Chapitre 1


Ouvrir les yeux. Difficilement. Les refermer face à l'éblouissement. Les rouvrir complètement. Analyser le décor. Blanc. Immaculé. Triste. Où suis-je ? Pourquoi cette blanche prison si austère ? De l'agitation, un mouvement, enfin de la vie et peut être des réponses. Une femme vêtue de blanc pénètre dans cette chambre-prison. Elle ne semble pas être ravie d'être ici, ce que je comprends parfaitement.


 Elle s'approche rapidement voyant que je suis éveillée. Elle me dit que tout va bien, me laisse reprendre complètement mes esprits avant de me poser quelques questions. Elle s'enquière d'abord de mon état général, si j'éprouve la moindre douleur, comment je me sens. Elle s'interrompt un instant paraissant chercher ses mots avant de finalement me demande mon nom. J'allais lui répondre quand je m'aperçois d'une chose. je me fige ainsi, la bouche à demi ouverte ne laissant filtrer aucun son : je ne sais pas, enfin je ne sais plus, impossible de me souvenir de mon nom. Rien. Le vide. Mes neurones tournent à plein régime mais pourtant il m'est impossible de répondre. 


Tout s'enchaîne alors très vite, je sens la panique monter en moi, mon souffle se bloque et ma respiration devient difficile. Elle se précipite à mon chevet pour m'apaiser, calmer la tempête d'angoisse qui fait rage en moi à cet instant. Une fois le calme revenu, elle quitte la chambre, me laissant seule, perdue dans l'inconnu. Puis un ballet de médecins prend place ; on entre, on sort, de nouveau examen sont fait. Le verdict tombe finalement : je suis amnésique bien qu'il n'y ait aucune lésion le justifiant, mon esprit à tout bloqué suite à mon accident. 


Je les ai interrogé au sujet de cet accident mais on m'a rétorqué qu'on ne sait pas précisément ce qui m'avait conduit ici. Selon mes blessures, il apparaîtrait qu'une voiture m'aurait renversée. C'est un habitant qui m'aurait trouvée dans une rue isolée au petit matin après une nuit particulièrement orageuse sans sac ni papiers puis m'aurait conduit ici. 


Alors je me retrouve ici, dans cet enfer, à cause d'un maudit chauffard qui m'a laissé pour morte après m'avoir renversé. Ma vie a basculé à cause d'un lâche qui n'a pas assumé, d'un autre lâche qui m'a volé mon identité en volant mes papiers et de mon propre esprit qui a dressé un mur devant mes souvenirs. Comment me reconstruire ? Qui suis-je ? Une vague de questions m'envahit et je sens la panique m'envahir. L'angoisse monte en moi sans que je ne puisse y faire face. Je m'agite de plus en plus, décrochant de la réalité, la voix de l'infirmière devient lointaine puis plus rien, je sombre dans les ténèbres.



Vide, c'est ce que je ressens depuis une semaine, depuis mon réveil. Au cours de cette semaine rien n'a changé, aucun souvenir n'a refait surface. J'essaie de faire face et de ne pas me laisser de nouveau submerger par l'angoisse. Plus les jours filent, plus je sombre ; mon espoir s'efface chaque jour d'avantage. On me répète sans cesse que le meilleur remède à mon amnésie est le temps. Je ne les crois pas, en une semaine pas une bribe de souvenir même quelque chose d'infime. Je ne suis plus rien, je n'ai plus ni nom ni date de naissance ni adresse ni... RIEN. C'est ce que je suis, ce que j'ai désormais. Rien...


Personne ne semble me chercher, aucune disparition ne correspond à mon signalement. Pourquoi personne ne me cherche ? Qu'est-ce que j'avais bien pu faire avant pour mériter cela ? Des questions, encore et toujours ces mêmes questions qui ne me laissent aucun répit, elles m'étouffent d'avantage chaque minute qui défile. La migraine me guette à nouveau, vicieuse complice de ces questions. Depuis mon réveil, aucune d'elles ne m'a quittées plus d'une seconde. Devant ma souffrance apparente, le personnel de l'hôpital se montre patient mais m'offre également des regards dégoulinant de pitié. Ils me dépriment avec leur « Garde espoir », « Bat-toi », « Courage », comme si être un étranger pour soi-même était simple, comme s'il pouvait comprendre ce qu'on ressent dans cette situation.


Deux semaines dans l'enfer immaculé, deux semaines sans le moindre progrès. J'ai enfin décidé de quitter ma cage blanche pour visiter l'hôpital. Mes quatre murs ivoires m'ennuyaient tellement. Depuis plusieurs jours maintenant j'arpente les couloirs.


L'hôpital était assez banal, un peu ancien et assez mal entretenu à en juger la peinture écaillée des couloirs. Les chambres s'organisent autour de ces long couloirs sans fin, lugubre à la tombée de la nuit. J'aire dans les couloirs comme les nuits précédentes lorsqu'une lumière m'attire dans la chambre 483. Je m'avance lentement jusqu'à la porte, poussée par la curiosité, à l'intérieur un vieil homme d'environ 90 ans est là assis dans un fauteuil contemplant une vieille photographie. Je n'ose pas entrer de peur de le déranger, je reste alors sur le seuil à l'observer. Il interrompt soudainement sa contemplation pour poser son regard sur moi. J'entame un mouvement pour regagner ma chambre, honteuse d'avoir dérangé sa quiétude, quand il m'interpelle.


« Attends, me dit-il d'une voix calme. Tu sembles si perdue. Perdue dans l'amertume, perdue dans tes tourments. Qu'est-ce qui te ronge jeune fille ?

-Je suis prisonnière d'un passé que j'ai oublié, victime d'un présent que je ne peux pas maîtriser et terrifié par un avenir incertain, lui répondis-je malgré moi, presque machinalement.

-Les souvenirs sont des poisons qui nous rongent constamment. Quand ils sont là, on les ressasse inlassablement mais lorsqu'ils nous sont ôtés, on court vers eux désespérément. »

Il se tait à la fin de sa réplique, emporté par Morphée. Je pars rejoindre ma chambre, confuse, chamboulée par cet homme, par ces paroles et surtout par mes révélations ; c'est la première fois que j'exprime ce que j'ai vraiment sur le cœur. Je tente de trouver le sommeil moi aussi mais en vain. Les paroles de cet homme résonnent en moi. Les souvenirs, c'était la clé de ma vie actuelle mais que faire : m'en créer de nouveau ou poursuivre les anciens...

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