Chapitre 1

Le... Vide ? A quelques centimètres de moi ? Dans une vaste étendue rocheuse il y a encore peu ? Je refuse d'y croire ! Pas encore.

J'ouvre les yeux, trempé de sueur. Un rêve ? Un... Simple rêve ? Pourtant, ça avait l'air si réel. Le plafond blanc renvoi la lumière du soleil qui passe à travers la fenêtre ouverte. J'ai le sentiment d'être aveuglé et je sens une migraine monter en moi comme la vague qui ensevelit le bateau en pleine tempête. Je me tourne difficilement sur le côté, observant la boîte de pilules médicamenteuses sur la table de chevet en chêne clair. Après quelques instants d'inactivité, je me redresse avec cette épouvantable sensation que ce n'était pas qu'un simple rêve. J'attrape d'un geste, étonnamment vif, la boîte de comprimés. Presque vide... Je pousse un râle avant de boire l'eau qui se trouvait dans le verre près de cette dite boîte. Je ne peux m'empêcher de rester assis sur le lit, comme paralysé. Je revis sous mes yeux, tout en étant réveillé, le cauchemar chaotique. Une étendue rocheuse plongée dans le brouillard pareil aux matins d'hiver sur la côte. Alors que, je m'en souviens parfaitement, je redressais la tête vers le ciel morne et couvert, un bruit de clapotis avait rompu le silence qui était reposant, d'une certaine manière. Étonnant vu que lieu donnait presque un tableau à l'ambiance morbide, digne d'un début de jeu d'horreur. Je me rappelle avoir été réveillé par mon propre cri quand j'avais constaté que le plateau rocheux qui s'étendait à perte de vue laissait place à un trou circulaire de plusieurs dizaines de mètres de diamètre, et incroyablement profond. Le bruit des vaguelettes se fracassants contre des parois venait de cet abîme obscur.

Avec le peu d'eau qui restait dans mon verre, j'avale une pilule avec un effet plus...Personnel. L'écriture est effacer mais la boîte en carton est reconnaissable entre toutes.

Tiens ? Mon mal de tête est passé. Le premier comprimé a du faire effet plus vite que je ne le pensais, mais tant mieux. Alors que je me prépare pour une journée morose, des bribes de ma nuit me reviennent. Les parois du trou étaient étonnement lisses, comme si elles avaient été creusées par un humain. Je sens un frisson parcourir mon échine.

Après quelques minutes de normalité, je passe devant le buffet de la cuisine. Rien de neuf sous le soleil, presque vide hormis quelques plantes.

***

Et une journée fatigante de terminée, une. Entre la visite chez la psychologue et la pharmacie... Ma sœur avait insisté pour que j'ai un suivi après le décès de notre mère, le seul parent que nous ayons connu.

Alors que je m'affale sur le canapé et allume la télé sans conviction, un objet se trouvant dans ma vision périphérique attire mon regard. Une photo, de trois filles : une adulte et deux jeunes, se trouve posée et mise en valeur sur le buffet. Un nouveau râle s'échappe de ma gorge. Je me lève brutalement au point que je dois m'agripper au bord de la table pour ne pas perdre l'équilibre suite au vestige qui me prend. Une fois que j'ai retrouvé mes esprits, et une vision nette, je me dirige vers le meuble d'un pas agacé. Mon but est simple : coucher, image contre bois, ce maudit cadre. Je ne suis plus cette personne crédule qui ne se trouvait pas légitime et ma mère est morte. Pourtant, elle ainsi que ma sœur, étaient les seules à m'accepter, malgré ma différence.

Mais d'ailleurs... Comment est arrivée cette photo ? Encore ce matin, le buffet ne contenait aucun objet de ce genre, j'avais fermé mon appartement avant de sortir et personne n'a le double des clés, pas même la seule personne de ma famille. Je sens une goutte de sueur froide glissée le long de mon dos et je préfère ignorer ce sentiment qui s'empare peu à peu de moi. J'avale rapidement un sandwich et décide d'aller me coucher avant que ce sentiment de malaise persistant ne prenne de l'ampleur.

***

Même rêve, même trou infiniment profond avec de l'eau, même brouillard, même terreur indescriptible et même réveil dans la panique. Depuis le jour où a eu lieu « l'incident » avec la photo, ce rêve est devenu récurent. Depuis une semaine. Une semaine que mes nuits sont troublées par ce chaos mental. Et une semaine qu'il est interrompu avec brutalité dans un sursaut et un hurlement strident. Même routine redondante et déprimante. Je ne sais plus quoi faire. Depuis que je dors mal, j'ai l'impression de devenir fou, que mon esprit est au bord de la rupture, du craquage. Sans oublier les objets qui apparaissent et disparaissent sans raison. Est-ce que je deviens parano ? Vu ma situation ça ne m'étonnerai même plus. J'entends un craquement répétitif sur le plancher du couloir, comme des pas. J'écarquille les yeux avant de m'enfoncer encore plus sous mes draps. Je remonte soigneusement la couette au-dessous de ma tête. Ma respiration est plus difficile avec les couches de tissus qui me recouvrent mais la suffocation est si légère, et mon anxiété face à l'idée d'une intrusion est si prenante, que j'ignore le manque d'air.

Je sens que mes paupières sont lourdes, la lumière du jour est filtré par la couverture, ce qui donne une lueur tamisée. Après une semaine de rêves tortueux, je m'endors rapidement sans même en avoir conscience, alors qu'il y a encore peu, tous mes sens se trouvaient en éveil.

De nouveau le sol rocailleux dans le brouillard. J'éprouve le même besoin irrépressible de lever la tête et quand je la baisse, le trou béant est de nouveau là. Au lieu de me laisser aller à la panique, je m'assois en tailleur en tentant de garder mon calme. C'est ce sentiment de terreur qui me pousse au réveil, alors, si je reste tranquille, peut-être en saurais-je plus. Après quelques respirations profondes apprises chez la psychologue, je pense à méditer sur la situation. Le clapotis presque familier à présent résonne depuis le fond de la cavité. Une idée, ou plutôt une question de plus, germe dans mon esprit. Depuis quand suis-je effrayé par l'eau ? Ce n'est pas le trou qui me paralyse le plus. C'est le son de l'eau en contrebas qui est le plus terrifiant.

J'ai beau fouiller dans mes souvenirs, je ne trouve rien. Au contraire, les informations que je récolte ne m'aident guère. Effectivement, étant plus jeune, j'aimais la mer. Je prends une fois de plus sur moi pour me pencher légèrement et pouvoir observer la paroi la plus proche de moi. Un débris d'échelle rouillée se trouve accrochée au rebord. Le reste a sûrement du tombé dans l'abîme. Le brouillard se disperse pendant ma réflexion. Le peux maintenant voir le plateau rocailleux derrière la cavité. Les nuages se dissipent au fur et à mesure. Puis ma vision en générale s'assombrit. Un début de crise d'anxiété monte en moi à l'idée de me retrouver dans l'obscurité complète.

J'ouvre soudainement mes yeux. Je me redresse et prend une grande goulée d'air. L'impression de suffocation s'était empirée dans mon sommeil et je meurs de chaud en supplément. J'avale d'une traite l'eau se trouvant dans le verre sur ma table de chevet. Les souvenirs de l'évènement s'étant passé avant ma sieste me reviennent en mémoire. Une possible intrusion. L'angoisse commence à me submerger. Une fois de plus. Ce sentiment de plongé dans un abîme de stress et d'obscurité m'est si familier à présent que je me lève rapidement, malgré mes jambes flageolantes. La porte d'entrée est bel et bien verrouillée.

Après avoir vérifié l'intégralité de l'appartement dans les moindre coins et racoins, je dois faire face à la triste réalité : je suis seul. Pourtant les pas n'étaient pas qu'une hallucination ! Cette indubitable vérité est plus terrifiante que l'idée d'intrusion en elle-même... J'appelle ma sœur, en panique. Comme toujours, la conclusion de devoir continuer le suivi avec la psy revient sur le tapis. Après un bref au revoir, je raccroche, au bord de l'énervement. Si elle ne comprend pas les évènements qui se passent et ma détresse, qui va m'aider ? Sa psy ? Un étranger ? Balivernes ! Je donne un coup de pieds enragé dans le pied de table avant de pousser un petit cri de douleur en m'agrippant les orteils et en sautillant sur place.

Je dois aller faire des courses... Cette idée me déprime au plus haut point. Je déteste sortir et voir des gens en masse.

***

Je décharge mes sacs au centre de la pièce à vivre et range la nourriture dans le frigo et les placards.

C'était épuisant, comme prévu.

En repliant les cabas, je remarque que sous l'un d'eux se trouve un caillou. Une face est étonnement lisse et plus ou moins vernie. Pas de doute possible, c'est un bout de tombe.

Je me rends comme par instinct au cimetière. Je pense que mes recherches vont être extrêmement dures pour retrouver la bonne pierre tombale mais j'en éprouve le besoin. Après dix bonnes minutes à analyser les pierres tombales près de l'entrée, j'en remarque une de la même couleur que mon morceau. Elle est effectivement abîmée et mon caillou s'insère parfaitement dans l'espace creux. Je regarde alors l'appellation pour rendre oralement hommage au défunt, et, en la voyant, je tombe à la renverse dans un hurlement strident. C'est... Mon nom ! Sans le moindre doute possible, il s'agit de ma pierre tombale !

Alors que j'effleure les lettres dorées, comme en transe, tout ce qui s'est passé me revient à l'esprit. Expliquant par ailleurs mon rêve récurrent.

***

Peu avant le décès de ma mère, un trou très grand et très profond avait fait le tour des réseaux. Il était apparu naturellement et s'appelait une doline. Il me semble. Cependant, ma seule figure parentale m'a quitté et j'ai oublié cet évènement anodin, pour moi en tout cas. Quelques semaines après, j'ai eu le sentiment d'avoir besoin de me promener pour m'aérer l'esprit. Le temps était ensoleillé. Seulement quelques nuages à l'horizon. Je suis passé sur un plateau rocailleux constitué en grande partie de calcaire. Je me suis donc retrouvé à devoir longer cette doline. La photo de ma mère, que je gardais toujours sur moi depuis sa mort, s'était échappée de ma poche ouverte pour se laisser porter quelques secondes par le vent avant de sombrer dans l'abîme. Je me souviens avoir été paniqué comme jamais à l'idée de perdre cette image si chère à mon cœur. Après repéré une échelle, je décidai de l'emprunter. Il fallait que je descende, j'étais obligé ! Plus je m'enfonçais dans le sol, plus l'atmosphère était humide. Le lieu était de plus en plus sombre. J'ai donc dû sortir mon téléphone en activant le mode lampe torche pour avoir un minimum de clarté. Quelques barreaux plus loin, je me rappelle avoir remarqué que l'échelle était rouillée. Et que ça ne s'améliorait pas par la suite. Alors que j'allais atteindre le fond de la doline, un craquement sinistre rompit le silence. J'eus à peine le temps de lever la tête que je me sentis entraîné vers le sol dans une chute qui me sembla durée une éternité. Mon poids avait tout bonnement fait céder les barreaux endommagés.

Mon dos percuta le sol dans un bruit sourd. L'échelle tomba a quelques centimètres de moi. Je repris soudain un minimum de lucidité. La photo ! Il y avait, environ, vingt centimètres d'eau qui auraient suffis pour l'endommagée. Je devais la retrouvée au plus vite. Après avoir retourné une partie de l'abîme, je la vis. Je sautai, littéralement, dessus pour la réceptionner rapidement. L'image était un peu détériorée mais la personne dessus restait reconnaissable. Je la serrais contre mon torse dans un soupir de soulagement.

Après quelques heures à chercher une échappatoire, une goutte s'écrasa sur mon crâne, puis une autre. Et ainsi de suite. Une terreur indescriptible s'empara de moi, avant que je ne sois pris de la plus grosse crise de panique qui m'ai été donnée de faire.

J'entendis un hurlement qui se répercuta sur les parois. Je tournai la tête dans tous les sens, complètement désespéré, afin de voir si quelqu'un que je n'avais pas vu se trouvait avec moi dans cet endroit sans issues. C'est seulement après plusieurs minutes à chercher frénétiquement, désemparé, que j'eus compris que c'était mon propre cri.

La pluie s'intensifia. Je pestai contre la météo. Jamais je n'avais vu telle drache.

Le niveau de l'eau monta rapidement. Trop rapidement. Je luttais pour rester à la surface mais aussi pour garder un minimum mon calme. Chose quasi impossible. La photo de ma mère s'échappa une nouvelle fois de ma poche. Je me rapprochai le plus d'elle mais je sentais les muscles de mes jambes lâchés. Je pris une dernière goulée d'air avant de sombrer dans les eaux sombres. La main tendue vers la silhouette floue de la photo maintenant hors de portée. J'aurai peut-être dû appeler ma sœur... mais mon téléphone est déjà mort. Et depuis un moment déjà ; sûrement lors de la chute je pense. Je me sens inexorablement attiré vers le fond. Fichue gravité... La lumière n'est plus qu'une très faible lueur qui me parait si loin. Pour m'habituer à ce qui sera désormais mon quotidien, je ferme les yeux. Définitivement. Je me souviens avoir perdu connaissance peu après ça. La dernière sensation dont je me souviens fut celle du manque d'air qui brûlait mes poumons et de l'eau qui s'y infiltrait.

***

Alors que le paysage du cimetière se reforme devant mes yeux, je reste assis sur le sol poussiéreux. Un bruit métallique me fait soudainement sortir de ma torpeur. Je vois ma sœur, complètement abattue, baisser la cliche du portail en fer. Alors que j'essaye de lui parler, elle dépose des fleurs sur ma tombe. Cette dernière se trouve près de celle de notre mère. Après quelques mots adressés à nos pierres tombales, elle repart, tête basse et regard vide. J'ai beau savoir que je suis éternellement près de la personne si chère à mon cœur, je me sens affreusement seul. Seul comme dans l'appartement qui était déjà vide de toute présence vivante. Seul comme dans la doline où j'ai dû affronter l'épreuve qu'est la mort ; seul.

Complètement seul.

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J'espère que cette courte nouvelle vous aura plus, j'ai hâte de lire vos commentaires, et si vous avez des questions, j'y répondrai avec plaisir, cependant j'ai quelques questions pour vous:

Selon vous, a quoi servent les pilules avec un effet plus personnel ?
Quel est le genre du protagoniste (différencier genre et sexe) ?
De quel coin viens le protagoniste ?


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