Chapitre 19
Trois jours étaient passés depuis l'incident avec les villageois. J'évitais de sortir hormis pour aller fureter dans les bois, en m'arrangeant pour ne croiser personne.
Le rejet que j'avais subit était douloureux. J'avais cru naïvement que depuis que j'étais devenu Enchanteur de la Cour et que Gwen avait accepté la magie, tout avait changé. Or non. Pas partout.
Je m'en voulais un peu d'avoir ruiné tous les efforts de ma mère qui avait tenté de cacher mes dons toutes ces années, mais depuis que j'avais gouté à la liberté de pouvoir être qui j'étais, je n'avais plus envie de me cacher. Je ne risquais plus rien à présent.
Mais malgré ça, je venais de m'attirer les foudres des villageois d'Ealdor, mon propre village, celui où j'étais né. Pire, je commençais à avoir le mal du pays. En fait, j'avais presque envie de partir et de retrouver Lohot. Comme tout le temps. À chaque fois que j'étais loin de lui, j'avais l'impression que je pouvais sombrer à nouveau dans la folie, comme il y a huit mois de cela, avant la naissance du Prince. J'avais l'impression que je n'aurais rien à quoi me raccrocher si jamais je tombais.
C'était presque injuste de voir qu'un enfant qui venait de naître était devenu presque plus important pour moi que ma mère ou mon tuteur. Mais c'était ainsi. Le profond lien que j'avais avec vous perdurait avec votre fils.
Je me demande s'il aura une grande destinée, lui aussi. Serons-nous liés comme vous et moi l'avons été ? Je l'ignorais. Et maintenant que Kilgharrah est partit à jamais, je ne le saurais sans doute pas.
Je soupirai en face de ma fenêtre, laissant apparaitre une fine pellicule de buée sur la vitre. Même lui, il n'est plus là. Même mon vieil ami de toujours. Il est probablement mort de vieillesse à présent. Il m'avait dit à votre mort qu'il n'avait plus longtemps à vivre. Et dire que vous n'avez jamais eu la chance de le voir...
Il y a tant de choses que je n'ai pas eu le temps de vous dire. Tant de chose que vous ignorez encore. Je veillerai à ce que Lohot les sache. En fait je veillerai à ce que Lohot reçoive tout ce que je n'ai pas pu vous offrir. Je ne ferai pas deux fois les mêmes erreurs. Et si un nouveau Mordred arrivait, je ne le laisserai pas réussir cette fois-ci.
- Merlin ? appela ma mère. Que fais-tu le nez collé à la vitre ?
- Pardon, excuse-moi, je réfléchissait simplement.
« Toi ? Réfléchir ? » me murmura votre voix dans un souvenir lointain. « C'est nouveau ça ! »
Je souris discrètement en vous imaginant me fixer d'un air goguenard en me lançant des pics comme tout le temps. Comme avant.
Ma mère me sourit tristement.
- Tu veux en parler ?
J'hausse les épaules.
- De quoi ? De Lohot ? Des villageois ?
- D'Arthur.
Je la regarde un moment. Elle avait prononcé le mot tabou.
- Pas vraiment.
- Merlin, me dit-elle avec douceur. Tu ne pourras pas garder cela pour toi toute ta vie.
- Pourquoi pas ? grommelais-je en m'adossant à la fenêtre.
- Ça te fait du mal.
- Ça ne changera rien, mère.
- Tu n'es plus toi-même, mon fils.
Je grimace. Ce point-là était indéniable.
- Parle-moi, Merlin. Je m'inquiète pour toi.
- Il me manque, lâchais-je de but en blanc. Tout chez lui me manque. Même son arrogance sans limite et la puanteur de ses chaussettes.
Ma mère me posa une main sur l'épaule. Je restai immobile.
- Je n'arrive pas à croire qu'il est mort, lâchais-je. Je n'arrive pas à accepter l'idée que tout ça est terminé. Il ne peut pas être mort ! Il...
Je soupirai, mes yeux perdus dans le vide.
- Après tout ce qu'on a traversé...Pourquoi n'ai-je pas réussit à le sauver cette fois-ci ? Pourquoi mon destin est-il aussi injuste à chaque fois ? Pourquoi lui ?
- Ce n'est pas de ta faute, Merlin, dit ma mère en me prenant dans ses bras.
- C'était mon destin, mère. Ce pourquoi je suis né. C'est pour ça que mes dons m'ont été donnés. Pour le servir. Alors pourquoi n'ai-je rien pu faire ?
- Certaine chose sont inévitable, mon fils.
Mon regard croise le sien. Un court moment, j'aurais cru entendre mon bon vieux Kilgharrah. C'est ce qu'il m'avait dit, lui aussi. Que mon destin avait été accompli. Que je n'avais pas échoué. Vous aviez été destiné à mourir à cette bataille, quoi qu'il arrive. Et Albion avait été unifiée.
Mais à quel prix ? Quand vous reverrais-je ? Je ne savais dire en cet instant si j'aurais préféré voir Albion ou vous. Quel était le plus important à mes yeux ? Je ne le savais.
- J'espère qu'il reviendra bientôt...
- Qu'il...reviendra ?
- Oui, affirmais-je avec un demi-sourire. Kilgharrah, le Grand Dragon, me l'a dit.
- Un dragon ?
- Oui, dis-je en la regardant dans les yeux. Un ami de mon père. C'était le dernier dragonnier. Il ne te l'a probablement jamais dit, mais c'en était un. Il y a longtemps de cela, je suis allé le chercher avec...Arthur...et j'ai pu le revoir.
- C'est vrai ?! s'exclama ma mère en me prenant les mains. Comment va-t-il ? Où est-il ?
Mon cœur se serra et je détournai le regard.
- Mère...Il est mort. J'ai à peine eut le temps de le connaitre.
- Balinor est mort ?
J'hochai la tête lentement, attristé. Encore une personne que le destin m'avait arraché.
Ma mère essuya quelques larmes. Je devinai qu'elle aurait aimé le revoir.
- Je suppose que je m'y attendais, murmura-t-elle. Cela fait des années que je ne l'ai pas vu. Il serait revenu s'il avait pu.
- Oui, après la mort d'Uther, sans doute.
- Arthur était un bon Roi. Il ne lui aurait jamais fait de mal.
- Oui, soufflais-je. C'était un bon Roi. Un très grand Roi...
- Je sais qu'il comptait énormément pour toi.
- Plus encore...
- Et il tenait énormément à toi.
J'hochai la tête et l'enfouit dans le cou de ma mère. Comme j'étais plus grand qu'elle, je dus me pencher pour qu'elle puisse m'enlacer de ses bras.
- Je suis content de t'avoir revu, mère.
- Moi aussi. Tu seras toujours la bienvenue.
- Mère...pourquoi ne viendrais-tu pas à Camelot ? Guenièvre serais ravie de te trouver une place !
- Non, Merlin. Ma place est à Ealdor.
- Mais pourquoi ? Nous pourrions être réunis tous les deux.
Elle secoua la tête en souriant.
- Ma place n'est pas à Camelot. Ce n'est pas chez moi, là-bas.
- Mais...les villageois...
- Ça leur passera. Ils regrettent déjà ce qu'ils ont fait j'en suis certaine. Et puis il ne s'agit que certains d'entre eux.
- Tu es sûre que tu préfères rester ?
- Oui. Camelot est ton vrai chez-toi, bien plus qu'ici. Mais ce n'est pas le mien.
- Je comprends, acquiesçais-je en mettant fin à notre étreinte.
- Tu comptes partir dès aujourd'hui ?
- Je l'ignore.
- Reste encore quelques jours. Il est bon de te voir. S'il te plaît, mon fils.
- Bien, mère. Je vais rester encore un peu.
Elle me caressa tendrement les cheveux et commença à cuisiner. Je m'approchai d'elle et commença à l'aider, comme lorsque j'étais enfant.
L'odeur de la soupe emplit bientôt mes narines. Je fermai les yeux. Pour un peu, je me croirai revenu à l'époque où j'étais enfant. Cette époque bénite où je n'avais pas de destin. Pas de cœur brisé. Pas de perte affreuse dans mon entourage. Juste l'enfance, ma mère, Will, et Ealdor...
Cette époque me manquait. À ce moment j'aurais tout donné pour la revoir et tout recommencer. Revoir cette époque insouciante où je n'avais encore rien perdu.
Je restai ainsi de longues minutes. De longues minutes où ma vie s'effaçait, pour laisser place à ce que j'avais de plus cher : mes souvenirs...
Fin du chapitre !
Alors, vos impressions ?
Je trouvais important d'informer Hunith pour Balinor. Après tout, elle ne sait pas grand-chose sur son fils, finalement :/
Ps: J'ai changé la couverture, comme vous avez pu le remarquer. Est-ce qu'elle vous convient ? Donnez-moi votre avis svp :3
À dimanche prochain ^-^
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