Chapitre 22 : 7ème Conseil
PDV Matis
- Le village se réveille.
Je regardais Marina dormir avec un sourire. Je venais de passer la meilleure nuit de ma vie.
A l'entente de l'appel du Maître du Jeu, Marina ouvrit vivement ses yeux dans un sursaut. Quand elle me vit, allongé juste à côté d'elle en train de la contempler, elle écarquilla les yeux en demandant :
- Ce n'était pas un rêve alors ?
Je souris en secouant négativement la tête. Elle rougit légèrement avant de me rendre mon sourire. Un silence s'installa dans la chambre tandis que nous échangions des regards et des sourires niais.
Mon ventre se mit subitement à gargouiller. Marina éclata d'un rire mélodieux et je sentis directement mes joues s'empourprer. Maudit estomac !
Marina sortit donc du lit et enfila un pantalon.
- On ferait mieux d'aller prendre un petit déj !
Je grognai en m'enroulant dans la couverture. Je ne voulais tellement pas quitter ce lit... Je ne voulais pas affronter cette journée. Je voulais juste rester avec Marina dans ce cocon de couverture pour toujours...
Celle-ci leva les yeux au ciel face à ma réaction. Un petit sourire illumina son beau visage.
- Aller la marmotte ! J'ai pas envie d'affronter l'extérieur sans toi...
Sa voix s'était faite plus douce, comme un souffle. Mon cœur fit un bond dans ma poitrine.
- C'est sûr que, demandé comme ça, je ne peux pas refuser...
Son sourire s'agrandit. J'écartais donc la couverture de mon corps avec une grimace. Dès que le contact chaud de la couverture m'eut quitté, je ressentis instantanément un grand froid envahir mon corps.
Je me levai du lit en frissonnant et enfilai mon T-shirt et mon pantalon de la veille.
Marina m'attendait, les bras croisés contre sa poitrine. Quand j'eus enfin fini de me préparer, elle ronchonna :
- Eh ben ! C'est pas trop tôt ! Je vais finir par mourir de faim moi !
Sans me prévenir, elle m'attrapa par le bras et me tira littéralement dehors comme si j'étais une simple poupée de chiffon.
- Eh ! Tout doux la furie !
Elle s'arrêta net et baissa les yeux vers le sol, honteuse. Elle tenait toujours mon bras, comme prête à recommencer sa course.
Je lui pris son autre main avec mon autre main et entrelaçait nos doigts. Elle leva la tête et plongea son regard étonné dans le mien. Je lui fit un grand sourire et lui dit, d'une voix douce :
- Allons-y tranquillement, d'accord ?
Elle hocha la tête, rouge comme une tomate. Nous prîmes donc le chemin de la cantine main dans la main.
Nous nous installâmes à une table, une fois que nos plateaux furent remplis. La cantine était entièrement vide.
En même temps, nous n'étions plus que cinq et bientôt, quatre. Mais je préférais ne pas y penser. Je voulais profiter pleinement de cet instant seul avec Marina.
Celle-ci mangeait goulûment des céréales miel pops. Je la fixai longuement. Je la trouvais vraiment belle, même si tôt le matin. Ses yeux noisette étaient légèrement bouffis dû à la nuit qu'on venait de passer et elle avait des traces d'oreiller sur la joue. Ce détail me fit rire.
Marina me jeta un regard interrogateur. Je secouai la tête :
- Non, rien.
Elle leva les yeux au ciel.
À cet instant, Éliot entra dans la cantine, accompagné de Dave. Je vis le jeune pauvre faire un signe de la main à sa sœur. Celle-ci hésita avant de capituler et de lui répondre par un sourire.
Éliot et mon meilleur ami passèrent à côté de nous et allèrent s'installer plus loin. Marina suivit son frère des yeux en soupirant. Puis, elle reporta son attention sur moi :
- J'ai vraiment peur pour lui...
Je ne répondis rien. Elle continua :
- Est-ce que tu pourrais m'en dire plus sur le seul gagnant pauvre de ce stupide jeu ?
Je haussai les sourcils. Pourquoi voulait-elle se torturer ainsi ?
- Tu es sûre ? Je ne veux pas t'inquiéter encore plus...
Elle hocha la tête, sûre d'elle.
- Bon, très bien, que veux-tu savoir ?
Elle eu tout de suite une réponse :
- Déjà, commençons par le commencement, comment s'appelait-il ?
- Il s'appelait Josef, il me semble...
Elle hocha doucement la tête, réfléchissant déjà à une prochaine question.
PDV Marina
- J'aimerais savoir comment il a réussit à gagner ? Et quelle carte il avait ?
Je tendis l'oreille, totalement à l'écoute de Matis. Il avait planté ses yeux vert pétillants dans les miens. Une lueur d'inquiétude y brillait. Mais il me raconta tout de même :
- Il n'était que le Cupidon. Seulement, il n'était pas bête. Le premier jour, il avait observé le comportement des riches et avait deviné qui était leur leader. Du coup, lors de la première nuit, il s'est lui-même mit en couple avec ce fameux leader. Les deux ont réussit à gagner comme ça, même si le leader détestait vraiment Josef... Au moins, là, David n'a pas l'air de détester ton frère plus que ça.
Je jetai un coup d'œil à mon frère. Il mangeait des céréales en compagnie de David qui, lui, buvait un verre de lait. Quand David reposa son verre, il avait une moustache de lait. Je vis mon frère se moquer ouvertement de lui et David rigoler avant de s'essuyer. Je souris, en effet, ils semblaient quand même bien s'entendre malgré leur mensonge.
Je soupirai. J'espérais que David resterait aussi sympa avec mon frère après leur victoire...
Comme si Matis avait lu dans mes pensées, il dit :
- Ne t'inquiètes pas, je t'ai promis que je demanderais à Dave de prendre soin de ton frère.
Je souris.
- Tout ce que je veux, c'est que mon frère ne finisse pas comme ce Josef.
Il posa sa grande main rassurante sur la mienne. Mon cœur fit un énorme bond dans ma poitrine et j'eus une soudaine envie de l'embrasser.
Je sentis le regard de mon frère me brûler la joue. Je ne fis donc pas ce que je rêvais de faire à Matis.
- T'as fini de manger ?
Je hochai la tête. Parler de Josef et de mon frère m'avait coupé l'appétit.
- On peut y aller alors ? Comme ça on pourra passer du temps ensemble sans que ton frère nous observe avant le Conseil...
Le Conseil. Une boule se forma dans ma gorge. J'avais presque oublié que mon temps était compté.
Je pris une grande bouffée d'air et affichai un sourire sur mes lèvres. Nous nous levâmes, débarrassâmes nos plateaux et sortîmes de la cantine.
PDV David
Nous étions seuls dans la cantine, Matis et Marina venaient de partir. Éliot fixait encore la porte où étaient disparu mon meilleur ami et sa sœur. Il se tourna vers moi peu de temps après :
- Ils sont drôlement proche non ?
Je levai les yeux au ciel.
- Éliot... Tu recommences à te mêler de ce qui ne te regarde pas...
Il soupira en secouant la tête et reporta son attention sur son petit-déjeuner.
Je le fixai tandis qu'il enfournait une tartine de beurre presque entièrement dans sa bouche.
Je repensais à notre discussion de cette nuit. Je savais qu'il allait demander à Matis de s'en prendre à lui plutôt qu'à moi cette nuit... Je devais empêcher cela. Je ne savais pas trop pourquoi, mais je n'avais aucune envie de voir Éliot souffrir. Je me sentais obligé de le protéger.
Une fois notre petit-déjeuner terminé, nous vidâmes nos plateaux et sortîmes de la cantine.
Nous marchions côte à côte dans le village, sans rien nous dire, quand soudain, le Maître du Jeu apparut devant nous, comme par magie. Éliot sursauta en poussant un petit cri de frayeur.
Le Maître du Jeu nous fixait, les yeux plissés, sans rien dire. Instantanément, un frisson de malaise me parcourut le dos et ma gorge devint sèche. J'ouvris la bouche mais aucuns sons n'en sortit.
Finalement, le Maître du Jeu nous fit un sourire avant de disparaitre dans l'une des rues du village.
- Il vient de ce passer quoi là ?
Les yeux noir de Éliot brillaient d'incompréhension. J'ignorai la peur qui faisait battre mon cœur à mille allure et haussai les épaules :
- C'est juste le Maître du Jeu... Il est bizarre, on le sait tous... Rien de nouveau...
- Si tu le dis...
Je sentais qu'il n'était pas très convaincu par mes propos. Je ne l'étais pas, moi-même...
PDV Éliot
Je frissonnai. David me fit un sourire qui se voulait réconfortant mais le doute et la peur se voyait dans ses yeux.
David se racla la gorge et changea complètement de sujet :
- Je meurs de fatigue... Ça fait une semaine que je n'ai pas eu de véritable nuit de sommeil...
Pour compléter ses paroles, il bailla à s'en décrocher la mâchoire. C'est vrai qu'il était la Petite Fille... Mais, maintenant qu'il savait qui était les derniers Loups-garous, il pourrait passer sa dernière nuit à dormir.
D'ailleurs, il fallait que je demande à Matis de me tuer cette nuit, je suis sûr qu'il sera d'accord, il ne voudrait sûrement pas s'en prendre à son meilleur ami...
J'allais répliquer qu'il pourrait se reposer ce soir mais la voix du Maître du Jeu dans les hauts parleurs me coupa dans mon élan :
- Tous les villageois doivent se réunir au centre du village pour commencer le Conseil.
David et moi échangions un regard avant de se diriger d'un même pas jusqu'à la place du village.
Pour une fois, aucun corps recouvert de drap n'était présent. Je pris place sur l'un des rondins et David prit place à mes côtés.
Bientôt, Matis et ma sœur débarquèrent, main dans la main. Je serrai les dents en essayant tant bien que mal d'ignorer ce détail.
Les deux tourtereaux se séparèrent. Marina vint s'asseoir à ma gauche et Matis s'assit à la droite de David. Il ne manquait plus que Léana et nous serions au complet.
Celle-ci arriva deux minutes plus tard, le visage encore bouffi à cause de mes coups de poing. Elle nous jeta à tous un regard noir empli de haine et alla s'asseoir le plus loin possible de nous.
Le Maître du Jeu arriva à son tour :
- Cette nuit était une nuit de paix et d'harmonie, personne n'est mort.
Je vis du coin de l'œil ma sœur se pencher pour croiser le regard de Matis et lui faire un petit sourire. Je retins un grognement et reportai mon attention sur le Maître du Jeu. Je devais m'occuper de mes affaires.
- Je vous laisse débattre sur celui ou celle que vous allez tuer aujourd'hui.
Léana se leva instantanément et pointa un doigt menaçant vers David et moi. Je ne voyais pas trop lequel de nous deux elle montrait...
- Il faut qu'on élimine le couple ! Comme ça, les Loups-garous auront gagnés !
Marina secoua la tête.
- Je ne peux pas voter contre mon frère, c'est au-dessus de mes forces...
Léana poussa un soupire en levant les yeux au ciel.
- On a cas voter contre David, ça revient au même !
Je jetai un regard à mon coéquipier, une boule dans le ventre et la gorge sèche. Je commençais à paniquer mais, lui, semblait confiant.
D'ailleurs, il se leva à son tour et lorgna la jeune fille ébène d'un air menaçant.
- Moi, je pense qu'il faudrait éliminer Léana. Elle n'arrête pas de foutre la merde depuis qu'elle est là et puis, elle se prend pour la meilleure, il faudrait qu'on l'a fasse redescendre à sa place, sous terre !
Je ne pus retenir un sourire. David avait raison. Même si, au début, c'était grâce à Léana que je n'étais pas mort, elle avait commencé à me menacer et à menacer ma sœur et, ça, c'était la goutte de trop.
Le Maître du Jeu revint vers nous, son éternel sourire figé sur ses lèvres.
- Le débat est maintenant terminé. Nous allons procéder au vote. Qui vote contre David ?
PDV Léana
Je levai ma main très haut dans le ciel en espérant très fort que mes coéquipiers Loups-garous suivent mon geste.
Je vis la main de Matis se lever dans l'air, hésitante. Il lança un regard désolé à son meilleur ami. David l'ignora. Son corps était tendu à l'extrême.
Je fixai Marina d'un air menaçant. Je vis des larmes s'échapper de ses yeux quand elle leva la main à son tour. Je me sentis tout de suite rassurée. Il y aurait deux votes contre trois, nous allions gagner !
- C'est noté. Qui vote contre Léana ?
Les deux garçons réunient par le Cupidon levèrent la main d'un même geste assuré. Beaucoup trop assuré pour des gens qui savaient qu'ils allaient mourir... Il y avait un problème quelque part...
- Trois votes contre David et trois votes contre Léana. Ex-aequo...
Je fronçai les sourcils, mes mains se mirent à trembler. Je ne contrôlai plus du tout la situation...
- Mais, ils ne sont que deux à voter contre moi !
Le Maître du Jeu me fit taire d'un geste dédaigneux de la main.
- C'est à Éliot, le maire, de départager les votes.
J'écarquillai les yeux. Mais oui, le maire ! J'avais complétement oublié qu'il était là... Son vote comptait double !
Éliot planta ses yeux noirs dans les miens. Je savais qu'à cet instant, j'étais entrain de vivre mes derniers moments de vie. Étrangement, je me sentis très calme, comme si j'avais toujours su que ce moment allait arriver.
- Je suis désolé Léana, mais c'est toi qui va y passer.
Une lueur désolée brillait vraiment dans le regard du jeune pauvre. Pourquoi se sentait il désolé pour moi ? J'avais fais de sa vie un enfer depuis qu'on était arrivé ici...
Le Maître du Jeu s'avança vers moi et posa l'éternelle question :
- J'espère que ça te va de mourir noyée ? De toute façon tu n'as pas d'autre choix.
Un frisson me parcourut tout le corps. Je me levais, les mains tremblantes et suivies le Maître du Jeu sur l'estrade où une petite bassine rempli d'eau était posée sur le sol.
Je fixai la bassine. Celle qui allait causer ma mort. Il y avait tellement peu d'eau là-dedans que j'avais du mal à croire que j'allais réussir à me noyer...
- Met toi à genoux devant la bassine.
Bizarrement, la voix étrangement douce du Maître du Jeu me rassura. J'exécutais son ordre, la tête vide.
- Quels sont tes derniers mots avant de mourir ?
J'avais un peu mal aux genoux agenouillé, comme ça, sur le sol dure de l'estrade. Malgré ça, je gardais contenance et levai les yeux vers les autres villageois.
- David, je crois que j'ai enfin trouvé un adversaire plus intelligent que moi, bravo.
David était étonné. Il me fixait, ses yeux semblables à deux grandes billes rondes.
- Marina... Je suis sûre qu'on aurait pu être amie en d'autres circonstances...
La pauvre eu un sourire timide et haussa les épaules.
- Éliot... Je suis désolée de t'avoir embarquée dans des dramas qui ne te concernaient pas du tout.
Il hocha la tête, les yeux fermés, acceptant mes excuses.
- Matis... T'es l'un des meilleurs coups que j'ai jamais eu.
Je me tournais ensuite vers le Maître du Jeu, ne voulant pas regarder la réaction de Matis.
- Et vous, monsieur, je vous trouve vraiment flippant... Mais j'espère que vous êtes forcé à l'être et que vous ne prenez pas vraiment de plaisir à faire tout ça...
Je remarquais une lueur étrange dans le regard du Maître du Jeu mais, bien vite, tout redevint normal. Je soupirai. C'était bon, j'étais en paix avec tout le monde, je pouvais partir.
- C'est bon, j'ai fini. Vous pouvez me tuer.
Le Maître du Jeu m'agrippa les cheveux d'une poigne de fer et plongea ma tête de force dans la bassine, sans que j'eus le temps de prendre une gorgée d'air.
L'eau était glaciale et me picota le visage. Le Maître du Jeu maintenait ma tête dans le fond tellement fort que mon nez s'était écrasé contre la paroie de la bassine. Je l'avais entendu craquer et j'avais l'impression que du sang en jaillissait car l'eau devenait de plus en plus sombre.
Bientôt, l'air me manqua et je commençais à vouloir remonter à la surface. Bien évidemment, le Maître du Jeu ne me laissa pas faire.
Je me débattais de plus en plus fort. Je sentais que le Maître du Jeu allait bientôt lâcher prise.
Malheureusement, je me mis à boire la tasse et les forces me manquèrent pour me débattre. Mes poumons me brûlaient à mort. Je ne pouvais plus résister.
Alors, j'arrêtais tout mouvements et commençais à me détendre.
Une lumière blanche vint soudainement m'éclairer le visage, de plus en plus éblouissante. Je tendis la main pour la toucher. Je me sentis flotter hors de mon corps.
C'était fini, j'étais morte.
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