Chapitre 6


Je me réveille le lendemain matin, seule dans mon lit vide, en me demandant si les événements de la veille n'étaient pas juste une partie de mes rêves agités. Je suis plutôt perplexe et cherche le moindre signe qui pourrait prouver la présence de Thomas ici la nuit dernière. Mais elle est là, cette odeur de cigarette cette fois mêlée au shampoing de ses cheveux. Il était bien là, j'avais bien été dans ses bras, nous nous sommes bien endormis ainsi l'autre soir. C'était trop réel et trop beau, la perspective que ce ne soit qu'un rêve m'aurait presque attristée. Je me lève alors, enfile un gilet à capuche noir au dessus de mon débardeur que je mets la nuit et de mon short de sport -Oui, je ne l'utilise pas pour faire du sport mais pour dormir, attendez... Le mot sport est rayé de mon vocabulaire, que croyez-vous?- Je m'avance prudemment jusqu'à la cuisine et la première chose que je vois, c'est Dylan qui règle le son de la radio en bougeant exagérément son postérieur. Il y a Will aussi, toujours à la même place, toujours sur son téléphone. Je passe à côté de Dylan en dansant de la même manière et donne une petite claque sur sa main pour la dégager. Je ne chipote plus et mets le son à fond. Il me regarde, étonné, puis un sourire éclaire son visage. Je fais une pirouette le long des plans de travail jusqu'au tiroir où se cachent les céréales et attrape un paquet de 'Trésor'. Dylan vient derrière moi et m'attrape par les hanches en bougeant son corps contre le mien, je frissonne à ce contact si direct. Pourtant je me laisse prendre au jeu, me retournant vers lui. Nous sommes collés l'un contre l'autre, nous mouvant de façon exagérée. Dylan fait danser ses sourcils en plongeant son regard dans le mien, je comprends son jeu et passe ma langue sur les lèvres en arquant un sourcil. Il se mord les lèvres pour ne pas rire, alors je pose mes mains sur les siennes et m'approche doucement de son visage. Mes lèvres effleurent sa joue et lentement je lui susurre à l'oreille;

"C'est toi qui a mangé tous les trésors?"

Je l'entend lâcher un vague "Oops" et il arrête soudainement de danser. Je resserre ma poigne sur ses avants bras.

"Tu vas le payer, Dydy."

Il déglutit difficilement alors que d'un geste rapide j'attrape la boite de céréales vide, profitant de nôtre proximité, je verse le contenu de miettes restantes sur sa tête. On dirait qu'une abeille vient de lâcher tout son polen sur ses cheveux; ils sont parsemés de poudre jaune. Dylan garde une expression choquée, les yeux rivés sur un point derrières moi. Alors que je suis trop occupée à rire de son pauvre sort, il murmure à son tour;

"J'ai aussi terminé les cocopops."

J'ouvre grand les yeux et essaye de me dégager de son emprise avant qu'il ne soit trop tard, mais pendant cette petite danse comique, il m'avait coincé contre le plan de travail. Mon premier réflexe est de lui écraser violemment le pied; ce qui le déconcentre. Je passe en vitesse sous ses bras et m'échappe jusqu'au salon qui se trouve dans la même pièce et me mets debout sur le canapé, le nargant du regard. Il part à l'assaut muni de sa boite de céréales et saute par dessus le dossier du canapé. Je saute par terre et fait le tour du salon, le spectacle doit être beau à voir... Le malheureux me lance un coussin que je n'avais pas vu et me voilà par terre. Je rampe avec désespoir jusqu'au canapé sur lequel je monte et me réfugie furtivement dans un coin. Mais le revoilà. Il saute à genoux sur le canapé dans un cris de guerre du type "WAZAAAA". Je tend les jambes, me voilà prisonnière à nouveau il me tient d'une poigne ferme contre le canapé et de son autre main, il menace de faire écouler le contenu de sa boite en plein sur mon visage. Au même moment la porte s'ouvre et la tête blonde de Thomas apparaît dans son cadre. Nous tournons tous les deux la tête vers lui et lui vers nous, nous nous fixons ainsi pendant une bonne minute sans faire aucun geste. Il porte à son bras un gros sachet de croissants et à l'autre il tient en l'air les clés de l'appartement. Dylan s'assied sur le bout du canapé et se racle la gorge en tenant toujours son paquet à la main. Je replie mes jambes et fixe le mur devant moi. La situation est gênante, Thomas vient de nous trouver dans une position délicate à vrai dire... Son regard laisse entendre qu'il s'imagine mille et un films dans sa tête. Malgré tout un sourire vague flotte sur mes lèvres tant nous agissons comme des enfants. Will nous regarde en levant ses sourcils puis retourne à son téléphone; le pauvre a dû subir.

"Du coup... On va manger des croissants?" Dis-je à Dylan de manière hésitante.

Il sourit, amusé.

"Si il n'y a plus de céréales..."

S'en est trop pour moi, je lâche ce rire qui est resté noué dans ma gorge depuis le début suivie du brun, nous nous tordons de rire sur le divan sous les yeux étonnés de Thomas et Will. Je l'aide à se relever tant bien que mal et nous allons nous asseoir sur les tabourets hauts du bar pour prendre un croissant. Je vois Thomas fixer les cheveux jaunis de Dylan sans comprendre, nous voilà repartis dans un éclat de rire.

***

La semaine est passée, je rentre de cours ce matin à 10h30 en courant dans les couloirs de l'immeuble tout en criant le nom de Thomas.

"THOMAAAAAAAS!"

Je déboule dans l'appartement et le voit qui regarde derrière lui sur le canapé. Il a sur ses genoux son ordinateur portable, apparemment en pleine rédaction pour un travail à l'université. Il me regarde bizarrement. Je ne prends pas la peine de reprendre mon souffle et viens lui coller une affiche devant le nez.

"Tommyyyy, on peux aller à la patinoire ce soiiiiire?" Dis-je en battant des cils.

Il observe la fiche sans rien dire puis me lance un regard interrogateur.

"S'il te plaît...?"

Il rigole et me prend l'affiche des mains.

"Ou est-ce que tu as encore piqué ce truc?" Dit-il en souriant.

"Heu..."

En réalité, je rentrais tranquillement de cours quand une affiche à attiré mon attention sur le panneau d'affichage dans le hall de l'immeuble. Je l'ai observé un moment avec les yeux pleins d'étoiles en tant qu' adepte de patinage, j'ai regardé une fois à droite, une fois à gauche... Et j'ai arraché l'affiche d'un coup sec. Malheureusement à ce moment là, j'ai entendu la porte du concierge s'ouvrir, alors me voilà partie en courant comme une folle dans les couloirs avec une discrétion digne d'un félin. Notez le sarcasme, j'avais plutôt l'air d'un espèce d'éléphant-lapin à vrai dire.
Je résume cette courte anecdote à Thomas qui éclate de rire aussitôt.

"Je tiens une pièce à conviction dans mes mains là!"

"Fais tes bagages, on change de nom et on déménage à la patinoire avant que la police ne nous retrouve!"

Il roule des yeux et pose la feuille à côté de lui.

"Bon, va pour un tour sur la glace..."

Il paraît hésitant. Je m'assieds sur l'accoudoir du divan et le regarde d'un air faussement sérieux.

"Qu'est-ce qui ne va pas?"

Il fait mine de rechercher une information sur internet pour sa rédaction et secoue la tête.

"Oh... Rien, rien."

"Tu ne sais pas mentir."

Il plisse le nez et fronce les sourcils sans quitter l'écran des yeux.

"Je crois que je suis un peu malade... Tu pourrais toujours y aller avec, je ne sais pas, Dylan?"

Je me lève d'un coup sans m'en rendre compte, ses mots sont sortis de sa bouche comme une reproche à mon égard. Je le regarde sans savoir quoi faire.

"Excuse-moi? Est-ce que Dylan et moi t'avons fait quelque chose...?"

Je m'imagine que le rapprochement entre le brun et moi ai pu le rendre jaloux, mais pour quelle raison? Je ne vois pas pourquoi notre amitié naissante le dérangerait. Il paraît se rendre compte de son erreur en me crachant ses mots et tente de se rattraper tant bien que mal.

"Non! Je disais ça comme ça... En réalité, je ne sais pas patiner."

J'ébauche un sourire, pourtant au fond de moi je me sens blessée. D'ailleurs il n'est pas tout à fait crédible dans ses propos; je suis certaine qu'il patine très bien.

"Ce n'est pas un problème, Dylan pourra t'apprendre." Dis-je sur un ton de défis en soulignant le nom de Dylan.

Son expression se dégrade et il tourne la tête vers moi.

"Je te l'ai dis, tu ne sais pas mentir."

Sur ce je tourne les talons pour rejoindre ma chambre.

"On part à 16h00, sois prêt."

***

J'enfile mes patins à glace en souriant comme une enfant à l'idée d'aller glisser sur ce vaste espace avec mes amis. Je me relève et essaye de marcher droit sur la moquette avec ces étranges chaussures.

"Ce n'est pas facile ce truc." Dis une voix inconnue derrière moi.

Je me retourne et aperçois une jeune fille très jolie au visage jovial, les cheveux coupés courts à la garçonne et bruns. Elle a le teint mate et les yeux foncés, elle est magnifique.

"Brenda, je te présente Mercy. Mercy, Brenda, une amie à moi." Dit Kaya en s'efforçant de nouer ses lacets.

Je souris à la jeune fille qui me le rend avec sympathie. Nous discutons et j'apprends que je n'ai jamais croisé Brenda parce qu'elle étudie dans une section scientifique, et moi littéraire, c'est pour cette raison que nous ne nous sommes jamais vue.

"Allez princesse, en piste!" Me dit Dylan en me tirant jusqu'à la patinoire.

Me voilà sur la glace, je mets un moment à m'adapter avant de retrouver mes habitudes et à glisser correctement. J'aide Thomas à descendre en tenant ses deux mains gantées, malgré mon aide il atterrit avec facilité sur la glace; il ne sait pas mentir. Cette pensée m'attriste, je ne le comprends pas. Au loin je vois déjà Dylan zigzaguer entre les gens et faire des pirouettes tout seul comme un fou. Kaya et Will patinent ensemble en s'entre-aidant, elle est toute rouge est heureuse. Will lui plaît c'est certain, et je dirais que c'est réciproque; ils ont l'air de bien s'amuser.
Brenda est derrière nous, elle attend d'avoir l'accès libre à la glace et donc Thomas la laisse passer. Il ne lâche pas ma main et s'appuie sur la rambarde entourant la patinoire.

"Alors monsieur Sangster, on se décide à patiner oui ou non?"

Il soupire.

"Je t'ai dis que..."

Je pose un doigt sur ses lèvres pour le faire taire et l'attire vers moi, le décollante de la rembarde. Je vous vois venir! Non, ce n'est pas ce que vous croyez... Je fais en sorte de le retourner pour l'avoir dos à moi et le pousse vers le centre. Sur le coup il est surpris et déstabilisé, mais il se reprend vite et garde son équilibre.

"Tu mens vraiment mal!" Lui dis-je de loin en insistant sur le troisième mot.

Je lui lance un sourire moqueur et pars rejoindre Dylan et Brenda qui font déjà les fous dans le centre. La musique projettée va un peu plus fort encore et une voix d'homme s'élève des hauts parleurs.

"À présent, j'exige le sens contraire des aiguilles d'une montre, tous avec son partenaire!"

Et moi qui croyais que ces trucs là étaient ringards et finit, on dirait que c'est toujours à l'ordre du jour. Je cherche mon colocataire de loin et ébauche un sourire en coin. Que j'aime le taquiner! Je patine alors vers lui qui a l'air tout perdu, cherchant ses amis du regard. Par derrière je l'attrape par le bras pour l'entrainer avec moi, malheureusement ma manœuvre ne se déroule pas comme prévu. Je vais un peu trop vite, certe je l'emporte avec moi, mais plus dans une chute que dans une glissade. Nous glissons ensemble sur quelques mètres en nous accrochant l'un à l'autre avant de se tomber dessus avec lourdeur. Rien de très élégant. Je me redresse à quatre pattes sur lui et le regarde lever les yeux vers moi. Il est couché sur le sol ce qui fait que quand il veut me regarder, il adopte un excellent double menton. Sortir mon téléphone portable pour faire une photo ne serait certainement pas bien vu. Alors je me contente de restée assise sur ses genoux en faisant en sorte qu'il ne puisse se lever et attendant que la glace et lui ne fasse plus qu'un.

"Je suis frigorifié." Lance-t-il tout simplement.

Je ris et prend ses mains.

"En fait, tu es un très mauvais patineur, tu avais raison."

Il me fait une grimace enfantine et enfin je l'aide à se relever, prise d'une certaine générosité à son égard.

Il regarde autour de lui, tous les binômes sont ensemble et se tiennent la main. Quand il tourne la tête, je tends ma main vers lui en esquissant une expression moqueuse.

"Accepteriez-vous de prendre ma main le temps d'un tour de piste mon cher?"

Il me regarde et sourit en roulant des yeux.

"C'est une demande en mariage? Ça y ressemble fort du moins." Dit-il en riant.

"Je n'oserais pas! Comment pourriez-vous vivre le restant de vôtre vie avec une énergumène comme moi?"

"Vous m'ouvrez à de nouvelles expériences."

Je me mordille la lèvre à cette phrase qui m'a fait sourire dès la première fois qu'il l'a prononcé.

"Et ce n'est pas désagréable." Ajouta-t-il.

Sans que j'ai le temps de lui répondre, il accepte ma main et m'emmène valser sur la glace, ses cheveux d'une couleur blonde irrégulière s'emmêlants dans les bouffées de vent glacées. J'ai dû remettre mon bonnet en place plusieurs fois tant la vitesse paraissait grande durant ces quelques minutes.

À la fin de la chanson, je vois Ki-Hong arriver muni de ses patins. Il glisse vers nous, la mine un peu déçue. Il était censé passer le week-end avec sa petite amie en faisant le tour de Londres, mais le voilà qui nous rejoint.

"Hayoung pas là ce week-end."

Thomas prend une l'air renfrogner et pose une main amicale sur l'épaule de celui-ci.

"Ce n'est rien, tu pourras passer le week-end avec nous. On t'achètera même une pizza pour toi tout seul si tu veux."

"Une pizza? Pour moi tout seul?"

Thomas hoche la tête, sur ce geste, Ki-Hong lève les bras et fait demi tout en patinant à toute vitesse tout en criant;

"PIZZA !!!"

Les gens se retournent sur son passage sans qu'il n'y fasse attention. Son attitude nous fait rire. Kaya, Dylan, Will et Brenda nous rejoignent à leur tout en fixant Lee qui continue de crier "Pizza" en faisant le tour de la piste. Kaya, la première à se tourner enfin vers nous comme si la réaction de l'asiatique était tout a fait normale, nous regade d'un drôle d'air. C'est comme si elle essayait de nous envoyer un message par le regard... J'essaye de le déchiffrer et un jeu du regard s'installe entre nous. Soudain elle alterne les yeux de mon visage jusqu'à quelque chose en dessous. Je ne comprends pas tout de suite. Je suis alors son regarde et tombe avec surprise sur la main de Thomas toujours liée à la mienne sans que je ne m'en rendre compte. Kaya ébauche un sourire pervers et jouant des sourcils. Silencieusement avec mes mimiques faciales je lui fais comprendre que ce n'est pas ce qu'elle croit. Je n'ose pas me retirer de peur de paraître impolie, mais je panique intérieurement à l'idée de rougir. Trop tard.
Dylan se tourne vers nous et c'est aussi la première chose qu'il voit. Je me sens alors obligée de glisser doucement ma main hors de celle de mon colocataire avant que tout le monde ne se fasse des idées sur un potentiel nouveau couple. Ce n'est d'ailleurs pas mon jour pour être en couple; je me suis réveillée ce matin avec un bouton près du sourcil droit, sourcil évidemment pas encore épilé par flemme. De plus, le froid m'assèche la peau. Pas besoin de dessin, je ne suis pas flamboyante aujourd'hui. Mais ais-je déjà été flamboyante une fois dans ma vie? Je rigole fort intérieurement. Le blond se tourne vers moi et me lance un regard interrogateur comme si il ne comprenait pas, regarde sa main, puis rougis. C'est bon, il vient de tilter.
Je regarde Dylan, son expression est cramoisie. Dieu, non, il repense à Britt, j'en suis convaincue. Avant que tout ne parte en n'importe quoi, je cherche une excuse plus ou moins valable dans les profondeurs de mon cerveau peu actif.

"Hem... Lee voulait une pizza non?"

Et c'est ainsi que nous nous sommes retrouvés à la pizzeria.

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