Une jeune femme était calmement assise sur un banc. Elle observait les passants un à un, sans réellement les observer. C'étaient de simples gens, pris dans le train train quotidien. Parfois certains jetaient un regard à leur montre, puis pressaient le pas.

En ce vendredi de printemps, les gens prenaient plaisir à sortir et profiter du soleil. En plein centre-ville, entourée d'arbres, la jeune femme semblait songer à de nombreuses choses, impossibles à déchiffrer.
Dans la verdure environnante, corbeaux et pies se battaient un simple mais précieux morceau de pain, sûrement jeté et abandonné par son ancien détenteur. Ainsi, ces oiseaux ne prêtaient guère attention aux passants et encore moins à la femme immobile sur son banc. Seule la vitrine du petit supermarché en face d'elle semblait ne pas l'avoir oubliée, en reflétant le portrait de la jeune femme, cachée sous la capuche de son sweat noir.
Ses lèvres fines, maquillées d'un rouge à lèvres bordeaux et étirées en un sourire angélique étaient les seuls éléments visibles de son visage.

Un papillon se posa à côté de la femme, pensant sûrement qu'il s'agissait d'une simple statue. Des pas précipités se firent entendre dans la rue. Cette succession d'échos avait suscité l'intérêt de la femme qui tourna la tête, effrayant ainsi le papillon posé sur le banc. En direction du bruit se trouvaient deux hommes et une femme, tous également cachés par les pans de tissus noir de leurs sweats à capuche. Les trois individus semblaient se connaître, ils s'échangeaient des regards déterminés. Chacun d'eux tenaient en leurs mains un sac de sport qui se frottait à leurs jeans noirs.
Le sourire de la jeune femme assise sur le banc s'élargit, devenant de plus en plus chaleureux.

Les trois acolytes, après avoir lancés des regards furtifs vers la jeune femme (sans doute se connaissaient-ils), pénétrèrent dans le supermarché face à elle.
La porte coulissante se referma sur le trio d'individus, indifférente face à leur apparence ou encore face à l'attitude suspicieuse qu'avait pris ceux-ci une fois entrés dans le petit, mais assez peuplé supermarché.

Du mouvement pouvait s'observer depuis l'extérieur. La jeune femme sembla soudain s'agiter. Ses mains fourrées dans les poches de son sweat, ne cessaient de remuer. Cependant, elle ne laissait pas son sourire disparaître.

Deux coups de feu firent cesser le chant habituel et mélodieux des oiseaux. Les corbeaux et les pies s'envolèrent précipitamment, abandonnant leur chamaillerie. Les gens dans la rue se stoppèrent d'un seul homme, tétanisés. Puis des cris fusèrent depuis le supermarché.
Dans ce chaos où des passants succombant à la peur, s'enfuyaient en courant, et d'autres braves allant à la rencontre du danger se croisaient, se heurtaient, se poussaient.

La jeune femme, debout au milieu de cette cohue, s'en alla simplement. Son sourire avait été remplacé par un sourire satisfait et elle fredonnait les airs d'une chanson à l'allure joyeuse. Elle marchait paisiblement au milieu de ce chaos. Personne ne semblait faire attention à elle, comme si elle faisait partie du paysage.

Si seulement ils avaient examiné la jeune femme plus en détail. Si seulement ils avaient remarqué son sac abandonné sur le banc. Si seulement ils avaient vu qu'elle n'était pas qu'une simple passante au mauvais endroit, au mauvais moment. Elle était plutôt au bon endroit, au bon moment.

C'est ainsi que le sac de la femme, ignoré de tous, explosa. Le souffle de l'explosion projeta les pauvres passants au sol, il brûla les membres de certains trop proches de la bombe. La jeune femme ne se retourna pas pour observer l'horrible spectacle qu'elle avait mis en œuvre. Les cris de douleur et de terreur des victimes lui étaient suffisant. Bientôt, elle disparut laissant derrière elle le carnage qu'elle et ses acolytes avaient réalisés. Abandonnant à leur triste sort les victimes de cet attentat qui a rompu les habitudes de ce quartier.

~So I'm breaking the habit tonight~