Chapitre 36

Morgan,

Ils entrent dans la salle de production, trempés par les jets d'eau qui continuent de jaillir du plafond, mais parfaitement calmes. Le genre de calme qui précède souvent une tempête.
Je reste immobile, les poings serrés, essayant de trouver une échappatoire. Si Diamond n'était pas là, j'aurais probablement appuyé sur le bouton de déclenchement à distance sans hésiter. Mais avec elle dans la pièce, c'est impossible. Pas question de la mettre en danger, même si elle semble avoir retrouvé cette froideur inébranlable. J'ai l'impression de faire face à une statue de marbre, impassible et inatteignable.

Justin prend la parole, un sourire narquois étirant ses lèvres.

— Alors, Morgan, on joue aux artificiers ? Où est la bombe ?

Je ne réponds pas, mon regard fixé sur Diamond. Est-ce qu'elle ressent quelque chose en ce moment ? Est-ce que, derrière ce masque de sérénité, il y a une étincelle d'émotion qui subsiste ? Impossible à dire. Le sérum a peut-être fait son œuvre, la rendant insensible, indifférente. Ou peut-être qu'elle lutte encore, quelque part au fond.

— Je te le demande une dernière fois, où est la bombe ? répète Justin en avançant d'un pas.

Il sort un pistolet de sa veste et me braque. Je lève instinctivement les bras en l'air.

— Pourquoi je parlemente encore avec toi, j'ai juste à en finir maintenant, crache Justin.
Lui, faut pas s'en prendre à son petit bébé.

— Du calme du con, j'ai un complice, s'il n'a pas de nouvelle de moi, il n'hesitera pas à faire tout sauter.

— Tu crois vraiment que j'ai pas déjà tout compris Weis ?

Et alors son pistolet se tourne vers Diamond. Le salaud.

— Dis-moi où elle est, sinon elle y passe, menace-t-il d'un ton glacial.

Diamond reste de marbre, comme si sa vie n'avait aucune importance à ses yeux. Ça me tue de la voir comme ça, comme une poupée sans âme. Ca me met hors de moi.

— Je vais être clair, Justin. Tu peux me menacer autant que tu veux, ça ne changera rien. Si je dois mourir, je crèverai avec le sourire en sachant que j'ai tout fait pour foutre en l'air votre petit empire. Mais tu ne la touches pas, tu entends ?

Justin éclate d'un rire amer, baissant légèrement son arme.

Je serre les dents, les poings tremblant sous la colère. Je n'ai jamais été très doué pour les actes héroïques ou les sacrifices grandiloquents, mais cette fois-ci, je suis prêt à tout. La bombe est encore là, prête à exploser, mais je ne peux pas risquer la vie de Diamond.

Mon téléphone jetable vibre à nouveau dans ma poche. C'est Prince. Je fais signe à Justin de me laisser deux minutes ce qui semble le perturber et je prends cet appel.

— J'ai fini à la banque, mec. Ils ont mordu à l'hameçon. Tout est en place. Faut qu'on se tire maintenant. T'es où ?

Je jette un regard rapide à Justin et à Diamond. Si je ne trouve pas une solution, je vais être coincé ici, et tout ce qu'on a préparé va tomber à l'eau. Littéralement.

— Je suis un peu dans la merde ici. Justin a un flingue, et Diamond est avec lui. Ils savent pour la bombe, mais ils ne savent pas où elle est. On doit trouver un moyen de les distraire.

— Putain, on t'entend Weis !

Son cri me fait presque sursauter, tellement que j'en raccroche au nez de mon meilleur ami. Je sais qu'il va m'en vouloir celui-ci. Encore pire, si je ne m'en sors pas, il trouvera toujours le moyen de me le reprocher. Justin perd patience, et je trouve que la vulgarité ne lui va vraiment pas. Je dois gagner du temps. Je ne quitte pas Diamond des yeux, avec ce canon sur la tempe. Oserait-il s'en prendre à elle ? La fille de son premier porte-monnaie ambulant.

Bien sur, il n'aurait qu'à dire que c'est moi qui l'ai attaqué, et tout le monde le croirait, comme c'est pratique.

— Mon amour, écoute-moi. On peut encore s'en sortir, mais tu dois me faire confiance.
Diamond me fixe toujours? Je commence à la connaître et je sais la bastille intérieur qui se joue en elle.

— Confiance ? comment tu veux que j'ai confiance Weis, tes plans sont tous plus foireux les uns que les autres. Me dit-elle enfin.

Je la sens au bord des nerfs, presque plus prête à exploser que ma bombe elle-même. Je DETESTE quand elle m'appelle Weis. Pour elle je suis et resterais Morgan.

— Oui, moi aussi, je t'aime.

Ses joues s'empourprent, mais j'ai beaucoup de mal à croire que ce soit dû à l'émotion de me retrouver. Ou alors, ils ont vraiment du souci à se faire avec leur sérum, il ne fonctionne plus très bien. Non, je crois que je l'agace simplement.

— Ça suffit vos querelles à la noix.

S'énerve Justin, il tourne en rond comme un lion en cage, tirant son otage par le bras.

— C'est quoi ça? Demande le père de Diamond, en pointant du doigt mon sac à dos soigneusement caché derrière un bureau.

Le fameux sac à dos contenant ma bombe artisanale. Bon ok, j'avoue, elle n'était pas si soigneusement cachée. Mais qui aurait pu prévoir l'arrivée de ce binome d'enfer ? À cette heure-ci tout le monde aurait dû être dehors !  Et le laboratoire en cendre. Pour toute réponse, je lève les yeux aux ciels. Je vois Diamond s'agiter, le canon toujours pressé contre sa tempe. Elle rigole. Elle se fend carrément la poire en deux la traitre. Justin est un piètre bourreau.

— Sérieusement, tu l'as juste posé là ? S'insurge la femme de ma vie.

Merci Diamond pour l'observation.

— Ouais, peut-être bien, certainement même, mais vous ne sauriez pas la désactiver.

— Alors, plus rien ne m'empêche de te tuer.

Pourquoi j'use ma salive ?  Justin n'écoute strictement rien. Il pointe son pistolet vers moi et s'apprête à tirer. J'aimerais lui rappeler que si, quelque chose l'empêche de me tuer, comme désactiver cette putain de bombe ? Ou au moins mon complice. Mais avant que je ne puisse le lui faire remarquer, la porte de la salle s'ouvre brusquement, et une épaisse fumée envahit la pièce. Le coup de feu part. Mais je suis déjà au sol.

Je leur ai fait perdre un temps précieux. Maintenant, c'est fini pour lui.

C'est le signal de Prince, un écran de fumée pour foutre la pagaille. Ma respiration se fait difficile et alors je comprend. L'odeur âcre m'envahit le crâne, je sens mes membres devenir de plus en plus lourd.

— Un gaz sédatif, vraiment Papa Mike, tu te moques de moi j'espère ?

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