Chapitre 2
Katherine retourne chez elle vers neuf heures. Kyle l'attend, avec impatience, pour savoir le verdict. Avec une coupe de champagne à la main et une musique au piano en fond, Marcello de Bach. Kyle rayonne quand elle voit le sourire sur le visage de sa protégée.
_ Alors, comment c'était ?, demande Kyle en se tortillant de joie.
_ Eh bien, nous avons un contrat à vingt-cinq mille dollars dans la poche, maintenant ! Il faut que j'appelle Richard pour lui demander s'il est prêt à envoyer les commandes pour les meubles, et s'il a fini ceux pour les mariés de Sacramento.
_ Je l'appelle tout de suite !, s'exclame Kyle en buvant une gorgée de Bollinger.
_ Non, pas maintenant. Je l'appellerai demain matin. Nous allons fêter ça, d'abord !
Katherine lui sourit et elles passent au comptoir qui fait aussi office de table pour manger et de bar, en même temps. Katherine s'installe sur un tabouret, Kyle en face d'elle, de l'autre côté. Elles entrechoquent leurs verres et Katherine se perd à nouveau dans ses pensées. Ce visage. Cette bouche. Ces yeux. Elle ne peut s'empêcher de penser à Jeremy Martins. Personne ne l'a ébranlée à ce point, jusqu'à aujourd'hui. Même si ce fut seulement pendant de brefs instants. Et pourtant, cela ne change rien. Il la hante.
_ Que se passe-t-il mon enfant ? Tu n'es pas heureuse ?
_ Si ! Si, bien sûr !, s'enquière Katherine. Mais... Je ne sais plus si je dois...
_ Il te plaît ?
_ Non ! Enfin si, mais... Je ne sais pas... Je ne dois pas confondre travail et sentiments, et surtout je ne veux plus souffrir comme jadis, avoue Katherine en buvant une autre gorgée de champagne.
_ Un jour, il fallait bien que cela t'arrive.
_ Malheureusement... L'amour ne me va pas.
_ Non, tu es une femme pleine de contradictions. Tu veux mais tu te défends de prendre.
_ Non, je ne suis pas pleine de contradictions. Je suis une femme compliquée, voilà tout.
_ Qui n'est pas compliqué ?
_ Ceux qui ne le sont pas, justement. Reste encore à les trouver.
Kyle sourit avec indulgence à Katherine et lui demande si elle souhaite manger quelque chose. Mais Katherine refuse et demande à Kyle de rentrer chez elle. Qu'elle en a assez fait pour la journée, et que c'est à son tour de se reposer. Kyle embrasse Katherine sur la joue et récupère ses affaires avant de sortir de l'appartement. Katherine, après avoir fini son premier verre de Bollinger, s'en resserre un autre en s'approchant de la chaine hi-fi. En appuyant sur la touche « suivant », des violons, puis une guitare et des percussions vrombissantes retentissent dans la pièce du salon. En écoutant Strong de London Grammar, elle s'approche de la baie vitrée. Elle fait toute la largeur de la pièce. Elle abandonne son regard sur les buildings voisins, clignotant au rythme de la musique. Le corps réchauffé en écoutant cette chanson l'envouter, elle songe à la journée qui vient de s'écouler. Mon dieu... Qu'est-ce qu'il était beau...
Elle repense à lui mais, malheureusement, elle est convaincue qu'elle ne le reverra jamais après leur rendez-vous d'aujourd'hui. C'est la seule fois qu'elle le verra. L'unique fois, après ce ne sera que des conversations téléphoniques. « Aucune envie de la revoir ». C'est ce qu'elle pense en s'imaginant dans les pensées de ce cher client bien mystérieux. Pour elle, ça a l'air d'un défi mais elle se retient, malgré tout. Elle a peur. Elle a toujours eu peur depuis cette première année en école de commerce. Depuis, elle s'est enfermée dans sa bulle. Enfin, c'est ce qu'elle pensait...
On sonne à la porte. Le verre à la main, elle baisse le son et marche pour voir qui c'est. En ouvrant la porte, elle découvre Maggie, sa meilleure amie. Elle vient de Seattle. C'est elle qui a donné envie à Katherine de venir s'installer ici. Maggie est petite, blonde avec des yeux bleus. Ce qui a plu chez Katherine en premier, c'est son contact avec les gens. Elles sont toutes les deux sociables et se sont très bien entendues dès la première conversation qu'elles ont partagée.
_ Salut, ma grande !, s'exclame Maggie en prenant Katherine dans ses bras. Prête à faire la fête ?
_ Euh oui ! Tu veux aller où ?
_ Je ne sais pas encore, avoue Maggie en rentrant dans le couloir menant à la grande pièce. Tu as une idée ?
_ Tu m'as dit qu'il y avait tes amis qui venaient aussi, non ?
_ Oui mais ils ne savent pas encore l'endroit.
_ On n'a qu'à aller au Kells, tu sais, l'Irish pub !
_ Bonne idée !
Maggie s'approche du comptoir et examine la bouteille de Bollinger sur le plan de travail. Elle interroge Katherine du regard, un sourire en coin.
_ C'est rien, on a fêté un contrat avec Kyle, ce soir, dit-elle, évasive.
_ Il y a autre chose ?, demande Maggie, enjouée.
_ Mon client est à tomber par terre, crie-t-elle, déçue.
_ Alléluia !, s'écrie Maggie. C'est la première fois que je te voie comme ça pour un garçon en cinq ans d'amitié ! Il est comment ?
_ C'est l'héritier des Martins, le fils cadet.
_ Quoi ? Tu l'as vu ? Il est comment ? Je. Veux. Tout. Savoir, s'époumone Maggie.
_ Je ne saurai te le décrire, mais vu que c'est le premier qui me fait chavirer depuis un bon moment, je te laisse deviner que c'est un dieu !
_ Oh, mon dieu !
Maggie se met à sautiller de partout au tour du bar sous le regard de Katherine, amusée. Elle ne l'a jamais vu aussi contente. Elles poursuivent la conversation dans la chambre de Katherine, en même temps que celle-ci se change pour sortir. Katherine se met à appréhender cette soirée. Mais ceci est de courte durée. Lorsqu'elles sont dans la voiture de Maggie, une chanson entrainante ramène Katherine dans la bonne humeur. Et le sourire revient sur son visage.
Arrivées dans le bar, pas loin de Pike Place Market, les filles se dirigent vers une table dans le fond du bar, à côté d'une table de billard. Deux garçons et une fille les attendent pour commander. Il s'agit de Paul, Carla et Preston, les amis de Maggie. Preston reluque Katherine lorsqu'elle entre dans le bar, au bras de Maggie. En tout cas, elle ne le laisse pas indifférent.
_ Salut la compagnie !, s'exclame Maggie. Voici Katherine Soldiers, mon amie que j'ai rencontrée en France. Ma chérie, voici Paul, Preston et Carla.
_ Bonjour, répond Katherine, gênée.
_ Vous voulez boire quoi ?, demande Carla. J'ai trop soif !
Katherine demande une Bud et le reste commande des bières brunes. Quelle boisson épouvantable, cette bière ! Comment font-ils pour boire ça ?
Après deux heures à boire et à chanter, Carla et Paul sont, comme qui dirait, bourrés. Katherine ne l'est pas, une bière lui suffit amplement. Quant à Maggie et Preston, encore deux et ils rejoindront le cercle très fermés de leurs amis de lycée. Katherine se met à regarder autour d'elle. Pleins de groupes d'amis se sont retrouvés ici pour regarder le match des Celtics. Katherine se prend d'intérêt pour le match. Le sport l'a toujours intéressé, ainsi que les livres, la musique et l'art en général. C'est une fille très difficile qui se diversifie et s'intéresse à tout. C'est en parti à cause de ça qu'elle fait peur aux garçons. Elle n'est pas du genre à gueuler sur un gars parce qu'il n'a pas rabaissé la lunette des toilettes -après tout nous ne sommes pas handicapées, on peut le faire nous-même. De plus, elle préfère regarder un match de football avec une bière plutôt que de sortir au restaurant ou au shopping. Cela ne la répugne pas, mais elle le fait rarement.
Elle pense qu'elle est une énigme à elle toute seule. Elle s'est souvent posé la question si c'était elle qui avait un problème, mais Kyle lui a toujours répété qu'elle était parfaite, que c'étaient les autres qui avaient un problème, qu'ils ne comprenaient pas la perfection incarnée. Même aujourd'hui, elle doute encore de ce que Kyle lui a souvent répété pendant toute son adolescence. Elle avait des prétendants au lycée, mais ils fuyaient lorsqu'elle avouait sa vraie nature. Un garçon lui a même dit qu'il n'avait pas envie de vivre avec un mec. Je ne rote pas non plus à tout bout de champs ! Les filles étaient jalouses d'elle, du coup, elles parlaient mal dans son dos, lui faisait une réputation des plus exécrables sans même savoir qui elle était, en réalité. A l'école, en France, ça allait un peu mieux, elle a rencontré Maggie mais les garçons passaient au second plan à chaque fois. Elle souhaitait avoir sa situation et ne dépendre de personne. Etre autonome et heureuse avec elle-même. C'était tout ce qui lui importait.
Le public dans le bar se lève d'un seul homme avec le suspens d'un ballon volant directement vers le panier de basketball, seulement la balle et retombée à côté, et c'est comme si une vague s'échouait sur le sable, côté supporters. Soudain, Katherine sent une présence derrière elle. Elle se retourne et voit que Preston est planté derrière elle, la regardant avec un regard de braise qui ferait fondre plus d'une fille dans le bar, seulement, ce n'est pas le cas de Katherine.
_ Tu aimes le basketball ?, s'enquière Preston.
_ Basket, foot, rugby, j'aime tous les sports, répond Katherine en buvant le fond de sa bière.
_ C'est rare, ça.
_ Quoi donc ?
_ Une fille qui aime le sport.
_ Rare mais pas impossible !, soutient Katherine, avec un sourire forcé.
Laisse-moi regarder mon match tranquille !
_ Maggie m'a dit que tu étais une fille peu commune.
_ Maggie a du mal à tenir sa langue, parfois.
_ J'avoue !, Preston rigole, en se tortillant sur son tabouret.
Maggie revient près de Katherine. A l'intérieur, Katherine remercie le ciel d'avoir convaincue Maggie de revenir vers elle. Une envie pressante la surprend et Katherine doit l'accompagner aux toilettes. Merci Seigneur ! Elle se lève et accompagne Maggie vers les toilettes. Deux portes. Une pour les filles et une autre pour les garçons, représentés tout deux par des lutins verts. Elles rentrent ensemble chez les dames.
_ Comment tu trouves Preston ?, demande Maggie en s'asseyant sur le trône.
_ Il est loquace.
_ Il ne te plaît pas, c'est ça ?
_ Non, avoue Katherine, appréhendant la réaction de Maggie.
_ Mais il y a cet apollon qui tourne dans ta tête en boucle ?
_ Effectivement. Mais c'est impossible. Je ne le reverrai pas et puis, c'est un client. Je ne peux pas me le permettre.
Maggie se relève et tire la chasse d'eau, d'après l'oreille de Katherine qui est de dos. Katherine continue son monologue par rapport à l'histoire impossible auquel elle ne croit pas. Maggie se lave les mains et Katherine sort des toilettes en continuant son monologue.
_ Et puis, je ne dois même pas lui plaire, il est tellement renfermé sur lui-même en même temps, c'est une énigme à lui seul et puis...
Elle allait taper dans un costard-cravate un peu plus grand qu'elle quand elle se retourne pour faire face à la salle du bar. En levant les yeux, elle rencontre ces yeux-là. Elle blêmit.
_ Bonsoir, Mlle Soldiers. Quel plaisir de vous revoir !, prononce Jeremy Martins, détaché.
Bordel de merde...
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BONJOUR A VOUS TOUS!
Tout d'abord merci de vous être arrété sur cette page. Cela me fait chaud au coeur, vraiment!
J'espère que pour le moment vous appréciez ce que vous lisez. Je suis vraiment heureuse de pouvoir partager tout ça, avec vous.
Seulement, j'aimerais avoir votre avis. Alors si j'obtiens au moins cinq commentaires (et ATTENTION, de VRAIS commentaires je dis bien! Pas de ceux qui font une ligne!) Même si vous avez des critiques ou quoi, je me ferai un plaisir de les lire. Ils pourront m'aider à m'améliorer.
Bien à vous,
Joëlle SADOK-QUILICHINI.
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