18.
Je descendis les escaliers, fin prête à prendre mon déjeuner, avant d'aller à l'école. Mon père étant parti travailler, laissant la maison dans un silence effrayant. Seule ma mère se trouvait dans la cuisine, appuyée contre le comptoir, un café à la main, feuilletant le journal. Je courus l'embrasser sur la joue, étant de bonne humeur. Ma mère leva la tête et paru complètement surprise.
« Bon matin! » m'exclamai-je en ouvrant le réfrigérateur pour en sortir le contenant de jus d'orange.
« Tu es de très bonne humeur ce matin... Il y a quelque chose de particulier aujourd'hui? »
« Maman, je peux très bien être de bonne humeur sans avoir de bonne raison. » rétorquai-je, après avoir bu quelques gorgées de jus.
« Oui, oui... C'est juste que habituellement tu te réveilles assez grognonne et que tu marmonnes des jurons jusqu'à ce que tu partes pour l'école. »
Je levai les yeux au ciel en me faisant griller du pain, ne comprenant pas pourquoi ma mère était aussi pessimiste. Aujourd'hui, c'était jeudi. La journée où je verrais les gens réagir à cette nouvelle liste. Et la veille de mon rendez-vous avec Conley. Hier soir, après que l'on soit tous entrés dans l'école pour afficher la banderole, Conley avait été le seul à me raccompagner jusqu'à mon domicile. On se tenait sur le seuil de la porte d'entrée et il allait m'embrasser, mais mes parents avaient ouvert la porte au moment clé. Nous avions sursauté tous les deux, mais Conley semblait être le plus effrayé en voyant mon père le dévisager et ma mère rigoler face à ce malaise. Il était parti en me disant qu'il aimait bien mon pyjama. Je n'avais pas arrêté de rougir jusqu'à ce que je m'endorme.
« C'est ce garçon n'est-ce-pas? » me questionna-t-elle, le sourire étincelant son visage.
« Non, ça n'a rien à voir. » répondis-je en rougissant.
« Ouais, je vais te croire, bien sûr. »
Je ne répondis pas et je garni mon pain grillé de confiture à la fraise, avant d'y croquer à pleine dents, savourant la saveur fruité que j'attendais. Ma mère se concentra à nouveau sur son journal. Je me mis à l'observer discrètement. Ses cheveux blonds restaient toujours en place, peut importe les mouvements qu'elle faisait, puisqu'ils étaient suffisamment courts, symbole de son cancer. Ses yeux étaient clairs et pétillants, et ma mère n'usait d'aucuns produits de beautés, contrairement à ce qu'on pouvait penser. Ses pommettes étaient bien vues, me laissant croire qu'elle avait perdu du poids. Étais-je la seule à l'avoir remarqué?
« Maman, est-ce que tout va bien? » lui demandai-je en m'approchant d'elle.
« Oui, oui. »
Elle avait caché la page de journal qu'elle feuilletait à l'aide de sa main, mais j'avais eu le temps de remarquer le titre de la page. Pourquoi était-elle dans la rubrique des maisons à vendre? Que se passait-il? J'allais lui demander, seulement son regard me laissa comprendre que je n'avais pas à y comprendre quelque chose. En tout cas, pour le moment.
« Bon, eh bien, je crois que je vais y aller. Je ne voudrais pas manquer l'autobus. Bye, Maman. » déclarai-je en jetant un coup d'œil à l'horloge.
« D'accord, chérie. Bonne journée! Amuse-toi bien. »
J'embrassai ma mère sur la joue, à nouveau, laissant les restes de pain à la confiture sur le comptoir. Je me dirigeai dans le vestibule et prit mon manteau, avant de nouer les lacets de mes bottines. Je mis mon sac en bandoulière et quittai la maison, enjouée et inquiète à l'idée de découvrir ce qui m'attendais une fois à l'école. Je me mis en route, d'un pas pressée jusqu'à l'arrêt d'autobus.
• • •
Alicia m'attendais dans le stationnement de l'école. Je courus la rejoindre, essayant de camoufler ma bonne humeur.
« Es-tu allée sur Facebook, ce matin? » me demanda-t-elle.
« Où est passé le bonjour? » blaguai-je, m'attendant à avoir une remarque sarcastique de la part d'Alicia.
Seulement, Alicia me dévisagea. J'avais l'habitude de ne pas être salué par Becca, autrefois. Et elle me répondait toujours de manière sarcastique, me laissant comprendre qu'elle s'en fichait royalement. C'était quotidien. J'étais tellement habituée à ce type de «salutations» que pour moi, ce n'était qu'un automatisme.
Alicia n'est pas Becca, me répétai-je mentalement.
« Non, je n'y suis pas allée. » grommelai-je en faisant référence à sa question.
« Vas-y au plus vite, dans ce cas! »
« Ça n'a pas marché, pour la liste je veux dire? » demandai-je, soudainement inquiète.
« Au contraire... C'EST GÉNIAL! Bon, il reste quelques sceptiques, par exemple Thomas Grant, mais bon la majorité apprécie cette troisième liste. » se réjouit Alicia en sautillant.
Je fus contente au point que je sautais dans les bras d'Alicia, sans penser au fait que nous n'étions pas extrêmement proche. La jeune brune se raidit à mon contact et je reculai instinctivement.
« Désolée, c'est juste que... Eh bien... C'est incroyable et... Je n'arrive pas à y croire... C'est... » bafouillai-je, cherchant mes mots pour paraître moins gênée.
« Ça va, ne t'inquiètes pas. Je ne suis juste pas très fan des contacts physiques. »
Je mis une distance raisonnable entre nous, mais ce petit incident ne m'empêcha pas de garder le sourire, tant il s'agissait d'une bonne nouvelle. Certes, comme le disait Alicia, certains étaient toujours opposés, mais la plupart des élèves semblaient accepter - même apprécier - la nouvelle liste. Je pouvais ainsi presque me sortir d'un supplice à peine supportable. Je remerciai Alicia et courus jusqu'à l'intérieur de l'école, passant devant la banderole que les professeurs tentaient d'expliquer et que les élèves acclamaient. Je courus de plus en plus vite, un sourire sur les lèvres, un surveillant me criant de ralentir. Je n'obéis pas et fonçai dans le local de la radio étudiante que je partageais avec Conley. J'ouvris la porte rapidement et sautai au cou de Conley dès que je l'aperçus. Il fût surpris, mais ne pus exprimer ses pensées, car je scellai mes lèvres aux siennes, partageant un baiser passionnel avec le garçon aux cheveux foncés que j'aimais profondément. Nos lèvres s'accordant parfaitement, le baiser dura. J'avais parfois du mal à continuer notre échange, car je souriais comme une débile, très vite imité par Conley. N'empêche que ce baiser semblait être un manque inhumain d'affection, alors que l'on s'était vue hier. Ensemble, nous échangions un baiser passionnel. On se sépara au bout d'un moment, le sourire aux lèvres. Conley m'embrassa rapidement et m'agrippa la main pour m'amener plus près de ce que j'aimais appeler le tableau de commande de la radio étudiante.
« Je n'arrive pas à y croire... Je... » bafouillai-je, émotive.
« Moi non plus. C'est incroyable, Lucy! »
Il fit pression sur ma main, alors qu'il était appuyé sur la table. Ses yeux bleus me fixaient avec un mélange de fascination et de tendresse.
« Arrête de me regarder comme ça. On dirait un petit chien... » ricanai-je, souriant tout de même.
« Aimes-tu les petits chiens? »
« Pardon? » rigolai-je en haussant un sourcils, avant de poursuivre, « Bien sûr que je les aimes. Mais, je préfère Jacob Conley à ces petites bestioles à quatre pattes. »
Son sourire s'élargit et sa main vint effleurer ma joue, délicatement. Je passai ma main dans ses cheveux d'un bruns étincelants en le regardant tendrement. Conley m'observa longuement avant de prendre la parole.
« C'est à toi de me regarder comme un petit chien, maintenant. »
Je l'embrassai sans hésitation, pour la énième fois. Si la nouvelle liste faisait mon bonheur, Conley en faisait grandement parti. Ce baiser ne fût pas aussi prolongé que le précédent, car une petite sonnette retenti, nous séparant. C'était l'heure. Conley soupira et s'assit sur la chaise de bois qui lui appartenait maintenant et je l'imitai, une pile de CD de musique alternative que j'avais sélectionné traînant à mes côtés.
« Bon, eh bien, je regrette mais nous avons une émission de radio à faire. »
Je souris, ayant l'impression d'être au bon vieux temps, comme si rien ne s'était passé depuis. Je mentais à moi-même.
• • •
« Lucy Frances Powell est demandé au bureau du directeur. Je répète: Lucy Frances Powell est demandé au bureau du directeur. Merci. »
Je grognai, alors que cet annonce raisonnait à travers toute l'école, attirant l'attention sur moi. Je fermai mon casier, en gardant quelques manuels pour mon prochain cours entre mes mains, puis je me mis en route pour le bureau de la direction. Je croisai quelques élèves de mon âge, mais aucun ne m'adressa de regard de mépris, ce qui me valu un grand sourire. J'accélérai le pas en me rappelant que le directeur n'était pas friand des retards. Une fois devant le bureau, sa sympathique secrétaire me donna une carte de visite - nouvelle procédure - avant de me laisser entrer dans le bureau de M.Cree. Ce-dernier tenait une feuille de papier, l'air franchement contrarié, alors que je m'assoyais sur l'un des deux fauteuils en cuir qui faisait face à sa personne. Sa secrétaire remarqua son expression facial et décida de fermer la porte. Elle avait pigé cette bonne vieille Mme Vance.
« ON PEUT M'EXPLIQUER CE QU'EST CETTE LISTE? JE CROYAIS AVOIR ÉTÉ CLAIR. » hurla le directeur au point que j'eus l'impression que les murs tremblaient.
Je restai muette, ne sachant pas trop quoi dire... Ou quoi faire. M.Cree semblait franchement en colère après moi, sans parler du regard qu'il lançait à cette énième liste qu'il tenait entre ses mains. J'aurais dû avoir peur de lui, comme toute élève modèle, mais ces-derniers temps, j'avais eu l'occasion de m'apercevoir que ce n'était qu'un crétin sans défense, qui se fichait bien du sort de ses élèves. Ce n'était pas quelqu'un dont il fallait avoir peur, selon moi. Un ennemi, certes, mais facile à écraser pour sa lâcheté.
À mon grand étonnement, le directeur ne poussa pas plus loin. Il attendait visiblement que je m'explique. C'était ce que j'allais faire. Je n'avais pas d'autres choix, si je voulais faire vite.
« J'ai pensé que c'était un bon moyen de corriger mes erreurs. En écrivant une nouvelle liste. Celle qui a le plus de sens. À mes yeux. Aux yeux de tous. »
« Vous plaisantez, j'espère! » s'exclama l'homme âgé d'un rire sec.
« Non, monsieur. Croyez-moi ou non, cette liste a changé les choses! La paix est revenue et l'école. Tout est réglé. »
« Tout est réglé? TOUT EST RÉGLÉ? » M.Cree écrasa son poing contre son bureau, en colère à nouveau. « Des élèves ont manigancés des choses franchement cruelles. Une tentative de meurtre a été commis dans cette école. Une élève a été assassinée. Une autre est accusée de meurtre et a pris la fuite. La police enquête auprès de notre école sérieusement. Et des rumeurs se disent sur le bon sens de notre établissement scolaire. Vous croyez que ça, c'est réglé? Vous croyez peut-être que tout ça, ça va inciter les gens à venir dans notre école? COMMENT POUVEZ-VOUS CROIRE QUE C'EST RÉGLÉ? »
Je bondi hors du fauteuil pour venir écraser mon poing sur son bureau impeccable, à mon tour. Le directeur ne sembla pas surpris. Il avait conservé sa posture d'allure sérieuse et ses traits ne s'étaient pas radoucis.
« Eh bien, tant mieux si peu d'élèves s'inscrivent dans cette école. Ils ne vivront pas le calvaire! » rétorquai-je, les sourcils froncés.
« CETTE ÉCOLE ÉTAIT UN HAVRE DE PAIX JUSQU'À L'ARRIVÉE DE CES SATANÉS LISTES! »
« Vous croyez que Rebecca Travis est la première à écrire une liste noire? Parce que si c'est ce que vous pensez, laissez-moi vous dire que c'en est tout le contraire. La majorité des élèves dans ce bahut ont une liste noire bien secrète qu'ils cachent en se disant qu'il vaudrait mieux la brûler que de vivre la même aventure que Rebecca et Lucy! Il y a toujours eu des listes et il y en aura toujours. » crachai-je tel une furie.
Le directeur s'enfonça dans son fauteuil impeccable, soudain plus calme. Un drôle de sourire perlait sur son visage. Un sourire qui n'annonçait rien de bon. Il me scruta des yeux, comme s'il examinait un spécimen en voie de disparition. Ce n'était guère rassurant.
« Vous ne comprenez toujours pas, Mlle Powell. Vous êtes aussi bête que tout le monde, finalement. » ricana-t-il.
« Si c'est pour me dire qu'il y a beaucoup plus derrière la liste que Becca et moi avons écrite, je le sais déjà, figurez-vous. »
« Vous êtes une idiote. »
S'il ne s'agissait pas de mon directeur, ma main aurait brutalement entré en contact avec sa joue pour créer ce qu'on appelle une gifle. Seulement, je ne pouvais pas me permettre ça, car j'écoperais d'une suspension et je ne voulais pas de cela, pas cette fois. Mes parents seraient encore déçus de moi, si ça se faisait. Et je voulais que tout redevienne normal entre nous. C'était donc contradictoire à ce que je voulais. Je fis donc mon possible pour garder mon calme, même si avec mes sourcils froncés et mes joues en feu, je semblais gravement en colère.
« C'est vous qui ne comprenez rien, d'accord? Vous croyez que négliger l'aide de la police et garder toute cette histoire à l'intérieur de cette école est le meilleur moyen de gérer tout ça, mais vous vous trompez. Car c'est un climat impitoyable qui se trouvent dans cette école depuis l'apparition publique de ces multiples listes. Tout le monde étouffe, ici. »
« Dans ce cas, je crois qu'un petit voyage scolaire dans les bois s'imposent. » rétorqua M.Cree, me défiant.
« Non. Vous êtes aussi monstrueux que Becca. Tout ce qui vous importe c'est votre satanée réputation! » hurlai-je, avant d'ajouter, plus calme, « Moi, j'essaie d'arranger les choses. Moi, je fais des efforts pour. Je sonne peut-être prétentieuse en vous disant ça, mais je crois que cette liste est un grand succès. Et que moi, j'ai réussi à faire avancer les choses. »
« Alors vous pouvez m'expliquer pourquoi Thomas Grant a décider de porter plainte contre vous, ce matin même? Vous qui êtes si fameuse. » lança le directeur avec arrogance.
Cette annonce me fit l'effet d'une bombe. Thomas Grant avait vraiment osé porter plainte contre moi? Je n'en revenais pas. Je savais que mes termes avec Grant était plutôt mauvais, mais j'ignorais que c'était à ce point là. Je croyais qu'il en voulait à Becca et qu'il se servait de moi pour la retrouver et lui faire payer amèrement la mort de sa copine, reine des abeilles. Il était en colère, certes, et il cherchait un coupable. J'étais la candidate idéale puisque Becca m'avait abandonnée. Encore.
J'essayai fortement de ne pas avoir l'air surprise, mais M.Cree eu le temps d'apercevoir cette micro-émotion qui traversa mon visage l'espace de quelques secondes.
« Eh oui. Thomas Grant vous déteste à mort. Et je suis certain qu'il n'est pas le seul. La faute à qui? »
« Je sens que je n'ai pas besoin de répondre à cette question. Vous connaissez déjà la réponse. Tout le monde la connaît, d'ailleurs. »
« Mlle Powell, réglez cette affaire sans interpeller les médias, je vous prie. Sinon, vous savez que les conséquences pourraient être extrêmement graves. » quémanda-t-il en ignorant ma remarque.
« Pour moi, c'est déjà réglé. Si ça ne vous convient pas, faites le sale boulot. Ne demandez pas aux autres de le faire à votre place. »
Sur ce, je fonçai droit vers la sortie, en ignorant les multiples regards que me lançait sa secrétaire, Mme Vance. Je pris mes manuels de cours et jetai la carte de visite sur son bureau, au passage, et courus droit vers le stationnement de l'école. Je laissai tomber mes livres dans la poubelle la plus proche et courus hors des limites de l'école, ne jetant aucun coup d'œil derrière moi pour savoir si quelqu'un m'avait aperçu partir tel une furie. Ça m'étais égale. Je courus, à bout de souffle cependant, ne souhaitant pas m'arrêter. Je courus à une vitesse folle, ne sachant pas où j'allais. Ça m'importait que très peu. Mon rythme cardiaque s'accélérait et la colère, très vite suivit du déni, s'installa brutalement en moi. Je ne cherchais pas à arrêter. Je ne voulais pas m'interrompre. Mais, soudain, une fois dans un parc désert, à quelques rues de l'école, une force inexplicable en moi se manifesta contre mon gré. J'eus aussitôt de la difficulté à respirer et mon souffle fût conserver par de brefs hoquets. Une douleur me saisit la tête et ce fût à genoux que je tombais dans l'herbe fraîche de l'après-midi.
Je vis plusieurs Rebecca Travis se manifester tout près de moi me tendant la main, l'air pleine de compassion, avant de sombrer dans le noir total.
:::::::::::::::::::::::::::::::::::::::
Bonzouuuur!
J'espère que vous allez bien et que vous profitez au max des vacances. :)
✕ Qu'est-il arrivée à Lucy à la fin du chapitre?
✕ Que pensez-vous du directeur, maintenant?
✕ Que pensez-vous de la plainte de Thomas Grant?
✕ Que pensez-vous de ce chapitre en général?
✕ Vos prédictions?
Merci de partager votre avis à chaque chapitre. J'adore lire vos commentaires! ;) Et merci énormément pour les 13k de vues. C'est vraiment énorme!
→ Marianne
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