Chapitre 39

Aaron était tranquillement posé comme à son habitude sur son lit, son casque sur les oreilles diffusant une musique électro à fond. Bouger la tête au rythme de la chanson était sa seule activité du week-end et même de la semaine depuis l'incident...

Ne voulant pas penser à ça, le jeune homme augmenta encore le volume déjà presque au maximum et se perdit dans le rythme endiablé qui s'enchaînait dans ses oreilles. Il n'entendit pas sa sœur rentrer à la maison jusqu'à ce que la porte d'entrée claque violemment.

Aaron regarda autour de lui, un peu hébété, comme s'il venait de se réveiller. Pourtant, il n'avait pas bougé. Il était toujours dans sa chambre où des vêtements jonchaient au sol, où la seule lumière qui filtrait était celle de la petite fenêtre située à l'autre bout de la pièce et où le peu de meuble qui l'arrangeaient étaient anciens et semblaient avoir été gribouillés par un petit enfant.

- Wow, tu ne peux pas faire doucement? Cria-t-il en direction de sa sœur.

Seul le claquement de la porte de sa chambre lui répondit. Aaron soupira : c'était devenu assez tendu avec Eva depuis quelques années. Pourtant avant, ils se disaient tout, partageant de bons moments ensemble, étant toujours si proches. Ils avaient pourtant assez peu d'âge de différence : Aaron ne comprenait pas comment ils en étaient arrivés là.

Il revint à sa musique, s'abandonnant aux paroles qui défilaient à une vitesse effarante, sans qu'il puisse réellement les comprendre. Aaron aimait cela : s'échapper pendant un court moment du monde qui l'entoure, oublier ses problèmes et ne penser à rien.

Il entendit arriver sa sœur avant de la voir. Elle resta plantée devant lui le dévisageant d'un air presque inquiet. Soudain, sans prévenir, elle prit son casque et le balança violemment à travers la pièce, coupant ainsi court à la musique qu'Aaron écoutait.

-Non mais Eva tu es folle ou quoi ? Qu'est-ce que je t'ai fait ? La questionna-t-il, complètement abasourdie.

-Demande-toi plutôt ce que tu as fait à Lina, lâcha-t-elle avec un regard plein de dédain.

Il ne répondit pas.

-Et réponds moi quand je te parle ! Se mit-elle à hurler. Non mais comment tu as pu l'abandonner comme ça Aaron, comment ?! Je savais que tu étais un lâche, ça oui, mais au point d'abandonner ton amie se retrouvant avec deux bébés à cause de qui ?! Non mais t'es complètement inconscient en plus, tu mets plus de capote maintenant ?

Elle s'interrompit le temps de reprendre son souffle avant de lâcher finalement :

-Je te préviens Aaron : si tu ne fais rien et que tu refuses d'assumer tes actes, c'est bien la dernière conversation que nous aurons !

-Parce que tu crois que j'ai voulu de tout ça moi ? Parce que tu crois que je l'ai fait exprès ? Réagit enfin le jeune garçon en se levant à son tour. Lina c'était juste pour un soir, elle est vachement belle et c'était l'occasion. Comment j'aurais pu deviner que ça allait finir comme ça, après juste une fois ?

-Et comment vas-tu le dire aux parents hein ? Le questionna-t-elle d'un air triomphant. Parce que je ne pense pas qu'ils vont être spécialement heureux d'apprendre qu'ils sont grands-parents non ?

-Alors écoute-moi bien Eva, lui ordonna-t-il de sa voix grave et ferme. Ce ne sont PAS tes affaires ! Je n'ai jamais voulu de ces bébés et je n'en voudrai jamais ! Tu comprends ça ?

-Ah parce que tu crois que Lina en a voulu elle de ces enfants ?! Non mais réveilles toi Aaron : ok vous vous êtes mis tous les deux dans cette merde mais tu sais ce qui est injuste ? C'est que Lina, elle, n'a pas eu beaucoup le choix et pour l'instant c'est elle qui est en train d'assumer vos bêtises toute seule !

-Je te l'ai dit : Lina c'était juste pour un soir, rien de plus, répondit-il brusquement. Maintenant c'est fini. Laisse moi tranquille.

-Tu me dégoûtes Aaron, lança simplement sa sœur en le toisant d'un air de profonde repulsion.

Et Eva tourna les talons pour aller s'enfermer dans sa chambre, prenant bien soin de claquer la porte de manière tout à fait audible, reflétant ainsi ses pensées.



Lina revint chez elle peu après avoir croisé Eva : elle se sentait si mal. Pour ne rien arranger, cela faisait depuis un bon moment que Louis et Lindsey faisaient un concours de celui qui crierait le plus fort, n'arrangeant rien à l'humeur déjà massacrante de leur mère.

Lorsque ses parents la virent passer le pas de la porte, poussant la poussette à l'intérieur avec difficulté, l'air complètement exténuée, aucun des deux ne fit de commentaire. Seul Eden se précipita vers elle pour accueillir sa petite maîtresse. Lina laissa la poussette dans un coin, prit Louis dans ses bras et jeta un coup d'œil à sa mère, attendant une aide quelconque. Celle-ci était plongée dans son livre, jetant de petits regards à sa fille qui essayait de se débrouiller seule. Véronique savait qu'elle ne pourrait pas monter les deux bébés en même temps : elle soupira.

Lina leva les yeux au ciel : alors ça c'était la meilleure ! Elle monta déposer Louis dans son lit, redescendit les escaliers en faisant le plus de bruits possibles et remonta avec Lindsey et le sac qu'elle mit sur l'épaule. En s'éloignant, elle entendit des chuchotements étouffés : et c'était reparti ! Les disputes parentales reprenaient...

Lina détestait plus que tout entendre Véronique et Grégoire se disputer. Ces derniers temps c'était de plus en plus fréquent et la jeune fille savait que la nouvelle situation n'arrangeait rien.

Après avoir enfin réussi à endormir les bébés, Lina se précipita dans la salle de bains : une bonne et longue douche chaude, voilà ce qu'il lui fallait.

J'ai vraiment tout fait foirer, murmura-t-elle pour elle-même en appréciant le mince filet d'eau chaude qui coulait le long de son corps. J'ai couché avec un garçon que je n'aime pas parce que j'étais ivre, j'ai perdu l'homme que j'aime, j'ai bouleversé mes études et mon futur et maintenant je vais faire divorcer mes parents. Vraiment Lina, je crois que tu bats des records...

En sortant de la douche, relaxée et détendue, Lina se rendit dans sa chambre et s'effondra sur son grand lit. Elle appréciait particulièrement le confort des beaux draps rouges en satin qui recouvraient le matelas, leur chaleur et surtout leur douceur. La jeune fille avait l'impression d'être protégée lorsqu'elle était emmitouflée dans ceux-ci, comme un petit enfant cherchant du réconfort auprès de ses peluches, croyant que rien ne peut lui arriver tant qu'elles sont là près de lui.

A travers le plancher lui parvenaient tout de même des bribes de conversations de l'étage inférieur, troublant le calme de l'habitat :

« Et comment on va faire maintenant hein ? C'est toi qui avais dit qu'on trouverait une solution ! Grondait Véronique. Et voilà que tu dois partir pour 2 semaines à l'autre bout du monde. Non mais Greg tu crois vraiment que c'est le moment ?

Lina entendit un soupir.

-Je sais Véro, j'ai essayé de déplacer mais ils refusent, c'était prévu depuis longtemps. Et puis tu n'as qu'à chercher aussi ce n'est pas à moi de tout faire non plus ! Et puis tu aurais quand même pu un minimum préparer le coup non...

Sa voix se perdit dans la grande maison des Fenton.

-Qu'est-ce que tu insinues ? Demanda Mme Fenton d'une voix si faussement innocente que Lina sut aussitôt que ça allait barder. Tu es en train de dire que j'aurais dû me rendre compte de quelque chose c'est ça ?

Pas de réponse.

-Ah mais alors ça c'est la meilleure ! Non mais tu crois vraiment que j'aurais imaginé une seule seconde que ma fille unique allait être mise en cloque à 16 ans ? Et puis si tu étais un peu plus souvent à la maison tu l'aurais peut-être remarqué toi, se mit-elle à crier.

Lina enfouit sa tête dans son coussin. Elle ne voulait plus rien entendre.

Le soir, après un repas pris dans le silence le plus complet, Grégoire prit enfin la parole :

-Euh Lina ? Commença-t-il en s'éclaircissant la gorge. Nous voulions te dire que dès lundi tu retourneras au lycée.

Lina baissa la tête.

-Il faut que tu y retournes chérie... l'encouragea sa mère. C'est important de faire des études, d'avoir un diplôme ; sinon tu auras beaucoup de mal à trouver un travail et je veux que tu puisses gagner ta vie plus tard. Nous avons trouvé une solution pour Lindsey et Louis : mamy les gardera et tu pourras passer les chercher en rentrant du lycée. De plus, elle va essayer de jouer de ses relations pour leur trouver une place en crèche pour l'année prochaine, mais rien n'est garanti. C'est de plus en plus dur de nos jours.

Les parents fixaient leur fille d'un air enthousiaste, espérant la faire esquisser ne serait-ce qu'un petit sourire. Lina releva alors la tête, scotcha un grand sourire sur sa figure que la fatigue avait pâli et les remercia gentiment.

C'était si gentil de leur part. Ils se démenaient à cause d'elle et elle n'était même pas capable d'en profiter ! Elle était consciente de ne leur apporter que des problèmes...

Elle adorait sa grand-mère : Lina était sûre qu'elle s'en occuperait très bien, ayant travaillé avec des enfants toute sa vie. Mais bon... cela voulait dire qu'elle devrait retourner au lycée dans deux jours et affronter le regard des autres.

Et cela, c'était au-dessus de ses forces.

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