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Assise à sa table les jambes croisées, accompagnée par ses pensées et son verre de liqueur comme à son habitude, Sakura admirait le soleil couchant, déteignant ses plus belles couleurs dans le ciel. Les dernières lueurs du soleil faisaient briller ses prunelles consumées par la tristesse.

    À sa table, il y avait deux chaises. Une pour elle, et l'autre pour la solitude à laquelle elle avait décidé de se condamner afin de protéger son cœur.

Elle tournait son verre de crystal, le regard vide, faisant danser l'alcool parfumé qui égayait depuis quelques temps ses soirées où la solitude la tuait. Elle n'était jamais ivre, ce n'était pas sa tasse de thé de noyer ses peines. Cependant, elle appréciait cette odeur sucrée qui lui caressait les narines et la descente de sa boisson forte lui chatouillant l'œsophage. Or, elle ne consommait qu'un seul verre après le repas, jamais deux.

    Soudainement, quelqu'un frappa à plusieurs reprises à sa porte, chose qu'elle ne remarqua pas tout de suite, car il est difficile de l'interrompre dans le courant de ses pensées quand elles sont torrentueuses.

— Mais qui ça peut bien être à cette heure-ci...? soupira-t-elle, reposant son verre sur la prestigieuse table de verre.

    Elle se leva de sa chaise, et une douce brise courra dans la pièce, soulevant légèrement sa robe de chambre en satin qui embrassait délicieusement ses courbes. Sakura Haruno s'avança d'un pas silencieux jusqu'à sa porte, cependant déterminée à découvrir la raison qui avait guidé cet individu jusqu'à la sienne au lieu d'une autre. Elle haïssait l'imprévisibilité.

En ouvrant la porte de sa demeure de façon hésitante, elle se figea pendant quelques secondes.

— Sasuke ? Encore toi ?

Les pas de Sasuke Uchiha avaient été guidés jusqu'à chez elle. Quelle en était la raison ? Elle faisait semblant de ne pas savoir. Il était bien décidé à remplir ce salon démesurément trop grand pour Sakura et sa solitude.

— Je ne veux pas te vo-

    Sasuke eut tout juste le temps de se faufiler dans l'espace entre la porte et Sakura avant même qu'elle ne puisse terminer sa phrase. Il esquissa un sourire en coin avant de finir sa trajectoire dans le salon de la rose, comme prévu.

— Ce n'est pas poli d'essayer de fermer la porte au nez de quelqu'un.

Il se retourna vers la Haruno, outrée par la vulgarité de ce dernier, cependant incapable de le chasser de sa demeure. Elle l'aimait, même si son ton et ses paroles en exprimaient le contraire.

— Toi aussi tu m'as manqué, Sakura.

Sakura tenta de dissimuler ses joues devenues rougeâtres avec ses mains. Pendant ce temps, Sasuke s'assit sur le canapé de velours. Il avait tout de même pris le temps d'ôter ses chaussures, pour paraître ironiquement plus poli.

— Qu'est-ce que tu veux cette fois-ci ? demanda Sakura, se tenant debout, les mains sur ses hanches.

— Sers-moi un verre de liqueur.

Sakura croisa les bras et fronça les sourcils. Non seulement il s'invita dans son intimité, mais il osait lui demander quelque chose pour se rafraîchir. Elle soupira légèrement avant de tourner les talons et d'exécuter à contre-cœur la demande de son invité.

Un court silence s'installa dans ce vaste salon à la décoration coquette. On ne pouvait qu'entendre l'alcool rencontrer le verre que Sakura s'apprêtait à servir à Sasuke. Elle se dirigea vers son hôte et lui le tendit, le dévisageant.

— Quel bon vent t'amènes ici ? demanda-t-elle d'un ton arrogant, en s'asseyant elle aussi sur le canapé.

— Tu sais ce que je veux, Sakura.

— Non, je ne sais pas, répondit la rose d'un air moqueur.

— C'est ça ton problème. Tu penses toujours mieux savoir que les autres et tu en assumes toujours le pire, grogna-t-il.

— Je n'assume pas le pire, je sais que tu l'aimes plus que moi et que tu te sers de moi pour l'oublier, s'exclama la Haruno.

— C'est faux, et tu le sais, dit-il en volant une gorgée de liqueur à son verre, sans la quitter des yeux. Ton liqueur est aussi amer que tes paroles envers moi.

    La discussion fut courte. Sakura détourna ses prunelles menthe du noiraude et posa son verre cristallin, avant d'enrouler une mèche rose autour de ses doigts et de se distraire avec. À vrai dire, elle savait ce qu'il voulait et ils partageaient le même désir. Cependant, les blessures de son âme avaient volé la parole à sa volonté et s'exprimaient à sa place. Les mots rassurants et sincères n'étaient plus assez forts pour balayer les doutes. La tentation et l'effroi rentrèrent en conflit. Ses paroles étaient comme des dagues visant à blesser Sasuke et à le rejeter, pendant que ses yeux l'imploraient de rester.

    Sasuke le comprit aussitôt. Il savait que derrière ces paroles amères et ces affirmations faussées, se cachait une Sakura souffrante, étouffée par la peur.

    Après un long silence pesant où aucun mot ne fut échangé, Sakura décida, chose inhabituelle, de se servir un deuxième verre. Ce soir, elle avait besoin de se noyer dans sa liqueur, de noyer ses désirs enfermés par la peur d'être brisé, mais également de noyer la voix affligée de ses blessures intérieures. Elle voulait infliger le silence, le temps d'une soirée, à la guerre de ses pensées rivales.

Elle n'aimait pas les sentiments, elle les haïssait. Rien que de s'imaginer donner la possibilité à quelqu'un de pouvoir la blesser, lui donnait la nausée. Elle n'autorisait personne à accéder à son cœur que le passé retenait prisonnier dans ses chaînes. Elle n'aimait pas la vulnérabilité à laquelle la condamnait l'amour, vulnérabilité qui l'avait menée à sa perte à plusieurs reprises. Elle préférait la solitude, qu'elle jugeait être sa protectrice, toutefois la haïssant tout autant que les sentiments.

Cependant, Sasuke avait décidément d'autres plans. Avant qu'elle n'ait eu le temps de se lever, le Uchiha se rapprocha doucement, et leurs lèvres se rencontrèrent. Sakura ne put résister. Il était sa faiblesse. Elle le savait, malgré tout. Or, elle refusait de se l'avouer.

    Son geste s'était exprimé bien mieux que n'importe quel mot n'aurait pu le faire. Leurs bouches se lièrent avec passion, dans cet obscur salon où seule la lune était témoin de leur union.

    La liqueur n'allait jamais pouvoir éteindre la flamme du désir d'une femme pour un homme. Aucun alcool n'aurait pu empêcher la réponse de son désir, il était comme un feu dévastateur détruisant la totalité des encombres sur son passage.

    Leurs vêtements disparurent peu à peu, maladroitement, donnant accès à chacun au corps de l'autre et de le découvrir. Les yeux du noiraude parcoururent celui de sa partenaire, avant de s'engager à nouveau dans un baiser passionné, où les mains commencèrent à se balader.

    Sakura se sentait faible dénudée de ses vêtements. Elle était dénudée de ses mots qui lui servaient d'armes et qui mentaient mieux que son corps.

   Il quitta ses lèvres avant de déposer d'autres baisers sur sa fleur de peau, pendant que ses mains embrassaient son intimité, ce qui fit naître une expression de honte sur son faciès. Or, ce n'était pas la honte de rencontrer le plaisir. C'était celle d'y avoir succombé. Elle renversa sa tête en arrière, fuyant le contact visuel, empêchant ses yeux de communiquer quelconque émotion, n'assumant guère d'être soumise à cette attirance et d'apprécier cette luxure.

— Je peux ?

Elle haïssait l'effet qu'il lui faisait. Cette sensibilité, que seul son corps nu pouvait exprimer. Toutefois, elle désirait que ce moment dure pour l'éternité. Ses sentiments s'entremêlaient pendant que son corps ne pouvait s'empêcher de rester muet.

— Évidemment...

    Sasuke déposa ses marques sur sa chair, avant de s'introduire dans sa féminité avec tendresse, en prêtant attention à s'être protégé et à son consentement. Après un soupir de satisfaction et quelques va-et-vient, ses mouvements s'accélérèrent, pendant que des cris s'échappaient de leurs bouches et s'élevaient dans la pièce, faisant mourir le silence qui avait duré trop longtemps pour deux personnes qui se désiraient.

    Sakura l'arrêta après quelques instants, atteignant le stade de jouissance, envahissant son corps d'une sensation éphémère, toutefois nouvelle, qu'auparavant aucun homme ne la fit y parvenir. Elle caressa avec délicatesse le faciès de son partenaire au regard fiévreux.

    Après quelques échanges affectueux, elle se releva, et rhabilla son intimité avant de sortir fumer une cigarette, sur sa terrasse éclairée par la lumière lilliputienne de la lune. Sasuke se revêtit à son tour, avant de la suivre.

— Je peux t'en voler une ? demanda le noiraude.

    La Haruno acquiesça et lui tendit une cigarette dont elle embrasa l'extrémité sans plus attendre, sous son regard amoureux. Elle approcha la flamme de la sienne, illuminant son faciès aux traits suaves avant d'allumer sa cigarette. Le tabac se consumait petit à petit, laissant s'échapper une odeur que la solitude de Sakura connaissait bien. Or, ce soir-là, la solitude mourut. Sakura n'était plus seule. Elle devait accepter que la condamnation à cette dernière n'était point le remède de ses chagrins.

    Allongés sur les chaises longues que Sakura fit installer quelques jours plus tôt, ils admirèrent les étoiles qui vinrent rejoindre la lune, afin qu'elle ne soit plus seule cette nuit-là. Après quelques minutes où régnait un silence agréable et léger, où leurs yeux étaient rivés sur ce spectacle lumineux, le temps que la terrasse ait été envahie par un nuage de fumée grisâtre, Sasuke prit la parole.

— Tu ne me crois toujours pas ? dit-il en ricanant.

— Peut-être que oui, peut-être que non. Qui sait ?

Sakura laissa échapper un ricanement avant de reprendre sa cigarette une dernière fois et d'en inhaler la fumée. Sasuke n'avait de yeux que pour elle, c'était une évidence. Sakura, elle, savait qu'elle ne pouvait plus y résister malgré la fuite pour laquelle elle préférait opter constamment.

— Je te sers un autre verre ? demanda gentiment la Haruno, se dirigeant à l'intérieur.

— Oui, mais pas de liqueur cette fois je te prie.