Chapitre 1

J’aimais Lonesome pour ses collines. Du haut de la Yellow Hill, on avait la moitié de la ville en vue. Les habitants l’avaient appelée “yellow” parce que le soleil tapait si fort que les herbes cramaient, la terre craquait, ce qui lui donnait de loin sa couleur jaune moutarde. J’avais l’habitude de penser qu'il faisait plus chaud là-haut que n’importe où en Californie. La sueur perla au-dessus de mes lèvres. Je l’essuyai d’un revers de la main et continuai de fixer la décapotable garée en face de l’ancienne maison de Roselyn. Roselyn avait été la plus vieille de la ville jusqu’à sa mort, évidemment. Cent-trois ans elle avait vécu. J’aimerais en faire autant. Elle donnait des croquettes à Vodka quand Luke ne s’en occupait pas. Quand j'étais petite, elle me donnait des Carambars à travers le grillage. Puis le temps l’avait rattrapée et on l’avait enterrée il y avait trois semaines. Sa fille, une garce de Los Angeles, avait vendue sa maison à ce qui semblait être un jeune couple.

— Putain j’ai chaud, craquai-je.

Le soleil brûlait mon bras. Je passai une main dessus, remarquant la chaleur qui émanait de ma peau. Ash ignora ma remarque, expirant son tabac par les narines. La fille de la maison sortit de la camionnette avec un carton dans les bras. Son short en jean à moitié déchiré et son tee-shirt remonté sous sa poitrine par un nœud représentait le cliché parfait de la Californienne parfaite. Si on omettait ses cheveux lisses et blonds coupés au carré, qui ajoutaient une pointe d’urbanisme dans son aspect.

— Tu penses vraiment que c’est un couple ? demandai-je, observant cette fois-ci le garçon blond qui buvait un verre de whisky tout en inspectant le jardin.

— Évidemment.

— Ils ne se sont pas touchés depuis le début.

— T’as vraiment besoin qu’ils se touchent pour les qualifier de couple ? soupira-t-il d’un air exaspéré.

Je haussai les épaules.

— J’en sais rien, mais j’ai l’impression qu’ils se ressemblent.

— Tu penses à quoi ?

Il fit tomber sa clope et l’écrasa contre l’herbe sèche.

— Frère et sœur, hasardai-je.

— Qui voudrait emménager avec son frère ou sa sœur ?

S’il prenait comme exemple son propre frère et son cerveau de crétin, un mec vraiment impossible à vivre qui avait déménagé à temps à San Diego, c’était certes difficile à croire. Mais tout le monde n’avait pas une relation aussi merdique avec sa fratrie. Je touchais le guidon du vélo pour remettre la roue droite mais retirai aussitôt ma main.

— Et merde, jurai-je. C’est brûlant. Vraiment une excellente idée de monter ici, bravo.

— Tu pourrais arrêter de râler deux secondes ?

— Seulement si t’arrêtes d’avoir des idées à la con.

Il agrippa brusquement mon poignet et me jeta son regard de dur à cuir, celui qu’il adoptait quand il voulait se faire respecter.

— C’est toi qui voulais savoir qui étaient les nouveaux de cette ville, Candice, alors ferme la.

Ash disait qu’il voulait se marier avec moi. Acheter une maison, avoir des enfants, un chien, bref, mener une parfaite vie américaine. Il s’imaginait sûrement en patriarche absolu, revenant du travail pour gronder les gosses et ramener des fleurs à sa femme. Alors parfois, il se prenait un peu trop au sérieux. Ça faisait rire Luke. Moi non, plus maintenant. Je détachai sa prise et lui volai sa bouteille d’eau à l’arrière de son vélo. Je déversai le liquide sur le guidon. Le choc du froid contre le fer brûlant créa une fumée translucide qui s’élevait lentement vers le ciel. Je balançai le plastique à quelques mètres et empoignai le guidon sans me brûler.

— Espèce de chochotte, entendis-je dans mon dos alors que je me remettais à pédaler.

Il avait beau me traiter de chochotte, il arriva cinq minutes après moi en bas, son tee-shirt enroulé autour du fer. Son torse luisait de sueur.

— C’est qui la chochotte maintenant ?

— La ferme.

Il passa à côté de moi et claqua mes fesses avant que je puisse me retourner. Je le rattrapai dans la rue Clinton, pédalant sur le côté de la route, les cheveux au vent. Le guidon se réchauffait déjà et mes mains me démangeaient. Une mèche ondulée barra mon visage. Je l’écartai maladroitement avant de bifurquer sur la droite. Ash m’attendait pour attacher nos deux vélos à la chaîne.

— Dépêche-toi, Goldie va gueuler.

Je lui donnai le véhicule, me recoiffai un peu même si c’était vain. Mon haut de maillot était trempé sous la transpiration. Il devait y avoir une chemise à l’arrière du bar, il me semblait en avoir laissé une la nuit où Ash était arrivé bourré au bar et m’avait fait l’amour sur le carrelage vert de l’oncle Goldie. S’il savait, le pauvre, il serait furieux. À l’intérieur, la ventilation recouvrait la voix de Roger Miller. Jacky buvait sa bière, assis sur sa banquette en cuir qu’il occupait six heures par jour. Le journal gisait face à lui, intact. À deux tables de lui, l’officier James Eytler bavardait avec une connaissance que je n’avais vu que brièvement dans la ville. Il me salua d’un vague geste de la main. Jacky, quant à lui, ne remarqua même pas notre présence.

— Alors ? Ta curiosité est rassasiée ? lança Luke quand il nous vit débarquer.

Vodka se frottait à lui avec une impatience notable. L’air de Oh, Pretty Woman s’échappait de la vieille radio grésillante que la sœur de Luke leur avait refilé quand elle en avait acheté une autre. Elle surpassait le vrombissement incessant du frigo.

— Ash pense qu’il s’agit d’un jeune couple, mais j’opte plutôt pour un frère et une sœur, dis-je en m’affalant sur le canapé.

Il grinça sous mon poids. Vodka se rua sur mes jambes, persuadée que j’allais m’occuper d’elle. Sous son insistance, je passai une main sur son pelage gris mais sa réjouissance fut de courte durée. Je la repoussai pour récupérer la chemise roulée en boule à côté du meuble en bois peint. Je défis le nœud de mon maillot et l’enlevai. Ash ferma la porte à la volée, craignant que quelqu’un ne passe et jette un coup d'œil indiscret à l’intérieur. J’enfilai la chemise et la nouai avec un nœud au-dessus du nombril.

— Je vais prendre le service, annonçai-je.

— Alors c’est tout ? Vous êtes montés en haut de la Yellow Hill pour ça ? fit Luke avec un air profondément déçu.

Il s’attendait certainement à ce qu’on découvre un corps découpé dans l’un de leurs cartons, ou des sachets entiers de cocaïne dans le coffre de leur décapotable. Je me tournai vers lui, presque amusée. Il avait attaché ses cheveux de devant en un chignon à l’arrière, laissant le reste de ses boucles châtains pendre au-dessus de ses épaules.

— T’as qu’à sonner à leur porte et tu en apprendras plus.

Il tenta un coup de pied dans son tibias mais je m’esquivai à temps.

— Caresse Vodka, elle réclame.

— J’emmerde Vodka.

Je déposai un bref baiser sur les lèvres d’Ash et partis en direction du comptoir. Jacky n’avait pas changé de place, en revanche, le pote de l’officier s’en était allé. Profitant de mon arrivée, Eytler s’avança vers le comptoir avec ses lunettes bleues dans la main. Il s’appuya sur le bois tandis que j’essuyais les verres qui séchaient à côté de l’évier. L’oncle Gorgie n’était étonnamment pas là.

— Comment va ton père ?

Toujours la même question, avec le même front plissé et le sourire forcé. J’aurais bien aimé Eytler s’il n’avait pas été flic.

— Bien.

Dans “bien”, j’incluais le fait qu’il se torchait à la bière sur le canapé de leur salon, la télé fonctionnant h24 même s’il s’endormait devant la moitié des programmes. Parfois, ça lui prenait, il allait courir ou faire des pompes. Il voulait sûrement garder sa forme pour réussir un jour à tirer sur Ash.

— J’espère que vous ne faites pas de conneries, tous les trois.

— Pourquoi est-ce qu’on en ferait ? fis-je en feignant un sourire innocent.

— On a chopé un trafic pas très loin d’ici, à Holgin. On enquête encore dessus. S’il s’avère que vous êtes relié à ça, je n’aurai aucun scrupule.

On ne s’était jamais lié à ces marchés justement parce qu’Eytler aurait trop de plaisir à nous piéger. C’était Joyce qui nous ramenait l’herbe. Et Joyce s’assurait toujours de ses arrières.

— Vous dites ça chaque semaine, déclarai-je en rangeant les verres sur l’étagère. Ça en devient lassant.

— C’est pour que ça rentre dans vos petites cervelles d’ados retardés.

Il devait terriblement s’ennuyer pour nous emmerder autant. Lonesome n’était pas une ville d’action. Il fallait bien s’occuper.

— Jacky ! appelai-je.

Il releva furtivement la tête et je profitai de son attention pour communiquer avec lui. C’était difficile parfois, mais on y arrivait.

— Une autre bière ?

Il hocha brièvement la tête. Je versai le liquide dans le cristal, prenant bien soin d’envoyer toute ma sympathie hypocrite à l’officier. Je voulais juste qu’il s’en aille. Qu’il me laisse en paix - nous laisse en paix. C’était un type vraiment sympa quand il ne prenait pas sa tête de con. Tout de suite, en l'occurrence, il l’avait prise et ça m’agaçait. Mais il s'était assis sur un tabouret et ne comptait pas me délivrer. Je déposai le verre devant Jacky et retournai au comptoir. Pitié, un client. Un sauveur. Gorgie tient, on était l’oncle Gorgie ?

— Sers-moi un whisky, s’il te plaît.

Tant qu’il buvait son whisky et qu’il la fermait, ça m’allait. Mais non, évidemment. Une fois le verre en main, il remua légèrement le liquide tout en me scrutant du regard, comme si j’allais sortir une arme de mon short.

— Que vas-tu faire de ton avenir ?

— Travailler pour Gorgie, me marier, vivre.

— Toi, te marier ? se moqua-t-il. Avec un branleur comme ton Ash ? Le fait que vous baisiez ensemble depuis des années ne veut pas dire qu’il soit un homme à…

— Bon, et si vous vous occupiez de votre vie, officier ? À part si vous voulez me faire une campagne de prévention contre le mariage suite à votre divorce qui vous a ruiné et vous a obligé à vous enterrer dans cette ville pour le restant de votre existence, mais dans ce cas là, je vais partir et vous laissez parler au mur, je suis sûre que les cloisons seront ravies de vous écouter.

Gorgie choisit ce moment pour débarquer - évidemment.

— Candice, les manières.

Sa figure tassée par l’âge me rendit nerveuse. Gorgie avait toujours su éveiller en moi, et les garçons, un respect et une estime immense. Il nous avait sorti de la merde, nous avait protégé et nous avait appris la valeur de la vie, ou du moins, de la survie. C’était lui qui soignait mes arcades pétées quand mon père frappait trop fort, lui qui avait empêché plus d’une fois Luke d’abuser sur l’herbe et de se retrouver à l’hôpital avec des merdes au cul. Gorgie était notre mentor, il me semblait immortel, à jamais debout pour nous faire la morale sur nos conneries. Quoique, Roselyn aussi m’avait paru immortelle, et elle avait vite fini sous terre.

— Officier Eytler, le salua-t-il en posant ses mains sur le comptoir. Vous appréciez votre journée ?

Le reste de la conversation m’échappa. La silhouette découpée d’Ash me poussa à me réfugier à l’arrière, tout en jetant un coup d'œil attentif vers Jacky qui restait éternellement immobile.

— Quoi ?

— Je t’ai entendue, fit-il avec un sourire irrépressible.

Adossé contre le mur, les mains dans les poches, il enfonçait ses yeux bleus clairs dans les miens, guettant ma réaction. Je mis du temps avant de comprendre.

— Tu m’espionnes ?

— On entend tout de l’arrière.

— Super, et ? fis-je en croisant les bras.

— Je croyais que tu ne voulais pas te marier.

J’aurais voulu souffler, me pincer l'arête du nez, lui signifier que cette conversation n’avait pas du tout sa place là tout de suite maintenant - mais quand, au final ? Oui, c’était vrai, j’avais avoué ça face à l’officier, sans savoir si j’étais honnête ou pas. J’avais vingt-et-un an. Mon père n’hésiterait pas à lui tirer dessus s’il le voyait, notre situation était tout sauf instable, on n'avait même pas assez d’argent pour lui payer sa nouvelle moto. Ce n’était pas le salaire que nous donnait Gorgie qui allait construire notre vie.

— C’est chiant là.

— Bébé, tu l’as dit.

Bébé, je n’ai aucune intention de me marier. Fous moi la paix avec ça et laisse-moi travailler.

— Mais tu l’as dit.

Je retrouvai le comptoir et m’emparai d’un verre pour m’occuper les mains. Et merde. Et merde et merde et merde.

— Candice, l’appela Gorgie.

— Oui ?

Je n’avais même pas remarqué que l’officier était parti. Enfin. Gorgie avait un talent inné pour virer les crétins de sa bâtisse.

— Je m’occupe de Jacky. Tu peux arrêter le service.

— J’aimerais rester.

— Tu les auras, tes dollars. Allez, dégage.

Je jetais le torchon sur le bois et me ruai à l’arrière. Vodka gueulait près de sa gamelle mais Luke semblait s’en foutre royalement, occupé à fumer un joint. Ash lisait. C’était un bouquin qu’il se traînait depuis deux ans, affilant deux pages par mois. Ça l’occupait, au moins.

— Je rentre, annonçai-je en récupérant mon haut de maillot.

— T’oublie pas pour ce soir, fit Luke en jetant un regard noir à Vodka.

— Ce soir ?

— Drive-in, l’informa Ash.

J’avais complètement oublié. Il nous faudrait une voiture pour ça, et ni Ash ni Luke n’en avaient. J’allais prendre la voiture de mon père sans autorisation, comme d’habitude, et il allait me tuer à mon arrivée, comme d’habitude. L’envie de les envoyer chier et de passer ma soirée devant Columbo me saisit, mais je songeai à la promesse de Joyce d’être présent à chaque ciné. Joyce tenait parole. Il viendrait.

— Ok, c’est bon, soupirai-je sous la frustration. Vingt-heures ici. Et donne à bouffer à ton putain de chat, Luke.

Je récupérai le vélo dans la ruelle où je l’avais laissé et m’engageai sur la route cabossée. Le soleil se couchait derrière les collines sèches. Quelque part derrière moi, on voyait l'océan. Une petite plage polluée par les poubelles, avec du sable jonché d’éclats de verre où même les surfers ne s'y risquaient pas. Ça tombait bien, ça faisait plus de place pour nous. J’accélérai et entrai dans les lotissements. Je reconnus la rue que Ash et moi avions observé quelques heures auparavant. Au numéro 23 il y avait ce bon vieux Roggie avec sa femme Margaret. Ils avaient eu deux fils, et l’un d’eux avait fréquenté le frère d’Ash. L’autre avait été emprisonné pour agression sexuelle à dix-sept ans. Depuis, sa mère n’osait plus sortir, même si ça faisait maintenant quatre ans que l’affaire avait été classée. En face, la dame de Las Vegas qui avait perdu tout son fric aux jeux. Elle revêtait ses anciennes fourrures, se maquillait à outrance pour montrer le peu qui restait de sa dignité. Vanessa, elle s’appelait. Tout le monde l’appelait “Madame” dans la ville, elle prenait ça pour une marque de respect alors qu’on se foutait juste de sa gueule. Par ici, il n’y avait pas beaucoup de riches, alors évidemment, on détestait l’argent. C’était facile de critiquer les choses qu’on avait pas.

Roselyn vivait à côté de Vanessa, auparavant, et devant Roggie. Aujourd’hui, la camionnette blanche était garée devant les deux piliers en pierre qui servaient de portail. De la vaisselle jonchait la pelouse. La fille était assise sur une chaise de plage, un verre d’alcool à la main. Ses lunettes recouvraient la moitié de son visage, mais je reconnus son carré blond. J’habitais à deux rues d’ici. Ils étaient proches, en fait. Et ils avaient une magnifique décapotable, déposée un peu plus loin par manque de place. On aurait pu croire qu’elle ne leur appartenait pas, mais je connaissais les moindres recoins de cette ville. Personne avant eux ne possédait une décapotable rouge Chrysler.

Je tournai sur la droite, m’arrêtai devant chez eux. Le menton de la fille tourna légèrement dans ma direction. Pas très discret, oui, mais ce n'était pas mon objectif.

— Bonjour !

Elle glissa les lunettes sur son nez et passa ses yeux recouverts d’eye-liner par-dessus la monture.

— En quoi puis-je t’aider ?

Elle avait l’air jeune, la vingtaine, comme moi.

— Je voulais vous souhaiter la bienvenue à Lonesome.

Ce que je supposais être son frère ouvrit la porte et passa le seuil, visiblement intrigué par les voix. Maintenant que j’étais plus près, la certitude qu’ils possédaient un lien familial me saisit. Même couleur de cheveux, même yeux en amande, ronds et éclatants. La fille ôta ses lunettes et se leva, toujours le verre en main. Si elle me chassait, j’étais foutue.

— Viens, entre.

Ma mère m’avait dit autrefois de me méfier des inconnus, mais ce genre de conseil ne valait pas dans une ville comme Lonesome. Tout se savait. Margaret était sûrement en train de nous observer par la fenêtre et Vanessa, qui laissait tout le temps la porte vitrée de son salon ouverte, entendait la conversation. S’ils me tuaient, Eytler les arrêterait à la minute près, le rapport déjà rempli. Il aurait vite fait de s’occuper de l’affaire, lui qui s’ennuyait tant.

Je laissai mon vélo à côté du pilier en priant pour que personne n’ait l’idée de le prendre. Il était à Ash, il me tuerait si je ne le lui rapportai pas.

— Bella Hustings, se présenta la fille en lui tendant la main.

— Candice Campbell, dis-je à mon tour avec un sourire que j’espérais bienveillant.

— Voici mon frère, Connor, désigna-t-elle en tendant la main vers l’homme.

Son frère. J’avais raison.

— Enchantée, et bienvenue à Lonesome. Vous verrez, c’est chouette ici.

Bella porta le verre à ses lèvres et engloutit la moitié du liquide.

— On cherchait la tranquillité.

— Vous venez d’où ? osai-je demander.

— San Francisco, répondit Connor.

— Oh, cool. Eh bien, j’espère que vous vous plairez ici. Je travaille chez Gorgie, son bar porte son nom. Vous pouvez y passer quand vous voulez.

— On y pensera, sourit Bella. On a aussi entendu qu’il y avait un drive-in, ce soir. Ce serait l’occasion pour nous de… faire connaissance avec les habitants.

Bingo. Juste ce dont j’avais besoin.

— C’est dommage, j’avais prévu d’y aller mais mon père ne veut pas me prêter sa voiture. J’aurais pu vous accompagner.

— On peut t’emmener, si tu veux, s’empressa de proposer Connor.

Quel gentil garçon. J'exprimai mon immense gratitude par un sourire.

— Merci beaucoup, j’accepte volontiers. Bon, j’avais prévu d’y aller avec mon copain et un ami, mais…

— Il y a cinq places dans la voiture, fit Bella.

Visiblement, ils étaient pressés de faire connaissance avec le peuple de Lonesome. Elle avait dû se rendre compte qu’on avait à peu près le même âge, et qu’une bonne compagnie dans une ville qu’ils ne connaissaient pas s’imposait. Ce qui m’arrangeait beaucoup.

— C’est super aimable, merci beaucoup.

— Tout le plaisir est pour nous.

Ses “nous” me faisaient flipper. On aurait dit que Bella et Connor Hustings étaient un seul mot. Ash serait étonné d’apprendre qu’il existait d’autres relations entre frères et sœurs que des engueulades et des vases brisés contre les murs.

— Vingt heures devant le bar de Gorgie ? Comme ça vous repérerez les lieux.

— Parfait, s’accorda Bella.

Je leur lançai un dernier grand sourire avant de reprendre le vélo, puis les saluai de la main. Le rideau de Margaret bougea derrière sa vitre. La porte vitrée de Vanessa claqua. Personne ne m’avait tué. Eytler s’emmerderait toujours autant, Ash ne pleurerait pas la mort de sa future femme. Et plus encore, mon père ne m’enfoncerait pas son poing dans ma face ce soir.

Les Hustings deviendraient de bons amis, j’en étais persuadée.

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