Trahison

Poudlard, bureau du directeur

Albus Dumbledore sembla plus vieux et fripé que jamais en cet instant, assis à son bureau, seul. Les plis soucieux que formait son front lui donnaient l'air d'avoir au moins cent ans. Cela était accentué par le bruit régulier d'une horloge dont le « tic-tac » incessant décomptait les secondes qui passaient.

Le directeur de Poudlard avait croisé ses deux mains ensemble et posé son menton dessus. Songeur, il poussait régulièrement un ou deux soupirs qui s'échouaient mollement dans sa longue barbe argentée. Ses lunettes en demi-lune laissaient entrevoir ses yeux, marqués par le poids des années, qui paraissaient exprimer sa nervosité et son inquiétude.

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On n'est jamais vraiment sur d'avoir pris la bonne décision tant qu'on n'a pas le résultat.

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La réflexion qu'il menait fut interrompue par Minerva Mc Gonagall qui venait de frapper à la porte. Les trois coups sourds se répercutèrent dans la pièce, troublant sa désarmante quiétude. La directrice des Gryffondor entra doucement dans le bureau du directeur, sans attendre de réponse, et referma la porte derrière elle. Le cliquetis qu'elle produisit en se verrouillant acheva de sortir Albus Dumbledore de sa torpeur.

Le directeur soupira de nouveau et décroisa ses doigts, s'installant plus en arrière dans son fauteuil. Il plongea son regard d'azur dans celui sa collègue. Il fut surpris de constater à quel point elle avait l'air fatigué, exténué. Les années qu'elle avait vécues paraissaient également peser sur ses épaules fragiles et ses yeux cernés attestaient de l'angoisse qui la tiraillait sans discontinuer.

S'affaissant dans un fauteuil en face du directeur, Minerva Mc Gonagall avait l'air de perdre pied à une vitesse phénoménale. Elle passa une main sur son front ridé, comme pour chasser un mal de tête persistant. Puis, enfin, elle se décida. Ses yeux se rétrécirent et ses mains plissées se serrèrent l'une contre l'autre un instant.

« Ils savent, Albus. Murmura-t-elle d'un ton presque inaudible.

-Comment ont-ils réagit ? Questionna calmement le directeur, époussetant machinalement sa robe étoilée.

-Mal, très mal. Résuma la directrice de maison en détournant le regard. Potter est entré dans une colère folle, Weasley est devenu tout vert et... Granger a fondu en larmes. J'ai même cru qu'elle allait s'évanouir. Pourtant je... Je leur ais précisé que les jours de Ginny n'étaient plus en danger et qu'il fallait simplement attendre qu'elle se réveille... Même si on ne sait pas quand cela aura lieu. »

Le directeur laissa passer quelques secondes, méditant les paroles hachées de Minerva Mc Gonagall, puis il reprit la parole, impatient :

« Ils n'ont rien dit ?

-Non, Albus. Rien du tout. »

La directrice des Gryffondor hésita et finalement questionna :

« Vous ne pensez pas qu'il serait peut-être temps de... Leur expliquer ?

-Je vous ais déjà dit pourquoi je ne leur en avais pas parlé avant, Minerva. Il est nécessaire qu'ils comprennent par eux même, sans quoi cela n'aura pas l'effet escompté... Ou du moins pas autant que je l'espère. Souffla-t-il d'une voix tranquille, la transperçant du regard.

-Mais... Comment pouvez-vous être sûr qu'il s'agit de ça ? S'agaça la directrice, se redressant un peu dans son fauteuil.

-Severus m'a rapporté de nombreuses informations et... J'ai réfléchis Minerva. J'ai pesé le pour et contre, croyez-moi... Je ne vois pas d'autre possibilité.

-Qui sont ces personnes qui ont attaqués les autres élèves, Albus ? Reprit la directrice des Gryffondor avec une pointe d'anxiété dans la voix.

-Vous le savez aussi bien que moi, Minerva. »

Quelques secondes passèrent, durant lesquelles la directrice de maison sembla s'enfoncer dans le désespoir. Elle essuya vivement ses yeux.

« Vous êtes absolument certain que... Vous ne pouvez rien leur dire ? La situation est vraiment mauvaise, Albus... Demanda-t-elle d'une voix étranglée.

-Je sais que la situation est critique, mais il est nécessaire, même vital, qu'ils comprennent par eux-mêmes. Je ne peux que les aiguiller... Et en aucun cas leur dire ce qu'ils doivent faire. » Trancha le directeur d'un ton vif, mettant fin à la conversation.

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Minerva Mc Gonagall ne répondit rien à cela, se tassant davantage dans le fauteuil de chintz rouge dans lequel elle était installée. Sa mine se renfrogna.

Le professeur Dumbledore comprit bien vite qu'elle n'était pas d'accord avec lui. Pourtant, il était persuadé de faire le bon choix.

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Le professeur de métamorphose se leva brusquement, encore un peu perdue dans ses pensées. Elle avisa la porte du regard et s'en approcha. Sa main trembla lorsqu'elle toucha la clenche glacée et sertie d'or. Elle souhaita bonne nuit au directeur et referma promptement la porte derrière elle. Une fois dans l'obscurité, elle ne prit pas la peine d'allumer les multiples torches accrochée au mur. Elle disparut dans le couloir en colimaçon, non sans penser que Dumbledore était, peut-être, aussi fou que le disait la légende.

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Poudlard, bibliothèque

Pansy Parkinson releva son visage fatigué du livre qu'elle était en train de consulter. Machinalement, elle arracha la page du lourd volume qu'elle venait de relire pour la cinquième fois, la plia et la glissa dans sa poche. Un maigre sourire éclaira ses traits tendus.

Elle savait.

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Poudlard, chambre de Lucius Malefoy

Lucius Malefoy se dressa de toute sa hauteur devant son fils qui resta aussi impassible qu'il est possible de l'être.

Les yeux glacés de Drago affrontèrent ceux de son géniteur pendant quelques secondes avant que celui-ci ne détourne le regard, gêné. Le Serpentard ne cessa pas pour autant de le fixer, détaillant le moindre de ses gestes. Il sentit aisément l'anxiété transparaitre par tous les pores de son corps. Il observa avidement ses tremblements nerveux, la courbure de son dos, les impulsions soudaines venues d'on ne sait où que recevaient ses doigts longs et légèrement arqués...

Cela lui parut, pendant quelques secondes, étrange que l'homme qui l'avait éduqué et qui lui avait appris à cacher la moindre petite émotion soit aussi transparent. Encore une preuve que certaines choses qu'on lui avait inculquées ne méritaient peut-être pas l'attention et l'importance qu'on leur prêtait.

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Le père de Drago, qui marchait à présent avec vigueur dans la pièce, stoppa soudainement sa course insensée et vint se poster juste devant son enfant, le sondant de ses yeux. Drago attendit patiemment qu'il ait terminé son petit manège. Il savait qu'il devait garder son calme s'il ne voulait pas perdre la crédibilité qu'il avait auprès de son père.

Ce dernier jeta un regard presque haineux à son fils, avant d'éclater enfin de cette colère longtemps contenue.

« Je peux savoir ce qui te prends ? Cracha-t-il sans aucune retenue.

-Je ne vois pas de quoi vous voulez parler, père. Répliqua calmement Drago, restant de marbre.

-Tu sais très bien de quoi il s'agit ! Ne fais pas l'innocent, ça te va très mal Drago ! Aboya son père.

-De toute évidence, j'ignore à quoi vous faites référence. Répondit le Serpentard en haussant un sourcil agacé.

-De la sang de bourbe, Drago !

-Vous en êtes encore à vous tracasser pour cette histoire... Siffla le jeune homme d'un air amusé. Je ne vois pas bien ce qui vous perturbe tant là-dedans. Est-ce le fait que je pouvais entrer en contact physique avec elle et contracter la maladie ? Je vous l'ai déjà dit, je fais très attention à la position de mes gants lorsque je sors chaque matin.

-Drago, tu sais très bien ce qui ne va pas ! Vous êtes plus que des ennemis n'est-ce pas ? Quelqu'un m'a dit que tu la regardais avec intérêt ! Tonna Lucius en donnant un coup de poing magistral sur la table, perdant totalement son sang froid.

-Tiens donc... Et qui est cette personne qui semble de si bon conseil ? Demanda Drago, un fin sourire se dessinant sur ses lèvres.

-Ca ne te regarde pas ! Coupa sèchement son père, recommençant à faire les cents pas dans sa chambre.

-Non, bien sur que non. Quelqu'un dit des choses absolument fausses sur moi sans que je le sache et cela ne me regarde pas le moins du monde. » Répondit froidement Drago.

Le visage de son père prit une teinte plus foncée, comme s'il rougissait. Les jointures de ses poings devinrent blanches et il sembla, un instant, suffoquer. L'habituel tic nerveux qui se déclenchait lorsqu'il était énervé agita convulsivement sa joue.

Il cessa momentanément de tournicoter dans la pièce pour s'approcher de son fils et se pencha par-dessus la table qui les séparait. Il laissa passer une minute ou deux, puis sa voix se fit plus lente et menaçante lorsqu'il reprit la parole :

« Je te le demande une dernière fois Drago... Qu'y a-t-il entre toi et cette fille ?

-Rien père, à part de la haine. Je la hais, je la déteste. Je ne sais pas quoi dire pour vous en convaincre... Tenez ! Demandez donc à Pansy ! Tenta Drago. Elle sait très bien que je n'ai aucune estime pour cette fille.

-Je ne vois pas ce que Pansy vient faire là dedans. Riposta immédiatement Lucius, soupçonneux.

-Enfin père, vous savez très bien qu'elle a beaucoup d'affection pour moi et qu'elle ferait n'importe quoi pour attirer mon attention ! Elle m'a déjà supplié des centaines de fois de la laisser détruire cette fille... Elle sait pertinemment que je la hais. »

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Sans le savoir, Drago avait eu une chance inespérée. Il avait, comme qui dirait, tapé dans le mille. Il sema le doute dans l'esprit de son père.

Ce dernier s'assit sur la chaise la plus proche, posant sa tête sur la paume de ses mains. Il avait envie de pousser un hurlement.

Il n'avait, pour l'instant, aucun moyen de vérifier ce que Pansy lui avait dit et son fils s'acharnait à lui dire qu'il se trompait. Et si c'était vrai ? S'il ne ressentait rien pour cette stupide créature ? Si ses sentiments étaient le fruit de l'imagination fertile de Pansy ? Après tout, Drago n'avait pas été élevé pour tomber amoureux, loin de là... En était-il seulement capable ?

Quand à une prétendue attirance physique pour cette immondice, il n'en était pas question... Son corps était tellement impur que le jeune lord serait forcément écœuré à la simple idée de l'effleurer.

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Et si Parkinson lui avait mentit ? Si elle s'était imaginé une rivale et était venue voir Lucius pour qu'il se débarrasse d'elle à sa place ? Elle avait peut-être compris que sa peur de perdre son fils et du même coup son rang de haut placé auprès de Voldemort étaient réellement importants pour lui. Elle en avait peut-être... Joué ?

Lucius Malefoy s'étala de tout son long dans son siège et se retint de frapper violemment dans l'accoudoir du modeste fauteuil.

Il fallait impérativement qu'il revoie Pansy Parkinson.

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Derrière la porte de la chambre de Lucius Malefoy, Harry Potter, abasourdi par la conversation qu'il venait d'entendre, resta figé, la bouche grande ouverte.

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Poudlard, salle commune des Gryffondor

Harry surgit en coup de vent dans la pièce, encore essoufflé d'avoir couru dans les couloirs de l'école. Il parcourut la salle commune des rouge et or du regard, cherchant l'objet de sa colère.

Ses yeux se posèrent successivement sur la fenêtre qui annonçait un temps radieux pour ce mois de janvier, sur une élève de troisième année qui s'apprêtait à manger un nougat néansang, sur une chouette qui dévorait joyeusement une souris morte sur le tapis rouge puis, enfin, sur Hermione et Ron. Les deux élèves étaient en grande discussion et semblaient se diriger vers le portrait de la grosse dame. Sans doute allaient-ils se réfugier dans la salle sur demande pour consulter les livres qu'Hermione avait dégotés.

En effet, les trois amis avaient décidé, d'un commun accord, de parler le moins possible de Ginny et de se focaliser exclusivement sur le virus afin de ne pas se déconcentrer. Ils avaient tout de même prévu de lui rendre visite une fois par jour.

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Harry marcha rapidement pour arriver à leur hauteur, entendant plus distinctement leur conversation animée :

« Mais Ron, je t'assure que ce n'est pas possible, ce n'est en rien rationnel !

-Ah, Harry ! Tu tombes bien ! S'exclama Ron en apercevant le survivant. Peux-tu expliquer à Hermione qu'il est tout à fait possible de faire un tonneau avec un balai, même sans les mains ?

-Plus tard ! Il faut qu'on parle ! » Trancha Harry, coupant court aux protestations de ses deux amis.

Il saisit le bras d'Hermione d'une main et celui de Ron de l'autre et les traîna jusqu'au portrait de la grosse dame, sans tenir compte de leurs exclamations surprises. Il les poussa prestement dans l'embrasure du portrait, faisant couiner la grosse dame qui s'offusqua d'une telle violence. Ron atterrit presque à genou dans le couloir vide et jeta un coup d'œil abasourdi à Harry.

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Ce dernier s'était rarement sentit aussi mal. Il avait la réelle impression d'être trahi.

Contrairement à Lucius Malefoy, qui doutait, il était persuadé que Drago et Hermione trafiquaient vraiment quelque chose. Oui, cela expliquait tout ce qu'il s'était passé récemment... Les longues heures que passait Hermione dans la bibliothèque, son air rêveur, sa relation ratée avec Seamus...

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Il avait l'impression que son corps était en train de fondre sur place. Il ne comprenait pas comment Hermione pouvait lui avoir menti. Elle était son amie, il lui avait toujours fait confiance... Il avait toujours cru en elle, aveuglément. Ce n'était pas vraiment l'idée qu'elle voit Malefoy qui le dérangeait... C'était le fait qu'elle ne leur ait pas dit, et surtout... Qu'elle avait peut-être un lien, même infime, avec ce qui était arrivé à Ginny.

Elle savait peut-être ce qui allait lui arriver ? Si elle était capable de leur mentir à eux, ses deux meilleurs amis... Qu'était-elle capable de faire, au final ?

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Arrivés dans le couloir, Hermione se débattit pour échapper à la main d'Harry, prise d'un vertige. Elle avait marché trop vite et commençait à se sentir mal. De sa voix rauque et asséchée, elle demanda :

« Mais enfin, Harry, tu vas nous dire ce qu'il se passe ?

-Tu me demande ce qu'il se passe ? Beugla immédiatement Harry en lâchant le bras douloureux de la jeune fille. Il se passe que tu nous as trahis Hermione !

-Harry... De quoi tu parles ? Souffla la jeune fille en sentant un poids descendre dans son ventre pour prendre une place grandissante dans son estomac.

-Ne fais pas l'innocente, j'ai entendu Malefoy et son père discuter de toi ! Je suis descendu dans les cachots pour être un peu seul, et j'ai entendu des éclats de voix qui provenaient de la chambre de Malefoy père... Tu étais la cause de son courroux Hermione! » Rugit Harry.

Il y eut un silence pesant durant lequel Hermione étouffa un petit cri et Ron s'étrangla avec sa salive.

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« Attends, qu'est ce que tu racontes, vieux ? Bégaya Ron, les yeux écarquillés, se frottant légèrement le bras là ou Harry l'avait serré. Dit pas n'importe quoi enfin, c'est Hermione.

-Ouais, c'est ça, c'est Hermione, justement ! Aboya le survivant dont les joues étaient devenues d'un rouge écarlate digne de l'oncle Vernon. Dis-lui Hermione ! Dis-lui que tu fricotes avec Malefoy !

-Quoi ? Enfin Harry, ce n'est pas possible ! Répliqua Ron avec véhémence. Hermione, dis-lui qu'il se trompe! Tu ne fais rien avec Malefoy n'est ce pas ? »

Les deux garçons se tournèrent d'un seul bond vers la jeune fille, parfaitement coordonnés.

Hermione avait le teint extrêmement pâle et le regard vitreux. Elle tordait ses doigts avec force les uns contre les autres et son corps était en proie à des tremblements incontrôlables. La douleur qui la submergeait semblait arriver par vagues incessantes, lui coupant presque la respiration. Elle ne savait pas quoi dire.

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« Je... Je... Je suis désolée... Dit-elle au bout d'un moment. Ce n'est pas ce que vous croyez... Je... Je fricote pas avec lui... C'est juste...

-Attend Hermione... Dit Ron, détachant bien chaque mot. Tu vois Malefoy ? Tu es censée nous dire que tu ne lui parles pas là, pas que tu ne fricotes pas.

-Ron... Bredouilla Hermione, dont les yeux commençaient à se remplir de larmes. Je ne fais rien avec lui, on se contente... de... de parler, c'est tout...

-Mais c'est pas vrai ! J'y crois pas, hurla Harry, sous le regard interloqué de Ron.

-Mais qu'est ce que tu fais avec lui, Hermione ? Pourquoi tu lui parles ? Enfin Hermione, c'est Malefoy ! Qu'est ce qu'il y a entre vous ? Reprit le rouquin d'une voix blanche.

-Mais rien ! Cria Hermione, au comble du désespoir, sentant une larme s'échapper de son œil pour couler sur sa joue. Rien ! On ne parle ni de Voldemort, ni du virus ! On... Discute d'autres choses c'est tout ! Je vous le jure, je vous le promets ! »

Harry lui lança un regard empreint de colère et lui tourna le dos, incapable d'en entendre plus. C'est comme si, brusquement, son cerveau était arrivé à saturation. Ainsi donc, il avait eu raison. Elle fréquentait vraiment Malefoy. Elle leur avait caché ça pendant... Pendant combien de temps ? Avec quelles excuses qu'ils avaient crus les yeux fermés, en bons et fidèles amis ?

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Harry était tellement en colère qu'il imagina un instant que, si Voldemort possédait la même cicatrice que lui, il serait en train d'hurler de rage en se roulant sur le sol, les mains plaquées sur son front.

Le jeune homme décida de repartir dans la salle commune pour couper court à toute cette mascarade et fit quelques pas en direction de la grosse dame qui les regardait d'un air intéressé.

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« Harry ! Harry, non je t'en prie, ne pars pas ! Sanglota Hermione lorsqu'elle vit qu'il rebroussait chemin. Elle sentit ses jambes se dérober sous elle à cause de l'épuisement et s'effondra par terre.

-Pourquoi, Hermione ? Tu n'as pas envie de retrouver Malefoy ? Vous avez peut-être envie de discuter de la manière dont il doit vider tes amis de leur sang, non ? » Lui déclara-t-il sèchement, sans même se retourner.

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Il savait que s'il croisait son regard, il serait incapable de lui en vouloir plus longtemps, tant la fatigue et l'arasement le terrassait. Et il ne pouvait pas... Il ne voulait pas pardonner tout de suite à Hermione. Pas après tout ça. Ce mensonge. C'était la trahison qui avait tué ses parents. Celle de ce rat de Pettigrow. Il ne supportait pas... Il ne supportait plus le mensonge.

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« Harry, je te jure, par Merlin, que si j'avais su ce qui allait arriver dans cette école, si j'avais seulement imaginé ce qui pouvait arriver à Ginny, je te l'aurais dit ! Elle est mon amie, comme vous l'êtes tous les deux ! Et tous ces gens qui sont attaqués... Ce sont des nés-moldus, comme moi. Tu crois que je veux courir à ma propre perte ? Je ne vous ais pas trahi, je n'ai rien dit sur vous, RIEN ! Je n'aurais jamais fait de mal à Ginny, je n'aurais laissé personne faire ça ! » Glapit Hermione, toujours à genoux par terre.

Harry serra son poing dans sa poche, tremblant de rage. Quoi qu'elle dise, il ne supportait pas qu'elle ne lui ait rien dit. Pourquoi avait-il fallut qu'elle leur mente ? Il ne répondit rien et sentit des larmes de rage lui monter aux yeux.

Son amie. Ginny. Hermione. La trahison.

« Babillages » Dit-il au tableau devant lequel il se trouvait, avant de s'engouffrer dans le trou qui s'ouvrait derrière le portrait de la grosse dame.

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Hermione se laissa complètement tomber à terre, secouée par d'incontrôlables sanglots. Elle voulait juste arranger les choses en parlant à Drago, juste que tout aille mieux, elle n'avait voulu faire de mal à personne. Et puis, au fil du temps, elle avait appris à l'apprécier. C'est tout.

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Elle sentit quelque chose de doux lui toucher le dos. Relevant la tête, elle s'aperçut que Ron était à coté d'elle. Son visage montrait à quel point il semblait souffrir, mais il ne prononça pas un mot et se contenta de caresser doucement le corps tremblant de son amie jusqu'à ce que ses pleurs se calment un peu. Il resta bien un quart d'heure à coté d'elle, lui apportant son soutien muet, puis il se redressa vivement.

Hermione lui jeta aussitôt un regard suppliant. Elle ne voulait pas qu'il parte, qu'il l'abandonne lui aussi.

« Ron... Commença-t-elle, plongeant ses yeux rougis dans les siens, cherchant les mots qui pourraient le retenir.

-Ecoute Hermione, coupa-t-il. Harry et moi... Tout comme toi, on a été très secoués par ce qui est arrivé à Ginny. Je ... Je pense qu'Harry a besoin de temps pour se remettre de ce qu'il vient d'apprendre. Ca fait trop d'un coup pour lui. Il a besoin de rester un peu à l'écart de toi pour se calmer et faire le vide. Et... Je pense que moi aussi.

-Ron... Non, s'il te plait... Plaida Hermione en tentant de se relever, s'appuyant sur ses jambes encore tremblantes.

-Hermione, Je ne t'en veux pas. Enfin, je ne crois pas. Je te fais confiance. Mais je... J'ai besoin de temps. »

Il marqua un temps de pause, troublé seulement par les sanglots déchirants d'Hermione qui avait renoncé à se redresser. Enfin, Ron lui souffla :

« En attendant... Demande à Malefoy de prendre soin de toi, et dis lui que s'il ne le fait pas... Il saura ce que c'est qu'être un cafard. Au sens propre. Et dit lui aussi que... S'il a fait du mal à ma sœur, je le tuerais de mes propres mains. »

Ron eut un faible sourire qui se perdit rapidement parmi ses traits tirés et désabusés. Puis, à son tour, il tourna le dos à Hermione et franchit le portrait de la grosse dame.

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Poudlard, bibliothèque

Drago Malefoy attendait Hermione devant la bibliothèque. D'habitude, ils ne se retrouvaient jamais devant les portes de l'édifice mais se donnaient rendez-vous à l'intérieur. Cependant, le jeune homme avait la fâcheuse impression d'être épié depuis sa conversation avec son père et il souhaitait lui proposer de changer d'endroit.

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Elle tardait à venir et il étouffa un soupir d'agacement, jetant un coup d'œil à sa montre sorcière cerclée d'or. Les aiguilles étoilées tiquèrent paresseusement, dépassant cinq heures et demie d'une bonne dizaine de minutes. Elle n'était jamais en retard. Pourquoi n'était-elle pas encore là ?

Il sentit une colère douce et silencieuse l'envahir tandis qu'il regardait le couloir comme s'il allait le transpercer du regard. Elle osait le faire attendre, lui, Drago Malefoy ? Et... De plus... Elle ne pouvait pas avoir changé d'avis, pas vrai ? L'arrivée de son père ne pouvait pas lui avoir fait peur... Elle était plus courageuse que ça.

N'est-ce pas ?

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Le cœur de Drago se mit à battre plus fort et sa colère redoubla d'intensité. Il avait peur. Peur qu'elle ait retourné sa veste, qu'elle ne veuille plus être son amie, qu'elle n'ait pas compris qu'il voulait simplement qu'elle ne soit pas blessée...

Quoi que le fait qu'elle ait pu le comprendre ne l'enchantait guère plus.

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Bref, Hermione Granger agaçait Drago Malefoy sans même être là, comme d'habitude.

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Les pensées tourbillonnantes de Drago cessèrent instantanément lorsque la jeune fille fit son apparition. Drago s'apprêta à lui faire une remarque cinglante sur son retard, mais n'en fit rien lorsqu'il découvrit son visage.

Elle était vraiment dans un piteux état et faisait peine à voir : elle avait les joues rouges et les yeux gonflés, injectés de sang, comme si elle venait de pleurer pendant des heures. Ses cheveux étaient plus ébouriffés que jamais et il nota que l'un de ses genoux était écorché. Il remarqua également qu'elle semblait agitée de frissons incontrôlables et ne marchait pas droit.

Drago poussa un soupir d'exaspération devant un tel tableau et saisit Hermione par le bras après avoir vérifié qu'il n'y avait personne dans le couloir pour les observer. Il ouvrit la porte de la salle de classe la plus proche et l'y poussa.

Lorsqu'il referma le lourd battant de bois, la lueur des vitraux éclaira un instant le visage d'Hermione avec plus de netteté et il fut certain qu'elle avait pleuré.

Ses yeux étaient encore brillants de larmes et elle n'arrêtait pas de renifler.

Elle essaya de soutenir le regard du Serpentard mais finit par le poser sur ses chaussures, l'air hagard. Drago sentit l'irritation l'envahir en quelques minutes à peine. Pourquoi fallait-il qu'elle soit si douce quand elle était vulnérable ? Il essaya de penser à autre chose qu'à la manière dont il pourrait la consoler et attaqua dans le vif du sujet, persuadé de taper juste :

« Ils savent, n'est ce pas ? »

Hermione sursauta en entendant la voix de Drago. Elle rougit encore plus, si cela était possible, et tordit à nouveau ses doigts dans tous les sens. Il remarqua qu'elle s'était rongé précautionneusement les ongles jusqu'au sang.

« O... Oui. Ha... Harry t'as entendu parler avec ton père à mon sujet et il a fait le lien... Sans doute avec... Mon emploi du temps. Il n'en m'en a pas trop dit... Mais... Je sais qu'il a compris. Du coup... Ron est au courant aussi.

-Et ? Ils ont réagit comment ? interrogea Drago qui connaissait déjà la réponse.

-Il... Semblerait qu'ils aient besoin de temps pour y réfléchir. Surtout Harry. Il... N'était pas très content. Je pense que... Qu'il ne va pas me reparler tout de suite. Souffla doucement Hermione.

-Crétin de balafré ! Lâcha instantanément Drago en contractant sa mâchoire.

-Quoi ? N'insulte pas mon...

-Oui, ton ami, je sais. Coupa le Serpentard. Enfin... Ce qu'il reste de votre amitié. »

A ces mots, les yeux d'Hermione semblèrent se remplir de larmes une nouvelle fois.

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Drago sentit qu'il avait été un peu trop loin.

Son ventre se contracta lorsqu'il se rendit compte qu'il ressentait de la culpabilité. Il haïssait ce sentiment, qui, une fois de plus, ne pouvait être provoqué que par elle. Il fit de son mieux pour le repousser au plus profond de ses pensées et l'oublier. Il ne réussit pas totalement cela mais décida de se concentrer avant tout sur Hermione. Elle était épuisée par la maladie et par l'atmosphère morbide qui régnait dans l'école.

Elle avait besoin de soutien, bien sûr... Mais il ne savait pas comment s'y prendre. Il n'avait jamais trop fait ce genre de choses. La dernière fois qu'il l'avait consolée quand elle pleurait, il l'avait insultée... Et avait plutôt bien fonctionné. Mais bizarrement, il sut que, pour cette fois, ça ne fonctionnerai pas.

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Il s'approcha, hésitant. La chaleur du corps de la jeune fille se diffusa rapidement autour de lui l'enserrant presque à l'étouffer. Son parfum fruité lui vint au nez comme une tentation indécente. Ses yeux se tintèrent d'une lueur mauvaise.

Elle ne le laissait jamais en paix.

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Hermione plongea son regard dans le sien, ignorant l'air glacial qu'il prenait. Elle commençait à comprendre qu'il ne s'agissait que d'une façade.

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Il sentit son cœur battre plus fort tandis qu'il observait son visage dans les moindres détails. Le grain de beauté sous son œil gauche, la cicatrice fine et blanche sur sa mâchoire, ses longs cils qui attrapaient toutes les larmes de ses yeux... Ses yeux.

Il contracta son poing dans sa poche. Elle se mordit les lèvres et passa sa langue dessus sans s'en apercevoir. Il détestait quand elle faisait ça. Il la détestait. Ça le brulait tellement fort après qu'il pensait toujours, à ce moment là, qu'elle ne pouvait pas ignorer l'effet qu'elle lui faisait.

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« Je suis désolé, Granger. Souffla-t-il, sincère, ignorant le battement saccadé qui agitait obstinément sa poitrine. Il détourna momentanément le visage, incapable de soutenir son regard une seconde de plus.

-C'est pas grave... Renifla Hermione. Je... De toute façon, vous vous êtes toujours détestés.

-Mais toi je... Je ne te déteste pas. Je ne voulais pas te... Faire de peine » Dit Drago tout bas.

Il se rendit compte de ce qu'il avait dit seulement une fois les mots prononcés et il eut tellement mal au ventre qu'il crut un instant qu'il allait se pencher en avant et se tordre en deux à cause de l'intensité de la douleur.

Elle ne devait pas savoir.

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Hermione sursauta à l'entente de ces paroles et cligna des yeux plusieurs fois d'un air surpris.

« Ah... Moi je ne te déteste plus. »Dit-elle avec sérieux, essuyant une larme qui coulait le long de sa joue.

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Plus ? Elle l'avait donc vraiment haï ?

Drago eut un petit rire. Décidément, elle ne changerait jamais. Même lorsqu'elle était triste et qu'elle pleurait pendant des heures, elle restait tellement sincère que ça en était frustrant.

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«Drago... Tu es celui qui a attaqué Ginny ? Demanda doucement Hermione.

-Non, Granger.

-Comment être sure que je peux te faire confiance ?

-Tu ne pourras jamais en être certaine, Granger. Mais crois-moi, si j'avais voulu faire du mal à un né-moldu, je me serais attaqué à toi en premier. Répondit Drago avec un sourire narquois.

-C'est vrai. Estima la jeune fille avec sérieux. Tu sais je... J'aimerais bien continuer à te voir si ça ne te dérange pas. Parce que... On ne fait rien de mal pas vrai ?

-Je ne crois pas qu'on fasse quelque chose de mal. Quelque chose d'interdit, de réprouvé, oui. Mais mal, j'en suis de moins en moins persuadé.

-Drago ?

-Granger.

-Merci. Dit-elle d'une petite voix.

-Ne dis pas ça, je vais avoir l'impression d'avoir fait quelque chose pour toi. Répondit-il, imperturbable.

-Pfff. Souffla Hermione en levant les yeux au ciel.

-Aller, viens t'asseoir ici. » Lui dit-il en désignant une table, sans se départir de son sourire.

Hermione s'installa dessus maladroitement, se prenant les jambes dans les plis de sa jupe, puis renifla bruyamment. Drago se moqua d'elle tout en s'asseyant à sa gauche. Elle le poussa légèrement sur le coté. Il ne lui fit aucune remarque sur ce qu'elle venait de faire, feignant d'ignorer son acte.

Elle sourit.

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Poudlard, salle commune des Serpentard

Pansy passa par le lourd tableau pour rejoindre la salle commune, et, comme prévu, trouva Drago confortablement installé dans un siège. Elle regarda, indécise, les lumières vertes et bleutées danser sur ses cheveux blonds, les éclairant d'une douce lueur. Elle fit quelque pas dans la salle commune, étouffés par l'épais tapis qui recouvrait le sol.

Drago ne leva pas la tête quand Pansy s'installa à coté de lui, exactement comme lui-même l'avait fait quelques jours plus tôt. Pourtant, à son tour, il sut que c'était elle.

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Pansy laissa tomber son corps fatigué et tendu avec soulagement. Elle avait tellement pleuré qu'elle sentait des courbatures parcourir son dos dans tous les sens. Ses yeux étaient rouge écarlate à force d'avoir lu encore et encore les pages des grimoires sur lesquels elle était tombée et d'avoir versé des larmes pour son amie.

Pansy fit tourner son poignet sur lui-même, sentant une vive douleur irradier à l'intérieur tandis qu'il craquait d'un bruit sinistre. Madame Pomfresh lui avait expliqué qu'elle s'était fait cela en s'évanouissant et qu'il lui faudrait quelques jours pour que la douleur s'estompe.

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« Je suis désolé pour Millicent. »

Pansy frémit un instant, étonnée par le fait que Drago fasse preuve d'autant de sollicitude. Ce n'était pas dans son habitude. Il s'était si souvent moqué d'elle, railleur, qu'elle avait perdu ne serait-ce que l'envie de l'entendre prononcer ce genre de mots.

Les rouages de sa tête se mirent en mouvement, échafaudant une nouvelle fois des plans et mettant en place des stratagèmes. Cela ne servait à rien, elle le savait. Il n'y avait qu'une seule solution.

Finalement, Pansy inspira, puis elle se pencha sur le Serpentard et lui glissa à l'oreille :

« J'ai besoin de ton aide. »

Il tourna immédiatement le regard vers elle, cette fois-ci. Glacial, il semblait se demander ce qu'il lui prenait. Elle ne lui demandait jamais rien même pas un service... Alors lui demander son aide... Elle soutint les prunelles acier qui la transpercèrent et retint son souffle. Même lorsqu'il était en colère, il était beau.

« Qu'est ce que tu veux, Parkinson ? » Grinça-t-il.

Elle hésita. C'était le moment ou jamais. Elle n'avait sans doute pas d'autre alternative. Elle y avait réfléchit pourtant... Elle était presque certaine maintenant qu'il était sa seule et unique chance. Elle inspira, puis murmura prestement :

« Quelqu'un m'a effacé la mémoire. Je ne sais pas qui, ni pourquoi... Mais je pense qu'il faut que je la retrouve. Sinon, on ne m'aurait pas enlevé mes souvenirs. »

Drago la fixa sans rien dire. Pansy frissonna. Qu'allait-il décider ? Allait-il enfin faire quelque chose pour elle ?

Il tourna la tête vers le mur au bout de quelques minutes, comme si elle n'avait jamais prononcé un mot. Elle devina qu'il n'avait absolument aucune envie de lui apporter son aide.

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« Tu n'aimerais pas savoir, toi ? Imagine, si tu avais un trou dans la tête...T'aimerais pas savoir pourquoi il est là ? » Lui demanda-t-elle malgré tout, avec une pointe d'agacement dans la voix.

Elle n'avait plus rien à perdre. Elle avait perdu le seul allié qu'elle avait ici. Millicent... Désormais, la seule chose qui réussissait à l'animer était un mot, un seul. Vengeance.

Il ne bougea pas, mais elle perçut un léger frémissement au coin de sa bouche, comme s'il souriait. Se moquait-il d'elle ? Elle l'ignorait.

Elle se leva du bord du fauteuil, impuissante. Elle lui jeta un dernier regard et l'entendit alors dire, à sa grande surprise :

« D'accord. »

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