Il s'avance dangereusement.

À bout de patience, désespérée, je ferme les yeux.

Pourquoi fait-il ça? Pourquoi insister autant? Est-il sûr qu'il joue vraiment? Et qu'est-ce que c'est comme jeu?

Non, décidément, je ne le laisse pas m'approcher. Quitte à passer pour une lâche à ses yeux, une faible, ou je ne sais trop quoi encore. Au bout d'un moment, il faut arrêter.

Je trouve qu'il a... disons, un peu changé depuis l'arrivée d'Emily. Il agit différemment. Tout à coup, il redevient si sûr de lui...tout à coup, il met en principe ce jeu. Je ne comprends pas.

Je ne le suis plus.

Il pose ses mains sur mon visage.
Je concentre toutes mes forces...pour lui asséner ma plus grande claque.

« Putain, mais stop! crié-je. C'est quoi ce jeu à la con? Je t'ai fait quoi, à la fin? Je t'ai fait quoi, pour que tu m'embrasses puis que t'ailles attirer une autre fille dans ton lit? Je t'ai fait quoi pour que tu prennes du plaisir à me rendre jalouse et à me faire péter un câble? Tu penses à ce que je ressens à l'intérieur? Non, bien sûr. Ce matin je me suis dit, pourquoi pas rentrer dans ton petit jeu! Mais tu sais quoi? Finalement, j'abandonne! Tu peux dire ce que tu veux, j'abandonne... je m'en fous de ton jeu. »

Je suis affreusement sur les nerfs, et je me suis peut-être trop emportée pour quelque chose qui n'en valait pas tant la peine.

Néanmoins, tant pis. Je m'en fiche. Je crois que j'ai juste besoin de dormir.

Matthieu a baissé la tête, de sorte que je ne parviens pas à voir ses yeux. Je ne sais pas ce qu'il pense, pourtant je donnerais n'importe quoi pour savoir ce qu'il lui passe par la tête.

Putain, on est tellement compliqués, nous deux.

« Bonne nuit, Matthieu, dis-je pour mettre fin à cette situation embarrassante. »

Je tourne les épaules et me concentre sur mon oreiller que je cale contre le dossier du canapé.
Je m'allonge et me glisse sous la couverture.

Matthieu est parti silencieusement.

***

Putain, c'est pas possible!

Quatre heures. Quatre heures! Quatre heures que j'essaie de dormir, sans succès. Je ne trouve pas de position confortable, je déteste ce canapé!

Je tourne et me retourne, enroulée n'importe comment dans ma couverture. Je ferme les yeux, puis les rouvre.

Le pire, c'est que j'ai envie de dormir...j'ai tellement sommeil, mais ce canapé m'empêche de tomber dans les bras de Morphée.

Je pousse un grognement de frustration et me lève brusquement.
Je titube jusqu'à la cuisine. J'allume la lumière.

« AAAH! »

L'individu en face de moi crie aussi, mais moins fort que moi.

Je cligne des paupières et porte une main à mon cœur.

Je souffle.

« Bordel, tu m'as fait peur, Matthieu! Tu fous quoi ici à deux heures du matin?

– La même chose que toi, je vais me chercher un verre d'eau, t'as cru quoi?

Je me calme.

« Tu n'arrives pas à dormir? demandé-je.

– Si si, je dors à poings fermés, là, regarde.

Je lève les yeux au ciel.

« Le canapé est trop inconfortable, je peux pas dormir dessus, me plaigné-je. »

Étant un peu dans le chou, j'oublie totalement notre dernière altercation.

Il me regarde fixement. Ses yeux ont un air...doux. Vraiment doux. Depuis quand ai-je droit à un tel regard?

Mal à l'aise, je baisse la tête et décroche un bâillement.

« Tu as toujours soif? questionne Matthieu.

– Non... »

Je lève timidement les yeux vers lui.

« Je...je peux pas dormir avec toi? »

Il me sourit brièvement et me prend par la main jusqu'en haut.

Arrivée dans la chambre, je bute sur quelque chose.

« Aïe!

– Chut, tu vas réveiller Emily!

– Je fais ce que je peux! râlé-je. »

Je viens m'allonger près de lui et nous restons l'un à côté de l'autre, sur le dos, mal à l'aise.

Il y a comme un froid entre nous. On ne sait pas où se placer. Je soupire; aucune chance que je m'endorme là non plus...

Soudain, un bruit étrange nous fait sursauter.

« C'était quoi, ça? chuchote Matthieu.

Le bruit se répète régulièrement, semblant venir... de notre chambre même.

Je comprends brutalement et réprime un rire.

« Matthieu, je crois que — (je lâche un éclat de rire involontaire) — c'est Emily... qui ronfle...

– Putain, c'est pas vrai! »

Il s'étouffe de rire, et je ne peux pas m'en empêcher non plus.
Emily a perdu toute crédibilité auprès de nous dès le premier soir.

Après s'être calmés, je dis:

« J'arriverais jamais à dormir avec ces ronflements, je descends. »

Je me lève et il me suit. Une fois de retour au salon, Matthieu se couche sur le divan.

« Tu prends toute la place! protesté-je.

– C'est pas de ma faute, le canap' est trop petit!

— Laisse moi une place... »

Nous réussissons à nous entasser à deux, couchés sur le canapé. On se retrouve juste allongés sur le côté, collés, et il est obligé de me maintenir par la taille pour que je ne tombe pas; et sa tête enfouie au creu de mon cou.
Néanmoins, cette position me convient, et je me sens bien avec lui.

Comme à chaque fois.

Son contact m'apaise. Son bras protecteur sur ma hanche, son souffle chaud sur ma nuque... je m'endors presque immédiatement, un petit sourire que je n'arrive pas à réprimer aux lèvres.

***

« Qu'est-ce que vous fabriquez encore, vous deux? »

La voix sévère de ma mère me tire brutalement de mon sommeil, me faisant au passage tomber du canapé.
Je me frotte les yeux et grogne.

Ma mère nous fixe d'un air exaspéré.

« Levez-vous, tous les deux! Emily est déjà debout, elle mange à la cuisine. Dépêchez-vous! »

Je me lève difficilement et secoue Matthieu qui dort encore à poings fermés.

« Mmh, laisse moi... marmonne-t-il avant d'enfouir la tête dans l'oreiller.

– Grouille, Emily attend à la cuisine, lui dis-je.

– Pas envie, grommelle mon faux demi-frère. »

Je soupire et ferme les yeux, ce qui me donne immédiatement envie de me rendormir.

« Oh, et puis tant pis... pousse-toi, je me recouche avec toi, murmuré-je. »

Il se met sur le côté, tête tournée vers moi et soulève son bras. Je viens me nicher contre lui, mon dos contre son torse. Sa main retombe autour de ma taille et il cale son menton au-dessus de ma tête.

Je me sens tellement à l'aise, comme ça, avec lui. Tellement... chez moi. J'ai juste envie que cet instant dure éternellement.

« J'ai pensé qu'on pourrait inviter Noah et d'autres potes aujourd'hui, et faire une sortie tous ensemble avec Emily.

– Ça me dit. On pourrait aller au parc d'attraction à une petite heure d'ici?

– En hiver? T'es folle, toi...

– Allez, c'est marrant, puis ils avaient prévu un peu de soleil aujourd'hui. S'il te plaît, ce sera fun!

– Ok, pourquoi pas. »

Nous finissons par nous lever, il se détache de moi à mon plus grand regret.

Nous rejoignons Emily à la cuisine. Heureusement, elle ne pose pas de questions sur le fait que Matthieu ait quitté la chambre au milieu de la nuit...

On parle de tout et de rien; on est tous miraculeusement de bonne humeur. De plus, j'avais raison: aujourd'hui s'affiche un grand soleil et on se rapproche des 11 degrés.

Il est bientôt midi.
Emily est partante pour le parc d'attraction, alors moi et Matthieu nous chargeons d'inviter les autres.

De mon côté, j'ai pas mal de partants: Bea, Ethan, Jimmy et Tim sont libres.

« Moi, indique Matthieu, j'ai Dylan, Noah, Isaac, et Mia qui viennent.

– Parfait! »

Honnêtement, je la sens bien, cette sortie. Cela nous fera du bien à tous de prendre l'air, et on va bien s'amuser.

Du moins j'espère!

***

Désolée pour ce chapitre sans rebondissements!

Le prochain sera plus rempli ;)