- Charbon Blanc -
Le free-fight c'est pas juste un sport. C'est une façon de vivre.
Moi, je suis plus rien sans les combats.
***
- Gavin ! Tes jambes! Et surveille ta garde, bordel de merde !
Je n'écoute déjà plus le vieux, bien trop occupé à esquiver les assauts du blond en face de moi. J'enchaîne rapidement coups sur coups, sans jamais fatigué une seule seconde. Poings, pieds, coudes, genoux. Je le frappe encore et encore. Les côtes, le visage, les jambes.
Je me bats le sourire au lèvres, ce qui a tendance à agacer très sérieusement notre coach. Il s'imagine toujours que je ne fais jamais attention à ma garde ou à quoi que ce soit venant de mon adversaire. Ce qui est totalement faux. Remarque, là, il n'a peut-être pas totalement tort, sachant que je viens juste de me prendre un coup en plein visage.
Je tombe sur le tapis du ring, complètement sonné par le coup. J'ai vraiment mal placé le mien. Je reprends ma respiration et me relève avec peine avant de me reprendre une gauche en pleine face. Je dois être recouvert d'hématomes et faire peur à voir.
- Reste pas terre, merde !
- NON !
- Gavin !
Ça y est, je suis en rogne. Une nouvelle fois debout, je ne pense plus qu'à le faire tomber, lui, sa jolie petite tête blonde et son sourire plus qu'agaçant. Ma respiration est saccadée, mes muscles tremblent et un goût étrange me prend à la gorge. S'il me touche encore une fois, je crois bien que je pourrais faire abstraction de tout, juste pour le voir s'effondrer au sol et lui cracher un visage le sang qui borde mes lèvres.
- Sean, arrêtes toi...
Il jette un coup d'œil de l'autre coté de la grille de la cage et soupire en baissant les bras. Il ne va pas abandonner maintenant. Il ne DOIT pas abandonner maintenant. Toujours en mouvement, je sautille sur place, mes poings devant moi, prêts à le frapper s'il m'approche d'un peu trop près. Je décide de le narguer un peu, essayant de le faire reprendre notre combat.
- Bah alors.... T'as pas de couilles trou d'uc ?!
- Non... C'est juste toi qui me les brises sévères, Gav...
Il m'ennuie presque. Je m'arrête enfin et notre entraîneur ouvre la cage. Il est complètement furieux. Vraisemblablement à cause de moi. Il se rapproche de nous, d'un pas boitant. Il a toujours refusé de nous donné la réelle cause de sa blessure, inventant une nouvelle histoire à chaque fois.
- Un jour, je vous jure, vous allez me tuer...
Sa remarque me fait doucement rire. Depuis que le connaît, il n'a jamais manqué un seul jour pour nous le rappeler. Mais il ne semble pas décider à ne pas nous abandonner lui et sa bonne humeur. Il s'arrête devant nous, regarde tour à tour nos visage blessés et croise ses bras sur son torse, attendant sûrement nos excuses. Sean ne tarde pas longtemps, pour les lui donner.
- Désolé coach. J'ai dépassé les bornes.
- Gavin ?
Il m'observe avec un air insistant. Je sors du ring en poussant un grognement. J'étais prêt à continuer et lui, il m'a coupé en plein élan. Je m'assois sur un banc placé sur le coté et peste contre Sean. C'est de sa faute, c'est lui qui m'a touché en plein visage. Il récupère son sac et tente tant bien que mal de me parler, mais je l'ignore royalement en lui crachant un insulte en plein visage. Il chasse ma réplique cinglante d'un geste de la main et quitte la salle. Je respire enfin et lâche un long soupire tout en retirant mes gants.
L'ancien champion de combat se rapproche de moi et s'assoit à ma gauche, de l'autre coté du banc. Contrairement à tout ce qu'il peut penser de mon attitude envers lui, je l'admire tellement. Lui et ses nombreux exploits. Depuis que je suis en âge de combattre, je ne rêve que d'obtenir la même reconnaissance que lui. J'aimerais tellement qu'il me dise juste une fois, rien qu'une seule, qu'il est fier de moi. Ce qui n'arrivera sans doute jamais.
- Tu m'expliques ce que t'as foutu tout à l'heure ?
Je finis par poser mes gants à côté de moi et observe le cinquantenaire. Je suis déterminé à lui montrer que je suis capable de me battre et de remporter un combat.
- Laissez-moi combattre...
Il se met debout, comme agacer par le fait que je lui ai même proposer la chose. Il frotte ses cheveux grisonnants en ricanant. Il voit que mon obstination est à toute épreuve. Quand je veux quelque chose, je finis toujours par l'obtenir et il le sait parfaitement.
- Gavin, on en a déjà parler...
- Juste une fois, rien qu'une seule !
- Au risque de faire la même chose que la dernière fois ? Non... Surtout pas après ce qu'il vient de se passer.
- Mais ça n'arrivera plus, je vous jure !
- Comme la dizaine de fois où tu m'a dit ça ?
Il sait également que s'il me laisse combattre, cela apporterait de nombreuses choses à nous deux. Surtout des problème pour moi en vérité. L'histoire risquait de se répéter encore une fois.
- On va faire autre chose, tu veux ? Mon fils arrive demain du Canada. Je voudrais que tu t'entraînes un moment avec lui et seulement là, je verrais pour ton inscription à un prochain combat.
Je sens mon cœur louper un battement. Son fils était partit au Canada en jurant à tout le monde qu'il ne serait jamais prêt à rentrer à Détroit, voulant à tout prix quitter cette ville et ses problèmes.
- Merde... Votre fils ? Pourquoi il reviens ? Je pensais qu'il voulait oublier cette ville !
- Je le pensais aussi, tu vois. Comme quoi...
- Et vous... Vous savez quand il devrait arriver ?
- Demain, en début de journée, je crois... Donc, c'est bon pour toi ?
- J'en sais rien... Peut-être... je vous dirais demain.
Je me mets debout et part me changer dans les vestiaires, encore surpris par son annonce. Son fils est connu pour avoir remporter plusieurs championnats à Détroit. Un combattant hors paire, entraîné par son propre père, jouant dans les meilleures club de tout l'état. Il n'a jamais connut de réelle défaite. Excepté une fois. Une défaite qui avait faillit mettre fin à sa carrière.
Je revois encore la scène, à coté de son père, complètement impuissant. Le brun dans la cage, plier en deux par la douleur. Son visage couverts de bleus et de sang. Les hurlements dans toute la salle et les battements d'un cœur.
Mon cœur qui battait à tout rompre dans ma poitrine. Comme en ce moment même.
Je me tiens aux murs pour ne pas m'effondrer sur le sol. Une douleur vient subitement me lacérer le ventre. Je pousse une hurlement et envoie mon poing dans un casier au hasard, pliant légèrement le métal vert par la même occasion. Mon sang pulse rapidement dans mes doigts. Je laisse reposer mon front contre la paroi et essaie tant bien que mal de calmer ma respiration. J'ai l'impression de revivre la scène devant moi. Les cris, le sang, les coups interdits, mais surtout, son regard. Ses yeux bruns rougis par des vaisseaux éclatés et des larmes.
Je ferme les yeux et essaie d'effacer ce souvenir de ma mémoire. Un autre vient aussitôt le remplacer. Une main se pose sur la peau nue de mon dos, me décrochant un frisson. Une autre sur mon bassin, qui me fait sourire. Un souffle sur ma nuque me faisant lâcher un juron.
J'ouvre de nouveau les yeux. Ce n'était rien de plus qu'une simple sensation que je souhaitais à tout prix oublier.
- Dans quel merdier tu m'as foutu...
***
Cette sensation qui nous prend au ventre, qui nous montre que nous sommes juste trop faible pour l'assumer, qui nous fait perdre la notion du temps, nos repères et la raison. Je la connaît bien. Peut-être même un peu trop.
Une cigarette entre les doigts, je m'assois sur le toit de l'entrepôt aménagé. Emmitouflé dans ma veste, j'observe les gens défilés dans la rue. Des années auparavant, je m'amusais à inventer des histoire à ces passants, toujours accompagné de mon meilleur ami. C'était plus que l'amitié pour moi en vérité. Mais je n'avais jamais oser lui avouer à ce moment-là.
- Gavin ?
Je me retourne quand je reconnais sans peine celui qui m'appelle. Il me fait face, se tenant assez éloigné de moi, habillé d'un sweat-shirt avec le logo du club de son père imprimé dessus. Il me donne son magnifique sourire qui m'avait tant manqué.
Cela fait deux ans que je ne l'ai pas vu, mais je ne trouve rien à lui dire sur le moment. Comme si on s'était quitté la veille.
Je tapote le bitume froid à coté de moi pour l'inviter à le rejoindre. Il s'assoit et on ne dit rien pendant plusieurs minutes, jusqu'à ce qu'il ne brise finalement le silence.
- Tu m'as sacrément manqué.
- Pourquoi t'as pas appelé ? je lui demande finalement avec une certaine accusation dans la voix.
- Gav...
- Non, dis moi, je veux savoir. Je veux savoir pourquoi tu m'as pas appeler une seule fois en trois ans. Ou même juste envoyer un message, même si c'était pour me dire que tu allais bien.
Je suis presque attristé de lui dire ça. On se connaissait depuis l'enfance et du jour au lendemain, notre relation avait coupé court, sans jamais que j'en obtienne la raison.
- J'avais pas les couilles de le faire. Voilà... Pas après ce qu'il c'était passé pendant un an.
Je passe une main dans mes cheveux avant d'écraser sa cigarette contre le bitume pour finalement me relever. Je commence à m'énerver et nos retrouvailles risques de vite tourné au vinaigre.
- Un an... Un an tu sais ce que c'est dans toute une vie ? C'est que dalle.
- Donc, toi et moi c'était que dalle ? interroge-t-il en se levant à son tour.
- C'est pas ce que j'ai dit...
- Mais c'est ce que tu penses.
- Putain... Joues pas avec les mots toi ! Et puis je t'ai posé une question. Pourquoi tu m'as pas ap-
Je sens mon cœur me joué encore des tours. Keith me prend soudainement dans ses bras, me serrant contre lui, son visage près du mien. Peut-être même un peu trop. Une main sur ma taille et l'autre derrière ma nuque caressant mes cheveux.
- Si je t'ai pas appelé c'est parce que je savais que si je le faisais, j'aurais tout fait pour retourner ici. Parce que j'avais trouvé quelque chose qui comptais bien plus que les combats. J'aurais tout fait pour te retrouver.
- C'est pas à ce genre de déclaration à laquelle je m'attendais.
- Et tu t'attendais à quoi ?
- T'es le genre de mec à tout savoir. T'as déjà deviné non ?
- Démasqué...
Je me détache légèrement de lui et passe mes bras derrière sa nuque. Je ferme les yeux en posant mon front contre le sien.
- Merde...
Je redresse la tête pour faire face à son regard brun presque fiévreux.
- J'ai besoin de toi, je déclare dans un souffle.
- Besoin ?
- Non. Ouais... Tu sais que j'aime pas le dire... je ricane.
J'ai presque l'impression de ressentir mon cœur exploser dans ma poitrine quand il prend mon visage froid entre ses mains et que ses lèvres rencontrent les miennes. Depuis qu'on s'était quittés, je ne rêvais plus que de ça. Le sentir de nouveau contre moi. Pouvoir caresser tendrement sa peau, lui dire quelques mots d'amour et l'embrasser encore et encore. Je sais sans problème qu'il le souhaite aussi.
- Tu l'ignores peut-être, mais moi aussi, j'ai envie de toi. Et au moins, je te le dis en face. Même si je vois que ça à l'air de vraiment te gêner.
- Putain, t'es con...
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