Chapitre 22 : Noblesse
Naori avait lâché son sabre. Genma était le fils déshérité d'un illustre seigneur. Il avait une sœur jumelle, décédée pendant la dernière guerre. Une sœur tuée par Raido.
C'était bien trop d'informations d'un coup.
— Il serait temps que tu arrêtes de débiter d'aussi grosses conneries, intervint Genma.
Il toisait son meilleur ami d'un air blasé, comme s'il avait entendu ce refrain bien trop de fois.
— C'est pourtant la vérité, persista le balafré.
Aucune larme ne s'échappait de ses pupilles, mais Naori n'avait aucun mal à deviner à quel point la mort de cette fameuse Hotaru l'avait affecté lui aussi. Elle ne résista pas plus longtemps à son envie de savoir.
— Vous... Vous voulez bien m'en dire plus ?
La jeune femme les dévisageait tour à tour, totalement perdue par leur comportement. C'est Genma qui, finalement, se décida à lui répondre :
— C'était pendant la dernière guerre. La situation de Konoha devenait de plus en plus catastrophique, malgré la puissance de Minato et les dégâts qu'il faisait en première ligne. De plus en plus de jonins et chunnins tombaient au combat, ou bien étaient grièvement blessés, si bien que les hautes instances de Konoha ont pris une décision : celle d'expédier les jeunes soldats en premières lignes. Nous n'étions que de la chair à sacrifier dans l'espoir de ralentir un peu le conflit.
Naori grogna. La dernière guerre avait été particulièrement barbare et meurtrière. Quiconque avait mis les pieds en premières lignes en rêvait encore, bien des années plus tard. La puanteur des cadavres qui s'accumulaient était une chose qu'on ne pouvait oublier. Pas plus que la terre gorgée de sang.
— Notre statut était un peu particulier : nous étions beaucoup à avoir été promu chunnins peu avant la guerre, mais aucun d'entre nous n'avait l'expérience nécessaire pour se retrouver à la tête d'escouade. Ils ont donc décidé de nous réunir en escouade de trois pour maximiser nos chances de survie.
— Trop aimable de leur part, ironisa Naori.
— C'était la guerre, les pires décisions étaient permises, reprit Genma avec un faible sourire. Nous, on ne s'inquiétait pas trop : nous n'avions pas vraiment conscience du danger qui régnait à l'avant. Autant te dire que lorsqu'on nous a annoncés que Raido, Hotaru et moi allions former l'une de ses escouades, c'était le plus beau jour de notre vie... Les senseïs avaient toujours pris soin de nous séparer, nous étions trop dissipés, paraît-il.
Voir Genma se replonger dans ses souvenirs était une chose inédite pour Naori. Il ne se départait pas de ce sourire mélancolique et pourtant, se remémorer sa sœur semblait faire briller une étincelle dans son regard.
— Même lorsqu'on était à l'académie, nous avions interdiction de nous asseoir au même endroit...
— N'oublie pas qu'on n'était pas les plus sérieux... Surtout Hotaru et toi, vous passiez votre temps à vous battre pour un oui ou pour un non, intervint Raido.
— On peut parler du moment où vous avez commencé à vous fréquenter et où vous séchiez tous les entraînements...
— Ça ne compte pas, on était déjà passé genin à ce moment-là.
Naori avait l'impression saisissante d'être face à deux ados qui se renvoyaient la responsabilité de leur bêtise. La différence lui sautait d'autant plus aux yeux après avoir passé tant de missions à leurs côtés. S'il y avait bien une constance dans leur duo, c'était que l'un et l'autre faisaient tout leur possible pour se protéger mutuellement.
— Entre Hotaru et toi, et Asuma et Kurenaï, votre senseï n'était pas gâté.
— Je ne te dis pas le nombre de fois où il nous a menacé de nous révoquer à cause de notre comportement. Même Hotaru avait le droit au sermon alors qu'elle n'était pas dans notre escouade.
— Ça, c'est parce que vous étiez insupportables ensemble.
— T'étais simplement jaloux parce qu'on passait moins de temps avec toi...
— Vous m'avez lâchement abandonné alors que je devais supporter Gaï et Ebisu à longueur de journée.
Leurs échanges arrachèrent un sourire à la kunoichi. La jalousie de Genma était une chose à laquelle elle avait été que peu confrontée, mais elle ne doutait pas une seule seconde que celui-ci ait pu s'énerver d'être ainsi abandonné. Genma dut se rendre compte de son sourire puisqu'il se passa une main dans la nuque, gêné.
— Bref, nous étions fous à l'idée de ne nous retrouver que tous les trois, sans personne pour nous superviser. Nos premières missions, par chance, s'étaient bien déroulées, mais ça ne dura pas. Raido et moi avons été stupides et imprudents. Nous sommes tombés dans un piège de l'ennemi, un piège grotesque que n'importe qui aurait pu éviter sans problème.
Sa voix se brisa. Visiblement, il s'en voulait encore terriblement.
— Les ninjas que nous sommes aujourd'hui n'ont plus rien à voir avec ce que nous étions, continua Raido à sa place. Tu nous connais comme des ninjas plutôt calmes, posés et réfléchis, à l'époque, c'était loin d'être le cas. Nous avons foncé tête baissée, sans prendre en compte la riposte ennemie.
Nous n'avons rien pu faire. Peut-être étions-nous trop jeunes, trop faibles... Toujours est-il que nous nous sommes retrouvés prisonniers. Une véritable aubaine pour Kumo. Deux ninjas à peine sortis du berceau, livrés sur un plateau d'argent à leurs équipes de renseignements.
— Ils voulaient absolument savoir comment Konoha organisait sa défense et quels étaient les prochains points stratégiques que nous devions attaquer, enchaîna Genma. Ils étaient prêts à tout pour ça. Ces renseignements leur étaient vitaux.
Ils ont commencé par moi. Je devais avoir l'air moins résistant que Raido, j'étais plus jeune, plus petit. Ça a duré pendant des heures, sans jamais s'arrêter. J'ai cru plusieurs fois que je ne tiendrais pas le coup. J'ai cru que j'allais craquer. La douleur était abominable, je n'en pouvais plus... Mais j'ai tenu bon, je ne sais même pas comment.
Genma se frottait la nuque, pensivement. Naori mit quelques secondes à comprendre pourquoi il répétait si souvent ce geste lorsqu'il réfléchissait. Cette cicatrice qui l'avait tant intriguée les premières fois qu'elle l'avait soigné était l'un des vestiges de cette torture.
Elle sentit la colère gronder en elle. L'idée même qu'on ait pu lui faire autant de mal la révulsait. Pourquoi réagissait-elle ainsi ? Elle ne le comprenait pas elle-même. Après tout, tout ça n'était que le passé.
— Je me souviens encore de la chaleur des flammes sur mon visage, expliqua à son tour Raido. La sensation de ma chair qui brûlait... Je me souviens du poteau auquel ils m'avaient attaché. Je ne pouvais même pas me débattre lorsqu'ils m'approchaient avec cette foutue torche. Ils me réduisaient lentement en cendre et je ne pouvais rien faire.
La respiration de Naori s'arrêta. Elle n'avait jamais osé demander à Raido d'où lui venait cette balafre qui lui barrait le visage. Le jonin n'en parlait jamais, mais elle savait à quel point il en souffrait. Combien de fois l'avait-elle vu détourner le regard quand quelqu'un le fixait un peu trop intensément ? Combien de fois avait-elle remarqué qu'il faisait tout pour éviter son reflet ? Il se tenait toujours dans l'ombre, dissimulant à la moindre occasion cette cicatrice.
— Alors j'ai hurlé. J'ai hurlé jusqu'à épuiser ma voix. Jusqu'à ce que la fumée me fasse suffoquer. Je ne voulais pas mourir. Je ne voulais pas m'arrêter de combattre. Sauf que je n'avais pas la force suffisante pour résister. J'aurais mieux fait d'abandonner directement et de les laisser m'abattre...
— Ferme-là !
Naori n'avait guère eu l'occasion de voir Genma s'énerver ainsi contre son meilleur ami. Naïvement, elle avait toujours cru que les liens qui les unissaient étaient trop puissants pour qu'un quelconque désaccord surgisse entre eux.
Pourtant, elle ne rêvait pas en constatant la colère qui brillait dans les yeux du chef d'escouade, pas plus qu'en voyant ses poings serrés et ses traits tirés par des émotions bien trop fortes pour être contenues.
— J'ai craqué quand ils se sont attaqués au reste de mon corps, continua pourtant Raido sans se soucier des réactions de son meilleur ami. Je n'en pouvais plus, j'étais à bout de force. J'avais beau hurler, ça ne s'arrêtait pas... Alors, j'ai fini par parler. Je leur ai révélé l'endroit où se cachait Hotaru. C'était elle notre chef d'escouade, c'était elle qui en savait le plus.
J'ai cru que ça suffirait pour faire disparaître toute la douleur que je ressentais. Pour qu'ils s'arrêtent. Sauf qu'on était en temps de guerre et la guerre rend fous les hommes. Les actes les plus inhumains sont toujours commis sur le champ de bataille, comme si les guerres pour un territoire pouvaient justifier toutes les horreurs commises.
Tu le sais aussi bien que nous, Naori. Tu l'as faite aussi cette foutue guerre. Tu as vu ce dont les shinobis sont capables dans leurs pires instants.
Elle s'en souvenait que trop bien. Combien de fois avait-elle vu les hauts gradés de son escouade torturer des ninjas de Konoha ? Combien de fois avait-elle entendu les cris et les hurlements ? Les traces laissées par la guerre sur leur corps étaient bien moins vives que les blessures infligées à leurs esprits. Les souvenirs ne cicatrisaient jamais. Tout juste parvenaient-ils à les nier. Un habile tour de leur conscience pour oublier ce qu'il s'était passé. Mais on n'effaçait pas si facilement les massacres commis.
— Ils nous ont attachés dans la même pièce Genma et moi. On arrivait même plus à nous tenir debout, alors ils nous ont suspendus par les poignets et ils se sont chargés de maintenir nos têtes pour que nous ne manquions rien du spectacle qu'ils nous avaient concocté.
Naori ne savait que trop bien ce qu'il allait lui raconter ensuite. Elle avait vu ses supérieurs faire ça des dizaines de fois. Les escouades composées de ninjas inexpérimentés étaient les plus faciles à atteindre. Celles qui contenaient des jeunes femmes étaient les plus savoureuses à torturer.
Elle voulut lui demander de cesser son récit. Elle voulut lui dire de leur épargner de tels souvenirs, mais les larmes qui coulaient sur les joues de ses coéquipiers l'empêchèrent de faire entendre sa voix.
Une part d'eux était restée bloquée dans cet enfer. L'un, comme l'autre, ils avaient tout fait pour oublier ce triste passage de leurs vies.
— Ils ont retrouvé Hotaru. Ils l'ont retrouvée et ils l'ont torturée devant nous. Tout ça parce que je l'ai trahie. Je l'ai vendu à l'ennemi dans l'espoir de m'en sortir.
— Ils auraient fini par la retrouver, que tu parles ou pas. C'était trop tard à partir du moment où l'on est tombé dans ce foutu piège.
Le ton de Genma était glacial.
— Elle aurait pu s'enfuir, riposta Raido.
— Et nous abandonner tous les deux ? Elle aurait retourné la terre entière pour nous retrouver, tu le sais aussi bien que moi.
— Le lien qui vous liait ne veut pas dire qu'elle se serait jetée dans la gueule du loup sans réfléchir.
— Je ne parlais pas de ce lien, mais du votre, idiot. Elle était folle de toi, elle n'aurait jamais pu te laisser mourir sans rien tenter pour te sauver.
Naori ne comprenait plus rien. De quel lien parlaient-ils ?
— Une explication ? quémanda-t-elle, perdue.
Genma détourna le regard. Visiblement, il n'avait pas prévu d'aborder ce sujet-là avec elle.
— Toujours par deux vont les Shiranui. Des générations de jumeaux qui s'enchaînent au fil des siècles, répondit Raido à sa place. Les liens entre eux sont puissants.
— Trop puissants, ajouta Genma, amer. Hotaru et moi étions incapables de nous passer l'un de l'autre. Lorsqu'ils l'ont tué, j'ai cru que mon esprit allait sombrer lui aussi. J'ai cru que j'allais devenir fou.
Il essuya du revers de sa main ses larmes qui coulaient encore. Ça le frustrait de réagir ainsi. Plus de quinze années étaient passées, et ça n'avait rien changé. Il avait toujours aussi mal lorsqu'il se rappelait ce funeste jour.
— Comment avez-vous réussi à vous en sortir ? demanda finalement Naori après un long silence.
— Minato.
Yondaime. Encore et toujours.
— On nous a rapatriés au village dans la foulée, et quelques semaines plus tard, la guerre prenait fin. Il nous a pris sous son aile et nous sommes devenus sa garde personnelle lorsqu'il a été nommé au poste de Hokage par Sarutobi. Sans lui, nous n'aurions certainement jamais réussi à remonter la pente...
Raido lança un regard navré à son coéquipier. Naori n'eut aucun mal à déchiffrer le fond de sa pensée. Genma s'était-il vraiment relevé après les horreurs qu'ils avaient endurées ? Elle n'en était pas sûre. La blessure restait là, terrifiante. Une plaie béante qui ne se refermerait sans doute jamais.
— Ma famille a appris la nouvelle peu après la mort de Hotaru et m'a désigné comme l'unique responsable. J'étais celui qui l'avait fait déserter de la demeure familiale. Celui qui n'avait pas su la protéger. Chez les Shiranui, c'était la honte suprême. Ils m'ont définitivement banni peu après ça.
Genma détourna précipitamment le regard, honteux. Il dissimulait encore une partie de la vérité à la femme qu'il aimait, incapable d'assumer son histoire. Par chance, Naori ne semblait n'avoir rien remarqué, trop secouée par toutes les révélations qu'ils lui avaient faites.
Il laissa s'échapper un soupir. Étrangement, il se sentait apaisé par la discussion qu'ils avaient eue. C'était peut-être la première fois qu'il parlait aussi ouvertement de la mort de Hotaru et des tortures que Raido et lui avaient subis. Même à l'époque, Minato et Kushina n'avaient pas réussi à aborder le sujet, malgré leurs innombrables tentatives.
— Quoi qu'il en soit, les prochains jours vont être mouvementés. Je doute que mes parents apprécient le choix de Konoha. Désigner notre escouade pour cette mission était assurément la pire chose à faire. On devrait profiter du peu de repos qu'on peut encore prendre.
Raido approuva sa proposition, pourtant il doutait de leur capacité à dormir après une telle discussion.
— Je prends le premier tour de garde, annonça-t-il avant d'aller se percher en haut d'un arbre, un peu plus loin.
Ses deux coéquipiers le regardèrent s'éloigner, témoins impuissants de sa détresse.
— C'est à cause de ça qu'il fuit constamment Lyra ? demanda finalement Naori.
— Il s'est mis en tête qu'il est le seul responsable, et qu'il doit payer pour ses actes.
— Ce n'est pas lui qui a porté le coup fatal pourtant. Il n'est pas plus responsable que toi, et bien moins que les ninjas de Kumo.
Elle ne réalisa ses paroles qu'après-coup, alors que seul le silence de Genma lui répondait. Elle se leva et vint s'accroupir devant lui.
— Je ne suis pas très douée pour réconforter les gens, hein ?
— C'est le moins que l'on puisse dire, lui avoua le jonin avec un sourire navré.
Il approcha sa main de son visage. Il n'aimait pas Naori pour sa délicatesse et encore moins pour son tact. Ses traits reflétaient toute l'inquiétude qu'elle ressentait pour lui, ainsi que pour Raido, et cela lui suffisait amplement.
— Viens là.
Le jonin ouvrit ses bras, l'incitant à venir se blottir contre lui. Tout ce dont il avait besoin se trouvait là, devant lui. Sentir son corps contre le sien le comblait de bonheur, encore plus lorsqu'il pouvait apercevoir la jeune femme lui sourire.
Alors qu'elle se laissait aller contre lui, il posa son menton sur le sommet de son crâne, pensif. Il redoutait la réaction de ses parents lorsqu'ils se présenteraient devant eux, mais surtout, il redoutait la réaction qu'ils allaient avoir lorsqu'ils saisiraient la relation qui le liait à la jeune femme. Genma se savait incapable de dissimuler une telle chose. Leur attachement crevait les yeux à quiconque n'était pas aveugle.
— Ton cœur bat vite, nota Naori.
Elle attrapa ses mains, entrelaçant leurs doigts. Son corps se pressa contre celui de Genma alors qu'elle relevait la tête, guettant la moindre de ses réactions sur ce visage qu'elle aimait tant. Elle détestait le voir aussi soucieux.
— C'est parce que tu es là.
Genma ne mentait qu'à moitié : les battements de son cœur s'accéléraient toujours quand la jeune femme se tenait près de lui. Il n'y pouvait rien.
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— J'aimerais bien passer la voir...
— Tu nous gonfles avec tes histoires de cœur Yatogo. Un jour, c'est la petite infirmière qui t'a soigné, un autre, c'est la serveuse de la taverne.
— Tu oublies la jonin aux cheveux blancs !
— Ça, je peux le comprendre, cette kunoichi est sublime, mais je crois que Shiranui a déjà mis le grappin dessus non ?
— Tu m'étonnes, si j'étais chef d'escouade avec une femme comme ça sous mes ordres, je m'arrangerais pour qu'elle ne regarde que moi !
— Tu lui donnerais des ordres pour qu'elle se retrouve dans ton lit !
Yatogo regardait ses deux amis, consternés par leur comportement.
— Cette femme s'appelle N, et elle mérite bien plus de respect que vous deux réunis. Quant à sa relation avec le capitaine Shiranui, cela ne nous regarde pas. Vous devriez prendre exemple sur eux, ce sont des ninjas incroyables, fit-il avec verve.
— Tu nous rabâches le même refrain depuis que tu es rentré de ta dernière mission, tout ça parce qu'ils t'ont sauvé la vie, lui reprocha l'homme à sa droite.
— En plus, ils ont eu de l'aide. Il y avait celui qui est défiguré avec eux. J'imagine que les ennemis ont fui dès qu'ils ont aperçu son visage, railla le troisième ninja.
Deux ombres menaçantes se dressèrent devant eux, les bras croisés.
— Aurais-je, par hasard, entendu de simples genins se moquer de leur supérieur ? Le code d'honneur des ninjas autorise de telles choses, Shikaku ?
— Non. Et je vais me faire un plaisir de leur rappeler. Vous deux, vous me suivez.
Shikaku se fit un plaisir de prendre un air terrifiant, s'amusant déjà de la réaction des deux jeunes. Il fallait dire qu'il avait appris ce regard-là de sa femme, elle lui offrait chaque matin depuis des années.
— Lyra, je repasse te voir demain avec le reste des herbes médicinales, bon courage pour le reste de ta journée, ajouta-t-il.
Il fit un signe de main à la médic-nin avant de s'éloigner avec les deux jeunes ninjas.
— Tes deux imbéciles de compagnons parlaient de Raido, n'est-ce-pas ?
— Vous le connaissez ?
Yatogo ne savait que penser de la scène qui s'était déroulée sous ses yeux. Ses deux amis allaient être bons pour les missions les plus ingrates. Étrangement, cela le réjouissait au plus haut point : malgré leur amitié qui remontait à leur enfance, il ressentait un fossé entre eux depuis quelques mois. Depuis qu'il avait été nommé chunnin et qu'eux non.
— C'est un ami, ainsi que N et Genma, se contenta de répondre Lyra.
Elle n'éprouvait aucune envie de montrer à quel point ce genre de critique envers Raido la touchait.
— Ils m'ont sauvé la vie tous les trois. On était complètement perdu, et ils sont arrivés comme par miracle pour sécuriser la frontière. Ce sont des héros !
Ce gamin avait à peine la vingtaine et il parlait avec une passion et une innocence que Lyra n'avait pas revues depuis des années. Voir ses yeux briller de cette façon lorsqu'il évoquait les trois ninjas lui mis du baume au cœur, apaisant légèrement le tiraillement qu'elle ressentait depuis leur départ en mission.
— Ça fait plaisir de savoir que tu les reconnais à leur juste valeur. J'imagine que tu es le jeune Yatogo ? N m'a déjà parlé de toi.
Yatogo hocha la tête en rougissant, ravi d'apprendre que la kunoichi ait mentionné son prénom.
— Et visiblement, elle ne te laisse pas indifférent, s'amusa Lyra en constatant sa réaction.
— Je... J'ai juste beaucoup d'admiration pour elle, se reprit le chunnin, gêné. En plus, elle ne s'intéressera jamais à un gamin comme moi.
— Qu'est-ce qui te fait dire ça ?
— Elle et le Capitaine Shiranui sont fous l'un de l'autre, ça crève les yeux. Et puis j'ai rencontré une autre kunoichi tout aussi impressionnante !
Lyra lui concéda un sourire indulgent, partagée entre l'amusement que ce gamin faisait naître chez elle, et la consternation. Elle avait pourtant répété de nombreuses fois à Naori d'être prudente quant à sa relation avec Genma. Moins les gens étaient au courant, moins ils couraient de danger. Elle imaginait d'ailleurs très bien Raido tenir le même genre de discours à son meilleur ami.
— Alors tu devrais profiter de ton temps libre pour voir cette fameuse kunoichi, le temps est précieux quand on est un ninja.
Elle le laissa sur cette phrase sibylline, coupant court à la conversation. Elle avait déjà passé trop de temps loin de ses patients.
Yatogo resta planter quelques secondes dans la rue avant de se ressaisir. Cette femme semblait être spéciale. Tout aussi spéciale que N, Raido et Genma. Était-ce donc ça que l'on devenait avec le temps ? Il haussa les épaules, et se remit en chemin, bien décidé à suivre le conseil de la médic-nin.
Ses pas le menèrent vers l'ouest du village, près de l'endroit qui avait été détruit par le serpent géant pendant la tentative d'invasion. Le quartier avait été déserté tant les dégâts étaient importants. De nombreux bâtiments menaçaient encore de s'effondrer à tout instant, si bien que les reconstructions n'avaient pas encore commencé.
Il s'efforça d'effacer de ses souvenirs les images de corps ensanglantés qui remontaient dans son esprit alors qu'il longeait un fossé dont la terre était encore teintée de rouge. Il n'avait jamais connu la guerre, mais l'aperçu qu'il en avait eu ce jour-là restait imprimé sur sa rétine, terrifiant.
Après avoir demandé son chemin à un passant, le jeune chunnin arriva finalement devant un immeuble plus simple qu'il ne l'aurait pensé. La bâtisse n'était pas très grande, et reflétait la pauvreté de ses occupants.
Jamais il n'aurait imaginé Tamako vivre dans un tel endroit.
-o-
Naori avançait avec nonchalance aux côtés de ses deux coéquipiers, ignorant les regards peu amènes des occupants de la demeure. Lorsque Genma avait parlé de l'endroit où sa famille vivait, jamais elle n'avait imaginé tomber sur un endroit aussi immense, peuplé d'autant de domestiques.
On les avait accueillis froidement à leur arrivée, les soldats avaient accepté d'ouvrir les portes uniquement lorsque Raido leur avait remis un parchemin portant le sceau de Konoha. Le rouleau de papier attestant de la véracité de leur mission, les deux hommes n'avaient eu d'autre choix que de les laisser entrer dans la propriété.
Un homme, sûrement aussi âgé que les lieux, avait ensuite pris le relais, les menant par un dédale de couloirs qui ressemblaient bien trop à un labyrinthe pour la kunoichi. Il n'avait pas pris la peine de leur adresser des mots de bienvenue. Seuls les regards qu'il adressait par moments à Genma témoignaient de son état d'esprit.
Il avait parfaitement reconnu le ninja, malgré les années passées depuis la dernière fois qu'il avait aperçu son visage. Un visage qui était le portrait craché de son père au même âge, l'air désabusé en plus. Jamais il n'avait imaginé que le ninja oserait remettre les pieds en ces lieux.
— Le Seigneur Shiranui et sa femme vous attendent. Merci de respecter les égards dus à leurs rangs.
— Épargnez-nous vos habituelles stupidités Masashi, je parlerais à mes parents de la manière qu'il me plait.
C'était la première fois que Genma ouvrait la bouche depuis un long moment. Il s'était muré dans un silence inquiétant à mesure qu'ils s'étaient rapprochés du lieu de leur mission, sous le regard de ses deux coéquipiers.
— Genma, je t'en prie, reste calme, se força à intervenir Raido. Merci pour votre accueil, nous ferons attention à ne pas commettre d'impair.
— Pour ça, il aurait fallu ne jamais faire rentrer ce traître sur nos terres.
Le vieil homme les toisa avec sévérité avant d'ouvrir la porte devant laquelle il se trouvait, les invitant à entrer à sa suite.
La pièce était à l'image du reste de la propriété : aussi grande qu'un terrain d'entraînement et richement meublée. Visiblement, les Shiranui mettaient un point d'honneur à se distinguer du commun des mortels en affichant leur pouvoir aux yeux de tous. Rien n'était laissé au hasard, tout était fait pour intimider les visiteurs qui pénétraient dans cette pièce. Des armes et armures en or étaient fixées sur certains murs, dominant par leur splendeur des vases d'émail finement peint.
Naori n'était pas sûre d'avoir déjà assisté à un tel étalage de richesse. Elle ne fréquentait que des ninjas depuis son plus jeune âge, et aucun d'eux ne mettait une telle ardeur dans l'accumulation de choses aussi futiles. Au contraire, leur mode de vie les conditionnait à ne pas être matérialiste pour la plupart.
Elle jeta un coup d'œil à Genma qui s'appliquait à arborer l'air le plus hautain qu'il connaissait, snobant avec magnificence les œillades accusatrices du personnel de maison. Dire que son coéquipier avait grandi dans cet environnement si particulier...
Elle comprenait maintenant d'où lui venait son attitude nonchalante et si détachée. Il s'était, sans aucun doute, composé un caractère contraire à ce que l'on attendait d'un jeune noble. Naori l'imaginait sans peine en train défier sa famille avec son sourire narquois, un senbon entre les lèvres.
La kunoichi reporta finalement son attention sur le fond de la pièce, là où trônait deux fauteuils somptueux, bien plus finement ouvragés que tout ce qu'elle avait pu apercevoir jusqu'ici. Ses yeux longèrent les ornements représentant des feuilles de bambous. Ce n'est qu'une fois après avoir noté le moindre détail dans son esprit qu'elle s'intéressa aux deux personnes qui les occupaient.
Genma était le portrait craché de son père. Voir le Seigneur Shiranui en personne était comme contempler une version plus âgée de l'homme qu'elle aimait. Plus âgée et plus stricte surtout. Tout en lui reflétait sa volonté d'afficher sa noblesse : sa chevelure longue et soyeuse, soigneusement coiffée, sa barbe grisonnante, bien mieux taillée que celle de n'importe quel homme, ses habits de soie, sûrement choisis parmi les étoffes les plus délicates.
Et son regard.
Son regard qui brillait d'une détermination sans faille, mais surtout d'un mépris à peine voilé.
— Un traître et une esclave. Konoha a donc envoyé sa meilleure escouade à notre service.
Il était parvenu à les insulter, Konoha et eux, en ouvrant à peine la bouche. Cela forçait l'admiration, Naori était bel et bien obligée de l'admettre. Cet homme, certes détestable, débordait d'un charisme certain, dont il se plaisait à user. Charisme qui se retrouvait à coup sûr chez son fils.
Naori observa ses coéquipiers. Il ne faisait aucun doute qu'elle était la fameuse « esclave », mais qui était le « traître » ? Et surtout, qui était superbement ignoré par le maître des lieux ? Elle se demanda un instant si cet homme connaissait les véritables circonstances de la mort d'Hotaru, et s'il savait ce que ses deux coéquipiers avaient subis pendant cette guerre.
Une chose était cependant indéniable : les paroles du seigneur avaient heurté ses deux coéquipiers. L'un et l'autre serraient les poings, contenant à grande peine leur rage.
— Une dynastie qui n'accèdera jamais au pouvoir. Konoha nous envoie donc protéger les vestiges d'un temps qui devrait être révolu depuis longtemps.
La kunoichi adressa un sourire narquois à l'homme qui lui faisait face. Elle eut le temps de discerner un soupçon de surprise dans ses iris noisette, avant qu'il ne reprenne contenance. Avait-il cru que son statut lui épargnerait ses réparties assassines ? Tout seigneur qu'il était, cela ne changeait rien aux yeux de Naori. Quiconque s'en prenait à Genma et Raido était la cible de son courroux.
Après tout, pour elle qui avait déjà osé menacer le Daimyô en personne, ce n'était pas grand-chose de rembarrer un seigneur de pacotilles.
— Les esclaves se devraient de ne jamais oublier leur statut. Les moins-que-rien ne sont pas autorisés à exister lorsque des nobles sont présents. Estimez-vous heureuse que je vous laisse fouler ce sol de vos pieds.
— Vos dents risquent de rencontrer ce sol un peu trop rapidement à votre goût.
Sa menace déclencha un raz de marée d'indignation, et très vite, les soldats, responsables de la sécurité dans la propriété, pointèrent leurs armes sur les trois ninjas. Naori resta parfaitement immobile, les bras croisés, les yeux fixés sur celui qui avait osé l'insulter. Son bouclier s'étendit de lui-même sur ses deux coéquipiers, prêt à les protéger de la moindre attaque. L'un des soldats s'aventura d'ailleurs un peu trop en avant, se rapprochant dangereusement de Genma.
Celui-ci eut à peine le temps de se retourner que déjà, une détonation résonnait dans la pièce, assourdissante. L'homme fut envoyé deux mètres plus loin, fauchant au passage un autre soldat.
La situation aurait pu vite s'envenimer si deux enfants n'étaient pas sortis de nulle part. Ils se couraient après, sans accorder la moindre attention aux tensions autour d'eux et à la haine palpable qui régnait dans la pièce.
— Genma ! Hotaru ! Combien de fois votre père vous a-t-il demandé de ne pas le déranger pendant une réunion ? s'emporta la domestique qui suivait les deux enfants.
La vieille dame peinait à suivre les deux garnements, mais la canne en bois qui la soutenait tapait le sol avec une hargne impressionnante.
Naori, elle trépignait. Une colère sourde brûlait en elle. Elle n'éprouvait qu'une envie : se laisser consumer par le feu ardent qui gonflait dans sa poitrine.
Les parents de Genma avaient donc osé. Ils avaient nié son existence et celle de sa sœur, les effaçant de leur vie sans le moindre scrupule. Genma et Hotaru. Des jumeaux, eux aussi, aux regards encore joueurs. Savaient-ils qu'ils n'étaient que des remplaçants ?
— Mais on joue aux ninjas ! s'égosilla la jeune fille.
La kunoichi aurait presque pu exploser de rire devant la mine déconfite de leurs parents si la situation n'avait pas été si dramatique.
— Les ninjas ne sont que les pâles esclaves de la volonté du Daimyô. Toi, tu es ma fille, et un avenir bien plus beau t'attend.
Il n'en fallut pas plus pour que Naori craque. Son chakra envahit la salle, terrifiant. Cela faisait des années qu'elle n'avait pas éprouvé une telle envie de réduire à l'état de poussière un être humain.
Le père de Genma était tout ce qu'elle exécrait le plus au monde. Sa suffisance, son mépris, sa haine et son arrogance... Tout ça lui sortait par les yeux au point qu'elle en oubliait presque leur mission.
Dire qu'ils avaient marché jusqu'ici uniquement pour permettre à des nobles imbus d'eux-mêmes de se vautrer dans leurs richesses. Naori avait toujours haï ceux qui s'accaparaient, sans aucune retenue, le moindre bien à leurs portées.
— Ça suffit.
La voix de Raido avait claqué, résonnant dans l'immense pièce. Il s'était placé devant la jeune femme, prêt à la protéger à la moindre riposte. Genma, quant à lui, avait attrapé sa main, liant ses doigts avec force, dans l'espoir d'apaiser la jeune femme.
— Veuillez nous pardonner cet écart, Seigneur Shiranui, apaisa Raido. Nous sommes ici simplement pour nous assurer que votre prochaine réception se déroule sans accroc, pas pour nous battre avec votre milice privée. Il serait dommage que des problèmes surviennent alors que le Daimyô vous fait l'honneur de sa présence.
Raido avait toujours été le plus mesuré d'eux trois. Il était celui qui apaisait les conflits, celui qui dissipait les craintes. Il était le pilier qui les empêchait bien souvent de s'effondrer, la bouée qui les empêchait de sombrer lorsque leurs esprits criaient grâce.
— Contre toute attente, les années ont fait leur office sur vous, Namiashi. Vos paroles sont bien plus réfléchies qu'au temps de votre jeunesse. Dommage que ce changement n'ait pas eu lieu avant que vous ne trahissiez notre pays et provoquiez la mort de ma fille.
Raido accusa le coup sans broncher. Il n'y avait aucun reproche que cet homme pouvait lui faire qu'il ne se soit pas déjà fait lui-même.
Ces phrases, il se les était répétées si souvent pendant des années. Hotaru était morte par sa faute ; il l'avait vendu simplement pour que la douleur cesse un instant. Simplement pour pouvoir survivre un peu plus longtemps.
L'ironie du sort, c'était qu'il avait commis cet acte pour rien.
La douleur n'avait jamais cessé depuis cette nuit-là. Elle le hantait, toujours plus terrifiante, toujours plus présente, le rongeant à petit feu.
Cette nuit où on l'avait torturé n'avait jamais pris fin. La seule différence depuis la mort d'Hotaru résidait dans le fait que la culpabilité le rongeait autant que le feu qui l'avait consumé.
— Contre toute attente, votre famille se porte pour le mieux, et ce, malgré les tragiques évènements d'il y a quinze ans et dont j'endosse l'entière responsabilité, affirma le jonin d'une voix qui ne laissait paraître aucun sentiment, tout en fixant les deux enfants qui s'étaient assis dans un coin de la pièce. Puis il reprit : croyez-moi, notre collaboration ne nous réjouit pas plus que vous, mais elle est cependant nécessaire.
Tout aussi préparée que puissent être vos différentes milices, cela ne remplacera en aucun cas l'expertise de ninjas aguerris. Notre escouade fait partie de l'élite de Konoha, et chacun d'entre nous serait capable d'éliminer la totalité de vos hommes en quelques secondes à peine.
Mettons donc nos querelles de côté, et vous aurez ma parole qu'une fois la réception terminée, vous n'entendrez plus parler de nous.
Son discours sembla faire effet puisque de nombreux soldats hochaient la tête en signe d'approbation, abaissant déjà leurs armes, sûrement conscients que leurs vies ne tenaient qu'à un fil.
Naori eut un sourire narquois en les voyant faire. Devant un tel manque de professionnalisme, il était aisé pour eux de démontrer l'utilité de leur escouade. Elle n'avait aucun doute sur le fait qu'elle pouvait pulvériser la moitié des soldats en un clin d'œil. Confier une tâche aussi importante que la protection de la réception à ces soldats serait du suicide pour la famille Shiranui.
Le père de Genma semblait s'en rendre compte également puisque ses yeux affichaient à présent un air contrit. Il n'avait pas le choix : il devait accepter leur aide et coopérer avec eux s'il ne voulait pas risquer une tentative d'assassinat dans sa propre demeure. Il haïssait certes le Daimyô, mais le laisser mourir sous son toit n'arrangerait en rien ses affaires et compliquerait sans raison son ascension vers le pouvoir.
— Vous logerez dans la dépendance Nord et n'aurez accès qu'à la caserne pendant les trois prochains jours. Masashi, veuillez les conduire jusqu'à leur quartier.
Le vieillard qui les avait menés jusqu'à cette salle exécuta une révérence à son seigneur avant de se placer près des trois ninjas. Cependant, il ne s'activa pas plus, tout comme le reste de la salle. Personne ne semblait vouloir s'éclipser, ils restaient tous immobiles, guettant un signal que Naori ne pouvait percevoir.
— Il est de coutume de laisser les nobles sortir en premier lors de réunion. Ils sont suivis des domestiques puis enfin de leurs invités, murmura Raido à l'oreille de la jeune femme.
La femme du seigneur fut celle qui initia enfin le mouvement. Pour la première fois depuis le début de leur entrevue, Naori reporta son attention sur elle. Elle lui paraissait bien jeune par rapport au père de Genma. Bien jeune, et bien fade. Elle ne possédait ni la beauté des Shiranui, ni leur charme insolent.
— Ce n'est pas la mère de Gen'.
Raido s'était de nouveau penché près de son oreille, lui murmurant ses quelques mots, discrètement. Il jeta ensuite un coup d'œil à son meilleur ami qui n'avait étonnamment pas bronché depuis le début de l'entrevue. Il restait amorphe, les yeux dans le vide, tenant à peine la main de leur coéquipière. Avait-il cru pouvoir l'empêcher de se battre par ce geste si faible ?
Le balafré ne savait que faire. Son inquiétude pour Genma le rongeait, mais sa présence dans l'escouade allait assurément compliquer leur mission. Jamais les Shiranui ne les laisseraient agir à leur guise.
Naori, elle, restait fixée sur la femme qui quittait la pièce, tenant par la main ses deux enfants. Elle n'était pas belle, et ne semblait pas particulièrement vive d'esprit. Elle était restée complètement amorphe pendant leurs échanges après tout. Pendant un instant, la kunoichi se demanda ce qui pouvait pousser un homme tel que le Seigneur Shiranui à épouser une femme comme elle ? Ce fut en l'observant plus attentivement que Naori eut sa réponse.
Elle possédait cette grâce et cette douceur inhérente à la noblesse. On avait dû lui apprendre depuis le plus jeune âge à se comporter comme un précieux joyeux fragile, et force était d'admettre qu'elle y parvenait aisément. Chacun de ses gestes était exécuté avec une lenteur parfaitement calculée.
C'était sûrement pour ça qu'elle était devenue l'épouse de l'un des hommes les plus puissants du pays du Feu. Simplement parce qu'elle était une noble douée pour le protocole. Une noble en âge de procréer et surtout, d'assurer une nouvelle descendance à cette illustre famille.
Hotaru aurait-elle pu connaître le même sort si Genma et elle n'avaient pas fui leur famille et eut l'idée de rejoindre Konoha pour devenir des shinobis ? C'était sûrement le meilleur moyen pour une jeune noble de se soustraire à l'influence de sa famille et d'éviter tous mariages forcés avec le premier rustre venu en quête de pouvoir.
Enfin vint leur tour de sortir, alors que la salle était à présent vide de toute présence, si ce n'était celle des gardes qui les fixaient d'un œil méfiant. Masashi leur fit signe de le suivre, sans prendre la peine de prononcer le moindre mot. De nouveau, ils traversèrent tout un dédale de couloirs, passant de bâtiment en bâtiment, tous plus labyrinthiques les uns que les autres.
Il leur fallut plus de dix minutes avant de regagner enfin l'extérieur. Naori s'en étonna une nouvelle fois. Comment ces nobles faisaient-ils pour vivre dans un tel endroit ?
Les jardins n'avaient rien à envier à la demeure. Chaque plante, chaque arbre, chaque buisson était taillé avec finesse, élaborant un tableau somptueux, bien plus beau à contempler que les plus grandes œuvres qui avaient pu être peintes.
Une rivière y avait aménagé son refuge, paressant silencieusement dans un lit sinueux. Un immense rocher la surplombait, déployant son ombre sur les alentours. Étrangement, cela évoqua à Naori l'endroit où Genma se réfugiait toujours à Konoha. Elle lui jeta un coup d'œil furtif, intriguée, mais il ne tourna pas la tête vers elle. Il demeurait toujours aussi silencieux, perdu dans ses pensées. La jeune femme s'efforça de ne pas trop s'inquiéter : Genma était un homme solide, il arriverait forcément à surmonter cette épreuve. Elle n'en doutait pas une seule seconde.
Masashi leur fit traverser entièrement le jardin, toujours en silence. Ils arrivèrent finalement devant la fameuse dépendance au Nord du domaine. L'endroit n'avait plus rien de luxueux. On les avait parqués le plus loin possible de la résidence, dans une minuscule maison au confort spartiate.
Le serviteur les abandonna devant le bâtiment, leur rappelant au passage les règles de la propriété. Lorsqu'il leur tourna le dos pour repartir, il lâcha une dernière phrase, bien plus sinistre que les précédentes :
— Tu n'aurais jamais dû revenir ici.
Genma resta immobile et encaissa le coup, fermant simplement les yeux sous l'impact de cette courte phrase. Masashi avait raison, il n'aurait jamais dû remettre les pieds dans cette demeure. Il sentit la main de Naori attraper la sienne, sûrement dans une tentative de réconfort, mais il s'en dégagea immédiatement.
— Gen'...
Il avait besoin d'être seul. Il entra dans la maison, et se dirigea avec empressement à l'étage. Cet endroit, il le connaissait par cœur. Rien n'avait changé en vingt ans. Rien n'avait changé depuis l'époque où il se réfugiait ici après une énième dispute avec sa sœur. C'était l'endroit où elle le retrouvait à chaque fois, sans cesse attirée par ce lien inexorable qui les liait.
Il entra dans la chambre de droite. Celle qu'Hotaru préférait. Avant leur décision de partir, elle y avait dormi un nombre incalculable de fois, et avait considéré cette pièce comme leur quartier général. C'était là qu'ils planifient ensemble les quatre cents coups. C'était là qu'ils avaient pris la décision de fuir leur avenir.
Il passa sa main sur l'un des meubles. Une épaisse couche de poussière le recouvrait. Visiblement, plus personne ne venait depuis des années. Tout avait été laissé à l'abandon. Il se demanda depuis combien de temps cela durait, avant de hausser les épaules. Cela devait durer depuis la disparition de sa mère, sans aucun doute. Que lui était-il arrivé ? Il n'en avait aucune idée.
Il se sentait simplement perdu. Ses défenses avaient lâché dès le moment où il avait aperçu une autre femme que sa mère sur le trône familial, et son père les avait piétinées dès le moment où ses deux nouveaux enfants étaient rentrés la pièce. Genma et Hotaru. Jamais il n'avait eu aussi mal depuis la mort de sa sœur.
Il s'effondra dans un coin de la pièce, déjà épuisé par les jours qui allaient suivre.
-o-
— Laisse-le, Naori.
C'était déjà la cinquième fois qu'elle était tentée de monter à l'étage pour retrouver Genma. C'était aussi la cinquième fois que Raido se chargeait de la dissuader.
— Il a besoin de temps seul pour reprendre ses esprits.
— Ça fait des heures qu'il est cloîtré dans cette pièce ! riposta la jeune femme.
Elle était à bout de patience.
— Imagine-toi à sa place cinq minutes, gamine. Il vient d'apprendre la disparition de sa mère et en plus de ça, son père les a totalement effacés de son existence, lui et Hotaru. Il lui faut un peu de temps pour digérer tout ça.
— Son père a toujours été aussi détestable ?
— J'imagine. Je l'avais seulement aperçu une fois à l'académie. Il hurlait sur Sarutobi pour récupérer ses enfants. Selon lui, Konoha lui avait volé sa descendance.
Naori soupira. Elle détestait se sentir aussi impuissante. Genma était toujours là dans les moments où elle se sentait mal, elle voulait faire de même pour lui. Elle avait cependant confiance dans le jugement de Raido. Il connaissait Genma mieux qu'elle, il savait ce qui était le mieux pour lui.
Ils restèrent dans le salon de la dépendance jusqu'à ce que la nuit s'installe, l'obscurité extérieure les isolait encore plus du reste de la propriété, qu'ils apercevaient à peine au loin. Raido lâcha un long bâillement sonore avant de déclarer :
— On va prendre un peu de repos ce soir, les choses sérieuses commenceront demain. Il doit rester encore une chambre en haut, je te la laisse, je prendrai le canapé pour cette nuit.
— Comment tu sais pour la chambre ?
— Genma et Hotaru me parlaient souvent de cet endroit lorsqu'on était à l'académie. Ils avaient appelé ça leur « repère ».
Il était curieux pour Naori d'entendre Raido évoquer ce genre de souvenir. Il n'avait jamais abordé cette période de sa vie. En y songeant, elle se rendit compte qu'elle ne savait presque rien sur lui. Qui était-il réellement ? Où était sa famille ? Appartenait-il à un clan particulier ? Son coéquipier cultivait l'art du secret avec brio...
— Tu me parleras de ton enfance un jour ? demanda-t-elle, curieuse.
Raido la fixa, étonné. Naori avait drôlement changé depuis leur première rencontre. Elle qui ne se préoccupait que d'elle-même quelques mois plus tôt, commençait à s'intéresser davantage à Genma et lui. Il ne savait dire si cela était une bonne chose pour eux.
— Si tu es sage, lui fit-il avec un clin d'œil.
Elle haussa un sourcil sceptique avant de lui souhaiter une bonne nuit. Elle grimpa ensuite les escaliers, et entra dans la pièce encore ouverte. Raido avait vu juste : il s'agissait bien d'une chambre, peu meublée et ensevelie sous une couche de poussière.
Son regard se posa sur le lit avec une légère déception. Depuis l'invasion de Konoha, elle avait pris l'habitude de dormir dans les draps de son coéquipier, de sentir son corps brûlant et sa présence rassurante contre elle. La perspective de dormir de nouveau seule dans un lit peu accueillant ne lui plaisait guère. Surtout qu'elle n'était pas si fatiguée que ça. La marche pour venir jusqu'ici avait certes été longue, mais leur véritable mission ne commençait que dans deux jours, elle ne sentait pas encore la fatigue si caractéristique de la vie de ninja.
Elle décida finalement d'examiner ses dernières blessures à la lueur d'une vieille lanterne qui fonctionnait à peine. Elle n'en avait pas reparlé avec Genma, mais ses côtes la faisaient toujours autant souffrir, son corps refusait totalement de cicatriser. S'efforçant de rester calme, la kunoichi retira le pansement qui couvrait sa blessure en serrant les dents. La blessure n'était pas belle à voir. Son sang ne coulait plus, mais sa peau prenait un aspect noirci loin d'être rassurant. Elle concentra un peu de chakra dans sa main avant de la passer sur sa plaie, apaisant relativement la douleur qui la hantait depuis leur dernière mission.
Son esprit divagua quelques instants, se dirigeant à toute vitesse vers Konoha. Lyra avait-elle eu le temps d'analyser ses échantillons sanguins ? Avait-elle pu trouver la raison de cette nouvelle défaillance de son corps ? Elle essaya de se rassurer : son amie possédait une intelligence semblable à celle de Shikaku. Elle ne doutait pas une seule seconde que Lyra finirait par remédier à son problème. C'était ce qu'elle faisait toujours après tout.
Une fois les soins terminés, Naori pansa de nouveau son ventre, puis s'installa sur le bord de l'unique fenêtre. Le sommeil la fuyait. Trop de choses se bousculaient dans sa tête depuis que ses deux coéquipiers s'étaient enfin décidés à lui révéler leur passé. Pendant plusieurs heures, ses yeux fixèrent le vide tandis que son esprit tentait de mettre de l'ordre dans ses pensées. Vainement.
Un mouvement à l'extérieur attira finalement son regard, la faisant sursauter. Une ombre se faufilait en dehors de la dépendance, bien trop furtive pour être celle d'un domestique ou d'un soldat. La jeune femme eut un sourire. Genma s'était enfin décidé à sortir de sa tanière. Pour quelle raison ? Elle n'en savait rien. Mais elle était prête à le découvrir.
Elle entrouvrit discrètement sa fenêtre et sauta souplement sur le sol, laissant l'herbe atténuer le bruit de son atterrissage. Elle n'était pas particulièrement douée en filature, mais elle connaissait par cœur la façon de penser de son coéquipier. Le berner n'allait pas être très difficile.
Le jonin se dirigea silencieusement vers l'ouest de la demeure, sans prendre la peine de vérifier ses arrières. Il savait pertinemment qu'aucun soldat n'allait oser s'en prendre à lui. Malgré son statut de fils déshérité, il n'en restait pas moins un noble, et les hommes de son père était conditionné à respecter tous les nobles qu'ils croisaient.
Ses pas le menèrent sans hésitation à travers une petite forêt. Elle non plus n'avait pas changé malgré les années. Elle restait aussi terrifiante que dans son enfance. Son ombre noire l'inquiétait toujours autant qu'à l'époque où Hotaru et lui avaient interdiction de s'en approcher. Ce n'était pas un lieu pour les enfants. On lui avait répété ça pendant des années, sans qu'il comprenne pourquoi. Une forêt était un territoire de jeu rêvé. Pourtant, il ne s'en était pas approché jusqu'à la mort d'Hotaru. C'était peut-être la seule règle édictée par ses parents qu'il avait respectée.
Il lui avait fallu du temps pour comprendre que la forêt en elle-même n'avait rien de particulier. Une simple étendue de bambous et autres arbres, comme sa mère aimait tant. La végétation était parfaitement contrôlée, comme tout ce qui appartenait à son père. Aucune feuille ne dépassait sur les chemins de terre. C'en était déprimant.
Cette forêt n'avait rien de spécial. Elle n'était là que pour cacher un lieu qui l'était bien plus. La crypte de sa famille. Là où reposaient ses ancêtres. Là où reposait Hotaru. Ce grand bâtiment aux allures de temple. Il n'y était allé qu'une seule fois. Ça avait été le pire jour de sa vie.
Genma se souvenait à peine de la bâtisse. Il avait préféré effacer son existence de sa mémoire. D'ailleurs, il n'avait jamais eu le droit de revenir ici après l'inhumation de sa sœur. On l'avait tout simplement banni du domaine familial, l'empêchant de venir se recueillir là où la moitié de lui-même reposait.
Hotaru était morte depuis quinze maintenant, il n'existait plus aucune trace du lien qui avait façonné leur vie jusqu'à leur adolescence. Ce lien si pur qui caractérisait les jumeaux Shiranui. Seul demeurait un vide immense qu'il n'était jamais parvenu à combler. Hotaru n'était plus là, et lui était seul. Plus seul que jamais.
Il poussa la porte de la crypte, essuyant machinalement les larmes qui coulaient déjà sur son visage. Il était tant qu'il fasse son deuil.
Naori n'osa aller plus loin. Elle s'était arrêtée à une centaine de mètres de crypte, incapable d'avancer plus. Elle n'était pas la bienvenue en ces lieux. Tout son corps lui criait. Elle n'avait plus qu'une envie, c'était de fuir le plus loin possible de cet endroit. Elle n'avait pas le droit d'être ici. Ce qu'une voix dans son dos lui confirma :
— Mon mari vous a pourtant ordonné de vous cantonner à la dépendance Nord et à la caserne.
La kunoichi se retourna dans un sursaut, le sabre déjà en main. Elle détestait être prise ainsi par surprise. Pourquoi n'avait-elle pas détecté la présence de cette femme avant ? La femme du Seigneur Shiranui se tenait devant elle, vêtue d'un kimono d'été, le visage à peine apprêté. À la lueur de la lune, son visage quelconque prenait une tout autre mesure. Les ombres qui se dessinaient sur sa peau la rendaient plus impressionnante qu'en plein jour.
— Je ne suis pas une shinobi, mais l'art de la noblesse nous apprend bien plus de choses que vous ne semblez le penser. Savoir être discrète fait partie de mon rôle, affirma la femme qui lui faisait face.
— Se limiter à un être un fantôme obéissant doit être épuisant à la longue.
C'était plus fort que Naori. Les nobles lui inspiraient un mépris manifeste. Si évident qu'elle ne parvenait pas à faire semblant, même pour sauver sa peau.
— Je pourrais vous faire exécuter pour de tels propos. Vous en êtes pleinement consciente, et pourtant, vous n'avez pas l'air de vous en soucier. Ne tenez-vous donc pas à la vie ?
Naori lui offrit un sourire carnassier.
— Votre milice entière ne suffirait pas à me mettre à terre, vous le savez aussi bien que moi. J'ai réchappé à des années d'esclavage et à une guerre. Je suis devenue une nukenin constamment poursuivie par les ninjas de Kumo. J'ai affronté et tué plus d'hommes que je ne pourrais le compter. Ma vie est ponctuée par plus de sang que celle de n'importe quel noble, alors ce n'est pas quelques menaces qui me feront peur. La mort ne veut pas de moi pour l'instant, et ce n'est pas vous qui parviendrez à la forcer à m'offrir sa douce délivrance.
Contre toute attente, loin de s'inquiéter de son discours, la femme du Seigneur Shiranui lui offrit un doux sourire.
— C'est donc ça que Genma aime tant chez vous. Mon mari s'obstine à vous voir comme une simple esclave, mais vous êtes bien plus que ça. En vous, brille de une force bien trop belle pour qu'un homme puisse y résister.
— Comment le savez-vous ?
— Seul un aveugle ne le saurait pas. Chez les ninjas de Konoha, rien n'est plus important que les liens qui unissent une escouade n'est-ce-pas ? C'est cette particularité qui place notre pays parmi les plus puissants, et ce, malgré un manque d'effectif évident. Raido, Genma et vous, vous en êtes l'exemple typique : vous vous soutenez sans même vous en rendre compte. Jamais ces deux hommes n'auraient osé remettre les pieds ici si vous n'aviez pas été présente.
— Je n'ai rien fait de particulier, si ce n'est leur apporter encore plus d'ennuis en provoquant votre mari.
— Au contraire, vous leur avez montré l'exemple : vos menaces non voilées ont inversé le cours de la discussion. Mon mari a peur de vous, bien plus que vous ne pouvez le penser. Les liens que vous entretenez avec son fils le terrifient, parce qu'il se rend compte que rien ne pourrait vous séparer. Ses tentatives pour récupérer son héritier sont parfaitement vaines maintenant.
— Je croyais Genma banni depuis son départ pour Konoha. Et de ce que j'ai pu voir, vous vous êtes chargée de lui offrir une nouvelle descendance.
— Genma a été définitivement banni le jour où il a rompu ses fiançailles avec la jeune Kaori. Sa mère avait tout fait pour le faire revenir dans la famille jusque-là. Mon mari n'a pas accepté cet affront de plus de la part d'un fils qui l'avait déjà tant déçu. Sa mère s'est suicidée le jour même où la sentence a été annoncée. Quant à mes enfants, ils ne vaudront jamais autant que l'aîné d'une famille noble. Je ne suis que la seconde épouse, et ma descendance n'a que peu de valeur aux yeux des Shiranui. Des simples remplaçants, tout au plus.
Elle disait ça avec un tel détachement. Naori n'en revenait pas : jamais elle n'aurait imaginé cette femme aussi lucide sur sa situation.
— Pourquoi rester ici alors ? ne put-elle s'empêcher de demander.
— Cet endroit m'offre tout ce que j'ai toujours souhaité : une situation confortable, des richesses à ne plus savoir quoi en faire, la sécurité, une belle vie pour mes enfants... La liste est longue, mais j'ai bien conscience que tout cela vous paraît absurde. Nous sommes bien trop différentes, vous et moi, Naori.
La lame de la kunoichi vint effleurer la gorge de la noble avant même qu'elle n'ait eu le temps de hurler.
— Comment savez-vous ? cracha Naori.
Pourquoi tant de gens était au courant de son existence ? Comment tant de personnes connaissaient ce prénom qu'elle s'était efforcée de cacher pendant de longues années.
— Malgré les apparences, le Daimyô est un ami de longue date, j'ai longtemps fait partie de son entourage, et c'est lui qui m'a confié votre existence. Vous pouvez baisser votre sabre, je ne suis pas votre ennemi, loin de là. Il m'a demandé de vous protéger pendant votre séjour ici.
— Pourquoi vous croirais-je ?
— Parce que vous n'avez pas le choix. Vous êtes forte, personne ne peut le nier, mais vous manquez de pouvoir. Seule, vous ne parviendrez à rien.
— Je ne suis pas seule.
— Malgré tout le respect que j'ai pour vos deux coéquipiers, ils n'ont aucune valeur sur le plan politique. Vous pourriez faire tomber de nombreuses têtes, avec les bons alliés à vos côtés.
— Je n'ai jamais prétendu vouloir éliminer des gens.
— Lorsque vous apprendrez la vérité, je suis persuadée que votre volonté de vous venger deviendra un parfait outil pour quiconque à de l'ambition. Je ne vous demande pas une réponse maintenant, sachez simplement que le Daimyô et moi sommes là pour vous soutenir.
— Et votre mari ? N'est-il pas un ennemi du Daimyô ?
— Aussi grande soit son ambition, jamais il ne parviendra à mettre la main sur le pouvoir, je n'ai donc pas à m'inquiéter. À ses yeux, je resterai une épouse fidèle et aimante. Mais nous devrions remettre cette conversation à plus tard. Venez me retrouver dans le patio demain pendant la nuit, je vous en apprendrais un peu plus sur ce qui vous attend.
— Je viendrais. Avec Genma et Raido, ne put s'empêcher d'ajouter la kunoichi.
— Je l'espère bien. Cela me donnera l'occasion de connaître un peu mieux mon beau-fils. Il m'a l'air bien différent de son père, répondit la noble avec un sourire.
— N ?
Les deux femmes se retournèrent en sursautant. À force de discussion, aucune d'elle ne s'était rendu compte du retour de Genma. Celui les fixait, l'air peu ravi. Visiblement, il n'appréciait pas la conversation que sa coéquipière était en train d'avoir.
Naori n'en avait que faire. Elle s'était rongé les sangs pendant des heures pour lui. Il lui avait fallu user de toute sa patience pour ne pas débarquer dans la chambre dans laquelle il s'était réfugié. Elle avait eu peur pour lui, bien plus qu'elle ne l'admettait.
Alors la colère visible sur le visage de Genma, elle n'en avait que faire. Son regard tueur, il ne l'impressionnait pas le moins de monde. Pas plus que ses poings serrés. Maintenant qu'il se tenait enfin devant elle, elle ne comptait certainement pas le laisser s'échapper.
Sans réfléchir, elle se précipita dans ses bras, l'étreignant de toutes ses forces.
— Je me suis tellement inquiétée pour toi.
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Je sais, je sais, j'ai BEAUCOUP de retard... Mais du coup, pour me faire pardonner, ce chapitre est officiellement le deuxième plus long de cette fanfic ! De quoi vous occuper pendant un petit moment non ?
Il a été particulièrement difficile à écrire, on commence à arriver aux révélations les plus importantes, et faut dire que ça fout la pression un peu ._.
Alors j'espère sincèrement que ce loooooong pavé vous a plu, et j'ai hâte de lire vos théories sur la suite \o/
Je ne sais pas trop combien de temps je mettrais pour écrire le prochain chapitre, entre Noël et tout le bordel du mois de décembre, j'espère que j'aurais quand même un peu de temps pour écrire, donc comme d'hab : je vous remercie pour votre patience et je vais faire de mon mieux :D
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