17.

Point de vue de Kayla

Ils approchent. Je le sens. Tout le monde est prêt. Nous avons mangé de sorte à ne pas souffrir d'une crampe ou d'un mal de ventre soudain, mais aussi pour avoir suffisamment d'énergie. 

Je suis devant toute ma meute, sur mes pattes, je regarde droit devant moi. Aucun d'entre nous ne se parle. Nous les attendons. 

Malgré le fait que j'ai aidé Calum à s'entraîner un peu, je lui ai donné une fausse date, question qu'il ne se pointe pas. C'est un coup bas, mais je ne voulais pas prendre le risque qu'il se fasse sérieusement mal. Je l'ai fait pour le protéger. C'est mon combat, pas le sien. 

Mes poils s'hérissent soudainement. Leur odeur s'intensifie. Je sens que quelques membres de ma meute deviennent de plus en plus nerveux, mais je ne peux plus les réconforter à présent. Le moment pour lequel nous nous sommes entraînés de façon aussi assidue. Ils devront trouver un moyen de gérer tout ça d'eux-mêmes. 

Finalement, les premiers coyotes font leur apparition. Il se placent comme nous le faisons présentement. Pourtant, leur alpha ne me fait toujours pas face. Au bout de quelques secondes, il s'avance au milieu des autres et accroche ses yeux aux miens. Voyant son visage griffé, je n'ai plus aucun doute: il s'agit bel et bien du même individu que sur la vidéo, sous sa forme animale.

-Ma chère Kayla... Enfin, je te rencontre. Après tout ce temps.

-Bonjour, Valère. Vous allez bien? Lui demandais-je en toute courtoisie.

-Tu n'as pas besoin de me vouvoyer. Entre alphas, ça n'est pas nécessaire.

-Je ne le suis pas encore, justement.

-Dans ce cas, je te le dis: tu n'as pas besoin.

Nous nous regardons sans rien dire.

-Nous avons assez poireauté. Tu as l'air d'être intelligente, j'ose alors estimer que tu as bien réfléchi à la proposition que je t'ai fait et que tu as également pris la bonne décision. 

-En effet. C'est exactement ce que j'ai fait. À l'aide de l'actuel bêta et du conseil, nous avons établi ce qui serait le mieux pour nous.

-Ah, mais c'est vrai! Ysen, comment tu vas? 

-C'est Ysengrin, pour toi. Répond celui-ci.

-Oh, tu ne me portes toujours pas dans ton cœur, à ce que je vois.

-C'est bien, tu n'es pas aveugle.

-Ysen, s'il te plaît. Le réprimandais-je. 

-Alors, si je présume que vous avez pris la bonne décision, je suppose que vous allez tous vous soumettre à mon autorité?

J'étouffe un rire.

-Je suis désolée, mais non. Nous ne nous soumettrons pas. Jamais. 

-Oh. Tu en es vraiment certaine? Tu veux vraiment employer la manière forte? Ce serait dommage que tu te fasses mal.

-Je suis une grande fille, je peux encaisser. 

-Comme tu voudras. Vous savez ce que vous avez à faire!

L'instant d'après, les premiers coyotes se jettent sur nous et Valère profite de ma courte surprise pour se lancer sur moi. Je reprends rapidement mes esprits et commence à l'attaquer avec autant de force que lui. Les seules choses auxquelles je pense présentement, c'est au fait de le battre. Il faut que je le batte, peu importe à quel point il peut être fort. Il met tellement de force dans ses coups et dans ses griffures que ça me fatigue d'avoir à contre-attaquer de la même façon. C'est réellement éprouvant, mais je tiens bon. C'est nécessaire.

-Tu sais, tu te défends bien, tout comme ton père. Dit-il lorsque nous tournons en cercle tout en nous dévisageant.

-Toi qui parle en bien de mon père, c'est louche.

-Ce n'est pas moi, le méchant. Mais bien lui. Tu veux savoir pourquoi j'ai cette marque monstrueuse sur mon visage? C'est à cause de lui. C'est lui qui m'a fait ça. Le jour de sa mort.

Je grogne. Il est sûrement la dernière personne au monde qui a le droit de parler de mon père. Je sais qu'il essaie de me provoquer pour me faire perdre le contrôle.

-Mais ce n'est pas trop grave, au final! Tu sais pourquoi? 

Je ne réponds pas et me contente de le fixer. Je ne dois pas flancher.

-Parce qu'au final, j'ai gagné. Je lui ai fait payé cette griffure ainsi que toutes ces années de souffrance.

-Tu n'arriveras pas à me provoquer. Tu peux dire tout ce que tu veux, ça m'est complètement égal. Dis-je en tentant de rester la plus neutre possible.

-Vraiment? Même si je te dis que je n'ai eu aucune pitié quand je l'ai achevé?

Je respire de plus en plus lourdement. 

-Je vais te donner une meilleure image de la scène. Il était par terre, à saigner de partout et à gémir de douleur. Tu sais, c'est le moment le plus satisfaisant de toute ma vie, de le voir comme ça... À pratiquement me supplier de le garder en vie. 

-Tu... Tu mens! Mon père n'aurait jamais fait ça!

-Mais tu n'étais pas là, tu n'as aucune façon de le prouver. Tu veux la vérité? Ton père était un lâche qui ne voyait pas la réalité en place parce que tout lui a toujours été donné. En vérité, il était si faible qu'il m'a carrément demandé de lui sauver la vie en échange d'une autre... La tienne.

Je lui saute dessus sans me retenir. C'est une réaction irrationnelle, au fond de moi je sais que ce qu'il dit est faux. Je connais mon père, jamais il n'aurait fait ça.

-Mais à présent... Je vais faire ce qu'il m'a demandé: je vais t'envoyer à la même place que lui.

Il réussit à me propulser au sol et je m'y écrase dans une très mauvaise position. Je ne me retiens pas de crier, j'ai mal. Valère se rapproche de moi en riant.

-Oh, ma pauvre enfant... Tu pensais vraiment avoir une chance contre moi? C'est mignon, tu es comme ton cher papa...

-La... La ferme... Sifflais-je en me tenant la patte.

-Tu résistes? Ça ne sert à rien, je vais en terminer tout de suite... Tu vas te retourner dans ta tombe pour l'éternité à angoisser sur le fait que tu aies complètement vendu ta meute. Figure-toi que c'est ce que tu as fait, en ne choisissant pas la solution facile.

-Tous les autres se battent tous encore... C'est la tienne qui est en train de perdre. Dis-je en jetant un coup d'œil aux alentours.

-Oh, mais ça va changer dès qu'ils verront que leur chère future alpha est sans vie...

Il s'apprête à m'asséner un coup de griffe, mais j'entends un grognement puissant et une ombre noire lui saute dessus pour le mettre à terre. Je me relève lentement et ce qui est devant moi me glace le sang. Calum est en train de mettre la raclée de sa vie à Valère. Il le griffe, le mord, le frappe. Valère n'a même pas la possibilité de répliquer, Calum le maintient au sol, sur le dos. J'utilise mon pouvoir de guérison sur ma patte. L'effet est instantané. Je me précipite vers eux.

-Calum! Va-t'en! Tu n'as rien à faire ici! 

-Mais tu te fous de moi? Si je n'avais pas débarqué, tu serais morte à l'heure qu'il est! Nous en reparlerons plus tard.

-Oh, mais que vois-je?

Nous tournons la tête vers Valère qui a entre-temps pu se remettre sur pieds. Il est amoché, mais tient toujours debout. Malheureusement.

-Voyez-vous ça! Monsieur l'âme sœur vient à la rescousse de sa bien-aimée! Comme c'est mignon. Même à deux vous ne serez pas en mesure de me vaincre.

-Tu veux parier? C'est ce qu'on va voir. Réplique Calum.

Il se jette de nouveau sur Valère, mais je me joins à lui, au moins pour le protéger de l'alpha des coyotes. Valère se défend quand même bien. Ma force combinée à celle de Calum est pratiquement doublée. Il est vrai que maintenant que j'y pense, je me souviens avoir appris que deux âmes sœurs sont toujours plus fortes ensemble. 

Pourtant, nous arrêtons tous les trois de nous battre. Nous nous tournons vers l'énergie que nous avons ressenti et je vois que tout ceux qui se battaient ont fait la même chose. Je m'approche de la source d'énergie, suivie de près par Calum et Valère. Ce que j'ai sous les yeux me fait écarquiller les yeux.

Je vois Alistair, face à une coyote. Les deux se regardent en secouant leurs queues respectives. Ils s'assoient en parfaite synchronisation et il entame la conversation.

-C'est toi.

-C'est toi. Répond-elle sur le même ton. 

Ils se regardent en ignorant le reste du monde pendant un bon moment et se lèvent avant de marcher à leur rencontre. Ils commencent par se toucher du bout du museau. Alistair lui lèche ensuite la joue. Elle rigole et fait de même sur son visage. Ils se câlinent ensuite mutuellement. La vue me fait fondre, je sais que si j'avais été sous ma forme humaine, je l'aurais sûrement exprimé à haute voix. Mon meilleur ami a trouvé son âme sœur. 

-Mais attaquez-le, bon sang! Grogne Valère.

Alors que les coyotes s'avancent, l'âme sœur d'Alistair se place immédiatement devant lui et grogne pour le protéger. 

-Éléa, hors du chemin! Clame Valère.

-Jamais. Je vous interdis à tous de lui toucher! 

-Bien, comme tu voudras. Occupez-vous d'elle d'abord. Dit Valère.

Cette fois, c'est Alistair qui vient se placer devant elle pour la protéger. 

-N'essayez même pas de vous approcher d'elle. 

-Très bien, puisque personne ne veut s'en charger, je vais le faire. Je n'ai pas envie d'un parasite dans ma meute, de toute façon.

-Valère, comment oses-tu dire ça? Comment oses-tu parler d'un des membres de ta meute de cette façon? Lui demandais-je en ne retenant pas mon air outré.

-Elle n'en fait plus partie. Surtout si c'est pour se révéler être affiliée à un de vos incapables insensibles.

Je ressens la peine d'Alistair sur le champ, qui va réconforter un peu la coyote. 

-Tu penses vraiment que c'est tout ce que nous valons? T'es sérieux? Demande un coyote à Valère.

-Pas vous, juste elle.

-Ce n'est qu'une enfant! Ce n'est pas elle qui contrôle qui deviendra son âme sœur! Tu devrais l'avoir appris, avec le temps. 

-Je te défends de reparler de Kaël! 

-Et dire que je pensais vraiment que nous avions tous de l'importance pour toi... Que tout ça, c'était pour renforcer les liens de toute la meute... En fait, non. Ce n'est qu'une histoire de vengeance suite à une jalousie qui n'aurait même pas dû avoir lieu.

-Et puis après? JE suis votre alpha. C'est moi qui commande! Et quand je vous dis de faire quelque chose, vous le faites et c'est tout! 

-Et bah, ce sera sans moi. 

Le coyote en question vient se ranger derrière les nouveaux âmes soeurs. 

-Bah d'accord, comme tu voudras. Tu feras juste une personne de plus à abattre.

-Ce sera sans moi non plus.

-Et moi non plus.

-Moi aussi, je pars. 

Ils viennent un à un se placer derrière Alistair et la coyote. Je décide de faire pareil. Je fais comprendre aux coyotes que je ne leur ferais rien. Calum me rejoint, suivi de mes amis, et du reste de ma meute et des autres coyotes qui ne s'étaient pas joints jusqu'à maintenant. Le seul à encore nous faire face, c'est bien évidemment Valère. 

-Admets-le, Valère. Tu as perdu. Tu ne peux rien contre nous tous. Dis-je d'une voix forte. 

Il nous dévisage tous. Voyant que nous sommes sérieux, il souffle et s'incline. Je sors et vais me poser juste devant lui.

-Je ne vais pas te tuer. Les autres non plus ne feront rien. Je vais te laisser partir, tu pourras faire tout ce que tu veux. Mais ne t'approche plus jamais de moi ou de ma meute et n'essaie même pas de manipuler la tienne pour qu'elle cause délibérément du tort à la mienne ou à quoi que ce soit d'autre. J'espère que c'est bien clair. Je ne veux plus jamais te revoir ou réentendre parler de toi, c'est bien compris? 

Il hoche la tête avant de la baisser pour regarder le sol. 

-Bien.

  Je lui tourne alors le dos pour retourner vers les autres. 

-Et bah, voilà qui est ré...

-Kayla, attention! S'exclame Alistair. 

Je me retourne et vois que Valère s'est élancé sur moi, la gueule en avant, grande ouverte. Je n'ai pas le temps de réagir. Mais, quelque chose saute juste avant qu'il ne m'atteigne et je tourne la tête vers la chose qui l'a empêché de me mordre très profondément. Je pousse une exclamation d'horreur en voyant que c'est Calum qui l'a intercepté et qui a donc été mordu au niveau de la gorge. Je vois alors complètement rouge et me jette sur Valère avant de l'asséner de coups, de le griffer et en enfonçant mes crocs un peu partout dans sa chair. 

-Kayla, arrête! Kayla! Intervient Ysengrin en me retirant de lui.

-Laisse-moi achever ce connard! 

-Non, il est inconscient maintenant, c'est inutile. Il faut aider Calum. 

Calum me revenant de cette façon en tête, je laisse carrément Valère de côté pour aller vers Calum qui saigne abondamment de la gorge en respirant avec beaucoup de difficulté. 

-Calum! Oh, non! Tu vas t'en sortir, OK? On va t'aider.

-J'ai... J'ai mal... Kayla, je...

-Tout va bien se passer, je te le promets... On va t'aider. 

Je commence alors à lui lécher la plaie pour qu'elle se referme. Le sang arrête de couler.

-Kayla... Je veux juste te dire que...

-Chut, ne dis rien, garde tes forces... Sinon, tu ne pourras pas te rétablir. On va te sortir de là, je te le promets.

-Je... Je t'aime, Kayla. 

Je le regarde plus sérieusement. Et puis, l'instant suivant, il ferme les yeux.

-Calum? Calum! Calum, réveille-toi, je t'en supplie, réveille-toi! 

-Kayla... Laisse-nous le transporter pour le guérir. Si on n'agit pas le plus vite possible, on risque de le perdre pour de bon. Me dit Ysengrin.

-Non... S'il te plaît, non... Ysen... Je ne peux pas le perdre lui aussi... 

-Je te promets qu'on fera tout ce qu'il faut. 

L'instant suivant, il est pris dans les bras d'Alistair qui s'est entre-temps transformé pour reprendre forme humaine et il court dans les bois suivis d'autres personnes de ma meute. Il y a aussi des coyotes, puisque je n'en reconnais pas plusieurs d'entre eux. Je me transforme aussi et vais à leur suite. Je retrouve mes habits et les enfile, tout en n'oubliant pas le collier. 

Sur place, on me demande de rester à l'écart pour favoriser la guérison sans avoir de source de distraction. Je fais alors des allers-retours continus entre deux arbres.

-Ne t'en fais pas, Kayla, il va s'en sortir. Me dit Alistair.

-Je panique totalement... Je veux vraiment pouvoir aider, mais je ne peux rien faire! 

-Hey, calme-toi. Les guérisseurs font tout ce qu'ils peuvent, ils sont capables de faire des miracles. Tu sais bien.

Je relève la tête vers lui et il me fait un câlin. Je lui retourne en soufflant et bientôt, Quinn et les jumeaux nous rejoignent. Ils me réconfortent un peu plus.

Un craquement nous détourne tous et je vois une fille, peau très pale, cheveux blonds qui sont longs et des yeux bleus.

-Oh, pardon... Je tombe mal, je crois... Je reviendrai plus tard... Murmure celle-ci d'une voix très douce.

-Non, reste. Dis-je. 

Elle ne bouge pas et je me défais de la prise des autres. Je sens qu'Alistair s'est complètement immobilisé et sa respiration est lourde. Je m'avance vers la fille.

-Comment tu t'appelles? 

-Euh... Éléa, madame.

-Madame? J'ai le même âge que toi, n'exagérons rien. Appelle-moi Kayla. 

-D'accord... Euh...

-Tu vas bien? Je suis vraiment désolée que nous ayons eu à nous battre.

-T'en fais pas, c'est bon. Je suis désolée que nous vous ayons forcé à en arriver là. Nous aurions dû nous retourner contre Valère plus tôt... Sauf que personne n'osait le faire. 

-Ce n'est pas forcément de votre faute, tu sais? Même pour moi, c'est un conflit qui date d'avant ma naissance... Nous nous sommes tous faits avoir à notre façon. 

-Tu sais... Tu es beaucoup plus gentille que ce que j'aurais pu croire...

-Ah, vraiment?

-Ouais... Valère nous forçait pratiquement à vous prendre en chasse dès qu'on vous localisait de nouveau... À force, on commence à penser que c'est parce que vous n'êtes pas des gens biens. Mais je l'ai bien vu tout à l'heure, avec ce que tu as fait pour moi et...

Elle baisse les yeux avant de les relever sur Alistair. J'ai un petit rire et vais chercher mon meilleur ami que j'attrape par la main pour l'escorter jusqu'à la coyote.

-Voici Alistair, mon meilleur ami et aussi notre futur bêta. Alistair, voici Éléa. Je vous laisse faire plus ample connaissance, maintenant.

Je m'éloigne d'eux, un sourire aux lèvres et vais retrouver mes amis.

-Dis donc, c'est super sympa, ce que t'as fait pour eux. Me dit Quinn.

-C'est dans ma nature. Vous pouvez aller avec eux, je crois que je vais aller marcher un peu.

-Tu es sûre qu'on...

-Mais oui, allez-y. Ne vous en faites pas pour moi.

Je leur souris doucement avant de m'enfoncer dans la forêt. Je marche un peu et finis par m'asseoir au sol. Puis, mon collier commence à s'illuminer et une fumée en sort. Je me relève aussitôt. Mon père est bientôt matérialisé devant moi. 

-Papa? Qu'est-ce que tu fais là.

-Je dois malheureusement te faire part d'une très mauvaise nouvelle...

Je fronce les sourcils.

-C'est pas le moment là, mais alors pas du tout. 

-C'est à propos de Calum.

Cette fois, je me crispe.

-Ça se passe mal. Très mal. La morsure de Valère a été très profonde dans sa nuque... Il risque d'y rester. 

J'apporte ma main à ma bouche et lentement, je commence à pleurer.

-Non... Non... Je... Je ne lui ai même pas dit que je l'aimais aussi...

-Écoute, la vérité, c'est que je ne veux pas que tu vives d'aussitôt ce que c'est la perte de ton âme sœur. J'ai une solution qui marchera à coup sûr. Mais pour ça, j'ai besoin que tu fasses quelque chose pour moi.

-Qu'est-ce que c'est? 

-Tu dois briser le pendentif du collier.

-Quoi?

-Tu dois briser le pendentif de ton collier.

-Mais... Non! Ça voudrait dire quoi?

-Ça voudra dire que mon esprit sera libéré du pendentif... Et que nous ne pourrons malheureusement plus nous contacter. 

Je fige complètement.

-Non! 

-Il faut que tu le fasses Kayla! C'est le seul moyen de sauver Calum. Je vais pouvoir lui transmettre de la vitalité. Tu sais bien comment ça marche! 

-Je... Je ne veux pas te perdre encore une fois... 

-Mais veux-tu vraiment perdre Calum? Écoute, Kayla. Je sais que c'est difficile, mais moi je suis déjà mort. Lui, tu as une chance de le sauver et de passer le reste de ta vie à ses côtés! C'était incroyable de te revoir et de pouvoir te parler à nouveau... Mais tu dois faire ton deuil. Je suis mort, c'est tout. Il n'y a rien qui peut être fait. Tu dois me laisser partir. 

-Mais... Et si j'ai besoin de ton aide?

-Tu te débrouilleras, tu l'as toujours fait, même pendant ces huit dernières années. Je sais que tu peux t'en sortir sans moi. 

-Tu m'as énormément manqué pendant ce temps!

-Je sais ce que c'est, de perdre quelqu'un. Crois-moi. Je sais à quel point c'est difficile... Mais tu ne peux pas t'empêcher de vivre à cause du manque. Les gens naissent et meurent, c'est le cycle de la vie, il n'y a rien qui peut être fait. On peut par contre repousser le deuxième phénomène. Et Calum en a besoin. Tu vas être malheureuse toute ta vie s'il meurt aujourd'hui. 

Je souffle...

-Tu as raison... Je sais que tu as raison... Mais c'est difficile. 

-Je sais. 

-Tu vas beaucoup me manquer, papa. 

-Moi aussi.

Il redresse la tête un moment.

-Vite. Fais-le.

Je hoche la tête et souffle. Je retire rapidement le collier de ma nuque et fixe la pierre turquoise avant de balancer le collier au sol. Je relève une dernière fois la tête vers mon père. Il me sourit d'une manière réconfortante. Je hoche la tête et finis par écraser du talon la pierre qui craque directement. Je lève le pied et vois que la pierre est en mille morceaux. Je regarde mon père. Il continue à me sourire pendant que son image s'efface par le vent.

-Je t'aime, Kayla. 

Finalement, il ne reste plus rien et je m'effondre au sol. Je pleure pendant quelques minutes, ayant perdu mon père une seconde fois. Sauf que cette fois, je sais qu'il n'y a aucune chance que je le revois. 

Je ne sais pas je reste là combien de temps. Je sais seulement que quand je me remets debout, je cours pour voir comment se porte Calum. J'arrive enfin à notre point central, je vois Calum humain allongé dans le brancard que nous possédons. Il a la tête déposée sur un oreiller et est enveloppé d'une couverture. Tout le monde se tourne vers moi. Je m'avance et m'agenouille auprès de lui. Il respire.

-Il dort, il devrait normalement se réveiller dans quelques heures. Nous l'avons échappé belle. Me dit Sonia. 

-On fait quoi, pour sa famille? 

-Les parents ne sont pas au courant, on les a contacté pour dire qu'il dormirait chez toi cette nuit. Les dernières marques visibles devraient ne plus être apparentes demain soir. 

-OK, il sera transporté dans une voiture jusqu'à ma maison?

-Oui.

Je souffle, soulagée. Bientôt, nous le transportons avant de l'installer sur la banquette arrière d'une voiture. La voiture démarre aussitôt en direction de ma maison, et je cours derrière elle pour arriver le plus vite possible. Malheureusement, n'étant pas si rapide, j'arrive beaucoup plus tard et rentre directement dans la maison. 

-Ysen? Il est où?

-Dans ma chambre, il prendra mon lit cette nuit. Il a besoin d'espace pour dormir. Je vais prendre le canapé. Je vais d'ailleurs aller dormir, je suis fatigué. Bonne nuit, ma grande.

-Bonne nuit. 

Je monte à l'étage et rentre dans la chambre d'Ysengrin. Calum est enseveli sous les couvertures. Il dort toujours, la bouche un peu entrouverte. Je m'approche doucement et me mets à genoux au bord du lit. Je passe ma main dans ses cheveux. 

-Je suis vraiment désolée, Cal'. Je sais que tu dors, tu en as besoin de toute façon, mais vraiment, je m'en veux. Je réalise que j'ai beaucoup de chemin à faire avec toi... Pour le moment, je suis juste contente de savoir que tu es en vie et que tu vas t'en sortir... Je ne me le serais pas pardonné, autrement. 

Je souris doucement et me penche pour lui embrasser le front.

-Je t'aime aussi. Fais de beaux rêves. 

Je me lève et quitte la chambre. Il a besoin de repos, moi aussi, d'ailleurs.

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Le prochain chapitre est le dernier avant l'épilogue! :)