>> Life For Rent, Dido. 

Je suis en train de dessiner dans mon carnet tout en piochant un rouleau de réglisse dans le sachet que Kellan m'a donnée à l'aéroport. Tout à l'heure, lorsque je l'ai perdu de vue dans le hall d'accueil, je suis restée un moment immobile, comme si je pouvais me téléporter et m'asseoir à ses côtés dans cet avion. Mais je ne me suis pas téléportée, alors j'ai pris la direction de la sortie pour prendre le volant. Cela ne fait qu'une petite heure que je suis rentrée à la maison, et à mon retour j'ai eu la surprise de la trouver vide. Ma mère m'avait laissée un mot sur la table de la salle à manger.

« Je suis partie à la boutique, je n'ai plus de peinture blanche. »

J'ai levé les yeux au ciel après avoir reposé le papier. Les textos ça existe maman.

Avant de croquer dans les deux fils collés, je les écarte entre eux, de façon à créer un petit escargot. Je souris discrètement devant cette figurine improvisée en pensant à toutes les fois où j'ai vu Kellan faire ça. Puis, je monte le son dans mes écouteurs et prends une bouchée de la friandise.

Je reprends ensuite mon crayon entre mes doigts et continue mon croquis. Je compte recréer ce dessin sur toile, les deux semaines de vacances vont pouvoir m'offrir cette opportunité.

Je dessine jusqu'à en avoir mal aux yeux, Shadow of the Day de Linkin Park en repeat. Alors au bout d'un moment, je pose mon carnet sur la petite table en bois du salon et m'étire. Je fais quelques pas, et me dirige vers la terrasse en bois qui fait face à la porte d'entrée. Pieds nus, je m'avance sur les planches brunes, et appuie mes coudes sur la rembarde en observant le voisinage. Tout semble calme à cette heure-ci, il y a peu de voitures, et les conversations bruyantes se font rares.

C'est alors qu'une longue queue de cheval blonde flottant dans les airs fait son apparition. Je la reconnais immédiatement. Romy. Merde. Je me baisse d'un coup, espérant être cachée par les arbres. Avec un peu de chance, elle continuera son footing un peu plus bas dans la rue. Je pense très fort à cette hypothèse comme si un génie pouvait alors m'entendre pour réaliser mon souhait. Mais malheureusement pour moi, il n'y a pas de génie, et des bruits de pas se font entendre dans les escaliers. Je pousse un soupir tout en me relevant pour accueillir ma voisine.

- Sun ! S'exclame-t-elle en ouvrant les bras, une fois que je suis dans son champ de vision.

Elle s'avance vers moi dans sa tenue de sport composée d'une brassière de sport et d'un short, et j'ouvre à peine les bras en agitant les mains, dans un faux élan de joie.

- Hey !

Elle me prend dans ses bras et je me raidis instantanément. Elle ne semble pas le remarquer et lorsqu'elle se décolle de moi, elle affiche toujours son éternel sourire. Elle me toise un moment de ses yeux verts, puis elle retrouve la parole.

- Tu as changé de couleur de cheveux ! S'exclame-t-elle.

- Eh oui...

Je m'efforce de sourire, mais je dois avouer que l'énergie débordante de Romy n'est pas ce dont j'ai besoin en ce moment-même.

- Ça te va bien, ce rose pastel. Même si j'étais fan de ton bleu ciel.

- Merci.

Elle détache ses longs cheveux, et telle une pub pour shampoing elle secoue gracieusement sa chevelure le long de son dos. Elle pose ensuite ses mains sur ses hanches et reporte son attention sur moi.

- Alors, quoi de neuf ?

Je hausse les épaules.

- Rien de spécial, et toi ?

- Les cours m'épuisent ! Les maths c'est autre chose que l'art hein !

- Bien sûr, je dis en grinçant des dents, mais toujours en souriant malgré tout. Tu veux entrer peut-être ? je demande en captant son regard qui ne cesse de faire des aller-retours vers le salon. 

- Oh oui, avec plaisir ! Je meurs de soif !

Aussitôt dit, aussitôt fait, Romy rentre chez moi et fonce dans la cuisine. Je soupire et lève les yeux au ciel en fermant la porte derrière moi. Pourvu qu'elle ne reste pas toute la soirée...

Je connais Romy depuis... Depuis toujours en fait. On vit dans cette rue depuis des années maintenant et si je fouille dans ma mémoire, je dirais qu'elle a toujours fait partie de ma vie. Je pourrais même dire qu'elle a été ma première amie.

Une amitié assez inattendue étantdonné nos différences, visibles au premier coup d'œil. Romy est la scientifique alors que je suis l'artiste. Elle est la fille populaire tandis que je suis la fille invisible. L'extravertie contre l'introvertie. Déjà petites, nous étions différentes, mais tout compte fait, je crois bien que nos différences se complètent. Mais il arrive que parfois ces divergences en arrivent à la mauvaise équation et que je ne puisse plus supporter son énergie. Comme ce soir, alors qu'elle vient à peine de montrer le bout de son nez.

- Il est pas là, Kellan ?

J'avance doucement dans la cuisine alors qu'elle vide un verre de thé glacé. Je hausse un sourcil. Pourquoi elle me parle de Kellan ?

- Euh... Non, pourquoi ?

Elle hausse les épaules en me faisant un petit sourire.

- Comme ça.

- D'accord... je dis, un peu perplexe.

En pensant à Kellan, je me dis qu'à présent cela doit bien faire deux heures qu'il est dans l'avion. Je n'ai pas le temps de calculer dans ma tête les heures qui se sont écoulées depuis l'aéroport car Romy me sort de mes pensées en se jetant sur le canapé. Elle s'allonge de tout son long en allumant la télévision.

Je porte les mains à mon visage et mime des gestes où je l'étrangle. Elle va rester des heures. Elle zappe sur une chaîne de télé-réalité et je gonfle les joues pour expirer un bon coup. Puis, je vois sa main tapoter une place près d'elle, et je fais le tour du canapé pour m'y laisser tomber en croisant les bras. Je suis un vrai petit chien qui obéit au doigt et à l'œil et ça m'agace. Mais je n'ai pas le cran de lui dire de partir de chez moi.

La cheville posée sur la cuisse de mon autre jambe qui est en train de s'agiter, je m'impatiente. Pourvu que ma mère arrive bientôt.

Quelques minutes plus tard, celle-ci franchit la porte d'entrée, les bras chargés de sacs en carton. Je reconnais sans mal le logo du restaurant asiatique où nous aimons manger. Je me lève alors aussitôt du canapé pour l'aider. Lorsque j'arrive à sa hauteur, elle me dépose un baiser sur la joue et son regard tombe sur Romy.

- Salut Romy ! la salue-t-elle. Tu tombes bien, j'ai acheté des tonnes de nourriture au restaurant asiatique ! Tu restes dîner ?

- Bien sûr que je reste, il faut pas me le proposer deux fois ! répond l'intéressée.

Je lève imperceptiblement les yeux au ciel en entendant sa réponse. Puis, je prends un sac dans mes bras et l'odeur sucré et riche de la nourriture vient me chatouiller les narines. Ma mère pose le reste sur la table du salon, et repart aussitôt vers la voiture, sûrement pour récupérer ses courses. Romy va dans la cuisine pour en ramener des verres et une carafe d'eau. Quant à moi, j'écarte les sacs pour en voir leur contenu. Je suis affamée et je crois bien que je pourrais tout avaler, j'en ignore même les tâches de graisses ramollissant les sacs marrons. Une main se pose sur mon épaule et je tourne la tête pour voir le visage de ma mère.

- J'ai pris les spécialités veggie pour toi, Sun.

- Merci, je lui dis en esquissant un petit sourire.

Elle pose quelques sacs sur le sol, puis s'assoit à table. Je l'imite.

- Sers toi, Romy.

- Avec plaisir !

Toutes trois, nous déchirons les emballages et nous servons. Dès que la première bouchée rentre en contact avec ma langue, je pousse presque un soupir de plaisir tellement c'est bon de manger. Je mange presque tout ce qu'il y a dans mon assiette à l'aide de mes baguettes et de mes doigts. Je me régale. Romy discute avec ma mère et je les écoute d'une oreille discrète, jusqu'à ce que ma mère s'adresse à moi.

- Au fait Sun, quelqu'un m'a contacté cet après midi pour l'abri de jardin.

- C'est super ! je dis entre deux bouchées. 

- C'est qui ? s'empresse de demander Romy.

Ma mère plonge un rouleau de printemps dans la sauce et lui répond.

- Un jeune homme. De ce que j'ai entendu au téléphone, il m'a l'air sérieux. Apparemment il a déjà retapé toute une grange avec son grand père, donc je suppose qu'il fera du bon boulot pour mon futur atelier.

Romy me lance un regard à l'autre bout de la table, et je lève les paumes vers le plafond pour lui faire comprendre en silence que je veux savoir ce qu'elle veut.

- Un jeune homme, fait-t-elle en remuant les sourcils.

J'en lève un à mon tour.

- Et ?

- Notre petite Sun va peut-être avoir le coup de foudre ! 

- N'importe quoi ! je m'exclame, le feu aux joues.

Romy part dans un grand rire, et je jette un œil à ma mère. Elle sourit discrètement tout en mangeant, et je soupire en revenant vers mon assiette. Du bout de ma baguette, je fais glisser les tâches de gras le long de l'assiette. Soudain, mon ventre se contracte et je perds l'appétit. Totalement.

- Enfin Sun, tu peux me comprendre ! Je m'inquiète sérieusement de ton manque d'intérêt envers toutes relations romantiques, poursuit mon amie.

Je lui jette un regard noir, et son sourire s'efface de son visage pour prendre une nouvelle bouchée de poulet au caramel.

- Excuse moi, Sun, dit-elle la bouche pleine.

Je serre les dents, très mal à l'aise. Je déteste qu'on parle de ça. Je déteste ça parce que ça me rappelle mes anciennes relations, et ça me fait mal. Je continue de jouer avec ma nourriture, et au bout d'un moment, plus mes pensées s'enchaînent, plus mon assiette semble énorme et plus mon estomac se rétrécit. Je n'ai plus faim. Je m'essuie la bouche avec ma serviette et repousse mon assiette tout en posant mes coudes sur la table. C'est à ce moment précis que mon téléphone se met à vibrer dans la poche de mon jean. Je m'empresse de le sortir de sa cachette.

✉️ Bien arrivé. Laisse moi deviner, tu as déjà oublié mon prénom ?

J'éclate de rire à l'instant même où mes yeux lisent ces mots, ce qui me vaut des regards curieux.

- Qu'est-ce qu'il nous vaut ta bonne humeur ? demande ma mère avec un sourire. 

- C'est Kellan.

Elle hoche la tête et je sens le regard de Romy sur moi. Tout en souriant, je tape ma réponse.

✉️ C'est malin, j'ai explosé de rire, Kellan.

✉️ Je suis très malin. Je vais prendre un taxi pour rejoindre quelques potes. Tu m'envoies un message quand tu vas te coucher ?

✉️ Yep.

                                        ***

Je pose ma tête sur l'oreiller, tout en croisant mes bras sous celle-ci. Comme chaque fois que je suis dans cette position, je pose mon regard sur tous les objets accrochés au plafond. Les étoiles ne brillent pas encore, je n'ai pas éteint ma lumière, mais les plumes tournent sur elles-mêmes à cause du courant d'air. Je place mes écouteurs dans mes oreilles et lance ma playlist. Je souris quand Right Here retentit. Je jette un coup d'œil à l'heure, il est presque minuit.

✉️ C'est bon, je suis au lit.

Quelques chansons passent avant que mon portable vibre sur mon ventre.

✉️ Tu es fatiguée ?

✉️ Pas vraiment, pourquoi ?

Quelques secondes plus tard, mon téléphone s'agite, et j'aperçois alors la demande d'un chat vidéo sur Skype. Je me redresse sur mon oreiller et fais glisser mon pouce sur l'écran pour accepter l'invitation. Aussitôt, le visage de Kellan apparaît. Il est dans la rue, et seule la lumière des lampadaires lui éclaire le visage. Il est en train de marcher, et jette donc souvent des coups d'œil autour de lui.

- Hey ! je fais.

- Salut, petit rayon de soleil. 

Je souris en entendant le surnom qu'il me donne.

- Ça fait longtemps que tu ne m'as pas appelé comme ça, je lui fais remarquer.

- Ouais, j'essaie de compenser, histoire que je te manque pas trop tout ça, tout ça. Après je vais culpabiliser... 

- Kellan ! Je le coupe, morte de rire. 

Je pose une main sur ma bouche. Lui aussi rit et c'est fou comme j'aimerais qu'il soit là. Je devine qu'il est en train de traverser une rue, quand il reprend :

- Plus sérieusement, il se pourrait que tu me manques un petit peu aussi ces prochains jours.

- J'aime mieux ça ! Je dis d'un ton amusé, même si en fait, je suis touchée par ce qu'il vient de dire.

Il sourit en secouant la tête.

- Alors, ta soirée ? j'enchaîne en tenant mon téléphone face à mon visage.

- Cool. Vraiment cool. Mais je rentre tôt parce que je suis mort. J'ai revu Flo', c'était sympa. 

- C'est cool ça, je réponds avec un sourire sincère. 

- Et toi, ta soirée ?

Je m'affale un peu plus sur le matelas en passant une main dans mes cheveux. Je pousse un soupir en jouant avec le cordon de mon sweat.

- Sun ? Qu'est-ce qu'il y a ? demande mon meilleur ami sur un ton taquin.

- Romy est venue et on a mangé chinois.

Je vois qu'il se retient de rire.

- Romy, tu dis ? 

- Ouais, Romy. 

- Tu as raison, c'est une torture de manger chinois en compagnie de son amie. 

- Gnagnagnagna ! je fais en lui tirant la langue. 

- D'accord, d'accord, j'avoue cette fille est pas facile à gérer quand elle s'y met, mais elle est plutôt cool. 

- Ouais... D'ailleurs je crois bien qu'elle est venue pour toi.

Il fronce les sourcils.

- Comment ça ?

- Quand elle est arrivée, elle a demandé si tu étais là. 

- Mouais...

La conversation se poursuit où il me raconte plus en détails sa soirée, alors qu'il parcourt la ville à pieds. Au bout d'un moment, il se trouve devant une bâtisse et je vois qu'il monte des escaliers.

- J'arrive chez moi ! 

- Cool, je dis en remontant ma couette sur mon menton.

Mes paupières commencent à se faire lourdes, parler avec Kellan m'a apaisée. Celui-ci me surprend en train de bailler alors qu'il est en train d'ouvrir une porte.

- Tu devrais dormir, Sun.

- Ouais, tu as raison, je reconnais en baillant une nouvelle fois. 

- Bonne nuit, petit rayon de soleil. 

- Bonne nuit.

La communication se coupe, et mon fond d'écran apparaît de nouveau. Je pose mon téléphone sur ma table de chevet et éteint la lumière, donnant ainsi vie aux étoiles au plafond. 

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Hello !

Comment allez-vous ? 

Ce chapitre vous a plu ? 

Que pensez-vous du nouveau personnage de Romy ? De la relation qu'elle entretient avec Sun ? 

Des idées quant à la suite ? 

Ce petit moment entre Sun et Kellan vous a plu ? 

La chanson vous plaît ? 

A la semaine prochaine ! 

Des bisous <3

Ps : Salut, encore TFWSPN, (c'est la dernière fois, promis) je passe juste pour vous reprévenir que si Sofeather ne répond pas tout de suite à vos commentaires c'est parce qu'elle n'a toujours pas accès à internet, mais elle rentre bientôt. En attendant, noyez la de commentaires ! (Ah, et, vous avez vu, je suis à l'heure cette fois).