Chapitre 11
Un autre monde. Les Lymbes étaient un autre monde. Crée il y a des milliers d'années par une dizaines de personnes aux pouvoirs incommensurables...
Quelle énorme farce !
Pourtant, le prisonnier dont je ne connaissais toujours pas le nom, avait lâché ces foutaises avec le plus grand des sérieux. Au point où durant quelques instants, le doute m'avait fait chanceler. L'homme, profitant de mon trouble, avait décrété qu'il était fatigué et s'était endormi, me laissant seule avec son bordel derrière lui.
D'abord, il n'y eut que le néant. Durant les longues secondes où j'assimilais ces propos extravagants, aucune pensée ne me traversa. Le vide régnait en maître. Puis dans une déflagration digne du Big Bang, je fus submergée. Questions, railleries, sanglots... tous s'étaient passés le mot et se précipitaient, dans un tumulte assourdissant, pour piétiner mon pauvre cerveau.
Il y a quelques minutes, je me demandais combien de temps encore tiendrait ma raison.
Je crois qu'elle vient juste de ployer.
Je tentai de réveiller le prisonnier, qui au bout de quelques secondes seulement, avait fini par sombrer. Mes exclamations se confrontèrent, tel un insecte contre un pare-brise impitoyable, à un sommeil de fer dont elles ne purent le tirer (ou alors, à un sadisme à toute épreuve qui poussait l'homme à m'ignorer) Après quelques appels qui ne rencontrèrent que le silence, le garde m'intima de me taire, accentuant son ordre d'un coup de pied dans les barreaux, avant de repartir aussi soudainement qu'il était apparu. Je ne pus que le contempler – lui puis le vide qui suivit son départ- la bouche entrouverte, interdite.
Un autre monde.
C'était absurde. Tellement absurde que j'en aurais ri. Ou pleuré. Tellement absurde que le plus crédule des gamins n'y aurait certainement pas cru. Et pourtant, le doute me tiraillait. Était-ce vraiment impossible ? Je m'en voulais de penser ainsi. Un autre monde - de surplus, un monde où chacun possédait une magie cachée derrière le mot Don – ça n'existait pas. Ça ne pouvait exister. Mais je revoyais ma tante incanter, mon réveil subit dans cette forêt, ces allés et bâtiments vieillots tout droit sortis d'une autre époque – sans parler de la population. Je repensais à cette chose...
Et je me demandais...
Était-ce vraiment impossible ?
J'avais envie de pleurer. De crier, de hurler. Je voulais rentrer chez moi. Serrer ma mère et mon frère dans mes bras. Je désirai tellement de choses, tellement que je n'en voyais pas le bout. Mais je pouvais compter sur les doigts d'une main celle que je ne souhaitais pas. Elles n'étaient pas nombreuses, à vraie il n'y en avait qu'une.
Je ne voulais pas être seule.
Et pourtant je l'étais.
Seule dans une cellule. Seule dans un endroit inconnu. Seule dans un monde étranger. Je n'avais aucun repère, aucun pilier. J'étais seule, seule avec mes pensées.
Et j'étais terrifiée.
Une cascade d'interrogations m'étouffait sous son poids, me noyait sous son flot. Allais-je sortir d'ici ? Où irais-je ensuite ? Retrouverais-je un jour ma maison ? Ou alors mourrais-je ici, étouffée par la solitude et la culpabilité ?
Cette dernière pensée m'acheva, elle fut le coup de grâce. Soudain devenu flasque, comme une poupée de chiffon que l'on aurait abandonnée, jetée comme un vieux déchet, je me laissai glisser sur la pierre froide et trempée, le regard obstinément tourné vers le couloir. Vide.
Personne ne viendrait me chercher.
J'abaissai mes paupières, ne supportant plus cette vision, même si je me condamnais par la même occasion à affronter le tourbillon de mes pensées. Une tornade puissante. Dévastatrice. Chaotique.
Et pourtant, malgré la virulence de cet orage, le voile trouble du sommeil vint calmer la tempête. Puis, avant de me laisser emporter par cet engourdissement libérateur, j'eus une dernière pensée. Une dernière espérance.
Tout ça n'était qu'un rêve et j'allais me réveiller.
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