Chapitre 42

Vers minuit, quand il rentra chez lui en compagnie de Drago, Harry s'approcha de la fenêtre ouverte et soupira en regardant du côté des cimes de la Forêt Interdite.

— Pensif ? demanda le blond en déposant sa cape sur le dossier du sofa.

— Chéri ?

— Hein ? Pardon, tu disais ? J'étais perdu dans mes pensées...

— Je te demandais à quoi tu pensais, dit Malefoy en allumant un candélabre du bout de sa baguette magique. Tu as fait ta ronde avec Ron, alors on n'a pas pu discuter...

Harry soupira et alla s'asseoir à son bureau.

— Je pensais à Gabriel, dit-il.

— Gabriel ? Mais... Harry, on avait convenu...

— Oui, je sais, mais je n'arrive pas à l'oublier, je...

Le brun secoua la tête. Malefoy posa une main sur son épaule puis annonça qu'il allait se coucher, qu'il n'avait aucune envie de parler de son fils enlevé à la naissance, même si l'envie ne lui manquait pas de retrouver Steller et de le découper en petits cubes...

Avant-dernière semaine de juin. Alexandre était rentré depuis un peu moins de trois jours de Paris, après un nouveau saut près de l'endroit où se terrait Steller et le bébé volé. Avec Hermione et Harry, ils avaient convenu de ne pas précipiter les choses, d'attendre que Steller fasse une erreur quelconque pour pouvoir récupérer le bébé volé, mais les jours passaient, les semaines, sans que rien ne se passe.

Ce jour-là, profitant que les élèves de Poudlard passaient leurs BUSEs et ASPICs, Malefoy, Harry et Ron débarquèrent chez Hermione, à Londres, sans prévenir, faisant sursauter la jeune femme tranquillement installée dans le sofa, son fils dormant dans un couffin posé à côté d'elle, sur le sol.

— Mais qu'est-ce que vous faites ici, les garçons ? s'étonna la jeune femme, le cœur affolé. Vous ne devriez pas être en examens ?

— Lupin, Rogue et Bibine surveillent très bien les élèves tout seuls, dit Harry. Alexandre est là ?

— Oui, en haut, pourquoi... ?

Harry lui fit alors un signe de tête et la jeune femme alla au pied de l'escalier et appela son compagnon qui descendit, vêtu d'un jean et d'un T-shirt un peu déformé taché de peinture.

— On te dérange ? demanda Harry.

— Mais... non, pas du tout, j'étais en train de faire la chambre d'Andrew, mais je dois attendre que la peinture sèche... s'étonna le jeune Moldu. Qu'est-ce que vous faites ici ? Si j'ai bonne mémoire, c'est la semaine des examens à Poudlard...

— Oui, répondit Drago. Mais je ne peux plus supporter de savoir mon fils si près de moi. Je sais que vous nous avez dit d'attendre que Steller fasse une erreur, mais je n'en peux plus, maintenant... Ça fait des semaines ! Imaginez une seconde que ce soit Andrew à la place de Gabriel, je...

Malefoy serra les mâchoires et Harry posa une main sur son bras. Hermione invita alors tout le monde à s'asseoir au salon et Alexandre raconta son dernier voyage à Paris et comment il avait espionné Steller et la femme qui s'occupait du bébé volé.

Quand il avait annoncé, la première fois, qu'il avait retrouvé Steller et que celui-ci vivait dans un appartement avec une femme et une petite fille de quelques semaines, Drago avait immédiatement voulu transplaner jusque là-bas et arracher son enfant à cet homme. Heureusement, Harry l'avait raisonné en disant que ça ne servait à rien de se précipiter, qu'il fallait laisser à Steller le temps de se sentir en confiance et d'être sûr que plus personne ne cherchait le bébé...

Quand Alexandre se tut, Malefoy était nerveux.

— Attend, attend, dit Alexandre. Il est hors de question que vous alliez à Paris tous les trois. Steller pourrait prendre peur s'enfuir en transplanant et vous ne retrouveriez alors probablement pas Gabriel. D'autant plus qu'il le cache sous l'apparence d'une petite fille, comme je l'ai dit, donc j'imagine qu'il doit masquer ses pouvoirs magiques d'une quelconque façon et...

— Une petite fille... marmonna alors Drago. Mais quel odieux personnage ! Mon petit Gabriel... en fille... !

— Du calme, dit Harry en lui prenant les mains. On va le lui reprendre, on va récupérer ton fils, je te le jure, mais tu dois être patient, Alexandre à raison, il...

— Non ! s'exclama alors Malefoy. Ne jure pas ! Ça porte malheur !

D'abord surpris, Harry se tourna vers Alexandre et celui-ci dû se résigner. Il donna donc tout ce qu'il savait sur l'immeuble rue St-Honorée où Steller avait trouvé refuge. Il leur donna aussi la gourmette subtilisée au bébé, quelques jours en arrière, alors qu'il avait suivi la Nourrice dans un parc, ainsi que la clé de l'appartement qu'il avait finalement loué dans cet immeuble afin de pouvoir mieux surveiller les aller-venues de Steller ou du bébé. À plusieurs reprises il avait regretté de ne pas avoir sa femme, ou un sorcier sous la main, car un Moldu avait bien du mal à suivre un sorcier, surtout si celui-ci utilisait des sortilèges pour se grimer...

Il fut donc décidé que des vacances à Paris s'imposaient, mais c'était sans compter qu'il restait encore un peu plus d'une semaine de cours avant les vacances, temps bien trop long au goût de Malefoy...

— On ne peut pas faire autrement, dit Harry à son compagnon quand ils furent de retour à Poudlard. Cette semaine, nous devons surveiller les ASPICs et les BUSEs de nos matières respectives et la semaine prochaine les corriger. Nous ne pourrons donc pas aller à Paris avant le premier juillet.

— C'est trop loin... gémit le blond.

— Je suis désolé, mon amour, mais c'est comme ça, dit Harry, un peu excédé. Et puis, Steller ne se doutera de rien parce qu'il ne connait pas Alexandre. Et puis, songe donc qu'on passera plus inaperçu en arrivant un premier juillet qu'au milieu du mois de juin. Les vacances ne sont réellement commencées qu'au début de juillet, et les étrangers affluent alors à Paris. Nous ne détonnerons pas parmi eux... L'appartement est au nom d'Alexandre Greenwald, nous serons en sous-location, et c'est parfait pour dix jours de vacances.

Malefoy baissa le nez et serra les mâchoires, paraissant déçu, mais Harry ne bougea pas de son grand fauteuil où il avait pris place en vue de répondre au courrier de la journée.

— Et ce n'est pas la peine de faire cette tête, dit-il en rassemblant un paquet de lettres. Tu ne me feras pas changer d'avis...

Le blond grogna alors quelque chose puis monta à l'étage et Harry entendit la trappe de sa chambre se refermer. Il posa la lettre qu'il avait dans les mains et soupira. Il haussa ensuite les épaules et entreprit de passer le reste de la journée à ranger son bureau.

Dans sa chambre, Malefoy ruminait, allongé sur son lit, les bras derrière la tête. Il savait que Harry avait autant envie que lui de retrouver Gabriel, mais il ne comprenait pas pourquoi son compagnon ne laissait pas parler son cœur au lieu de sa raison.

Se tournant sur le ventre, Drago observa sa chambre. Décorée de vert et argent et arborant, sur un mur, un grand drapeau rectangulaire où se déplaçait tranquillement un grand serpent argenté, il l'aimait bien.

Depuis la naissance désastreuse de Gabriel, il passait toutes ses nuits ici, ayant prétexté le chagrin pour déserter le lit « conjugal » et Harry n'avait pas insisté, surtout depuis qu'ils savaient que le bébé était vivant et qu'il avait été tout simplement enlevé par un Mangemort sans scrupules... Rogue y était même allé de sa théorie en osant prétendre que Steller envisageait très certainement un avenir très sombre pour ce bébé fait de pure magie, et dans tous les esprits, le titre de Seigneur Noir avait fait son chemin...

Quatre mois, presque cinq à présent, s'étaient écoulés depuis la naissance de l'enfant et les deux amants n'avaient pas partagé le lit de l'autre une seule fois durant tout ce temps.

Étrangement, en pensant à cela, Drago réalisa que l'amour avec Harry ne lui manquait pas trop. Certes, il y avait des nuits où, s'il n'avait pas été doté d'une puissante raison, il se serait jeté sur le brun et lui aurait fait l'amour comme un sauvage, mais il y avait aussi des nuits où il était content de pouvoir s'étaler dans la soie argentée de ses draps, de pouvoir prendre toute la place et toutes les couvertures...

Le lendemain mercredi, le matin, Harry surveillait un BUSE de Potions tandis que son compagnon finissait de corriger des ASPICs, du moins une partie, à la Tour Sud. Quand il eu terminé, aux alentours de onze heures du matin, il descendit et rejoignit les cachots, le paquet de parchemins sous le bras. Malgré le caractère important de ce qu'il avait corrigé, Rogue lui faisait entièrement confiance pour pré-évaluer les copies. Il repassait ensuite dessus, vérifiait si son Assistant avait surestimé les réponses de l'élève, puis il donnait la note finale. Cette pratique était courante depuis quelques années, et McGonagall et Dumbledore avaient été forcés de reconnaître qu'en octroyant des Assistants à certains professeurs, ils avaient de ce fait automatiquement moins de travail.

Malefoy entra dans la salle de classe vide de Rogue et déposa les parchemins sur le bureau de l'homme, absorbé dans ses propres corrections, avant de s'éloigner vers des étagères.

— Drago, est-ce que tout va bien ? demanda soudain Rogue en regardant son élève s'intéresser aux bocaux contenant diverses créatures flottant dans du formol. Drago ?

Malefoy regarda son professeur puis baissa la tête en la secouant.

— Non, professeur, dit-il sincèrement. Mon fils me manque et si je ne dépendais pas d'Harry, je serais déjà allé l'arracher à cette pourriture de Steller... !

— Drago, dit Rogue en se levant de son grand fauteuil professoral. Ne vous faites pas tant de soucis, si Potter préfère attendre encore c'est qu'il a une raison, et je le connais aussi bien que vous, je sais qu'il ne fait plus les choses sans réfléchir.

— Si vous le dites, dit Malefoy. Mais Gabriel va avoir cinq mois et je ne l'ai toujours pas vu... C'est pourtant moi qui l'ai porté pendant un peu plus de sept mois et c'est encore moi qui l'ai mis au monde !

— Écoutez, dit Rogue. Cet enfant, c'est le vôtre, il va encore rester entre quinze et vingt ans dans vos pattes et vous aurez tout le temps pour rattraper le temps qui vous a été volé durant ces cinq derniers mois, croyez-moi.

Malefoy soupira et Rogue lui donna une tape sur l'épaule avant de retourner à son bureau. Malefoy, lui, quitta la salle de classe et sortit dans le parc.

Plusieurs élèves étaient là, en ce mercredi après-midi, à prendre le soleil et à aérer leurs neurones avant de les remettre en route pour les BUSEs et les ASPICs du lendemain.

Soupirant, le Serpentard décida alors de longer le lac et s'arrêta à quelques mètres du Saule Cogneur, suffisamment loin de lui cependant pour ne pas prendre un coup de branche. Un oiseau passant trop près se fit cependant coincer et le couic ! qui en résultat fit remonter l'estomac du blond qui se détourna et s'éloigna. Il s'assit au bord de l'eau et regarda quelques élèves donner du pain au poulpe géant qui flottait entre deux eaux.

— Gabriel... soupira-t-il en regardant la surface de l'eau, claire au bord puis de plus en sombre au fur et à mesure que le fond s'éloignait de la surface.

Il regarda ensuite le ciel et une ombre se profila au-dessus de lui. Il sursauta violemment et se retourna pour voir le propriétaire de l'ombre. C'était le professeur McGonagall.

— Professeur, dit le blond. Vous m'avez fichu une de ces trouilles...

— Veuillez m'excuser, mon garçon, répondit la vieille femme. Ce n'était pas mon intention. Dites-moi, vous semblez bien pensif... Quelque chose vous tracasse ?

— Oui, le fait de savoir mon fils à portée de main et de ne rien avoir le droit de faire ! grogna Malefoy.

McGonagall s'approcha alors du bord du lac, les mains jointes devant elle, et observa le Calamar un moment avant de pivoter vers le blond.

— Votre fils est proche, oui, Drago, dit-elle. Mais Harry préfère jouer la carte de la prudence et il a raison.

— Vous trouvez ?

— Oui, dit McGonagall. Tout comme vous, il a envie de retrouver cet enfant, mais si jamais lui ou vous, vous précipitiez à Paris, le Docteur Steller prendra peur et pliera bagages si vite que vous n'aurez même pas le temps de le suivre ! Tout sera alors à refaire et le temps sera encore plus long et pourrait se compter en années, cette fois... Prenez votre mal en patience, Drago, votre fils vous sera rendu, j'en suis certaine.

— Si vous le dites, soupira le Serpentard.

La vieille femme lui sourit puis elle s'éloigna vers un groupe de Serdaigles qui taquinaient le poulpe avec de longs bâtons. Drago la regarda les sermonner puis les inviter à aller jouer plus loin, ce qu'ils firent non sans bougonner.

Dans son bureau, tout au sommet de sa tour, Harry retourna le dernier parchemin des ASPICs qu'il avait eu à faire, à la main et sans avoir recours à la magie. Il avait eu besoin de sa changer un peu les idées, et à présent, il était tard... Il soupira et massa son poignet douloureux puis attrapa un verre posé au sommet du bureau et vida le fond de scotch qui s'y trouvait, puis il le reposa et se frotta le visage.

— Terminé, soupira-t-il en prenant le paquet de parchemins et en en tapant le bas sur le bureau pour tous les mettre d'aplomb.

Il les noua ensuite avec un lien de cuir puis il se leva et quitta la Tour Sud, direction le bureau de Lupin afin de remettre les copies pour qu'il repasse dessus et mette les notes finales. En chemin, il songea à celui-ci et à sa copine louve. Il espérait vraiment que Marina allait pouvoir lui parler, au moins à lui, et apprendre à lui faire confiance.

Tout ce qu'il savait jusqu'à maintenant, c'est qu'elle avait toujours été seule pour gérer ses transformations, que ses parents l'avaient rapidement mise de côté après qu'elle ait été griffée par un loup, une nuit de pleine lune alors qu'elle rentrait du lycée... Et c'était il y a près de vingt ans maintenant, sinon plus...

Harry se demanda alors comment on pouvait continuer à vivre une fois qu'on avait été rejeté par sa famille. Marina avait beaucoup de mérite d'avoir réussi à gérer son loup tout en continuant à vivre comme une sorcière normale, sans jamais se faire prendre par les autres ou les Moldus. Il espérait donc que son parrain pourrait enfin espérer être heureux avec une femme qui savait dans quelle galère il vivait depuis qu'il était adolescent...

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