Chapitre #10

Cette leçon d'histoire me pompe tellement! Elle ne veut pas rentrer dans ma tête...
Je n'ai pas encore osé descendre voir ce qu'il se passait entre Matthieu et Jessica.
Je n'entends presque aucun bruit.

Ça va bientôt faire une heure que je bosse. Tout est plus compliqué que ce que je pensais...

Finalement, je referme mon cahier rageusement et descends. Je continuerai une autre fois.

Je retiens mon souffle avant d'entrer dans le salon. Tout de suite, mon cœur se relâche et je me détends: ils sont juste assis l'un à côté de l'autre et Jessica parle de ses vacances de l'été dernier.

Cependant, mon cœur ne tarde pas à redevenir lourd, lorsque je vois le sourire de Matthieu.

Je connais ce sourire, et ça ne présage rien de bon.

Je m'avance vers eux et déballe:

« Jessie, je crois qu'il faudrait que tu rentres chez toi, non? Tu sais, plus vite tu affrontes ta mère, plus vite ça passera.

Je veux qu'elle parte, et n'importe quelle excuse me convient.
Elle me regarde, une moue réticente sur le visage, puis cède:

– Ok, tu as peut-être raison. J'y vais.

Elle se lève, suivie de Matthieu qui l'accompagne jusqu'à la porte.
Elle me prend dans ses bras puis dépose un baiser sur la joue de Matthieu.

– À bientôt, Jess' , sourit-il.

Une fois la porte refermée, je m'exclame simplement:

– Quoi?!

Quoi?! Elle lui fait la bise? Il l'appelle Jess?! Il lui dit "à bientôt"? Ils se connaissent depuis une heure!
Matthieu me fixe:

– Quoi quoi?

Je préfère ne rien répondre. Je me sens un peu déprimée.
Le seul bon côté, c'est qu'ils ne sortent pas ensemble. Enfin, s'ils s'étaient mis en couple après une heure passée ensemble, ça n'aurait pas été normal non plus.
Je murmure "rien" et il m'annonce:

– Sinon, je sèche encore vendredi. J'ai une soirée jeudi soir après les cours, donc demain.

Il compte me mettre encore plus en rogne que je ne le suis déjà?!
Je lui lance un regard antipathique et vais m'enfermer dans ma chambre en prenant bien soin de fermer à clé.

Je prends une douche pour me rafraîchir les idées et laisse l'eau tiède couler doucement le long de mon corps en essayant de ne penser à rien.

Une fois sortie, je me mets en pyjama et allume la télé pour regarder la première émission qui s'affiche à l'écran.

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« Chloé? Chloé, allez, ouvre!

Il peut toquer autant qu'il veut, je refuse de lui ouvrir. Je ne veux parler à personne, et surtout pas lui. Peut-être que c'est ridicule, peut-être que je ne devrais pas être en colère, mais tant pis. Je ne peux pas m'en empêcher.

Merde, il faut que je me ressaisisse, c'est n'importe quoi...on ne sort pas ensemble, il peut draguer qui il veut! Et puis, ils sont probablement juste amis. Je devrais arrêter de m'emballer...

Je me lève à contrecœur et déverrouille la porte.
Il me fait face, l'air agacé:

– C'est quoi, ça? Pourquoi tu voulais pas m'ouvrir? Qu'est-ce que j'ai fait?

Je ne réponds rien et retourne sur mon lit pour disparaître entièrement sur la couette.
Je le sens s'approcher et s'assoir au bord du lit. Je sais que j'ai parfaitement l'air d'une gamine qui boude pour rien, mais je m'en fiche.

Je bouge à l'autre bout du lit, faisant en sorte d'être le plus loin possible de lui. Il en profite pour se glisser sous la couette et s'allonger à côté de moi.
Il passe un bras autour de ma taille et m'attire à lui. Je déglutis.

Il commence à me chatouiller.
J'éclate de rire.

– A...arrête! hoqueté-je.

– J'arrête si toi tu arrêtes de bouder pour je ne sais quoi!

– Ok ok! »

Il se détache de moi et je me tourne vers lui. Cependant, en voyant que je me retrouve à quelques centimètres face à lui, je lui retourne le dos en me mordant la lèvre.

« Allez, c'est quoi le problème à la fin? s'impatiente-t-il.

Je ne peux pas lui dire. Ça paraîtra ridicule.

Je dis juste:
– Rien, laisse tomber. Il est quelle heure?

– Tout juste quatorze heures.

On se lève et descend.

– Tu as faim? On a pas encore pris le repas de midi.

– Non, ça va, répond Matthieu, j'ai pris un sandwich en sortant des cours.

Je me prépare alors à manger uniquement pour moi. Tout en faisant réchauffer des pâtes, je demande innocemment, tenant de prendre un ton dégagé:

– Alors, tu la trouves sympa, Jessica? Ou Jess' comme tu l'appelles, ajouté-je malgré moi en lui jetant un coup d'œil.

J'espère qu'il ne remarque pas ma frustration.

– Ouais, elle est cool...réplique-t-il vaguement.

– C'est tout? je réagis directement.

– Euh, oui...pourquoi?

– Je sais pas...(Vite, il me faut un argument) C'est une de mes meilleures amies, alors ce serait cool que tu t'entendes bien avec elle. Elle reviendra sûrement bientôt à la maison.

À ces derniers mots, son visage s'illumine. Ça m'agace encore plus.

– Vraiment? lance-t-il.

– Oui, je dis impatiemment. Alors, honnêtement, tu la trouves comment?

– Elle est vraiment sympa, avoue-t-il.

Après un instant d'hésitation, il ajoute tout bas:

– Et elle est grave belle aussi. »

S'il pense que je ne l'ai pas entendu, c'est raté.
Je ravale ma colère et ma déception et me plante devant lui. Je lui adresse mon plus faux sourire, et émet un petit rire avant de déclarer:

« Tu sais, si elle te plaît, tu peux me dire.

Ma mâchoire est crispée au possible, et j'ai mal aux joues à force de m'obliger à sourire.

Il paraît rentrer dans le jeu et se confie un peu plus:

– Bah, je sais pas. Mais je l'emmène à la fête demain.

Je n'y crois pas. J'avais raison, alors. Il y a vraiment quelque chose entre eux deux. Ou il va y avoir quelque chose, en tout cas. Il plaît à Jessica, et apparemment Jessica lui plaît, même s'il ne le reconnait pas entièrement. Tout est si rapide!

Tout ça me rend triste, je ne peux pas le cacher. Je n'ai même pas la force d'inventer un mensonge pour qu'il ne puisse pas l'emmener.

– Oh, je lâche. Ok.

– Il y a un problème?

– Non, non. (je réunis quand même mes dernières forces pour tenter de le dissuader) Tu es sûr que tu veux l'y emmener?

– Oui, tranche-t-il d'un air catégorique.

– Tu sais, elle...elle n'aime pas trop les soirées, et demain, je crois qu'elle avait, euh, un dîner en famille de prévu...

– Non, elle me l'aurait dit sinon.

– Bah, tu sais, elle oublie souvent les choses...

– Tant pis, elle vient! Et c'est n'importe quoi, ce que tu dis, Jess m'a dit qu'elle adorait les soirées dans ce genre. »

Pitié, s'il prononce encore une fois ce stupide surnom «Jess», je vais craquer. Tout cela me blesse beaucoup plus que je ne pensais. Je me contrôle pour rester calme. J'ai juste envie de m'affaler sur mon lit et déprimer, ou alors tuer Jessica. Au choix.

« Elle dit souvent ça, mais en vrai elle est pas fan...

– Non, rétorque-t-il. Elle avait l'air vraiment emballée. ...Dis, est-ce que tu as un problème avec le fait qu'on aille ensemble à une fête?

Il m'observe, sourcils froncés. Je sens la dispute arriver.

– Parce que sinon, tu devrais me le dire, poursuit Matthieu, au lieu d'inventer des histoires. Pourquoi tu me mens? Je sais très bien qu'elle adore les fêtes et qu'elle n'a rien de prévu demain soir.»

Je baisse les yeux. Surtout, ne rien laisser paraître.

« C'est juste que Jessica peut sembler sympa au premier abord, mais elle est un peu...difficile à vivre, des fois. Je veux juste t'épargner ça.

Pourquoi est-ce que je continue à m'enfoncer?! Cela n'a plus aucun sens.

Matthieu s'énerve:

– Je fais ce que je veux! C'est n'importe quoi ce que tu me racontes! Elle serait contente si elle apprenait que sa meilleure amie la trouve 'difficile à vivre', hein! Si tu as un problème, tu le dis, point. »

Je me mords la joue et j'ai le bon sens de ne pas continuer mon petit jeu. Je le sens tendu, sur la défensive.

Pourquoi j'ai fait ça?!

Je m'empresse de dire:

« Non, non, pardon, on peut oublier tout ça?

Il me fixe avec colère, je me sens vidée de toutes mes forces.

– Pas besoin de t'énerver comme ça, ajouté-je faiblement.

– Je m'énerve pas! Enfin, si, je m'énerve! Pourquoi tu fais tout ça? C'est quoi qui va pas avec Jessica? Tu as peur que je finisse avec elle, ou qu'on couche ensemble et qu'après je lui brise le cœur?! Non!

– Ok, c'est bon!! hurlé-je. De toutes façons, tu comprends jamais rien, c'est pas nouveau! »

Soudain, mes forces sont de retour. Furieuse, je passe devant Matthieu qui se tient immobile, ne comprenant plus rien, enfile vite mes chaussures, prends ma veste et sors en claquant la porte. Les pâtes crameront, je m'en fous, la veste que j'ai prise est beaucoup trop légère et je vais avoir super froid, je m'en fous.

Dans quelle situation je me suis encore mise?
La courte période où nous avions recommencé à bien nous entendre et à être plus proches touche-t-elle à sa fin?

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