

À présent, je sais que nous ne sommes plus ensemble, mais... je n'aime pas ça, c'est tout.

– Mais tu n'as pas le droit! Les parents te l'ont interdit, tu sais bien! Puis chaque fois tu finis complètement bourré...

Il me fait une moue dépitée puis s'éclipse quelques instants. Il revient, vêtu uniquement d'un jean. À la vue de son torse nu, je baisse les yeux, gênée.

– C'est bon, c'est pas comme si tu m'avais jamais vu comme ça, lance-t-il, les yeux brillants.

Je le fusille du regard.

Il s'appuie contre le mur en face de moi et me toise.

Son regard s'adoucit.

– Tu pourrais me promettre de ne pas leur dire et de me couvrir, s'ils remarquent quelque chose?

Je ne réponds rien, j'attends qu'il ajoute quelque chose, et il le sait. Il lève les yeux au ciel et lâche à contrecœur:

– Et je ferai ce que tu voudras.

Je souris, satisfaite.

– Allez, qu'on en finisse, donne-moi un truc à faire et je le fais maintenant, fait-il.

– Embrasse-moi.

Euh? ... non, non, non! Pitié, dites-moi que ce n'est pas moi qui ai dit ça. Ce n'est pas possible... ce n'est pas moi. Merde, si.

De lui ou de moi, je me demande lequel est le plus interloqué. Est-ce vraiment moi qui viens de dire ça?

Mais c'est n'importe quoi! Qu'est-ce qui m'a pris?

Les mots sont sortis tous seuls. Je n'ai pas réfléchi...

Je sens le feu me monter aux joues. Matthieu continue de me fixer, consterné.

– J'ai mieux, articulé-je faiblement. Tu oublies ce que je viens de dire, et c'est réglé.

Je lève les yeux vers lui, la mine déconfite. Quelle gaffe je viens encore de faire? Pourquoi ai-je du dire ça? Je ne voulais pas dire ça!

Je prends quelques secondes pour réfléchir. Si j'ai inconsciemment sorti cette parole, serait-ce parce que j'en ai envie?

Mon regard dérive lentement sur ses lèvres.

Et là, je me dis merde, parce que, merde, je viens de réaliser que j'ai vraiment envie qu'il m'embrasse, et merde, je devrais pas.

Je pensais avoir tourné la page et réussi à le considérer comme... comme rien! Juste une sorte de frère avec lequel je vis et que j'emmerde car... c'est notre truc de s'emmerder l'un l'autre!

Je ferme les yeux et tente d'effacer son image de mon cerveau. De ne pas penser à lui, à ses lèvres, à son torse nu, avec ses muscles saillants, à son visage parfait, à ses beaux yeux envoûtants...
Je rouvre brutalement les paupières.

– Putain! crié-je rageusement avant de sortir. Je cafterai pas, tu peux t'en aller, lancé-je derrière moi d'un ton sec.

Je referme la porte et descends m'affaler sur le canapé à côté de Sam qui dort, la tête posée sur les genoux de Kath, ma sœur.

Pourquoi cette agressivité qui émane de moi, à présent? Je lui ai clairement dis de se casser, à l'instant. Encore une fois, qu'est-ce qui m'a pris? Pourquoi suis-je autant en colère?

Je respire à fond pour me calmer. Mon cœur bat à tout rompre.

Je me suis foutue la honte en lui demandant de m'embrasser. À coup sûr, il va tout raconter à ses copains et, dans les prochains jours, je risque d'en baver. Ça va être ma fête...

Puis, surtout, au fond, je crois que je suis frustrée, très frustrée.

Parce que je pensais avoir dépassé tout ça,

Parce que je pensais que je ne ressentais plus rien pour Matthieu,

Parce que je ne pensais pas que je pouvais toujours être amoureuse de lui,

Et parce que ce n'est vraiment pas de chance que je réalise tout cela maintenant, alors qu'une sorte de jeu consistant à se détester et à tout faire pour mettre l'autre hors de lui, a pris place entre nous deux.

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corrigé et relu le 25 septembre 2017

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