Faire ses adieux
Poudlard, couloirs
Il était tout à fait regrettable pour Seamus Finnigan qu'il n'ait pas réfléchit à l'éventualité qu'Hermione Granger explique tout ce qu'il lui faisait subir à Drago Malefoy. Il estimait qu'elle aurait trop peur de sa réaction qui pourrait alerter Harry et Ron au premier coup d'œil.
Oui, cette idée préconçue était fortement dommageable à Seamus. Ça l'était parce qu'il ne se doutait pas à quel point Drago Malefoy pouvait être mauvais quand on le contrariait. Il fut donc relativement surpris lorsqu'une poigne de fer l'attrapa au détour d'un couloir. Il se sentit projeté par une force surprenante sans avoir pu identifier ce qui venait de le pousser. Son dos heurta le mur avec un craquement sonore et il glissa doucement le long de la pierre glacée. Sa tête se mit à tourner douloureusement tandis qu'il se frottait l'arrière du crâne. Il sentait qu'une bosse était en train d'apparaître et ça lui déplaisait fortement. Il allait avoir un bleu. Il grogna de douleur et chercha du regard celui ou celle qui venait de l'agresser. Lorsqu'il rencontra les iris orageux, il sut qu'il était en mauvaise posture.
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C'est là qu'il se rendit compte qu'il aurait du prendre en considération l'honnêteté d'Hermione et le caractère enflammé de Drago. Mais il était trop tard. Bien trop tard.
Les yeux acier le fixaient d'un air particulièrement mauvais et il se doutait qu'il allait bientôt recevoir la sentence que Drago Malefoy désirait lui faire subir. Il sentait que ça allait être douloureux. Très douloureux.
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« Drago, arrête, calme toi ! »
La voix suppliante d'Hermione parvint faiblement à Seamus au travers des battements irréguliers de son cœur. Il ne la voyait pas et se doutait que Drago la maintenait à l'écart afin de pouvoir mettre en œuvre ses sombres desseins. Seamus eu peur et se mit à trembler. La douleur dans son dos et derrière sa tête s'accentuèrent tandis que son corps continuait de cogner contre la pierre du mur.
Drago se baissa à la hauteur de Seamus et l'attrapa par le col de sa robe de sorcier pour le soulever et le mettre à son niveau, sans le lâcher du regard. Incapable de bouger, le Gryffondor se laissa faire, les bras ballants. Les yeux de Drago le transperçaient comme s'ils allaient le détruire par leur intensité.
« Qu'est ce que tu fous avec Granger, Finnigan ? Il paraît que tu lui interdis de me voir plus souvent ? C'est pas vrai dis-moi ?» Siffla-t-il d'un air menaçant.
Ne voulant pas perdre la face mais également l'une de ses précieuses dents, Seamus décida qu'il serait plus sage de nier la vérité et de faire l'innocent. Si Drago apprenait qu'il était réellement en train de faire chanter Hermione, il risquait un sortilège d' « Épilus » intégral dont il se souviendrait sans doute longtemps.
« N...Non pas du tout. Je lui plais tout simplement... Et... Elle a envie de passer un peu moins de temps avec toi pour en passer plus avec moi. » Il fit un sourire qui se voulait victorieux à Drago et attendit qu'il le relâche d'un air penaud. Il comprendrait que sa relation avec Hermione était sans issue et le laisserait tranquille.
Mauvaise réponse.
Le poing de Drago partit rapidement et entra en contact avec la mâchoire du Gryffondor avec un craquement plutôt sonore. Une douleur sourde parcouru le visage de Seamus, par vagues. Des petits points brillants apparurent devant ses yeux, auréolant Drago d'une sainte lumière qui était loin de lui appartenir.
« Drago, je t'ai demandé d'arrêter ! Ça suffit, enfin ! »
La voix d'Hermione parvint encore plus faiblement aux oreilles de Seamus tandis qu'il sentait le goût du sang dans sa bouche. Il eu vaguement l'impression de sentir quelque chose de tiède couler le long de son menton, bien qu'il n'en fut par certain. Ses sensations s'étaient considérablement amenuisées et il était à présent dans une sorte d'état comateux douloureux et inconfortable. Le monde autour de lui semblait plongé dans un bourdonnement incessant.
« Tu en veux encore ? » Demanda Drago d'un ton narquois, agitant son poing aux jointures blanches sous le nez du Gryffondor. Seamus n'osa pas répondre, ne sachant comment agir face à un homme qui, visiblement, voulait défendre ce qui lui tenait à cœur. De toute façon, il ne pouvait pas articuler un mot à cause de sa mâchoire qui lui envoyait des signaux d'alerte plutôt convaincants.
Il aurait du y penser.
« Tu réponds pas ? C'est pas poli ça ! Je t'en remets une alors... Ça t'apprendra un peu les bonnes manières et ça te débouchera peut-être les oreilles.» Seamus comprit que l'avenir de son visage parfait était compromis et ferma les yeux, s'apprêtant à recevoir le coup qui ferait cogner sa tête dans le mur et demanderait des mois de réparation esthétique.
Cependant, avant que Drago ait pu faire quelque chose, une masse de cheveux bouclée et ébouriffée entra dans le champ de vision du Serpentard. Il arrêta son geste juste à temps, suspendant son poing dans les airs.
Hermione pointait sa baguette sur lui d'un air renfrogné. Elle tapait du pied d'un air agacé.
« Drago, il ne vaut pas la peine que tu t'énerves, alors lâche le. Quelqu'un pourrait te voir. On te posera des questions après, et il aura eu ce qu'il voulait au départ. »
Le Serpentard sembla hésiter un instant, frustré qu'elle pointe sa baguette magique sur lui. Hermione ne décolérait pas et son regard était plongé dans le sien. Elle restait impassible. Ce combat visuel avait une issue que l'on pouvait d'ores et déjà deviner. Enfin, Drago lâcha le col de Seamus qui tomba à genoux, hébété.
Le sol n'arrêtait pas de bouger et le Gryffondor vit des gouttes de sang tomber devant lui, entre ses mains, et former une flaque rouge et visqueuse. Il entendit la voix de Drago. Elle lui parvenait, tout comme celle d'Hermione, au travers d'un épais brouillard qui l'emprisonnait. Immobile, il les écouta sans vraiment le vouloir.
« Je te jure Finnigan, que si tu t'avises de parler de ça à Potter ou Weasley, ou que s'il te reprend l'envie de forcer Granger à faire quelque chose qu'elle n'a pas envie de faire, tu le regretteras amèrement. Ce que tu as eu là, ce n'est qu'un avant gout de ce que je peux te faire. »
Seamus ne se releva pas et ne répondit pas non plus. Il resta à genoux dans le couloir, son sang gouttant silencieusement. Lorsque les pas d'Hermione et de Drago se furent engouffrés dans le silence, il réprima un sanglot. Bien sûr qu'il allait se taire. Jamais il ne dirait à quiconque que Drago Malefoy était fou amoureux d'Hermione Granger.
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Poudlard, parc de l'école
Hermione sentit le vent s'engouffrer sous sa robe en peau de taupe et frissonna violemment. Un tremblement agita sa main lorsqu'elle remit en place une mèche de cheveux qui lui barrait la vue.
A cause de la quarantaine, le corps de Lavande Brown allait être enterré à Poudlard pour un temps indéterminé. Peut-être qu'ensuite, quand tout serait fini, ses parents déplaceraient le cercueil.
Tous les élèves qui avaient prévu d'assister à la cérémonie se tenaient dehors, debout dans le froid de Décembre qui faisait voltiger les capes et s'envoler les écharpes. La plupart se serraient les uns contre les autres dans l'espoir de trouver un peu de réconfort et de chaleur, perdus devant une telle situation.
Pour la cérémonie, une bulle magique entourait les élèves, évitant la propagation du virus à l'extérieur de l'enceinte de l'école. Les professeurs Rogue et Mc Gonagall étaient chargés de maintenir l'espace fermé à l'aide de diverses incantations. Hermione les avait aperçu qui psalmodiaient avec difficultés. Apparemment, le sortilège était très puissant et ne durerait pas éternellement.
A la pensée des parents de Lavande qui pourraient venir exhumer le corps de leur fille, Hermione frémit de dégout. L'envie de vomir qui lui tiraillait l'estomac depuis le début de la journée se fit plus prononcée encore et elle posa une main blanche et crispée sur son ventre tendu.
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Elle avait du mal à croire que Lavande était morte. Elle n'avait jamais rien eu contre elle et ne la connaissait pas beaucoup. C'était une fille sans prétention, calme, accro aux ragots. Une fille sensible et gentille. C'était une fille comme n'importe qui d'autre, une fille banale qui n'avait rien fait pour mériter son sort. Elle n'avait rien demandé à personne. Elle ne faisait la guerre ni aux uns ni aux autres. Si on lui avait demandé de choisir un camp, elle aurait surement choisit le camp des « gentils ». Elle aimait les petits lapins et les fleurs. Elle aimait les garçons qui faisaient du Quidditch. Elle aurait sans doute voulu vivre dans un monde stable et normal, puisqu'elle voulait se marier et avoir des enfants. Elle ne saurait jamais ce qu'allait advenir le monde à l'issue de cette foutue guerre. Elle ne fêterait même pas la nouvelle année et elle n'avait pas non plus déballé ses cadeaux de noël.
Injuste.
C'était le mot qui était presque fiché sur les lèvres d'Hermione. Elle avait envie de le hurler et devait se retenir à grand peine pour ne pas crier. Elle éternua et resserra la prise de son écharpe autour de son cou glacé. Elle se doutait qu'elle n'était pas la seule à penser que la mort de Lavande était imméritée. Pourquoi ?
Pourquoi cette maladie, pourquoi eux ? Pourquoi elle ?
« Une élève appréciée par beaucoup, qui avait de nombreux amis dans cette école et qui sera regrettée... »
Elle soupira doucement dans la fraîcheur de l'après-midi. Le soleil éclaira faiblement Dumbledore qui prononçait un discours qu'elle ne voulait pas entendre. Ses lèvres bougeaient, sa barbe frémissait, mais Hermione restait sourde à ses mots. Ils n'avaient pas de sens pour elle. Ils étaient vides et creux. Elle n'en avait pas besoin. Elle était là pour dire pardon à Lavande. Pour s'excuser d'être née comme elle était et d'avoir peut-être transporté le virus mortel jusqu'aux poumons de la jeune fille. Elle était là pour cette camarade de classe qui était morte et pour personne d'autre... Surement pas pour écouter le discours d'un directeur d'école qui perdait de sa superbe à mesure que son monde s'écroulait.
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Harry et Ginny se tenaient à ses cotés. Leurs doigts étaient entremêlés. Ginny avait l'air très attristée bien qu'aucune larme ne coula sur sa joue de toute la cérémonie. Elle connaissait sans doute un peu mieux Lavande qu'Hermione.
Parvati Patil, elle, pleurait silencieusement dans les bras d'une élève de Serdaigle aux cheveux courts et châtains clairs. Ses épaules étaient agitées de tremblements incontrôlables. De temps à autres, un léger sanglot s'échappait de sa gorge et déchirait l'air calme et brumeux de l'extérieur. Un instant, Parvati tourna la tête vers Hermione et cette dernière cru y lire du ressentiment.
Etait-elle en colère ? la pensait-elle coupable ? Lui en voulait-elle d'être malade et de ne pas être à la place de son amie dans le cercueil de bois poli ?
Hermione n'aurait su le dire. Elle n'avait jamais été tellement douée pour comprendre ce que les gens ressentaient exactement. Lorsqu'elle se sentait coupable de quelque chose, elle avait l'impression que chaque personne qui croisait son regard lui en voulait au moins autant qu'elle se considérait responsable.
Elle avait envie de pleurer. Ses yeux étaient humides. Elle se sentait terriblement mal, coupable, même si elle ne savait pas trop pourquoi. La guerre allait-elle tout détruire sur son passage jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien ? Jusqu'à ce qu'il n'y ait plus qu'Harry et Voldemort pour s'affronter ? Mais pourquoi s'affronter s'il n'y a plus rien pour lequel se battre ? Si le monde dans lequel vous vivez et les personnes que vous côtoyez ne sont plus là ?
Hermione secoua la tête pour chasser ces idées indignes d'une Gryffondor. Comment pouvait-elle être aussi défaitiste ? Au contraire, elle devait se battre, lutter, braver l'horreur pour en sortir grandie et pour enfin faire disparaître ce monde ténébreux dans lequel elle vivait. Dans lequel ils vivaient tous. Elle devait rester forte pour aider Harry, pour combattre Voldemort. Pour rester elle, envers et contre tout.
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Les choses devaient changer et elle le savait. Il fallait commencer par le début. Hermione ne cessait de réfléchir à sa vie, à ses choix, à ce qui lui importait réellement. C'est étrange de voir à quel point un événement aussi dramatique et injuste que la mort est porteur de vérité et de bon sens. Hermione se rendit compte qu'elle vivait dans un bulle complexe de laquelle rien ne s'échappait. Elle avait l'impression de ne rien maîtriser. Sa maladie. La mort. La guerre. Voldemort.
Pourtant, lorsqu'elle fit l'inventaire de ce qui lui importait plus que tout, elle se rendit compte qu'il s'agissait de choses qu'elle ne pouvait que contrôler. L'amitié. La connaissance. La famille.
L'amitié.
Hermione sentit son sang battre contre ses tempes et tangua un instant. La main d'Harry l'attrapa fermement avant qu'elle ne glisse à terre.
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Bien sûr. Elle était en train de laisser s'échapper une personne qui était importante pour elle. Un ami précieux. Elle le laissait partir pour un malentendu. A cause d'une maladie sans doute provoquée par une ordure de mage noir. Voldemort allait gagner si elle se laissait faire. Il aurait tout détruit autour de lui et autour d'eux. Il aurait dévasté un univers rassurant et coloré dans lequel tous trouvaient une paix intérieure, une joie sans fin. Et aujourd'hui, tout cela était en train de disparaître à cause d'un homme qui voulait dominer le monde.
« Peut-être dominera-t-il le monde, Songea Hermione. Mais il ne me dominera pas, moi. »
Elle tourna la tête un peu trop vite, cherchant Ron du regard parmi la foule massée autour du cercueil de Lavande. Elle l'aperçu, prostré dans un coin. Elle tenta de détailler ses traits et son expression. Ce n'est qu'au bout de quelques secondes qu'elle réussit à apercevoir la souffrance sur son visage, même de là ou elle était située. Son cœur se serra avec force. Elle n'aimait pas le voir comme ça. Ses poings étaient serrés. Son visage était blafard. Ses cheveux roux volaient impunément dans le vent. Ronald Weasley était en train de disparaître.
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Elle pressa le bras d'Harry. Lorsque ce dernier tourna sa tête vers elle d'un air interrogateur, elle désigna Ron du regard. Harry acquiesça. Il se pencha vers Hermione et lui murmura faiblement « Soit plus intelligente que lui... »
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Le discours de Dumbledore était terminé depuis quelques minutes et Hermione glissait sur le verglas jusqu'au rouquin. Elle faillit tomber un certain nombre de fois et fit de son mieux pour garder le semblant d'équilibre un rien précaire qu'il lui restait. Elle se dépêcha, craignant qu'il ne prenne l'initiative de rentrer dans le château.
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La jeune fille avait tourné la tête au moment ou l'incantation magique avait délicatement fait descendre le cercueil de la jeune Gryffondor au fond du trou de terre. Elle avait fait de son mieux pour se battre, encore une fois, et avait finalement reporté son regard sur l'objet, vide de sens et pourtant si représentatif du désespoir, qui disparaissait de la vue de tous. Le creux dans son estomac s'était creusé et elle avait espéré de tout son cœur que plus personne ne meure de cette horrible maladie.
Si seulement elle avait su.
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Lorsqu'elle arriva à coté de Ron, elle le vit se raidir ostensiblement. Il n'avait pas tourné la tête vers elle, mais elle se douta qu'il l'avait vue bien avant qu'elle soit aussi proche de lui. Elle pouvait presque tendre la main et caresser ses cheveux qui donnaient du fil à retordre au vent.
L'hésitation avait toujours fait partie de son caractère mais ne durait jamais longtemps. Lorsqu'elle parla, sa voix se fit rauque d'avoir été longtemps inutilisée.
« Ron... J'ai mes gants en peau de taupe. Et là, dans dix secondes, je vais glisser ma main dans la tienne. »
Hermione resta immobile quelques instants, redoutant la réaction qu'il pourrait avoir. Voyant que le rouquin n'esquissait pas un geste et ne disait rien, elle s'approcha davantage et prit la main de son ami.
Elle n'était pas habituée à tenir la main de Ron sans sentir sa peau et cela lui procura une sensation étrange. La séparation que leur imposaient les gants en peau de taupe lui rappela à quel point cette maladie dirigeait sa vie. Elle voulait à tout prix contrôler certaines choses et faire de son mieux pour réparer ce qui avait été cassé, au risque de se faire mal, à elle aussi.
Mais comme qui dirait, qui ne tente rien n'a rien.
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Hermione sentait que Ron avait besoin de son soutien et en fut d'autant plus convaincue quand il leva son visage vers elle. Il se retenait de pleurer et ses yeux étaient très rouges. Elle lu dans son regard un certain désespoir et une honte qu'il ne dissimulait plus. Les mots que sa bouche forma furent plus équivoques encore.
« Hermione... Je suis désolé. »
Le cœur d'Hermione se mit à battre plus fort. L'émotion l'envahit tandis que ses doigts se resserraient imperceptiblement autour de ceux de Ron, rendant leur poigne pour forte. C'était un moyen d'être encore plus là, encore plus proche. Même si elle ne voulait pas se l'avouer, Ron l'avait beaucoup blessée dans son orgueil et ses excuses lui faisaient le plus grand bien. Cependant, le visage et la peine qu'il affichait lui firent rapidement comprendre qu'elle n'avait pas été la seule à être heurtée. Elle eu envie de sourire, mais les coins de sa bouche restèrent figés. Elle se contenta de répondre :
« Je sais Ron. Moi aussi je le suis. Je crois qu'on a besoin de parler. »
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Poudlard, salle commune des Gryffondor
Installés confortablement dans un canapé, Hermione et Ron se dévisageaient sans rien dire. Leurs joues étaient encore rougies par le vent et le froid de l'extérieur. Hermione tremblait légèrement et luttait contre de nombreuses courbatures qui rendaient son dos douloureux. Un paquet de dragées surprises de Bertie Crochue était posé entre eux, mais aucun n'avait osé plonger sa main dedans, de peur qu'un mauvais choix du type crotte de nez leur rendre cette journée encore plus maussade.
Hermione ressentait une envie forte de se ronger les ongles et devait faire de son mieux pour ne pas porter sa main à sa bouche. Elle s'était assise dessus, dans l'espoir fou que cela lui ôte la sensation que ronger allait la soulager de tous ses maux. Puis, brusquement, sans signes avant coureur, elle décida que tout cela suffisait et qu'elle devait faire bouger les choses une bonne fois pour toute. Elle prit la parole d'une voix forte, essayant d'avoir l'air dégagé.
« J'ai toujours cru que tu avais un faible pour moi. Mais en fait, c'est de Lavande que tu étais amoureux, n'est ce pas ? »
Ron la regarda un instant sans rien dire, puis ses oreilles prirent une teinte rouge assez soutenue qui contrasta avec le paquet de dragées, rose.
« Euh... Je... Je l'appréciais vraiment, elle était très gentille avec moi, on discutait de beaucoup de choses ensemble. C'était... Bien sûr on n'était pas aussi amis que toi et moi... Mais justement, c'était différent, une autre sorte d'amitié... Enfin, oui. Ça aurait pu être plus, tu as raison. »
Hermione esquissa un sourire maladroit, espérant que Ron allait continuer sur sa lancée. Elle lui fit un petit signe de la main afin de l'encourager à continuer. Elle toussa bruyamment, s'arrachant la gorge, tandis qu'il reprenait la parole et le fil de ses pensées.
« En fait... Je... Je t'en ai voulu quand elle est tombée malade, mais c'est à moi que j'en veux. Je n'arrivais pas à mettre de mots sur ce que je ressentais et finalement... Je n'ai jamais pu lui dire que je l'aimais. J'ai déversé toute ma colère sur toi. Je n'avais que toi. Je n'arrivais plus à gérer le sentiment d'oppression qui me faisait mal. Quant- à la fois ou je t'ai repoussée quand tu as essayé de m'embrasser... C'était de la peur, tout simplement, je n'ai pas réfléchi...
-Oh, à ce propos, je suis désolée, moi aussi. Je n'ai pas vraiment réfléchi non plus et j'ai fait la première chose qui m'est venue à l'esprit pour prouver à Malefoy que je pouvais être une femme normale. Alors je te demande pardon. C'était risqué de ma part, tu aurais pu tomber malade et je ne me le serais jamais pardonnée. Alors... Je pense que c'est une bonne chose que tu m'aie repoussée.
- Ouais, Malefoy... J'aimerais bien qu'il tombe malade celui là, qu'on en finisse une bonne fois pour toute. »
Le ventre d'Hermione fit une sorte de saut périlleux d'une hauteur impressionnante lorsqu'elle entendit ces mots. Bien qu'elle ne sut pas tellement pourquoi, elle était déçue de voir que Ron haïssait toujours autant le Serpentard. Elle avait appris à apprécier certaines choses de lui qu'elle ne soupçonnait pas et cela contractait étrangement son corps lorsqu'elle se rendait compte qu'elle était la seule à être de cet avis. Elle ne haïssait plus sa présence autant qu'avant et commençait peut-être même à l'accepter.
Elle se força à sourire, ce qui fendit son visage d'un rictus désagréable que Ron ne remarqua pas, trop occupé à cracher la dragée surprise de Bertie Crochue aux asperges dans laquelle il venait de croquer à belles dents. Hermione se força à poursuivre la conversation qui, pour l'instant, était fructueuse.
« Et... Pour Harry et Ginny ? »
Le visage de Ron s'empourpra et il marmonna quelques mots qu'Hermione ne saisit pas dans leur intégralité. Il lui sembla entendre quelque chose à propos de l'endroit ou Harry pouvait se fourrer sa notion de l'amitié. Lorsqu'il tenta de parler à haute et intelligible voix, l'émotion fit trembler son poing serré.
« Je... Je ne veux pas qu'Harry fasse du mal à ma sœur. Je sais qu'à cause de sa mission il pourrait mourir et je ne veux pas qu'elle soit triste. En plus, je... Je ne supporte pas de la voir se faire tripoter par un homme. »
Son visage se renfrogna davantage tandis que sa main retournait farfouiller dans le paquet de dragées surprise. Hermione retint un sourire qui menaçait de fleurir sur ses lèvres et se dépêcha de dire ce qu'elle pensait :
« Tu sais Ron, je pense que Ginny et Harry ont tous les deux parfaitement conscience du fait que leurs destinées ne les garderont peut-être pas réunis toute leur vie... Mais je persiste à croire qu'ils sont beaucoup trop amoureux pour rester loin l'un de l'autre trop longtemps. Et puis tu sais, si on garde cette façon de penser... Personne ne devrait s'attacher à personne, pour prévoir une mort qui peut surgir à tout moment. Quant-à l'intimité d'Harry et Ginny... Il me semble qu'ils sont assez grands pour gérer ça tous seuls. »
Elle fit un clin d'œil à Ron qui baissa la tête d'un air gêné. Hermione rougit et dit, d'une voix presque inaudible :
« Je suis désolée Ron. Je suis désolée pour Lavande. »
Ron leva les yeux et se plongea dans ceux d'Hermione. Il mâchonna la dragée surprise à la framboise qu'il avait dégotée dans le paquet et lui dit, très sérieusement :
« Je ne t'en veux pas Hermione. Je ne t'en ai jamais voulu. »
La jeune fille sentit un poids très lourd quitter ses épaules et des larmes de soulagement emplirent ses yeux fatigués.
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Poudlard, chambre de Lucius Malefoy
Pansy Parkinson toqua doucement à la porte de la chambre de Lucius Malefoy. Ce dernier vint lui ouvrir, l'air revêche. Il avait sa baguette magique dans la main et jetait des coups d'œil suspicieux derrière la jeune fille. Un tic nerveux agitait sa joue. Les enterrements ne réussissaient pas non plus aux mangemorts, semblait-il.
Elle se glissa dans l'embrasure de la porte tandis qu'il la refermait derrière elle. Le bruit sourd qu'elle produisit acheva de les plonger dans un silence plutôt pesant et désagréable. Elle hésita un instant puis s'approcha du père du Drago, souriant gauchement.
« Bonjour Lucius.
-Bonjour Pansy. Assieds-toi. »
La jeune fille chercha un siège du regard et, n'en voyant qu'un seul, finit par s'installer sur une chaise bancale. Cette dernière tangua légèrement quand la jeune fille s'y installa. Elle faillit tomber et se rattrapa de justesse au mur.
Lucius Malefoy ne lui prêta aucune attention, s'installant confortablement dans son fauteuil. Il eu, comme tous les soirs, un mouvement de baguette agacé en direction de l'âtre. La chaleur semblait avoir encore plus de mal à se diffuser aujourd'hui et il portait une écharpe aux couleurs de Serpentard serrée autour du cou.
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Pansy le dévisagea un instant. Elle lui avait toujours fait une confiance aveugle. Elle avait souvent vu et côtoyé cet homme, qui était l'une des connaissances de ses parents.
Pour avoir fait naître quelqu'un comme Drago, il devait forcément être quelqu'un de respectable, au fond.
Elle ne savait pas trop ce qu'il se passait dans l'école, et la simple idée d'y réfléchir lui procurait des frissons d'angoisse. Cependant, elle s'avoua qu'elle savait que Lucius y était plus ou moins pour quelque chose. Elle savait aussi qu'il était le seul à pouvoir sauver Drago de sa perdition.
Son regard se perdit dans le néant pendant quelques instants, tandis qu'elle se souvenait vaguement des quelques jours qu'elle avait passé au manoir Malefoy cet été. Drago, assis dans sa cuisine, remuant un café avec sa petite cuillère avant de le boire d'un trait, le visage stoïque. Drago, le soir, au coin du feu, silencieux et renfermé. Encore Drago, debout et digne devant le seigneur des ténèbres, essayant de ne pas ployer sous son regard mais finissant pas faire courir ses yeux sur ses pieds et sur le tapis à cause de la prestance du mage noir.
Un sourire nostalgique à peine visible éclaira ses traits austères durant quelques secondes.
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Lucius Malefoy avait été cordial avec elle pendant tout ce temps. Il lui avait même fait comprendre à demi-mot qu'elle aurait été parfaite pour Drago si un arrangement n'avait pas déjà été en cours avec une autre famille. C'est aussi cette confiance et cet intérêt que lui portaient Lucius qui l'avait décidée à aller lui parler.
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Elle ne savait pas et ne saurait jamais que, durant une guerre, il vaut mieux mettre le plus de personnes possibles de son coté. Même si cela signifie mentir et brosser dans le sens du poil des gens que l'on méprise. Pansy Parkinson disposait encore un peu d'une chose rare pour quelqu'un de son rang qui avait suivit une éducation telle que la sienne. La naïveté.
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Pansy coula un regard discret et empreint d'anxiété vers Lucius. Celui-ci la fixait, impassible. Cette façon de masquer ses sentiments lui rappela un peu trop Drago pendant quelques instants, et elle fit de son mieux pour garder contenance. Elle avala sa salive avec difficultés. Cet avec un certain apaisement qu'elle entendit Lucius Malefoy prendre la parole.
« Oui, Pansy ? Pour quelle raison souhaitais-tu me parler et m'as-tu demandé une entrevue ? Tu m'as dit qu'il s'agissait d'un sujet de la plus haute importance... Je t'écoute.
La jeune fille hésita un peu, puis s'éclaircit la gorge et s'exprima avec sérieux.
« Je... Je dois vous parler à propos de Drago. Il... Je l'ai vu fixer une fille pendant le bal de noël... Et je pense que... Qu'il lui porte peut-être un certain intérêt. »
Lucius se redressa dans son fauteuil et se pencha vers Pansy. Ses doigts se refermèrent un peu plus sur sa baguette et il fit un sourire crispé à la jeune fille, essayant de ne pas lui hurler au visage qu'elle lui faisait perdre un temps considérablement précieux. Son ton était douceâtre quoi que légèrement agacé.
« Et ? Je ne saisis pas trop en quoi c'est un problème. Je t'ai déjà dit que les fiançailles de Drago avec une jeune fille de sang pur étaient prévues et qu'il était déjà pris... Je ne vois pas en quoi le fait que mon fils regarde une femme soit gênant.
-Il s'agit d'Hermione Granger. »
Les traits de Lucius se tendirent. En quelques secondes seulement, des milliers d'images de son fils faisant ami-ami avec une dégoutante sang de bourbe firent apparition dans son esprit. Il l'imagina au ralenti, riant bêtement à une blague moldue, montant dans une vuture... Euh... Voiture, prônant la pureté des sang de bourbe à tort et à travers après avoir amplifié sa voix à l'aide d'un sort... Il l'imagina même tenant la main de cette femme qu'il aurait mise enceinte jusqu'aux yeux, souriant tel un ravegourde devant un arbre à patacitrouilles.
Toutes les conséquences de ces actes se matérialisèrent devant ses yeux. La plus grosse d'entre toute fut celle où il entrevit pendant un instant le Seigneur des Ténèbres lancer un sortilège à la lueur verte sur son seul et unique enfant. Cette vision le révulsa et acheva de le mettre dans un état de colère indescriptible. Il fallait absolument qu'il agisse avant que les choses ne prennent une proportion impossible.
Hermione Granger avait de nombreux défauts. En plus d'être l'amie de Potter, elle était l'infâme créature qui pouvait lui ôter son fils. Sa main trembla rageusement et il serra le poing. Son visage, lui, resta impassible autant que possible. Son ton de voix se fit plus mielleux encore.
« Tu ne l'as dit à personne, Pansy ?
-Non, Lucius.
-Pour le bien de Drago, je vais devoir effacer ta mémoire. Si jamais le seigneur des ténèbres l'apprenait, ça irait très mal pour Drago, tu comprends ? Il pourrait facilement entrer dans ton esprit. Mais ne t'en fait pas, je vais m'en occuper. Je te promets qu'il n'arrivera rien de mal à Drago. »
Pansy le fixa un instant de ses yeux porcins qui se rétrécirent ostensiblement. De nombreuses idées semblaient se battre dans son esprit et les options qui s'offraient à elles se confrontaient avec violence. Puis, elle eu un signe de tête docile.
Lucius Malefoy approcha tranquillement sa baguette magique de la tempe de la jeune Serpentard, ignorant le tremblement qui continuait de l'agiter, et prononça « Oubliettes. »
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