La peur de l'échec
Le titre est trop révélateur certainement.
Mais j'avais envie de parler, de me plaindre aussi.
Chaque personne a ses peurs, sa manière de voir le monde. Des choses qui lui font dire:
"Non, je ne peux pas. Je ne peux plus."
C'est le cas par exemple de ma licence.
Alors je plonge, je chute de plus en plus. Je suis comme l'oiseau dont les ailes sont brisées qui voit sa fin venir. Le prédateur est en bas, en train d'attendre.
Les yeux brillants d'un chat dans l'obscurité. La fin.
La gorge tranchée.
Tout est terminé.
Pourtant, on pourrait aussi dire que tout commence.
J'ai vu venir ma fin il y a longtemps. Mais tout ne me retombe dessus que maintenant.
Ma majeure, c'est de l'économie. Je ne l'avais pas choisi à la base, je tiens à le préciser. C'était une obligation, on va dire. Les faits m'y ont conduit. C'est pourtant une matière qui ne m'avait jamais intéressée. Bien sûr, les théories même avaient leur importance. J'aime apprendre. Découvrir, comprendre. Je ne regrette pas cela, jamais. Je prends toujours ce qui peut m'aider. Mais en même temps, ce n'est pas un endroit qui m'attirait inexorablement. Oui, cela m'intéressait suffisamment pour que j'écoute et retienne mais non, je n'avais envie d'en faire mon métier.
Y passer ma vie. Certaines choses sont intéressantes d'ailleurs. A partir du moment où on peut les voir sous d'autres optiques, meilleures à beaucoup de points de vue.
Mais j'y ai fréquenté trop de gens que je ne pouvais supporter.
Imaginez-vous dans un amphi où les gens rient.
De la bonne humeur, me direz-vous... C'est très bien, n'est-ce pas ?
Surtout quand cela provient d'une seule chose: le fait que ceux qui gagnent moins d'argent sont les "cons" qui choisissent de faire social, imaginez-vous, ils veulent aider des gens, travailler avec eux, soigner même... Quelle idée stupide ! L'autre catégorie propice aux rires est celle des artistes. Ils gagnent si peu. C'est si simple de se moquer d'eux.
Dans cette ambiance, vous pouvez mieux me comprendre, le malaise qu'on peut ressentir. Quand on est encore un peu humain bien sûr... Quand on pense aux autres avant de penser à soi-même...
Quand on veut aider... Plutôt que de détruire.
Mais autour de nous, ce sont ces rires cauchemardesques qui nous font face.
Les élèves, les professeurs, tout le monde trouve cela hilarant, logique...
Moi, je trouvais cela simplement malsain.
N'a-t-on pas le droit de vouloir aider ? De penser aux autres ? De vivre pour eux ? De croire en nos amis et en notre famille ? Plutôt qu'en cet "argent-dieu" ?
Il semblerait que non...
Et moi, non habituée à ce qui choquait mes valeurs, j'ai chuté.
Peut-être était-ce une manière de fuir, d'y échapper.
Je chutais, tombais au creux la falaise...
En même temps, je devenais de plus en plus fragile, la chute étant difficile...
Et puis cela s'est vu. Mes parents... Mes amis... Pour la première fois, mon entourage m'a vu tomber.
J'aurais pu espérer que certaines personnes m'auraient soutenue. Ce fut le cas de certaines, une fois ma fin visible mais lorsque je la voyais venir, j'étais seule.
Parce qu'une chose était encrée dans leur tête. Ce n'était pas possible. Impossible, même.
J'étais la bonne élève, celle qui ne peut faillir, la première de classe, douée, compétente. Qui doit réussir. Aucun autre choix n'était offert à moi.
Pour eux, il était certain que je pouvais m'y faire, perdre les derniers restes de mon humanité. Parce que je devais réussir. Pourtant, je n'ai pas pu.
Je suis tombée.
Je tombe encore.
Alors sont venues les remarques, les reproches...
"Tu n'as pas pu tout rater tout de même ?"
"Tu es compétente, tu l'as toujours été, alors pourquoi tu n'y arrives pas ?"
"Révise."
"Travaille plus"
Alors que pendant ce temps, ma coquille s'était fissurée, elle l'est toujours, m'empêchant de me reprendre.
La chute avait fini par me blesser.
La peur de l'échec, trop inculquée en moi, me terrassait, m'empêchait d'agir, même de réviser.
Et je savais que de nouveau j'échouerais. Car je n'en pouvais plus. Impossible de me reprendre.
Tout ce qui m'importait venait d'éclater.
Tout ce qu'on m'imposait me pesait trop. Me pèse trop.
Pendant que les autres de ma licence, par un nombre de messages énormes, m'harcelait, pour savoir, toujours, tout. Des gens qui ne m'avaient jamais parlé avant, voulaient le résultat de mon échec. Quelle gentillesse de leur part !
Et moi, à chaque message en plus, je tombais un peu plus, sous les yeux de quelques personnes.
Chacun était un poignard dans mon dos qui me faisait avancer.
Et pas de la bonne manière.
Cette peur de l'échec, chez moi, conduit non pas à un avancement. Elle ne me fait pas réviser. Elle ne me fait pas dire que je dois bouger, avancer. Faire quelque chose.
Non.
Elle me montre mon inutilité. Me fait avoir des pensées noires, suicidaires. Me font me mutiler aussi. Parce que je ne suis pas ce qu'ils attendent. Ce qu'ils veulent de moi.
Je n'ai jamais eu le droit à l'erreur.
J'en ai trop commise.
Le supporter, maintenant, me semble bien impossible...
Il me suffit de voir mon entourage, ces messages harceleurs, ces attentes trop lourdes, pour que le fardeau s'agrandisse, toujours plus.
Qu'il est étonnant de voir que ce qui me fait tenir, c'est en même temps quelque chose qui me culpabilise. Ecouter des gens en train de parler ou de jouer, jouer avec certaines personnes, avoir des relations où l'on ne me reproche pas forcément mon inaptitude. Jouer. Avec certaines personnes sur LoL, ou avec d'autres ailleurs. Ecrire. Lire, vivre tout simplement.
Parce qu'au final, j'ai l'impression d'avoir sacrifié ma vie et mon humanité à cette peur de l'échec et aux attentes d'une famille qui ne m'a jamais comprise.
J'aimerais dire que "je suis humaine". Certains le prendraient mal, mais dans le cas précis, c'est probablement la dernière chose qu'il me reste.
Une humanité détruite.
Une carapace fracassée.
Des ruines à reconstruire ou à jeter.
Et une décision à prendre.
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