Chapitre 7 : Décisions
N se retourna une nouvelle fois dans le lit, elle n’arrivait pas à se rendormir, et encore moins à se lever. Elle prenait le contre-coup des derniers évènements. Elle qui avait espéré pouvoir rentrer tranquillement chez elle après sa mission avec Raido, c’était loupé. Ses pensées se tournèrent vers son appartement. Il avait été saccagé dans les règles de l’art. Même si elle avait tenté de ne rien laisser filtrer de ses sentiments devant Genma, voir dans cet état l’endroit où elle vivait lui retournait l’estomac. Pourquoi s’acharnait-on sur elle comme ça ? Elle ne souhaitait rien d’autre qu’un peu de tranquillité et quelques réponses sur son passé. Elle n’avait eu aucune mauvaise intention en arrivant à Konoha, et rien ne justifiait ce genre de chose.
Un soupir lui échappa avant qu’elle ne se blottisse encore plus sous la couverture. Genma avait eu raison en prétendant que rien n’était plus confortable que son lit. La kunoichi avait l’impression de se trouver sur un nuage moelleux et doux. Son chef d’équipe hantait ses pensées. Elle se sentait mal de lui causer encore plus de soucis. Ce que lui avait dit Lyra quelques heures auparavant ne cessait de tourner en boucle dans sa tête. Il avait besoin de repos, et pourtant, il avait insisté pour s’occuper lui-même de cette affaire. N ne lui avait rien dit, mais elle s’inquiétait réellement pour lui. Malgré le calme apparent qu’il avait gardé devant elle, elle avait pu sentir la colère bouillir en lui. Tout compte fait, ils ne valaient pas mieux l’un que l’autre, à se dissimuler mutuellement leurs états d’âme…
La quiétude qui l’avait envahi en retrouvant le village et son agitation tranquille avait intégralement disparu à présent. Seul un sentiment amer lui restait. Elle n’avait pas pu dormir longtemps, trop occupée à ruminer. Un bruit se fit entendre dans la serrure, et par habitude, elle se tendit, avant de réaliser que c’était certainement Genma qui rentrait. Après quelques secondes, des bruits de pas se firent entendre dans le couloir. Ils s’arrêtèrent devant la chambre, et un coup discret sur la porte prit le relais.
— Entre, fit la jeune femme à voix basse.
Genma apparut dans l’embrasure de la porte, un air soucieux sur le visage. Air qui disparut aussitôt lorsqu’il s’approcha de sa coéquipière. Il était diablement efficace quand il s’agissait de dissimuler ses sentiments.
— Comment tu te sens ? lui demanda-t-il.
— Fatiguée. Je n’ai pas vraiment réussi à dormir…
Elle se redressa, et lui laissa une place sur le lit. Il vint s’y laisser tomber comme une masse. Midi était à peine passé, mais il se sentait déjà lessivé par cette journée. Il laissa son esprit divaguer un peu, avant de s’assoir correctement dans le lit et s’adossant au mur contre lequel il se trouvait. Ses yeux se fermèrent doucement et sa respiration s’apaisa.
— Tu as l’air épuisé toi aussi, ajouta N.
— Un peu, la semaine a été compliquée.
— Tu me racontes ?
Il soupira. Ses soucis lui paraissait bien moindres en comparaison de ceux de la jeune femme. Personne n’essayait d’avoir constamment sa peau ou venait saccager son appartement après tout. Il la sentit s’approcher de lui, hésitante. Il ouvrit les yeux et la dévisagea. Après s’être plongé une fois de plus dans son regard doré, il n’hésita pas plus longtemps et vint poser sa tête sur ses jambes, par-dessus la couverture qui les recouvrait. Retrouver cette douceur lui fit un bien fou. Il ne comprenait pas vraiment ce qui le liait à N, mais il se rendait compte que sa présence lui était devenu nécessaire.
— Gen’ ?
— J’ai juste eu quelques petits soucis, éluda le ninja. Tu veux une bonne nouvelle ?
— Je t’écoute. Elle préféra ne pas relever le fait qu’il changeait totalement de sujet.
— Il a quelques jours, j’ai obtenu du Hokage que vous ne partiez plus en mission tant que je ne suis pas remis sur pied.
— Trois semaines de repos alors ? Son regard s’était illuminé d’un coup.
— Trois semaines d’entrainement, Gamine.
Elle grogna. Elle n’aurait pas dit non à des vacances. Il y avait cependant un bon côté dans cette situation : elle pourrait garder un œil sur Genma et veiller à ce qu’il se repose correctement. Pensive, elle se mit à jouer avec les mèches de cheveux de son coéquipier. Sa présence lui avait manqué, elle ne pensait pas s’être autant attaché à lui. Ce n’était pas dans ses habitudes après tout.
— Tu ne pourras pas t’entraîner avant une bonne semaine mon vieux.
— Ça ne m’empêchera pas de te coacher. Je refuse que notre prochaine mission se passe comme les deux dernières. Je ne veux pas que tu sois blessée de nouveau.
— D’un point de vue purement logique, il vaut mieux que ce soit moi plutôt que toi ou même Raido. Je guéris bien plus vite.
— Ton jutsu ne te suffira pas toujours. Tu as eu de la chance cette fois-ci Un jour, la blessure que tu auras sera trop importante pour que tu puisses te soigner seule. Je refuse de prendre le risque de te perdre N.
— Tu ne diras pas ça après trois semaines passées avec moi, plaisanta-t-elle.
Elle ne voulait pas lui montrer que ses paroles l’avaient touchée. Après tout, montrer ses sentiments, c’était être faible. C’était ce qu’on lui avait appris à maintes reprises. Un ninja ne doit rien ressentir, un ninja doit seulement agir. C’était un véritable précepte de là où elle venait et elle l’avait toujours appliqué. Pourtant, elle sentait que quelque chose avait changé en elle. Se lier avec des gens était une chose qu’elle avait toujours refusée. Lyra avait été la seule exception pendant longtemps. Puis elle était arrivée à Konoha et tous ses repères s’étaient envolés. Son amitié avec Kakashi, puis avec Raido… Cette proximité avec Genma… Tout ça la perturbait au plus haut point.
Elle n’eut pas le loisir d’y penser plus longtemps : des pas se firent de nouveau entendre dans le couloir. Ce devait être Raido qui se réveillait. Ce dernier frappa un coup à la porte avant d’entrer directement sans attendre de réponse.
— Genma, t’es… ?
Sa voix se tue lorsqu’il aperçut ses deux coéquipiers dans le lit. N crût même voir une légère rougeur apparaître sur les joues du balafré. Elle se contenta de son côté de le fixer d’un air blasé tandis que Genma n’avait même pas daigner ouvrir les yeux.
— Mais tu n’étais pas censé dormir chez toi, N ? demanda-t-il, toujours surpris.
— Il y a eu un petit changement imprévu au niveau du programme, expliqua Genma.
— Comment ça ?
— Mon appartement a été saccagé.
Le visage de Raido présenta une palette d’émotion impressionnante en un court instant. N pu d’abord y lire de l’incompréhension, puis de la surprise qui se transforma rapidement en colère. Enfin, la colère fit place à une expression de pitié lorsqu’il fixa la jeune femme. Elle détesta ça.
— Tu es la bienvenue ici Gamine, se contenta de répondre Raido après avoir repris contenance.
— C’est ce que je lui ai dit ce matin.
— Je n’ai pas besoin de votre pitié. Je peux très bien m’en sortir seule.
Son ton s’était fait glacial. Elle haïssait ce sentiment de faiblesse qui l’envahissait quand les gens avaient pitié d’elle. Elle n’avait besoin de personne pour s’en sortir, elle se l’était toujours répété. Genma se redressa d’un coup après la réplique de la jeune femme, étonné par cette véhémence. C’était la première fois qu’il la voyait aussi agressive et il n’était pas sûr d’aimer ça. Avant qu’il ne puisse intervenir, Raido calma la situation.
— Libre à toi de refuser, mais ce n’est pas par pitié que je te propose ça, tout comme Genma. C’est par amitié. Il attendit quelque seconde avant de reprendre : ne pas laisser tomber son coéquipier, c’est la base d’une escouade, et ce, même quand ce coéquipier est aussi épuisant que tu peux l’être.
Cette fois-ci, ce fut N qui se sentit gênée par la situation. Elle n’avait pas l’habitude, à coup sûr, de se faire remballer de la sorte. Elle passa une main dans ses cheveux, soupira, et se mordit les lèvres.
— Je vous attends dans le salon, qu’on puisse parler de tout ça, ajouta le ninja.
Il repartit sans attendre de réponse, fermant la porte derrière lui. Genma, de son côté semblait toujours énervé
— Genma…
— Tu penses réellement que c’est par pitié que j’agis comme ça avec toi ?
— Je…
— Il serait temps que tu ranges cette fierté mal placée Gamine. Il la toisait à présent avec un regard dur. Ce n’est pas pitié qu’on t’aide, comme l’a dit Raido. On tient à toi et on veut te soutenir. Chasse l’idée que c’est pour avoir bonne conscience qu’on est sympa avec toi, ce n’est pas notre style. Tu as le droit de nous envoyer balader et de te démerder seule, mais le jour où tu te retrouveras en difficulté, j’espère que tu te souviendras du fait qu’on t’avait tendu la main et que tu l’as refusé.
Le ninja se leva d’un mouvement souple et se dirigea vers la porte pour sortir. Il allait poser sa main sur la poignée lorsque son geste se stoppa. Il sembla hésiter avant de reprendre la parole :
— Accepter de l’aide n’est pas une preuve de faiblesse N. Bien au contraire.
N l’observa refermer la porte derrière lui. C’était la première fois qu’il se montrait aussi froid envers elle. Sans savoir pourquoi, un tel comportement venant de lui la blessait. Pourtant, elle était habituée à faire face à ce genre de situation. Les rares relations qu’elle avait pu avoir avant s’étaient toujours conclues de cette manière, et chaque fois, ça l’avait laissé de marbre. Elle soupira. D’une manière ou d’une autre, elle allait devoir se rattraper. La meilleure chose à faire, pour l’instant, était de présenter ses excuses aux garçons. Dire qu’elle envisageait cette solution de façon sérieuse alors qu’avant, cette éventualité l’aurait fait fuir le plus loin possible. S’excuser de ses actes, c’était admettre que l’on avait fait une erreur, et les ninjas ne faisaient pas d’erreur. C’était encore l’un des préceptes qu’on lui avait rabâchés toute son enfance.
Il était temps pour elle d’oublier tous ces préceptes. Ils ne lui avaient jamais rien apporté de bon… La jeune femme prenait doucement conscience que son monde avait changé et qu’elle n’arriverait à rien en continuant à repousser les gens de cette manière. Cela faisait plus de dix ans qu’elle était partie sur les routes maintenant, et elle n’avait quasiment pas progressé dans ses recherches… Il était temps pour elle d’accepter de l’aide. Elle se leva, enfin décidée à arranger les choses.
Raido, avachi sur la banquette du salon, tentait d’ignorer Genma qui tournait en rond comme un lion en cage. La tendance qu’avait son ami à ruminer en boucle ses soucis l’avait toujours épuisé. Au vu de son comportement, il pouvait aisément deviner que l’altercation avec leur coéquipière lui pesait. Il ne savait pas ce qui avait été dit après son départ de la chambre, mais ça avait l’air assez sérieux pour affecter le ninja. Quoique, lorsque ça concernait N, Genma avait une légère tendance à s’emporter, songea Raido. Cela le stupéfiait de voir son ami se soucier autant de la jeune femme, lui qui était plutôt du genre à être blasé par tout ce qui se passait autour de lui. Raido sentait qu’il allait sûrement en voir de toutes les couleurs avec ces deux-là…
Les pas de Genma se stoppèrent quand N rentra dans la pièce. D’un côté, il s’en voulait de s’être emportée contre elle, et de l’autre, il pensait cette mise au point plus que nécessaire. Elle devait comprendre qu’elle n’avait plus à affronter tout cela seule et que rejeter leur aide ne la mènerait à rien. Il espérait sincèrement que leur discours mutuel avait fait réagir la jeune femme.
— Je suis désolée. Elle prit une grande inspiration avant de continuer : je n’aurais jamais dû vous parler de cette façon et me comporter ainsi. Votre présence à tous les deux me touche bien plus que je ne le laisse paraître, tout comme l’aide que vous m’offrez. Je…
— Tu peux t’arrêter là Gamine, la coupa Raido. On ne t’en veut pas vraiment, on voulait juste te faire comprendre la situation. Quoi qu’il en soit, tu pourras toujours compter sur Genma et moi, compris ?
Elle hocha la tête gênée. Son air coupable tira un sourire à son aîné qui se leva de la banquette pour lui ébouriffer les cheveux. Pour une fois, elle se laissa faire sans râler, bien consciente que ce genre de comportement était la preuve de l’amitié qu’il lui portait. Il sortit de la pièce, ajoutant simplement qu’il allait chercher à manger pour tout le monde, et très vite, le bruit de la porte d’entrée que l’on fermait se fit entendre.
Genma et N se retrouvèrent une nouvelle fois seuls, et une tension palpable pouvait se ressentir. Le ninja ne savait pas vraiment comment réagir. Cette femme le rendait fou, lui faisait perdre son calme en un instant. Pourtant, il ne se sentait pas capable de lui en vouloir plus longtemps. L’air coupable qu’elle affichait à présent le conforta dans sa décision de lui pardonner. Depuis qu’elle était rentrée dans la pièce, il avait tenté de ne pas la dévorer du regard, mais il devait avouer qu’il la trouvait bien trop tentante. Elle avait gardé le t-shirt qu’il lui avait prêté – sa garde-robe ayant été saccagé avec le reste de son appartement. Avec leur différence de stature, ce haut était au moins deux fois trop grand pour elle, mais il laissait tout de même apparaître ses jambes fines, d’une couleur d’albâtre. Avec ses cheveux en bataille qui faisait ressortir son côté sauvage, il la trouvait magnifique. Il aurait voulu se délecter plus longtemps de cette vision, mais une petite voix dans sa tête lui rappela qu’en tant que capitaine de son escouade, il ne devait pas se permettre ce genre de comportement.
— Tu m’en veux encore ? lui demanda-t-elle d’une petite voix.
Elle n’osait pas le regarder dans les yeux. Genma comprit qu’elle avait sûrement surpris le regard qu’il avait posé sur elle, et l’avait mal interprété. Sans un mot, il s’approcha d’elle, et en un instant, la jeune femme se retrouva entourés par son bras valide. Il approcha ses lèvres de son oreille, et dans un murmure, il lui répondit :
— Je suis incapable de t’en vouloir N.
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La soirée était déjà bien entamée quand Raido se releva d’un coup dans son fauteuil. Il fixa ses deux coéquipiers occupés à lire dans la banquette et qui ne lui accordèrent pas même un regard.
— Il serait peut-être temps que l’on parle de tout ça non ?
— De tout ça quoi ? lui demanda Genma sans détacher ses yeux de son livre.
— Au choix : de l’appartement saccagé, de la quasi-mission suicide, de tes entrevues avec le Hokage, des gens qui essayent d’éliminer N. On a l’embarras du choix.
N et Genma échangèrent un regard et dans un même mouvement, ils fermèrent les livres qu’ils lisaient et se redressèrent, attendant que Raido poursuive.
— Je vois que j’ai toute votre attention pour une fois… Commençons par le plus récent, qu’est-ce-que le vieux singe t’a dit quand tu l’as prévenu du saccage ?
— Je n’ai pas réussi à le voir en vérité. Il a prétexté ne pas pouvoir me recevoir aujourd’hui.
— Tu es sérieux ? Et toi N, tu ne dis rien ? La jeune femme restait étonnamment passive malgré cette nouvelle.
— J’ai appris à ne plus compter sur les têtes pensantes du village depuis longtemps. Ce n’est pas la première fois que vos dirigeants ne respectent pas leurs engagements envers moi.
— Ne tire pas trop vite des conclusions N. En vérité, Sarutobi a demandé à nous voir dans dix nuits, à l’abri des regards et des oreilles indiscrètes. Mais j’aimerais en savoir plus sur les engagements dont tu parles ?
— Quand je suis arrivée dans le village, j’ai passé un accord avec Hiruzen et les deux vieux qui le suivent partout. J’ai accepté de coopérer avec eux et de mettre mes talents de ninja et de médic-nin au service de Konoha, et en échange, je peux rester vivre ici en bénéficiant de leur protection comme une véritable citoyenne du village, tout en ayant le champ libre pour mener mes recherches. Comme vous avez pu le voir, le contrat n’est pas totalement respecté puisqu’ils s’évertuent à m’envoyer sur les missions les plus périlleuses possibles, qu’ils m’ont parquée dans un quartier maudit histoire de m’éloigner des autres habitants et qu’ils m’empêchent de mener à bien mes recherches.
— C’est-à-dire ? l’encouragea à continuer Raido.
— Je n’ai pas accès aux archives, même sous surveillance, on me refuse également l’accès au dossier les plus récents, et en plus de ça, je n’ai même pas le droit de pénétrer dans la bibliothèque du village. La seule possibilité d’en savoir plus serait de questionner les gens autour de moi, mais je n’ai le droit qu’à un rejet total de la part des personnes que j’aborde quand je tente le coup. Autant vous dire que je n’ai absolument pas progressé dans mon enquête malgré mes deux ans passés ici.
— Tu accepterais de nous en dire plus sur ce que tu cherches exactement ? lui demanda Genma d’une voix douce.
— Je cherche d’où je viens, tout simplement.
— De Kumo non ? risqua Raido.
N hésita. Elle en avait déjà trop dit pour s’arrêter là, mais si elle continuait, il n’y aurait plus aucun retour en arrière possible. Elle n’était pas sûre de vouloir impliquer les deux hommes dans cette histoire. Si elle leur en disait plus, ils se retrouveraient en danger par sa faute. Elle repensa à sa discussion avec Lyra. La médic-nin lui avait conseillé d’être sincère avec son chef d’équipe. Elle lui devait la vérité, elle le savait, tout comme à Raido d’ailleurs. D’une certaine façon, être au courant de ce qui se passait vraiment autour d’elle pourrait leur permettre de mieux se préparer aux dangers qui les guettaient.
Les deux hommes attendaient sa réponse en silence. Ils étaient tous les deux conscients du dilemme intérieur qui se déroulait dans l’esprit de la jeune femme. L’un comme l’autre ne voulaient pas la forcer à s’ouvrir, alors ils la laissèrent faire son choix. Après tout, ils lui avaient dit qu’ils seraient toujours à ses côtés pour l’aider, et ils comptaient bien respecter leur engagement. Genma sentit sa subordonnée se crisper à côté de lui. Il était rare de la voir aussi tendue. Désireux de l’aider, il se demandait ce qu’il pouvait faire de plus pour la mettre à l’aise. Finalement, elle laissa s’échapper un long soupir avant de se lever et de diriger vers la fenêtre, sans que le ninja ait le temps d’intervenir. Elle laissa son regard divaguer encore quelques secondes avant leur répondre. Puis d’une voix distante, elle commença :
— Je ne suis pas née à Kumo, de ce que je sais, je suis originaire du Pays du feu. À ma naissance, la seconde grande guerre battait déjà son plein. Je n’ai aucune idée de qui étaient mes parents, mais j’ai été enlevée très jeune. J’ai passé mon enfance dans un laboratoire. Je n’ai pas vraiment de souvenir de ce qu’on m’y a fait, ni de qui pratiquait les expériences que l’on subissait, les autres enfants et moi. Aux alentours de mes six ans, j’ai été vendu à un haut gradé du village de Kumo en tant qu’esclave. N stoppa son récit, pensive. Il était rare qu’elle évoque cette période de sa vie. Elle reprit son souffle et continua : par chance, j’avais un don pour le ninjutsu médical et le contrôle du chakra. Au lieu de se servir de moi comme une véritable esclave, les gens qui se cachaient derrière ce système m’ont placé dans un centre d’entraînement intensif. Pour le coup, ce n’était pas si horrible que ça, pour une fois j’étais traité comme les autres même si je n’étais que de la chair à canon pour les têtes pensantes de ce projet. Comme vous deux, je me suis retrouvée sur le champ de bataille pendant la troisième grande guerre.
Les deux hommes pâlirent à l’évocation de cette période de leur vie. Ils ne parlaient jamais de qui s’était passé sur le champ de bataille. Les souvenirs restaient bien trop frais dans leur esprit malgré le temps qui était passé depuis. Des blessures trop grandes avaient été ouvertes…
— Ça a été un massacre du côté de Kumo, reprit N sans se douter du trouble qui s’était emparé de ses deux coéquipiers. J’avais tout juste dix ans et j’ai vu les gens autour de moi mourir les uns après les autres. Un jour la faction dans laquelle j’étais s’est fait massacrer par votre quatrième Hokage, l’éclair jaune.
— Tu t’es battu contre lui ? lui demanda Genma, stupéfait par cette histoire.
— Tu rigoles ? Je ne serais plus de ce monde si ça avait été le cas. Je ne saurais jamais pourquoi, mais il m’a épargné et m’a encouragé à déserter, ce que j’ai fini par faire.
Elle préférait taire certains éléments de sa vie, si bien qu’elle ne donna pas plus d’information sur son passé. Les deux hommes en savait bien assez maintenant, trop pour leur propre bien même. Et quelque part au fond d’elle, elle craignait leur réaction. S’ils s’étaient montrés presque silencieux pendant son récit, elle se doutait qu’ils ne tarderaient pas à réagir à ses propos. Elle n’osait pas se retourner, fixant la rue au-dehors, sans vraiment voir ce qu’il s’y passait. Ses mains étaient crispées sur le rebord de la fenêtre.
Elle n’entendit pas Genma se lever et s’approcher. Il fallut attendre que son reflet se distingue dans la vitre pour qu’elle réalise sa présence juste derrière elle. Elle se crispa encore plus, lâchant la fenêtre pour croiser les bras sur sa poitrine. Le ninja nota la tension qui s’accumulait en elle, et avec une douceur infinie et pour la deuxième fois de la journée, il l’enlaça. Il attendit qu’elle se détende pour lui annoncer :
— On fera tout ce qui est possible de faire pour t’aider N, je te le promets. Puis il se tourna vers Raido qui hocha la tête et se corrigea : nous te le promettons.
-o-
— Laisse-moi reprendre mon souffle, j’en peux plus, haleta N.
— Aucune endurance chez cette jeunesse.
Elle décocha un regard tueur à Raido. Ils s’entrainaient depuis plusieurs heures maintenant, et son corps criait grâce. Le ninja ne lui avait pas laissé une minute de répit depuis leur arrivée sur le terrain d’entraînement.
— Laisse-lui le temps de faire une pause Vieux. À ce rythme-là, elle va nous faire un malaise et on sera obligé de la porter jusqu’à la maison…
Cette fois-ci, N destina son regard tueur à Genma, ce qui fit s’esclaffer encore plus fort son chef d’escouade. Ce dernier était perché sur un muret et les observait depuis le début de leur entraînement. Il avait retrouvé son sourire depuis que Lyra lui avait donné l’autorisation de retirer son bandage à l’épaule. Depuis la veille, il avait retrouvé la même énergie nonchalante qui avait tant marquée N le jour où elle l’avait rencontré. Cette dernière se sentait soulagée de le revoir ainsi, il y avait quelque chose de rassurant à retrouver le véritable Genma.
— Alors Gamine, trop faible pour rivaliser avec des anciens ? lui demanda-t-il, narquois.
— C’est juste que je ne veux pas trop vous amocher, on m’a appris à ne pas taper les vieux, fit-elle, une lueur de défi dans les yeux.
— Les vieux carrément… Ils n’ont vraiment plus aucun respect ces jeunes… De toute façon, tu serais incapable de mettre à terre un vieux comme moi.
Il adorait la provoquer dès qu’il en avait l’occasion, elle tombait toujours dans son piège.
— Je refuse de me battre contre un infirme. Enfin, un vieil infirme plutôt.
— Parce que tu as peur. Même si je me battais qu’avec un seul bras, tu n’arriverais pas à me toucher.
— Tu veux tenter le coup peut-être ?
— Vas-y, je t’attends, Gamine.
Il évita de justesse le coup que voulu lui porter la kunoichi, qui avait bondi sans prévenir sur le muret où se trouvait Genma. Raido les regardait, un air consterné sur le visage. Depuis que N habitait dans leur appartement, Genma et elle ne cessait de se chamailler pour tout et pour rien. Il avait l’impression d’avoir la garde de deux enfants hyperactifs. Sans compter qu’il trouvait ça hallucinant lorsque la jeune femme fonçait tête baissée dans chacune des provocations de son ami. Il avait pris le parti de ne pas s’impliquer dans leur querelle, au risque d’en prendre lui aussi pour son grade. Après tout, la petite avait un caractère bien trempé…
Genma atterrit avec une souplesse relative sur le sol. Après plus d’une semaine sans aucun exercice, il sentait que son corps s’était encrassé. Un petit combat contre N ne lui ferait pas de mal. Elle revenait déjà à la charge, prête à en découdre. Alors que son poing frôlait son visage, il distingua nettement le champ de force que créait son bouclier quand elle l’activait. Si elle l’utilisait, c’était qu’il lui restait plus de chakra que Genma pensait. Il s’était peut-être montré un peu trop prétentieux en prétendant pourvoir la battre avec un seul bras. Même si elle était fatiguée, elle n’en restait pas moins une très bonne kunoichi.
Depuis que leur combat avait commencé, le ninja se contentait d’éviter les coups de la jeune femme, analysant chacun de ses mouvements et cherchant la moindre faille dans sa garde. Quitte à se battre en duel de cette façon, autant que ça lui soit utile. Il pourrait ainsi lui donner quelques conseils à la fin de leur combat. Son rythme effréné lui fit manquer de souffle et très vite, elle manqua également de chakra pour conserver sa protection. Elle battit en retraite, le temps de trouver une stratégie. Genma l’observa d’un air narquois, les mains dans les poches de son jogging. Il voulait la pousser dans ses derniers retranchements, et pour ça, il fallait qu’il lui tape sur les nerfs. C’était l’un des plus gros défauts de la jeune femme : elle s’emportait vite pendant un combat et fonçait sans réfléchir. Malgré sa puissance, cette mauvaise habitude finirait par lui jouer de mauvais tour et Genma se devait de l’y préparer.
— Alors ? On abandonne déjà Gamine ?
Elle ne prit pas la peine de lui répondre et envoya une salve de shurikens sur lui. Le ninja les évita aisément, mais la jeune femme arrivait déjà sur lui. Alors qu’il esquivait encore et encore ses attaques, il nota que ses mouvements avaient gagné en fluidité. Il l’observa plus attentivement et se rendit compte que le crépitement familier de son bouclier avait disparu. Elle ne devait plus avoir assez de chakra pour le maintenir. Le ninja pouvait enfin contre-attaquer sans risquer de se prendre une décharge. Gardant sa main droite dans sa poche – ce n’était pas le moment de se blesser une nouvelle fois –, il attrapa un senbon de la gauche et se mit à riposter.
Ce fût à la jeune femme d’être noyée sous les coups de son adversaire. Elle s’efforçait de tous les éviter, guettant le moment où son rythme faiblirait. Il fallait à tout prix qu’elle réussisse à lui faire lâcher son arme et qu’il l’attaque à main nue si elle voulait que son plan fonctionne. Mais désarmer Genma n’était pas une chose facile, même affaibli, il restait un adversaire redoutable et bien plus fort qu’elle.
L’ouverture qu’elle cherchait vînt plus rapidement que prévu. Peu habitué à se battre d’une seule main, Genma se retrouva déséquilibré par le coup qu’il lui porta au visage. N ignora le senbon qui lui traça une longue estafilade sur la joue et profita de sa petite taille pour se glisser sous le bras de son chef. Presque collée à lui, elle s’autorisa un clin d’œil provocateur avant de déclencher son bouclier. Genma eut la joie d’expérimenter une nouvelle fois l’onde de choc que provoquait le bouclier lorsqu’il entrait en contact avec quelqu’un. Il grogna de douleur, se dégagea rapidement et sauta en arrière pour mettre le plus de distance possible entre N et lui. À peine eut-il le temps de reprendre appuie sur le sol que la kunoichi était déjà sur lui. Le coup de pied qu’elle lui assena le cueillit en plein ventre. Il fut projeté en arrière, la respiration coupée.
N réalisa qu’elle avait mis plus de force qu’elle ne le pensait dans son coup. À cette vitesse, Genma allait percuter le muret, sur lequel il était perché quelques minutes plus tôt. Inquiète, elle se précipita, dans l’espoir d’arriver à amortir le choc, mais il était déjà trop tard. Il percuta de plein fouet la pierre qui vola en éclat. Alors que N s’approchait et que la poussière retombait autour d’eux, la jeune femme se rendit compte qu’elle était tombée dans un piège. Une souche de bois remplaçait Genma sur le sol. Elle s’était encore une fois fait avoir par une technique de substitution. Le ninja ne lui laissa pas le temps de reprendre ses esprits, il la faucha aux jambes avant de profiter de son déséquilibre à son tour pour la plaquer contre le sol.
Les bras bloqués par ses genoux, un senbon menaçant sa gorge, N était totalement immobilisée. Elle grimaça, frustrée de s’être fait rouler par la même technique que lors de leur premier combat. Le visage narquois de son chef n’aida en rien lorsqu’elle tenta de ravaler sa frustration tout en s’efforçant de ne pas se perdre dans le regard noisette de son coéquipier, mais c’était peine perdue.
— Tu as perdu Gamine.
— Tu as triché.
— Comment ça ?
— Une technique de substitution en utilisant qu’un seul bras ? le questionna-t-elle, boudeuse.
— Qui sait ? Je suis plein de ressource après tout.
— À d’autre.
— Match nul ?
— Hm.
— Vous vous souvenez que je suis encore là, ou je peux partir sans que vous vous en rendiez compte ? râla Raido.
Il s’était approché, lassé de les voir se dévorer du regard. Ils avaient pris l’habitude de le faire sans cesse, à croire qu’ils ne pouvaient pas passer plus de cinq minutes sans se dévisager. Ça irritait autant le balafré que ça le rendait heureux. Au fond, il était rassuré de retrouver le Genma qu’il avait connu dans sa jeunesse. Plus serein, plus apaisé. Ce dernier se releva puis aida sa coéquipière à faire de même. Alors qu’elle s’occupait d’épousseter ses vêtements couverts de poussière, Genma se chargea de répondre à son aîné :
— On va pouvoir partir tous ensemble, surtout que c’est au tour de N de préparer le repas ! ajouta-t-il, tout joyeux.
Sa déclaration jeta un blanc sur leur groupe. Raido le dévisagea, terrifié par la perspective que venait d’énoncer son ami. N, quant à elle, avait stoppé tout mouvement et arborait à présent un air satisfait.
— Mais ça sera avec plaisir mon cher, je vais te préparer le meilleur repas de ta vie, commença la jeune femme d’une voix presque mielleuse.
— Tu ne vas rien lui préparer du tout, je ne tiens pas à vomir mes boyaux toute la nuit !
— Comment ça ? demanda Genma.
— N est incapable de cuisiner ! Même nos rations de survie y sont passées pendant notre mission. Et pour ce qui est de la chasse, le lapin que j’avais attrapé a fini totalement carbonisé. J’ai cru que j’allais mourir de faim pendant une semaine, tu n’imagines pas l’horreur.
— Tu n’avais qu’à cuisiner toi-même, bouda la jeune femme.
— Ce n’est quand même pas horrible à ce point-là ? Si ?
— Ça dépend. Tu apprécies quand ton repas a le goût d’une vielle semelle pleine de boue ? Si c’est le cas, tu vas te régaler ce soir mon vieux.
— Tu n’exagérerais pas un tout petit peu toi ?
— Comme si tu pouvais le nier N, tu sais aussi bien que moi que c’est la vérité Gamine.
— Qui te dit que ce n’était pas une tentative d’empoisonnement, pour enfin me débarrasser de toi et avoir la paix ? lui demanda-t-elle avec humour.
— Si tu avais vraiment voulu faire ça, tu aurais fait en sorte que je finisse ma part !
— Il y a truc qui m’échappe quand même. N, comment tu fais pour te nourrir en temps normal ? lui demanda Genma, curieux.
— Depuis que je suis à Konoha, je suis la plus fidèle cliente d’Ichiraku !
À l’entente de ce nom, les yeux des deux hommes se mirent à briller d’envie. N comprit immédiatement le message qu’ils cherchaient à lui passer. C’était assez facile à deviner, d’ailleurs. En plus de leur regard, la jeune femme jurerait avec vu un peu de bave couler de leur bouche à l’idée d’un délicieux bol de ramen. Avec un sourire attendri, N les invita à se restaurer à l’échoppe de Teuchi et les trois comparses partirent du terrain d’entraînement avec entrain.
— N ! Nous commencions à nous inquiéter de ne plus te voir, nous avons même cru que tu nous avais oubliés… déclara Teuchi lorsqu’il vit les trois ninjas s’installer à son comptoir.
— J’ai eu quelques contre-temps malheureusement, mais tu sais que je suis incapable de me passer de ta cuisine pourtant.
Genma observa sa coéquipière avec surprise. Il était rare de la voir aussi à l’aise avec des gens de Konoha. En particulier avec des civils... Il se sentait soulagé de la voir un peu plus épanouie et moins renfermé. Elle parlait de façon plus légère et souriait plus qu’à son habitude. Lui qui était assez casanier se rendit compte qu’il n’aurait loupé ce repas pour rien au monde.
Alors qu’ils passaient leur commande respective, N nota le regard insistant que Ayame, la fille de Teuchi, posait sur son chef d’escouade. Et lorsque celui-ci s’adressa à elle, N vit les joues de la jeune femme se colorer de rose. Bizarrement, elle ressentit immédiatement un élan d’antipathie envers la cuisinière, qu’elle appréciait pourtant en temps normal. Elle se crispa et lui lança un regard noir avant de se tourner vers Genma qui réclamait son attention en lui racontant l’une de ses missions à grand renfort de geste.
De son côté, Raido, silencieux, arborait un sourire un peu navré. La réaction de sa coéquipière lorsqu’Ayame dévisageait Genma ne lui était pas passé inaperçue. Il n’aurait jamais imaginé que N puisse éprouver de la jalousie à l’encontre d’une autre femme, elle qui était si détachée de tout. En vérité, il trouvait que ce sentiment la rendait un peu plus humaine… La pauvre ne se doutait pas que sa réaction état parfaitement inutile et qu’elle avait nul besoin de se crisper ainsi. Genma avait toujours eu du succès auprès de la gent féminine de Konoha, mais il était surtout connu pour son manque de réaction total face à cela. Aussi loin qu’il s’en souvienne, son ami n’avait succombé qu’une seule fois au charme d’une civile, et il le regrettait encore amèrement. À vrai dire, son comportement avec N avait quelque chose de nouveau. Jamais il ne l’avait vu être aussi captivé par une présence, jamais il ne l’avait vu offrir de tel sourire à quelqu’un d’autre. Non, N n’avait vraiment aucun souci à se faire de ce côté-là : Genma n’avait d’yeux que pour elle.
-o-
N regardait le paysage qui l’entourait, le temps de reprendre un peu son souffle. Ils marchaient depuis des heures maintenant, et le chemin escarpé qu’ils arpentaient leur demandait une concentration constante. Plus d’une fois, l’un d’eux avait failli déraper et chuter. La beauté de la nature qui les entourait la captivait. Elle n’avait pas réalisé qu’ils avaient autant grimpé depuis le début de leur ascension. Elle sentait à présent ses jambes crier grâce, il était temps qu’ils fassent une pause.
Fascinée, elle s’approcha du précipice pour avoir une meilleure vue. Derrière elle, Raido et Genma, qui s’étaient arrêtés également, se tenaient prêt à bondir pour la rattraper, si jamais elle glissait. Tous deux connaissaient ce paysage par cœur et comprenaient la fascination de N. La Vallée des Murmures était l’un des plus beaux endroits du pays du Feu. Situé à un jour de marche au nord de Konoha, elle prenait place entre deux montagnes dont les sommets côtoyaient les nuages. Raido avait expliqué à la jeune femme que le nom si particulier de cette vallée venait du bruit, semblable à un chuchotement, que produisait le vent caressant les feuilles des arbres. Selon le ninja, ce vent soufflait sans discontinuer depuis des siècles et des siècles, si bien que rares étaient les hommes qui avait osé s’installer dans les environs. Ce paysage intact avait tout pour charmer la jeune femme.
Elle frissonna. Avec l’altitude, l’air s’était rafraichi. Cet endroit lui rappelait les environs de Kumo, en bien plus vert. Elle n’avait jamais apprécié les pics rocailleurs qui entourait le village caché des nuages, qu’elle trouvait sinistre au possible. La vallée des Murmures semblait respirer la vie en comparaison aux paysages de son enfance. N contempla le lac, loin en contrebas, illuminé par un pâle soleil d’automne qui amorçait déjà sa descente à l’ouest. Personne aux alentours ne venait déranger la tranquillité de ses eaux, pour le plus grand plaisir de la jeune femme.
Ils avaient débuté l’ascension du Mont Venteux, la montagne à l’est de la vallée, tôt le matin même. La végétation se faisait un peu plus rare, et un fin manteau de neige recouvrait le sol autour d’eux. N avait cette curieuse impression d’être au-dessus des nuages, bien qu’ils n’eussent pas encore atteint le sommet de la montagne. Elle aurait voulu rester là, à contempler cette nature pendant des heures, mais la voix de Raido s’éleva, brisant le silence qui s’était installé :
— La nuit ne va pas tarder à tomber. On doit se remettre en route N.
— Où est-ce qu’on va passer la nuit ? lui demanda-t-elle.
— À environ cinq cents mètres d’ici se trouve une petite grotte. Elle nous servira d’abris pour la nuit et nous protégera du vent.
Elle hocha la tête, et récupéra son sac qu’elle avait laissé sur le chemin. Ils arrivèrent rapidement à la grotte décrite par Raido. N se laissa tomber sur le sol avec un soupir de soulagement. Au loin, le soleil disparaissait totalement derrière la seconde montagne, laissant la pénombre s’installer sur la vallée. La grotte avait manifestement déjà servi d’abri, on pouvait y voir les restes d’un ancien feu de camp en son centre, ainsi qu’un tas de bois destiné à l’alimenter. Genma en jaugea la taille et déclara qu’il allait en ramasser un peu plus, pour pouvoir tenir la nuit entière. Alors qu’il s’éloignait, N le fixait, intriguée par son comportement. Il avait été plongé dans ses pensées et était resté silencieux tout au long de leur ascension. Lorsqu’il fut assez loin, elle se tourna vers Raido, en quête de réponse.
— Ne te fais pas de soucis pour lui, il est toujours comme ça quand on vient par ici.
— Comment ça ?
— Cet endroit lui rappelle des événements passés, des bons, comme des mauvais. Malgré le temps qui passe encore et toujours, les souvenirs de ces évènements le hantent encore. Venir ici l’apaise autant que ça le perturbe.
— Pourquoi venir ici alors ?
— C’est le chemin le plus court pour atteindre notre destination, lui répondit le balafré.
— Tu ne veux toujours pas m’en dire plus d’ailleurs ?
— Non Gamine. Tu ne sauras rien avant demain !
N laissa s’échapper un grognement suspect. Ses deux coéquipiers avaient tenus à taire la raison de ce périple. Elle les suivait depuis deux jours maintenant, sans avoir aucune idée de leur destination. Depuis leur départ, elle les avait harcelés de questions, dans l’espoir qu’ils finissent par céder. Mais c’était peine perdue, si bien qu’elle avait fini par presque abandonner l’idée de leur soutirer des informations. Selon les dires de Genma lorsqu’ils s’étaient mis en route, ils arriveraient à leur destination le lendemain midi. Il ne restait plus qu’à prendre son mal en patience pour la kunoichi.
La nuit était déjà bien entamée quand Raido réveilla sa coéquipière pour son tour de garde. Ils avaient décidé d’un commun accord de se répartir le temps de surveillance seulement entre eux deux. N voulait que Genma puisse se reposer, comme l’avait recommandé Lyra. Elle s’installa à la sortie de la grotte, emmitouflée dans son sac de couchage. Les heures passèrent lentement alors que les flammes de leur feu de camp léchaient doucement son visage. Monter la garde en cette région n’était pas forcément la chose la plus utile, mais elle estimait que c’était la chose la plus prudente à faire dans sa situation. Théoriquement, au cœur du pays du feu, elle ne risquait rien, mais on n’était jamais trop prudent selon la jeune femme. Les nuages qui avaient envahi le ciel ne lui laissaient même pas le plaisir de contempler la voute stellaire. S’ennuyant ferme, elle finit par laisser ses pensées divaguer au gré de ses envies.
Genma se réveilla, parfaitement reposé, alors que l’aube se levait enfin. Un peu désorienté d’avoir autant dormi, il mit du temps avant de comprendre que la forme à l’entrée de la grotte n’était que N.
— Tu ne m’as pas réveillé pour mon tour de garde ?
Il vint s’assoir à côté de sa subordonnée, qui lui tendit un bout de la couverture qui lui couvrait les épaules.
— Tu avais besoin de repos Gen’. On avait convenu de partager la nuit en deux avec Raido pour que tu puisses dormir.
— J’imagine que c’est Lyra qui t’en as parlé ? soupira le ninja.
— Elle m’a seulement demandé de faire en sorte que tu te reposes. Elle n’a pas voulu m’en dire plus. Je sais seulement que tu es en convalescence et que ton corps et ton esprit ont besoin de reprendre des forces.
Genma ressentit un certain soulagement en apprenant cela. Il ne voulait que N soit au courant de ses problèmes et Lyra semblait avoir tenu sa langue.
— Excuse-moi…
— De ? il la regarda, étonné.
— De ne pas avoir vu que tu étais épuisé. J’aurais dû m’en rendre compte par moi-même.
Entendre des excuses venant de la jeune femme était bien la dernière chose à laquelle il aurait pensé en cette matinée brumeuse.
— C’est à moi de m’excuser N. Je te donne encore plus de soucis que tu n’en as déjà. Il est temps que j’apprenne à faire la paix avec mon passé.
Il passa un bras autour de sa taille et la rapprocha de lui. Sentir son corps, sa chaleur, lui faisait un bien fou.
— Je suis là si tu as besoin d’en parler Gen’.
— Je sais.
Mais il n’était pas encore prêt. Il le sentait au fond de lui-même. Aborder certain sujet avec la jeune femme était encore trop compliqué pour lui. Après tout, il ne la connaissait que depuis quelques semaines, il n’était pas encore temps de lui révéler tous ses secrets. Pour l’instant, il voulait seulement profiter de ce moment qu’ils passaient tous les deux. Il savait que s’éloigner de Konoha et de leur quotidien de ninja, même pour quelques jours, ne pouvait que leur être bénéfique. Il avait l’impression qu’ils avaient laissé tous leurs problèmes au village. Et même si arpenter ce chemin lui pesait toujours autant malgré les années passées, il se sentait plus léger.
Ils regardèrent le soleil se lever timidement, serrés l’un contre l’autre. Le vent continuait à souffler et les bourrasques soulevaient les longs cheveux blancs de la jeune femme. Sans vraiment y réfléchir, il passa sa main dedans, fasciné. N vint poser timidement sa tête sur son épaule, heureuse. La présence de Genma à ses côtés lui donnait l’impression qu’elle pouvait soulever des montagnes et il lui apportait un réconfort inattendu. N aurait donné n’importe quoi pour que cet instant dure une éternité. Elle aimait sentir le contact de son corps, le contact de ses cheveux sur sa peau. Elle aimait son odeur, la douceur de ces gestes et de son regard. Mais surtout, elle aimait le sourire sincère qu’il lui offrait en cet instant.
— J’aimerais pouvoir rester ici… finit-elle par dire.
— Moi aussi.
Il comprenait parfaitement ce qu’elle voulait dire. La quiétude qui se dégageait de leur étreinte avait quelque chose de magique.
— Mais on devrait profiter du jour qui se lève pour se remettre en route. Il nous reste encore deux bonnes heures de marche.
— Pour aller où ? fit-elle innocemment.
— Tu le sauras quand on y sera ma belle.
Il se releva et aida la jeune femme à faire de même. Il sembla hésiter, alors que N se tenait encore contre lui. Puis sans prévenir, il prit son visage entre ses mains et déposa un léger baiser contre son front. Elle le regarda, étonnée par ce geste d’affection. Le sourire du ninja s’agrandit alors qu’il pouvait lire de la surprise dans le regard doré de sa subordonnée.
— Il faut que j’aille réveiller Mister Grognon, ajouta-t-il.
Mais il n’avait pas l’air d’avoir envie de bouger. Au bout de quelques minutes, il se détacha enfin de la jeune femme, non sans caresser une fois de plus sa joue. Comme prévu, Raido se révéla grincheux au possible pendant qu’ils se préparaient. Il avait incroyablement mal dormi selon ses dires. La faute au sol qui n’était pas droit. N ne put s’empêcher de suggérer qu’il n’avait plus l’âge de dormir au sol et il la gratifia d’un regard glacial.
Genma préférait ne rien dire : il avait le droit au numéro du ninja râleur chaque matin depuis des années maintenant. Par chance, le balafré se contenait un peu mieux lors de leurs missions, mais dès qu’il était de repos, le réveiller devenait dangereux. N l’avait vite remarqué, et prenait un malin plaisir à asticoter son coéquipier.
Finalement, ils se remirent en route après avoir avalé un petit déjeuner frugal. Leurs réserves étaient terminées et N espérait qu’il y aurait de quoi en refaire là où ils se rendaient. Ils avancèrent à une bonne allure, prendre du repos leur avait fait beaucoup de bien. Genma se montrait bien plus loquace que la veille et agrémentait leur ascension de divers commentaires. Il raconta à la jeune femme les nombreuses légendes qui mentionnaient la Vallée des Murmures et le Mont Venteux. Parfois, Raido rajoutait une ou deux précisions aux dires de son ami.
Contrairement aux précédents jours de marche, N ne vit pas le temps passer. Si bien que quand ses deux coéquipiers s’arrêtèrent devant un tunnel creusé dans la montagne, elle pensait qu’ils voulaient seulement marquer une petite pause avant de reprendre leur périple. Genma se tourna alors vers elle, une torche dans la main :
— Tu nous fais un peu de feu ?
Elle acquiesça et concentra son chakra avant de cracher une flamme qui embrasa la torche. Son chef d’escouade la remercia avant de tendre la torche à Raido. Il se retourna vers N et lui demanda :
— Tu me fais confiance ?
Curieuse, elle acquiesça une seconde fois.
— Alors prends ma main et ferme les yeux.
Elle hésita quelques secondes avant d’obéir. Raido ouvrit la marche dans le tunnel pendant que Genma guidait la jeune femme. Plusieurs fois, ses pieds butèrent sur de la roche, mais le ninja la retenait toujours avant qu’elle ne tombe. Cette marche dans le noir dura une bonne dizaine de minutes. N avait l’impression de ne plus avoir aucun repère. Elle fut tentée d’ouvrir les yeux à de nombreuse reprises, mais à chaque fois, la chaleur qui se dégageait de la paume du ninja la rappelait à la raison. Elle lui faisait confiance.
Enfin, N sentit l’air frais de l’extérieur lui caresser le visage. Le froid était plus mordant qu’auparavant, mais le vent semblait avoir disparu. Genma s’arrêta et la fit pivoter sur elle-même. Il releva un peu son menton et déclara :
— Tu peux ouvrir les yeux Gamine.
N fut d’abord ébloui par le soleil qui était à son zénith. Alors que ses pupilles s’habituaient au fur et à mesure à la lumière environnante, les contours d’un village se dessinèrent sous ses yeux. Les maisons étaient taillées dans le flanc de la montagne, à même la roche. Elles étaient toute recouvertes d’un épais manteau de neige éternelle. N pouvait d’ailleurs voir de la fumée sortir de certaines d’entre elles.
Le village n’était pas très grand, il disposait que de quelques bâtiments, en plus des habitations. Il était cependant surplombé par un temple, sur lequel trônait le symbole du feu. Il était relié au reste du village par des escaliers de pierre, taillés eux aussi dans le flanc de la montagne. Un prêtre empruntait l’un d’eux, un énorme paquet sur le dos. Le village avait l’air calme, seuls quelques cris d’enfants se faisaient entendre.
La kunoichi détourna finalement son regard des bâtisses pour observer l’endroit où elle se trouvait. Ses coéquipiers l’avaient emmené sur une corniche d’où partait un autre escalier qui menait au village. Elle comprit qu’ils se trouvaient maintenant sur l’autre versant du Mont Venteux, La Vallée des murmures n’étant plus visible en contrebas.
— Où sommes-nous ? finit-elle par demander en s’arrachant difficilement à sa contemplation.
— Dans l’un des villages sacrés du pays du Feu, lui répondit Raido. Il y en a cinq, tous disséminés aux quatre coins du pays. Celui-ci est le plus petit, mais aussi le plus secret. On raconte que c’est dans ce temple, que tu vois là-haut, que la volonté du Feu est née, bien avant la fondation de Konoha. Même lorsque les clans menaient une guerre sanglante, ce village n’a jamais été attaqué. On affirmait à l’époque que toute personne s’en approchant avec de mauvaises intentions serait maudite sur plusieurs générations, si bien que jamais personne n’a jamais osé revendiquer ce territoire.
— Aujourd’hui, ce village est considéré comme l’un des trésors du pays, et peu de gens sont autorisés à y vivre. Quant aux voyageurs, rares sont ceux qui ont le courage de s’aventurer jusque-là, mais ils sont toujours très bien reçus, ajouta Genma.
— Ça ne pose pas de problème que je vienne de Kumo ? demanda N à son chef d’escouade, gênée.
— Tu es une ninja de Konoha maintenant N, même si tu ne possèdes pas de bandeau. Et tu es avec nous.
Il serra la main de la jeune femme, qu’il n’avait toujours pas lâchée. Il était désireux de chasser l’angoisse qu’elle ressentait.
— Pourquoi sommes-nous là ? Pas pour faire du tourisme, j’imagine.
— Effectivement, répondit Raido. Nous voulons t’emmener voir un de nos vieux amis. Il se nomme Masahiro Yamauchi, c’est l’un des plus anciens habitants de ce village.
Ils entrainèrent N vers l’escalier. Voyant la kunoichi douter de la solidité des marches, Raido ne put retenir un sourire. Visiblement, elle n’était pas très à l’aise avec les escaliers suspendus dans le vide.
— Tiens-toi à la montagne pour t’aider, suggéra Genma. Et fais attention à où tu mets tes pieds : la pierre glisse avec le gel et la neige.
Le visage pâle de la jeune femme devînt carrément blanc. Elle n’avait aucune envie d’emprunter ce chemin. Un immense vide se déroulait sous les marches de l’escalier, une chute serait fatale.
— Concentre ton chakra dans tes pieds au pire N, lui proposa-t-il.
Elle se serait frappé la tête contre un mur. Elle avait oublié qu’elle était une ninja et qu’en contrôlant son chakra, elle était même capable de marcher sur l’eau. Alors un simple escalier ne devait lui poser aucun problème. C’est avec une appréhension un peu moins forte qu’elle posa un pied sur la première marche, après Raido. Genma posa une main sur ses hanches et lui chuchota :
— Je reste derrière toi, ne t’inquiète pas.
Elle hocha la tête. Il avait un don pour la rassurer. D’une légère pression de la main, il l’enjoint à avancer. Ils grimpèrent la centaine de marches qui les séparaient du village. N laissa s’échapper un soupir de soulagement lorsque ses pieds se posèrent enfin sur un véritable sol.
— Ne te réjouis pas trop vite Gamine, il faudra bien les redescendre ses marches ! plaisanta Raido.
— Ça sera sans moi, je compte rester vivre ici pour toujours, fit-elle en ne plaisantant qu’à moitié.
— À ta place, je ne rirais pas trop Raido, il me semble que tu ne fais pas le fier devant un certain animal de ton côté.
— Quel animal ? demanda la jeune femme.
— Aucun, grogna le balafré.
— Un reptile qui rampe, qui a une langue coupée en deux, et dont souvent, le venin est mortel…
— Alors comme ça, le grand Raido aurait peur des serpents ? commença à le taquiner N.
— Autant que la petite N a peur du vide.
— Je ne vois pas de quoi tu parles…
— Quand vous aurez fini de vous chamailler, vous pourrez peut-être saluer notre hôte ? proposa Genma.
Les deux ninjas se retournèrent en sursautant. Arrivant près de leur chef se trouvait un vieil homme courbé par les années, s’appuyant sur une canne taillée dans une branche de chêne. Une lueur d’amusement brillait dans ses yeux pâles, reflet du grand sourire qui barrait son visage ridé. À la façon dont il se tenait, et à la façon dont il fixait le vide derrière eux, N comprit que cet homme avait perdu la vue. Cela ne semblait pas le préoccuper outre mesure, puisqu’il se déplaça sans hésitation jusqu’à eux.
— Voilà longtemps que vos pas ne vous avaient pas mené jusqu’à moi messieurs. Si j’avais assez de force à dépenser, je vous tirerais les oreilles pour le peu de considération que vous avez envers un vieil homme seul. Mais trève de bavardage, vous n’êtes pas venus seuls. Qui est cette jeune femme ?
— Masahiro, je te présente N, notre nouvelle coéquipière. N, voici Masahiro Yamauchi, l’homme que nous sommes venus voir, présenta Genma sans faire attention aux menaces du vieillard.
— Masahiro-sama, c’est un honneur de vous rencontrer, s’inclina la jeune femme.
Le vieil homme ne lui répondit pas. Il préféra s’approcher d’elle avant de tendre une main dans sa direction. N, sceptique, chercha une réponse dans le regard de son chef. Celui-ci lui fit signe qu’il n’y avait rien à craindre. Elle attrapa alors la main qu’il lui tendait. La sensation qu’elle éprouva lorsque sa peau entra en contact avec celle du vieillard la fit sursauter. Elle n’avait jamais ressenti une telle chose. Elle avait eu cette horrible impression qu’il avait pénétré son esprit en un quart de seconde. La jeune femme ne sut dire si le sourire énigmatique qui se lisait sur son visage était une bonne chose pour elle.
— Voilà une jeune femme bien particulière que vous m’amenez là. Suivez-moi tous les trois.
-o-
La demeure de Masahiro se trouvait à l’intérieur même de la montagne. Il les avait conduits à travers un dédale de tunnels peu éclairés et peu fréquentés. Les rares personnes qu’ils avaient croisées s’étaient toutes cependant montrées très accueillantes. Sur le chemin, Raido et Masahiro avait discuté avec animations des dernières nouvelles du monde shinobis pendant que Genma et N restaient en retrait derrière eux. Voyant que la jeune femme restait encore méfiante, ce dernier avait posé une main réconfortante dans son dos, et lorsqu’elle avait levé la tête vers lui, il s’était contenté de lui faire un clin d’œil et de lui décoché un sourire réconfortant tout en mâchonnant son senbon.
Ils étaient à présent au chaud sous un kotatsu, savourant le thé que leur avait offert leur hôte. N observait la pièce autour d’elle. L’endroit était bien plus chaleureux qu’elle n’aurait pu le penser. Malgré le côté caverne de cette habitation, il y régnait une atmosphère des plus agréables. Les tatamis au sol donnaient une impression de grandeur à la pièce, renforcé par l’immense baie vitrée creusé dans la montagne. Elle reporta ensuite son attention sur Masahiro. Le vieil homme ne s’était pas départi de son sourire énigmatique depuis qu’il lui avait tenu la main. Elle ne savait pas vraiment quoi penser de lui, et ne comprenait toujours pas pourquoi ils avaient fait une aussi longue route pour simplement rencontrer un vieillard.
— Et si vous m’expliquiez pourquoi vous êtes venus me voir maintenant ? proposa ce-dernier.
Enfin, elle allait savoir ce que ces deux coéquipiers tramaient dans son dos depuis plusieurs jours. Elle n’en revenait pas qu’ils aient réussi à garder le secret de leur périple depuis aussi longtemps malgré ses ruses pour en savoir plus.
— Nous aimerions que tu forges une arme pour N.
Forger ? Une arme ? N ne comprenait plus rien. Konoha regorgeait de bons forgerons et d’armureries, à quoi rimait un aussi long voyage pour ça ? Et surtout, pourquoi pensaient-ils qu’elle avait besoin d’une nouvelle arme. Son sabre de foudre faisait parfaitement l’affaire. Elle posa un regard intrigué sur Genma, attendant qu’il lui en dise plus. Mais ce fut Raido qui continua :
— Tu possèdes une très bonne maîtrise du sabre, mais ta technique consomme bien trop de chakra. Tu manques clairement d’endurance, c’est ce qui te fait le plus défaut lors des combats. Masahiro est un forgeron très particulier, on pourrait comparer ses armes à des œuvres d’art… C’est lui qui a forgé Kokutô, mon sabre.
— Pardonnez mon impolitesse Masahiro-sama, mais pourquoi vous plutôt qu’un autre ? Il me semble que ce pays regorge de bons forgerons.
— Attrape N.
Genma lui lança l’un de ses senbons.
— Concentre ton chakra dedans et lance-le dans la roche.
La jeune femme s’exécuta, sans comprendre où voulait en venir son chef d’escouade. Elle n’était pas particulièrement à l’aise avec les senbons, mais en concentrant un peu de son chakra dedans, l’arme fusa vers la roche et s’enfonça jusqu’à sa moitié. À ses côtés, Genma fit de même. Mais le senbon qu’il envoya transperça la roche comme si c’était du beurre et s’enfonça au cœur du mur, ne laissant visible qu’un léger trou.
— Merci pour cette démonstration Genma. Ce que tes coéquipiers essayent de t’expliquer jeune fille, c’est que si je te forge une arme, elle ne sera destinée qu’à toi et aucune autre personne ne pourra en exprimer le plein potentiel.
— Vous avez aussi forgé ses senbons ? La jeune femme se tourna vers son chef : c’est pour ça que tu insistes pour les ramasser à chaque combat ?
— Je n’ai pas le choix, grogna-t-il pour réponse. Je me prends un savon dès que j’en perds trop.
— Combien de temps avez-vous ? demanda le forgeron.
— Deux jours. Ça veut dire que tu acceptes ?
Masahiro pris son temps avant de répondre à Raido. Il n’était pas dans ses habitudes de forger des armes pour des étrangers. Chacune de ses créations avait une valeur inestimable, et il ne voulait pas que ça tombe entre de mauvaise main.
— Raido, Genma, j’aimerais que vous nous laissiez discuter.
Le ton de Masahiro ne laissait place à une contestation. N regarda ses coéquipiers se lever avec appréhension. Elle n’était pas sûre de vouloir se retrouver seule avec le vieil homme. Elle les suivit du regard jusqu’à ce qu’ils quittent la pièce. L’atmosphère se fit plus pesante. Enfin, Masahiro engagea la conversation :
— Sont-ils au courant de ce qui sommeille en toi ?
Ainsi, le vieillard avait compris. Il avait dû saisir sa particularité lorsqu’il avait touché sa main. Elle ne savait comment réagir à cette information. D’un côté, elle se sentait soulagée par le fait qu’il n’ait rien mentionné devant ses coéquipiers et de l’autre, elle craignait son jugement.
— Non. Je n’ai pas encore trouvé le courage de leur dire.
— Le courage, tu n’en manques pas jeune fille. Je dirais plutôt que c’est le doute qui te pousse à leur cacher la vérité. Tu doutes de toi autant que tu doutes d’eux.
— Que suis-je censé faire alors ? Tout leur révéler au risque qu’ils m’abandonnent ? Leur dire la vérité et voir le dégoût dans leurs yeux ? s’énerva N
— Je pense que tu les connais assez bien pour savoir maintenant quelle serait leur réaction s’ils venaient à apprendre qui tu es réellement. N’aie crainte, je ne te forcerais pas à leur avouer ta véritable nature. Il serait simplement bon que tu te rappelles que les bandages que tu gardes autour de tes poignets ne seront pas toujours suffisants pour dissimuler ton secret. Il prit une inspiration avant de continuer : va rejoindre tes coéquipiers et repose-toi. Je forgerais cette arme pour toi.
Elle se leva avant de s’incliner devant lui. Elle ne savait que lui dire de plus, et même s’il ne la voyait pas, elle avait besoin d’exprimer sa gratitude envers lui. Après tout, il acceptait de porter le fardeau de son secret avec elle. Elle le salua avant de se diriger vers la porte. Mais au moment où elle chercha à sortir, la voix de Masahiro s’éleva une dernière fois :
— Le doute est une force N. Une vraie et belle force. Veille simplement à ce qu’elle te pousse toujours en avant.
-o-
Leur lame s’entrechoquèrent une nouvelle fois, faisant vibrer leur bras. Raido jaugea son adversaire avec fierté. Genma et lui avait eut raison de quérir l’aide de Masahiro. Le sabre qu’il avait forgé pour N était un prodige de finesse, et la kunoichi s’y était adaptée en un rien de temps. Depuis qu’ils étaient revenus de leur escapade, elle ne l’avait plus lâché et demandait sans cesse à ses coéquipiers de s’entraîner. Raido comprenait parfaitement ce sentiment, ce besoin qu’elle avait. Lui -même avait été obsédé par son sabre lorsque le vieillard lui avait forgé Kokutô. Il se prêtait donc avec joie aux combats quotidiens contre la jeune femme.
Cette dernière avait déjà fait d’énorme de progrès en si peu de temps. Maintenant qu’elle n’avait plus à maintenir constamment le contrôle de son chakra, elle se permettait plus d’audace dans sa façon de combattre. Ses mouvements étaient devenus bien plus fluides qu’avant, bien plus rapides aussi. À ce rythme-là, N allait devenir meilleure que lui songea le ninja. Elle avait le potentiel pour en tout cas. Et vu son acharnement au travail, elle en avait aussi la motivation.
Elle repassa à l’attaque, jouant de sa petite taille pour se faufiler sous sa garde. Mais Raido était un ninja aguerri et il maniait le sabre comme personne à Konoha. Il évita le premier coup en se décalant simplement sur la droite, avant de parer le second du plat de sa lame. Le plus impressionnant dans le sabre de N était ce crépitement particulier qui caractérisait le chakra de la jeune femme. La lame était parcourue d’arcs électriques qui s’illuminaient à chaque nouveau choc. Raido comprit qu’un jour viendrait où N aurait maîtrisé tous les aspects de son arme, et ce jour-là, ceux qui se trouveraient sur son chemin connaîtraient un destin funeste…
Raido allait porter une contre-attaque lorsqu’il aperçut la silhouette de Genma se dessiner au loin. Il fit signe à N que le combat était fini avant de se diriger vers sa gourde. Il était assoiffé. Genma arriva à leur hauteur, les mains de les poches, un senbon dans la bouche, comme à son habitude. N se surprit à le dévorer du regard, il ne portait pas son uniforme de jonin, et elle devait avouer qu’elle appréciait plus que de raison son corps musclé moulé dans un simple sweat.
— L’entraînement est fini, la nuit va bientôt tomber et il faut que vous vous reposiez un peu avant d’aller voir le Hokage. La nuit risque d’être longue.
Ses deux coéquipiers acquiescèrent, conscient de l’enjeu que représentait la discussion qui allait avoir lieu avec Sarutobi.
— On doit le rejoindre à quelle heure ? demanda N.
— À trois heures du matin, sur le portrait du quatrième Hokage. Tu devrais te couvrir Gamine, tu vas attraper froid.
À vrai dire, il lui disait surtout ça parce que sa tenue, un pantalon de toile et un simple bandage qui recouvrait sa poitrine, ne l’aidait vraiment pas à rester calme. Ses résolutions étaient durement mises à l’épreuve ses derniers temps. Il s’était promis de ne pas dépasser les limites avec sa subordonnée. Mais bien souvent, en privée, il finissait par craquer et ne pouvait s’empêcher de rechercher son contact. Chaque marque d’affection qu’elle avait à son encontre faisait dangereusement vaciller sa volonté et il lui fallait toute sa concentration pour ne pas finir par s’emparer de ses lèvres si tentantes.
L’heure du rendez-vous arriva rapidement. Ils étaient tous les trois avachis dans le salon, sur la banquette et les fauteuils, plongés dans leurs pensées. Enfin, Raido consulta sa montre avant de se relever et annonça :
— Il est temps.
Il allait tendre sa main vers Genma pour l’aider à se relever, mais au même moment, un coup sec se fit entendre sur la fenêtre. Instantanément, les trois ninjas se retrouvèrent debout, en position de combat. N fût la première à baisser sa garde lorsqu’elle vit le visage de celui qui les dérangeait. La tête à l’envers, Kakashi leur adressa un signe de main à travers les carreaux de la fenêtre. Raido s’avança pour aller lui ouvrir, curieux de savoir ce que faisait le ninja ici.
— Au cas où tu ne serais pas au courant, il existe des portes pour rentrer chez les gens Kakashi, remarqua N, hilare.
— Je serais bien passé par l’entrée officielle, mais vous êtes surveillés…
Le rire de la jeune femme se stoppa immédiatement. Elle lança un regard inquiet à ses coéquipiers. Genma intervînt en premier, il se tourna vers le ninja copieur qui était entré dans le salon et lui demanda :
— Que veux-tu dire par là ?
— Trois hommes sont dissimulés devant l’entrée de votre immeuble. Votre entrevue avec le Hokage a été révélé, ce sont sûrement des hommes de Danzô…
— Mais on en a parlé à personne ! Comment es-tu au courant d’ailleurs ? fit N.
— J’y suis convié moi aussi. Le vieux singe doit croire que je me préoccupe de ton sort… ajouta le ninja avec un clin d’œil.
— Et qui nous dit que tu es le véritable Kakashi et non pas un des hommes de Danzô métamorphosé ?
C’était Raido qui était intervenu. L’atmosphère de la pièce était devenue glaciale après sa remarque. Genma de son côté, se tenait sur ses gardes et s’était décalé légèrement afin de se placer devant sa subordonnée. Il se tenait prêt à la défendre si jamais Raido avait vu juste. N, elle, avait posé la main sur son sabre, se sentant en danger. Elle savait que le plus gros défaut de leur escouade tenait dans le fait qu’aucun d’eux n’était un ninja sensitif. Il était donc plus qu’aisé de les bernés de cette façon. Elle chercha à toute vitesse une solution pour connaître la vérité. De son côté Kakashi n’avait pas bronché, étonné par la tournure que prenait sa visite impromptue.
— Kakashi, que s’est-il passé le jour de notre rencontre ? demanda la jeune femme.
— Tu m’as sauvé la vie, un grand sourire gêné s’étala sur son visage, alors que j’essayais de te tuer.
N se détendit. C’était bien Kakashi qui se tenait devant eux. Après tout, ils étaient les deux seuls à savoir comment ils s’étaient rencontrés. Elle relâcha ses muscles et son sabre, rassurée.
— Tout va bien, c’est lui, confirma la kunoichi.
Genma se tourna vers elle, et chercha le moindre signe de doute peint sur son visage. La voyant aussi sereine, il s’apaisa également.
— Désolé mec, il fallait qu’on vérifie.
— Pas de soucis, je préfère savoir que vous êtes prêt à la protéger au moindre danger, nota le ninja en se frottant les cheveux.
En vérité, il n’en avait jamais douté une seule seconde. La complicité que N avait développé avec ses deux coéquipiers était impressionnante, et Kakashi se rendait bien compte que les deux ninjas étaient prêt à donner leur vie pour elle, ça se lisait sur leur visage.
— Des espions étaient également présents devant la demeure du Hokage. Il nous propose donc de se retrouver dans la tour de garde Est, celle qui n’est plus utilisée. Il m’a demandé de vous prévenir, continua Kakashi.
Les trois ninjas acquiescèrent. Ils devaient se mettre en route immédiatement s’ils ne voulaient pas être en retard. Après avoir créé des clones sur ordre de Genma – il voulait donner l’illusion que l’appartement était encore plein –, ils sortirent les uns après les autres par la fenêtre et grimpèrent sur le toit. Voyant que N était trop petite pour atteindre le rebord, Genma s’empressa de la tracter, non sans lui adresser un sourire moqueur au passage. Ils suivirent ensuite Kakashi, sautant de bâtisse en bâtisse, sans aucun bruit. Hiruzen Sarutobi était déjà présent quand l’ombre de Raido se faufila sous la porte d’entrée de la tour. Constatant qu’aucun danger n’était présent, les quatre ninjas entrèrent à sa suite.
— Vous êtes en retard, jeunes gens !
— Ils étaient aussi sous surveillance Hokage-sama, le prévint Kakashi.
— Et c’est pas comme si on attendait depuis dix jours pour une simple entrevue, Hiruzen.
Genma décocha un regard consterné à sa subordonnée. Il avait oublié qu’elle était encore pire que lui quand il s’agissait de défier l’autorité.
— Je vois que le vieux Masahiro t’as fait un magnifique présent N, prends en soin.
Genma ne put s’empêcher de remarquer que le vieux singe semblait bien plus permissif à l’égard de la jeune femme. Comme s’il cherchait à compenser le traitement que le village lui réservait depuis des années. Cette dernière se contenta de hocher la tête, déjà fatiguée par les immanquables changements de sujet du vieil homme.
— Entrons dans le vif du sujet, voulez-vous ? Un vieillard comme moi à besoin de sommeil, je ne peux pas me permettre de rester éveiller toute la nuit.
— Avant de vous endormir, vous pourriez songer à m’expliquer pourquoi mon appartement a été saccagé, fit N avec acidité.
Son chef d’escouade soupira. Avec la chance qu’il avait, le comportement de sa subordonnée lui retomberait dessus… Cette perspective ne lui donna pourtant pas envie de la retenir, ni même de la rabrouer. Il estimait son comportement et sa colère parfaitement justifiés au vu de sa situation.
— Comme j’ai déjà pu l’expliquer à Genma, ta situation est particulière N, nous ne pouvons pas agir à la légère… Je…
— À la légère ?! explosa la jeune femme. Dois-je vous rappeler notre accord Hiruzen ? Dois-je vous rappeler les promesses que vous m’aviez faites ?!
La colère de N explosait enfin. Genma sentait son chakra envahir la pièce et compris qu’elle ne se retenait qu’à grande peine. Son visage s’était figé dans une expression de haine terrible. La voir aussi affectée par la situation lui retourna l'estomac. Elle avait si bien caché ses sentiments qu’il en était venu à supposer que le saccage de son appartement lui importait peu… Il ne savait quel comportement adopter à présent. Il se sentait partagé entre son envie d’aider et de protéger la jeune femme et son devoir de ninja qui lui dictait de se tenir prêt à intervenir si elle cherchait à intenter à la vie du Hokage.
Kakashi et Raido semblaient être pris dans le même dilemme intérieur. Voir la jeune femme ainsi avait quelque chose d’aussi fascinant que terrifiant. Kakashi avait déjà eu plusieurs fois un aperçu de ses accès de colère et depuis, il considérait que rien ne faisait plus peur qu’une femme en colère. Étonnamment, le Hokage ne cherchait pas à calmer la jeune femme et ne s’énervait pas non plus. Il restait la tête haute, laissant N déverser toute sa rage sur lui.
Estimant qu’ils n’allaient pas avancer de cette façon, Genma se décida enfin à intervenir. Il s’approcha prudemment de la kunoichi, vérifiant que son bouclier n’était pas actif. Elle avait la fâcheuse habitude de le déclencher sans réellement sans rendre compte, et il ne tenait pas à se prendre une onde de choc cette nuit. Le crépitement qui le caractérisait était absent, il pouvait s’approcher d’elle sans rien craindre.
Raido observa son meilleur ami rejoindre N et se pencher vers son oreille pour lui murmurer quelques mots. Le résultat ne tarda pas à se voir sur le visage de jeune femme. La tension qui s’était accumulée en elle se relâcha doucement alors que Genma la serrait dans ses bras. Raido ne pût s’empêcher de détailler les réactions des deux autres personnes présentes. Si Kakashi ne masquait pas son étonnement, le vieux Sarutobi posait un regard bienveillant sur eux. Le ninja s’en sentit rassuré, la relation qui unissait ses deux amis, bien qu’encore balbutiante, pouvait poser problème au sein de la hiérarchie de Konoha. Savoir que le Hokage ne la voyait pas d’un mauvais œil rassurerait à coup sûr Genma…
— Je pourrais te présenter mes plus plates excuses N, mais je sais qu’elles ne te serviront à rien. Je n’ai pas respecté les termes de notre accord, et en ça, je suis entièrement responsable de tes malheurs. Je ne peux que te demander de me pardonner mes fautes.
Kakashi scrutait Hiruzen avec des yeux ronds. Décidément, cette réunion secrète allait de surprise en surprise. De mémoire, c’était la première fois qu’il voyait le troisième Hokage présenter ses excuses ainsi. Son esprit aiguisé le mis en garde. Si Sarutobi agissait de cette façon, ce n’était pas seulement pour se faire pardonner ses erreurs récentes. Il devait se sentir coupable pour quelque chose d’autre, quelque chose que même N ignorait. La lueur de culpabilité qui hantait son regard le prouvait bien, songeait le ninja copieur.
— Dites-le moi sincèrement Hiruzen, dites-moi si je suis encore la bienvenue ici…
La kunoichi semblait presque désespérée, elle se sentait accablée rien qu’à l’idée de devoir partir de Konoha. Malgré ses recherches au point mort, et malgré tous ses problèmes, elle s’était mise à apprécier la vie qu’elle avait maintenant. Après des années d’errance dans les différents pays du continent, elle aimait la stabilité que le village de la feuille lui apportait. Surtout, elle chérissait les relations qui s’étaient créées entre elle et ses proches. Elle ne voulait pas avoir à détruire tout ce qu’elle avait mis tant de temps à construire. Mais malgré tout ça, elle savait que si le Hokage lui ordonnait de partir elle ne pourrait rien y faire. Elle serait condamnée à retourner à son statut de kunoichi déserteuse, de nukenin. Savoir cela l’angoissait au plus profond de son être. Elle ne voulait pas partir.
Cette angoisse faisait écho à celle que Genma ressentait, près d’elle. Il n’aurait jamais pensé que cette discussion allait prendre cette tournure. Il avait refusé de songer à cette éventualité, toutes les fois où il avait pris le temps de réfléchir à ce qui allait se dire ce soir-là. Savoir que l’avenir de N au sein de Konoha ne tenait qu’à un fil lui serrait le cœur. Sans compter qu’il n’avait même pas le pouvoir de l’aider. Il regrettait à présent toutes ses années où il avait refusé de se mêler aux intrigues politiques qui prenaient place au village de la feuille. Et dire qu’il était un jonin et que ces-derniers étaient l’une des forces dirigeantes de Konoha... Il était temps pour lui d’assumer son rôle. C’était la seule chose qui pouvait lui permettre de protéger N.
— Ce que je t’ai dit le jour où tu es venue quérir pour aide n’a pas changé N. Tu es un kunoichi au même titre que ces messieurs, fit-il en désignant les trois hommes qui les entouraient. C’est pour cette raison que je t’ai apporté ceci, et je réalise aujourd’hui que j’aurais dû te le donner bien avant.
Il tenait dans sa main un bandeau ninja sur lequel était gravé le symbole de Konoha. N sentit son cœur faire un bond dans sa poitrine. Non seulement elle allait pouvoir rester auprès de ses amis, mais en plus, Hiruzen lui faisait enfin l’honneur de la considérer comme une véritable kunoichi du village ? Cela lui paraissait presque trop beau pour être vrai. Elle s’approcha du Hokage, hésitante. Elle ne savait comment réagir à cela. Ce fut une pression dans son dos qui l’encouragea à aller de l’avant. Elle attrapa le bandeau que lui tendait Hiruzen et le noua sur son front, comme elle l’avait fait tant de fois lorsqu’elle portait celui de Kumo. Elle se tourna ensuite vers ses trois amis, un immense sourire lui barrant le visage. La fierté qu’elle pouvait lire dans leur regard la conforta dans ses impressions : elle était enfin à sa place à Konoha.
— Maintenant que le statut de N ne fait plus aucun doute, que faisons-nous pour le saccage de son appartement ? Un tel acte ne peut rester impuni Maitre Hokage, souligna Raido, les bras croisés.
— J’ai demandé à Shikaku Nara de mener son enquête dans le plus grand secret, et malheureusement les indices qu’il a trouvés ne valent rien de bon pour nous…
— Comment ça ? demanda Kakashi.
— Il n’y a aucune trace de Danzô et de ses hommes, je doute qu’il ait pris la liberté d’agir ainsi au sein du village, juste sous mon nez.
— Alors qui aurait fait ça ? interrogea à son tour Genma.
— Shikaku pense avoir trouvé un indice, mais c’est à N de nous confirmer ce qu’il en est vraiment. Lorsque tu as fui Kumo et le pays de la foudre, qu’à tu fais de ton bandeau ninja ? Il me semble qu’à notre rencontre, tu ne le portais déjà plus.
— Je l’ai jeté au fond d’un précipice, et cela fait plus de dix ans maintenant. Je ne voulais pas garder de trace de mon passé.
La jeune femme se demandait bien où il voulait en venir avec cette question…
— Alors saurais-tu me dire d’où vient celui-ci ?
Il avait dans les mains, cette fois-ci, un bandeau ninja en tissu rouge, et dont la plaque de métal était gravé du symbole de Kumo, barré d’une longue entaille. Ce bandeau était maculé de sang.
— Je n’ai aucune idée d’où il vient. Mais une chose est sûre, c’est qu’il ne m’appartient pas.
— Shikaku avait donc vu juste. Je crains que tu ne sois plus à l’abri, même à Konoha. Après toutes ses années, les ninjas de Kumo t’ont retrouvé, et je doute qu’ils y soient parvenus seuls. Tu es en danger N.
FIN DE LA PREMIÈRE PARTIE
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En publiant ici, je prend enfin le temps de relire mon histoire depuis le début (mine de rien, les premiers chapitres ont plus d'un an, y a des détails que j'avais oublié ><) et je dois avouer que celui-ci reste mon préféré...
De la guimauve, de l'action, des révélations, bref le trio gagnant !
Sinon, y a pas mal de référence à mon auteur favori qui sont cachées dedans, vous les avez ? 😁
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