Chapitre 27

À l'heure où Halev profitait d'un repos bien mérité à l'exception de quelques hauts quartiers, le palais n'était pas en reste.

Les courtisans avaient profité de l'absence du roi pour s'étourdir de plaisirs et de péchés. Sous la surveillance avisée, mais volontairement laxiste d'Elénaure, la dernière figure royale à l'exception de Calypso, la Cour avait pu s'adonner à ses activités favorites. Activités auxquelles elle excellait. Le beau parler, la séduction, que celle-ci soit mise à profit d'un riche parti ou d'un éventuel amant, la danse, le tout arrosé du meilleur vin et des meilleurs divertissements. Elénaure avait laissé libre cours à l'imagination de ses invités du soir et avait invité quelques amies pour agrémenter la réception.

Seul absent digne d'être souligné : son fils, Tybalt. Elle l'avait aperçu aux alentours de huit heures du soir, alors que la soirée commençait à peine et que la séduction, les persiflages, n'avaient pas encore pris le dessus sur les conversations gorgées de politesse. Elle avait encouragé ces abus, avait soufflé sur les braises, mais rien, pas même le nom de Lyssandre, n'avait rappelé son fils à elle.

La duchesse de Lanceny était pourtant certaine que son fils haïssait le roi autant qu'elle. C'était tout ce qu'elle désirait, cette haine brute et aveugle, forcenée et violente.

Elénaure, toujours vêtue de noir bien qu'ayant paré son voile et sa parure de quelques coquetteries. De la dentelle, l'un ou l'autre bijoux pour souligner la ligne de sa gorge qu'elle avait délicate. Certains courtisans s'étaient étonnés de la voir participer à de telles festivités, car cela y ressemblait grandement, mais Elénaure n'avait pas donné l'impression d'une femme endeuillée.

Elle s'apparentait davantage à une femme qui fomentait sa vengeance.

Ainsi, elle y avait l'énergie nécessaire. Les alliés solides qu'elle possédait déjà étendaient leur toile, exécutaient ce que la Cour faisait de mieux : bavarder. Elénaure y prenait partie parfois, mais gardait essentiellement ses distances. Certains de ses complices préféraient garder l'anonymat aussi longtemps que possible et elle les comprenait. Personne ne se risquerait à la trahir, bien sûr, mais lorsqu'on jouait à ce jeu subtil, il valait mieux se montrer prudent.

Calypso avait bien dû remarquer la manière dont les discussions s'étaient éparpillées lorsqu'elle avait fait l'honneur de sa présence. Suivie par l'ombre discrète, effacée, du bâtard du prince, elle avait jeté sur les groupes de nobles un regard suspicieux. Elle se doutait de quelque chose. Calypso était une femme trop intelligente pour se laisser duper et Elénaure le savait. C'était pourquoi elle la considérait comme la seule rivale digne de lui tenir tête.

— Madame la duchesse, quel... plaisir de vous voir ici.

Elénaure nota que la sœur de feu son mari venait de la désigner comme étant la duchesse, non par le titre que tous employaient en sa présence, celui de reine douairière. Elle fut également certaine que Calypso se faisait violence pour ne pas lui asséner une remarque déplaisante au sujet de son deuil. Au sujet aussi d'organiser une telle réception le lendemain même de la disparition de sa fille. C'était inconvenant, une offense à la mémoire de la regrettée Romie, et Calypso portait le deuil de façon plus évidente. Un comble.

Seulement, elle ignorait qu'Elénaure projetait déjà d'établir les prémices de sa vengeance. Cette soirée en serait les racines, en plus de lui permettre d'oublier sa peine. Si la duchesse n'avait pas traversé plus d'un drame, elle se serait volontiers enfermée dans ses appartements pour les inonder de ses larmes. Elle savait que le meilleur moyen d'échapper à sa douleur, d'y remédier, était de la voir partager. Pas par un cortège de condoléances hypocrites, mais par un autre qui porterait, contre son gré, une souffrance équivalente à la sienne.

— Le plaisir est partagé, madame. Je ne pensais pas vous voir ici.

— Je suis toute aussi surprise de vous découvrir ici. J'ose espérer que cette petite fête est à votre goût, bien que je doute que Loajess est vraiment besoin de fêter quoi que ce soit. La noblesse, peut-être, mais les rares bonnes consciences qui subsistent ici, j'en doute.

— La noblesse a besoin de se changer les esprits, rétorqua Elénaure, sans cesser d'afficher son sourire de circonstances, crispé et glacial.

— Grand bien lui fasse, j'espère que cela vous soulage également de quelques...

Le regard de la reine douairière se durcit. Elle devina les mots avant que ceux-ci ne se présentent. Des remords ? Cette femme n'avait jamais eu d'enfants, elle n'avait aucun droit de s'exprimer à ce sujet. Si elles ne se trouvaient pas en public, sous le regard appréciateur ou impudique des nobles, Elénaure aurait fait ravaler ses prétentions à cette femme.

— Vous m'offensez !

Calypso se radoucit. Elle ne portait pas la veuve de son frère dans son cœur, c'était un fait, et avant toute chose parce qu'elle avait remplacé une femme qu'elle avait profondément aimé. Mélissandre de Loajess, première épouse de Soann, et mère d'Hélios, Willow et Lyssandre, avait été une amie fidèle, une femme exemplaire, une reine d'exception. Aux yeux de Calypso, Elénaure n'en était qu'une copie superficielle, vaniteuse et indigne.

En dépit de ce mépris commun, la tante du roi partageait sa peine. S'il y avait bien une chose qui pouvait allier les hommes, les réconcilier, c'était bien la douleur.

Les réconcilier ou les déchirer.

— Je n'ai pas eu l'occasion de vous présenter mes condoléances, Elénaure.

Elle était sincère et c'était sans doute cela, le pire.

La duchesse considéra la femme qui lui avait toujours tenu tête. Elle la haïssait d'avoir tant aimé Romie, pour sa force et pour être capable de lui répondre avec une telle inventivité. Elle s'en était d'accord moquée. La sœur du roi, vieille fille, éternelle célibataire qui parcourait les couloirs du château, cela ressemblait à une farce. Elle s'était gaussée de ce visage qu'elle jugeait ingrat, qui ne l'était sans doute pas, de ces rondeurs, de ces minuscules imperfections. Elle s'y était attaquée parce que rien en elle ne justifiait son dédain et qu'elle se savait, en comparaison, parfaite. Après tout, elle était parvenue à séduire un roi en l'espace de quelques semaines. Un miracle qu'elle plaçait sur sa beauté et sur son caractère impitoyable.

Elle rejoignit Calypso et, presque sans ralentir, lui glissa à l'oreille :

— Plutôt que de songer à la manière dont je vis le deuil de ma fille, je vous suggère de faire le nécessaire pour en avoir une, bien que je doute que vous en soyez encore capable. À défaut de cela, veillez sur ce que mon défunt mari vous a laissé. Les garder en vie promet d'être aussi aisé que de ramener Hélios d'entre les morts.

Sans laisser à sa rivale le loisir de rétorquer, elle s'en fut dans un froissement de dentelles et sans accorder le moindre regard à ses invités.

Quelques brefs instants plus tard, ce fut au tour de Tybalt de pénétrer dans le château. La nuit avait depuis longtemps remplacé les lueurs criardes et vespérales. Son pas lourd se changea en démarche conquérante dès lors qu'il mit un pied dans l'enceinte du palais.

Les apparences, veiller aux apparences.

Tybalt avait grandi avec cette consigne pour tout ordre de conduite. Il maniait désormais ce jeu à la perfection. Cependant, cette obligation ne lui avait jamais semblé aussi douloureuse, aussi encombrante. L'air de dédain qu'il plantait sur son visage étouffait ses traits et l'ombre plaquée sur ceux-ci, celle qui s'intensifiait avec les années et le damnait chaque jour davantage, était telle qu'il se confondait avec la nuit.

Il ne s'attarda pas sous les arcades de la cour principale et abandonna la fraîcheur délicate de la nuit, son parfum odorant, pour les couloirs interminables. L'esprit embrumé par le vin, il ne fit pas état des quelques courtisans qui croisèrent sa route. En ce jour plus que jamais, sa demeure à l'Est du continent lui manquait, son isolement, son calme et son authenticité. Le palais n'avait décidément rien à lui envier.

À mesure qu'il gravissait les marches, la rage sourde qu'il avait cultivée grimpa. Contre qui la portée, cette fois ? Contre les affres du pouvoir et les sacrifices qu'il demandait, contre sa mère qui le destinait à un tel sacrifice, ou contre le coupable tout désigné, Lyssandre ?

Ce soir, le monde entier méritait son courroux.

La mine plombée par deux cernes sombres sous son regard, ses cheveux sombres comme deux larges plumes de corbeau qui retomberaient sur ses épaules, il semblait plus dangereux qu'attrayant.

Il haïssait ses murs pour lui rappeler le temps où Romie caracolait entre les jambes des courtisans, indisciplinée et joyeusement vivante. Ce temps passé était encore proche. Suffisamment lointain pour que Tybalt le sache passé et regretté, mais pas suffisamment proche pour qu'il puisse espérer s'en emparer. Il aurait voulu tendre les bras et, de ses mains puissantes, agripper ce lambeau de temps pour lui intimer un ordre.

Par pitié, rends-moi ma sœur.

Et le temps, intraitable, refusait toute négociation. Romie appartenait au passé. Elle était morte sur les pavés d'Halev et avait abreuvé cette terre millénaire de son sang. Jamais Tybalt ne se pardonnerait sa disparition.

Jamais.

Envahi par la vision enchanteresse de son visage candide, rieur, il se l'imaginait encore avec une précision déroutante. Elle était si petite, si fragile. Une rose délicate enlevée de sa protection. Jamais plus Tybalt n'entendrait le rire cristallin de la petite combler le vide de ces lieux. Elle ne serait jamais l'adulte que son frère imaginait et qu'il protégerait de la convoitise des hommes.

Elle ne serait jamais, car les dieux avaient rappelé à eux la plus délicieuse de leurs anges.

La porte de ses appartements avait été laissée entrouverte. Tybalt songea, entre deux pensées plus lourdes de conséquences, qu'il morigénerait les femmes de chambre pour ce malencontreux oubli. La vision d'une invitée surprise assise sur le siège de l'entrée, un verre d'alcool ambré à la main, le dispensa de cette initiative.

Elénaure de Lanceny jeta sur son fils un regard dur, intransigeant, à l'image de tous ceux que Tybalt se rappelait avoir reçu d'elle.

— Fermez la porte, ordonna-t-elle, en guise de salutation.

Tybalt obéit sans penser, par réflexe, et ne chercha plus à se soustraire à ce regard étrange. Il y avait, à l'intérieur, un savant mélange de peine inconsolable et de détermination inflexible. Des deux, Tybalt savait déjà laquelle triompherait de l'autre.

— Mère.

— Je ns vous attendais plus, fils.

— Je ne pensais pas l'heure aussi tardive, se justifia Tybalt.

L'alcool qui réchauffait son être rendait sa réplique instable et son contrôle médiocre, il le savait. Lorsqu'il déposa son long manteau sur l'une des chaises de l'élégant ameublement de ses quartiers, il sut que sa mère ne lui pardonnerait rien.

Pas même la faiblesse d'un homme qui venait de perdre sa sœur.

Pas même les larmes qu'il retenait au nom d'une écoeurante fierté masculine inculquée par sa mère.

— Je n'aurais jamais pensé que mon fils écumerait un jour les tavernes d'Halev pour se présenter à moi dans l'état pitoyable dans lequel vous vous trouvez.

Tybalt sera les dents et essuya le coup. Celui-ci, il aurait pu le prévoir, ce qui ne l'empêcha pas de brûler d'envie de renvoyer le compliment à son expéditeur. Sa mère n'en était manifestement pas à son premier verre et paraissait bien envinée, elle aussi. Tybalt ravala cette bravade mal venue qu'il troqua contre un pragmatisme de circonstance :

— Qu'avez-vous à m'apprendre, mère ?

Elénaure ne s'offusqua pas. Elle ne rendait que rarement visite à son fils sans une bonne raison pour l'y pousser.

— Le roi a pris aujourd'hui une décision majeure.

— Une stratégie suicide sur laquelle repose l'avenir militaire de Loajess, commenta Tybalt. J'imagine que la nouvelle n'a pas enchanté ses conseillers. Les chances pour que la stratégie fonctionne sont pratiquement nulles.

Avec une certaine rigidité, Elénaure trempa ses lèvres dans son verre et fit rouler le liquide dans sa bouche. Tybalt fut parcouru par une soudaine envie de la gifler à la volée. Sa fille venait de mourir et elle venait lui rendre visite pour discuter de la guerre ? Son héritier n'était pas seulement déçu, il était effondré.

— J'ai fait en sorte que le roi soit invité à se rendre sur le front aux côtés de ses soldats.

— Il n'acceptera pas, trancha Tybalt. Lyssandre n'a jamais tenu une épée de sa vie et à défaut d'être à la hauteur de ses devoirs, il n'est pas encore suicidaire.

Elénaure eut un sourire. Un sourire que son fils aurait préféré ne jamais connaître. Un sourire froid, calculateur, inhumain.

Un sourire qui paraissait dire, plus férocement que des mots : « pas encore ».

— Oh, mais il ne s'y rendra pas pour combattre, seulement pour... encourager, dirons-nous, ses braves soldats. Il acceptera, croyez-moi, précisément parce que sa situation est désespérée et qu'il n'a pas d'autres choix.

— Qu'attendez-vous ? Que ces soldats se jettent à sa gorge et le réduisent au silence ? Avec le temps, cela deviendrait presque une habitude. Loajess se rappellera Lyssandre à travers le nombre de tentatives d'assassinat auxquelles il a réchappées.

— Un regrettable accident est si vite arrivé...

Tybalt manqua de rappeler à sa génitrice que sa fille avait péri au cours de l'un de ces regrettables accidents. Il n'en fit rien. Le duc savait d'avance qu'il obéirait à Elénaure, quoi qu'elle lui ordonne, parce qu'il n'avait jamais eu d'autres choix que de se plier à sa volonté.

— Je souhaiterais avant tout que vous l'accompagner. Je suis persuadée qu'il nous cache quelque chose et... quant à mes autres indications, je vous les dispenserai la veille de votre départ. Certains préparatifs requièrent du temps et je ne voudrais pas qu'une bévue vous mette en danger.

Il sourcilla. Que manigançait-elle ? Son mouvement de recul n'échappa pas à sa mère qui se leva pour le rejoindre. Elle abandonna son verre pour écarter les deux mèches sombres qui obscurcissaient le regard de son fils. Deux yeux d'un noir d'obsidienne soulignés de deux traits de khôl. Elle le jugeait, y cherchait le matériau dans lequel les rois étaient faits, et n'y trouvait qu'une docilité exemplaire.

Tybalt savait se montrer aussi sage qu'un agneau et au moins aussi obéissant, mais uniquement lorsqu'il s'agissait d'Elénaure.

— Après l'attentat d'Halev, Lyssandre n'a pas d'autres choix que de faire ses preuves. Je vous demande avant tout de garder un œil sur lui, d'écouter ce qu'il se dit. Les soldats ne lui sont peut-être pas aussi hostiles que la Cour. Soyez discret, soyez efficace, ne vous faites pas remarquer. Je ne vous demande pas de jouer d'hypocrisies, mais soyez aussi effacé que possible. Soyez plus irréprochable que ne le sera jamais ce prétendu roi.

— Bien, mère. Vous avez ma parole.

— Je ne veux pas qu'un roi tel que lui, qui marche sur les pas de son père et qui joue à tour de bras les donzelles effarouchées. Je ne puis me contenter des miettes plus longtemps, le comprenez-vous ? Ma fille doit être vengée.

La gorge de Tybalt se noua. Ce ne fut pas en raison de la mention de sœur, mais pour ce qu'Elénaure faisait de sa mémoire : un jouet, un instrument de pouvoir. Tybalt aurait voulu qu'elle reste la fillette insouciante, regrettée, quitte à endurer les ambitions de sa mère. Il en avait l'habitude, désormais.

— Que dois-je dire à ma fiancée ?

— Nausicaa de Meauvoir se passera de vos explications et de votre présence durant quelques jours. Une promise qui se languit de votre présence, n'est-ce pas le comble du romantisme ?

Elénaure se moquait presque. Elle n'avait jamais feint de comprendre l'attachement que ces deux jeunes gens se vouaient et encore moins leur inclinaison. Elle se réjouissait à peine de la jalousie que leur union arrachait à Lyssandre. Les doigts serrés sur le menton de son fils, elle ne lui permettait pas de se soustraire à son regard exigeant.

— Elle n'est pas dupe, mère.

— Eh bien, je me chargerai de lui expliquer que l'on vous a ordonné d'accompagner le roi et que vous n'avez pu échapper à vos obligations, pas même pour ses beaux yeux. Vous n'avez pas eu l'occasion de la prévenir malgré votre enthousiasme.

— Pourquoi ne pas simplement lui servir la vérité ?

Elénaure laissa échapper un sourire de lassitude. Ses lèvres se pincèrent et elle retint une floppée de reproches injustes. Ce jeune homme fort, solide, était son fils, l'enfant qu'elle avait mis au monde vingt-quatre ans plus tôt. Elle reconnaissait son empreinte dans son regard, dans ses yeux semblables à deux mares sans fond. Elle lui avait légué la beauté de son visage, exotique, irrésistible, mais pas l'entièreté de son caractère. Elénaure ne voyait pas en cet enfant la reproduction fidèle et complète de son âme, mais plutôt une vague copie qui n'égalerait jamais chacune de ses attentes.

— Elle est la courtisane la plus proche du roi, son amie fidèle et dévouée. Êtes-vous aveuglé par... l'amour ou par la stupidité ? Elle pourrait vous manipuler à sa guise et vous n'en remarqueriez même rien. Votre douce Nausicaa n'est peut-être pas celle que vous pensez.

Tybalt recula d'un pas, à mi-chemin entre l'obéissance et l'envie irrépressible d'ordonner à sa mère de quitter ses quartiers.

L'amour... S'il y avait bien une chose dont il pensait sa mère dépourvue, c'était bien cela. Elle était incapable de comprendre, même d'imaginer, ce que représentait Nausicaa à ses yeux.

— Elle pourrait détenir des informations précieuses, rétorqua-t-il, sans en penser un mot. Le roi se confie souvent à elle.

— Pourquoi croyez-vous que je vous ai permis de la courtiser ?

— J'accepte de me plier à chacun de vos ordres, mais permettez-moi de l'avertir de mon départ, la veille s'il le faut.

Nausicaa fronça le nez. Allait-il s'imaginer qu'il en avait le choix ? Afin de s'assurer de sa pleine coopération, elle ne lui refuserait pas cette faveur. Elle craignait que les tendres sentiments qui le liaient à sa promise ne lui fassent commettre des folies. Nausicaa était intelligente, elle serait capable de manipuler son fils si elle le désirait, et celui-ci d'admettre des vérités plus qu'embarrassantes.

— Faites, accorda-t-elle, d'un geste désinvolte de la main.

— Merci, mère, je vous promets d'accomplir ce qui sera nécessaire pour que Romie soit vengée.

Elle surveillerait en son absence la Cour, se chargerait de la tourner à son avantage et bénissait la possibilité qu'offrait le départ de Lyssandre. Une double possibilité, celle de sceller des alliances et une autre, plus lointaine, mais plus ambitieuse encore.

Elénaure quitta la pièce et soulagea son fils de sa présence. Sur le pas de la porte, elle murmura une bien sombre promesse :

— Ils payeront ces affronts de leurs vies.

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