Partie 3 : A l'aube d'un nouveau jour

   La lumière. Une lumière éclatante pénétrait par les carreaux. Saijo entrouvrit les yeux avant de les couvrir avec son bras pour se cacher de cette agression. Il dut attendre qu'ils s'habituent pour se relever et regarder autour de lui. Il était dans une chambre lumineuse aux murs bleus clairs et plafond étoilé en dôme, couché sur un lit aux draps blancs et couvertures vermeilles. Un second lit renfermait son jumeau endormi. Un sourire se forma sur le visage de Saijo, il se leva lentement mais se stoppa en entendant quelqu'un arriver à la porte. Une femme d'une vingtaine d'années accompagnée d'une fillette de quatre ans environ la passèrent et virent le garçon se transformer : il était redevenu une bête sauvage blessée, protégeant ses biens. Le jeune homme avait brisé un bol et tenait un morceau de porcelaine qui faisait couler son propre sang. Il était prêt à en découdre. Il voulait protéger Sao mais son corps refusait. La douleur au niveau de son dos et de ses plaies lui coupa les jambes, le faisant tomber. La plus vieille courut vers lui.

- Eh ! Ne bouge pas ! dit-elle avec inquiétude.

   Elle lui retira le morceau des mains avant qu'il ne puisse réagir. Les mains de Saijo tremblèrent et couvrirent sa tête par peur d'être frappé de nouveau. Il avait peur des adultes. Ils le terrifiaient. Se recroquevillant sur lui même, il émit une plainte craintive. Ce fut la petite qui parvint à l'approcher.

- On ne va pas te faire de mal. Détends-toi...

   Une énergie blanche et chaude enveloppa l'enfant : elle était rassurante, tel une mère aimante.

Saijo...

   Le murmure de la fillette interloqua l'enfant qui leva lentement la tête.

- Qui...

   Le mot lui arracha la gorge en sortant. Il était assoiffé. Il continua, ignorant sa douleur.

- Qui es-tu?

   Sa voix était éraillée, épuisée, sèche. La blondinette sourit et s'empara d'un verre d'eau avant de le lui tendre.

- Mon nom est Tsuki. Bois, tu dois avoir soif.

   Hésitant, Saijo finit par prendre et boire à grandes gorgées le liquide. Tsuki sourit et lui servit un second verre qu'il but aussi vite.

- Pourquoi sommes-nous là, Sao et moi ? demanda le garçon après un long silence. Vous n'allez pas nous frapper ? Si vous voulez punir quelqu'un, laissez Sao tranquille ! C'est moi le responsable des vols et... du malheur. Je suis le porte-malheur, ce n'est pas mon frère, il est innocent. Je...

- Du calme, personne ne sera puni, dit la gouvernante lentement. Tu n'es pas un porte-malheur, et si tu as volé, c'est uniquement pour vous nourrir et vous vêtir. Maintenant, il faut que tu te recouches.

   Elle le souleva avec tendresse et le déposa comme on pose un cristal précieux sur un coussin. Elle lui sourit.

- Madame...

- Appelle moi Nounou.

- Nounou... Où sommes-nous ?

- Tu es chez moi, dit Tsuki, à l'école de chevalerie. Tu ne risques rien ici, les villageois ne vous embêteront pas puisque mon père est le chef du village.

   Les yeux de Saijo s'emplirent de larmes pour la première fois depuis longtemps. Son calvaire était terminé, il n'aurait plus à craindre de voir son frère mourir, le Diable et l'Ange étaient sauvés. Ils allaient pouvoir avoir une vie normale, sans peur du lendemain. Une vie d'enfant.

- Ne pleure pas... dit Sophia en le prenant dans ses bras.

- Merci... Merci... répétait Saijo sans pouvoir s'arrêter.

   Il passa dix bonnes minutes à pleurer avant de parvenir à se calmer. Sophia le lâcha et se leva.

- Je dois retourner voir Orion pour lui dire comment tu vas. Tsuki, tu veux rester avec eux ?

- Oh oui !

- D'accord mais ne fais pas trop de bruit, Sao dort. Il a besoin de récupérer, avec tout ce qu'il s'est passé cette nuit.

- D'accord Nounou !

   La jeune femme quitta la chambre et ferma la porte. Tsuki se tourna vers Saijo : le petit garçon la fixait, un sourire timide aux lèvres. Ses cheveux noirs, qui descendaient jusqu'à ses épaules, étaient en bataille, le faisant ressembler à un lion sombre aux yeux rouges. Il était pâle, pas très grand et son visage présentait des traits fatigués. Tsuki, quant à elle, avait une bouille adorable sur laquelle trônaient de longs cheveux blonds ondulés qui descendaient jusqu'à ses reins. Ses yeux bleus nuit contrastaient avec ses lèvres roses claires.

   Elle brisa le silence en s'asseyant sur le lit de Saijo.

- Tu as quel âge ?

   Il compta sur ses doigts.

Cinq... Six. J'ai six ans, comme mon frère. Et toi ?

- Quatre ans. Dis... c'est quoi ton don ?

- Un quoi ?

   Elle le regarda avec un air surpris.

- Tu ne sais pas ce que c'est ?

- Non...

   Il baissa la tête tandis qu'elle se rapprochait de lui. Elle sourit en prenant doucement ses mains dans les siennes.

- Je vais te montrer.

   La peur du petit se lisait dans son regard mais il finit par prendre confiance. La même lumière blanche se propagea en lui et ses plaies se refermèrent. Il ne sentit que des chatouilles et des papillons sur ce qui n'étaient plus que des cicatrices. Les mains de la fillette le lâchèrent.

- Mon don est de soigner les gens. Selon papa, je suis comme la déesse de la lune. C'est pour ça que je m'appelle Tsuki. Ça veut «Lune» en japonais. Et toi ? Pourquoi tu t'appelles Saijo ?

- Je ne sais pas ... Je me souviens juste que la voix et Sao m'ont toujours appelés comme ça.

- La voix ?

- Oui, dans mon cauchemar.

- Tu fais des cauchemars ?

   Le garçon sembla souffrir tout à coup. Ce fut violent, en un instant, il se mit à convulser après être tombé au sol. La petite paniqua. Son don ne fonctionnait pas.

- A l'aide !

- Saijo !

   Sao s'était réveillé et se trouvait juste à côté de son jumeau. Il était inquiet comme Tsuki.

- Saijo ! Reprends-toi ! Ne le laisse pas faire !

   Les paroles de Sao avaient l'air de l'atteindre : ses convulsions se calmèrent peu à peu avant de s'arrêter totalement. Sa douleur l'avait quitté, il n'était pas apaisé mais presque.

- Qu'est-ce qu'il lui arrive...?

- C'est la voix. A chaque fois qu'il parle d'elle, elle lui provoque de grosses migraines jusqu'à ce qu'il convulse ainsi...

   Une aura noire s'échappa du garçon couché et se dissipa dans l'air tel un nuage de fumée. Ses paupières s'ouvrirent sur ses yeux rouges.

- Saijo !

- Sao... J'ai mal... IL m'a fait mal... Et IL... IL veut que je tue... IL a dit que je vous tuerai tous...

   Il fondit en larmes. Sao le prit contre lui et caressa ses cheveux.

- C'est faux, tu ne feras rien de ce qu'IL a dit.

- Comment tu le sais...?

  Un sourire se forma sur le visage de l'aîné qui le rassura d'un geste fraternel.

- Tu es mon jumeau, je sais que tu n'es pas un monstre, que tu ne feras pas le mal. La déesse de la Lune veille sur nous. Il ne nous arrivera jamais rien.

   Les sanglots du petit se firent de moins en moins présent jusqu'à n'être plus que des soubresauts. Tsuki les prit dans ses frêles petits bras.

- Elle veille sur vous et moi aussi...

- Merci Tsuki.

   Orion entra dans la chambre avec fracas et se précipita vers les enfants.

- Que s'est-il passé ?!

- Tout va bien, papa... C'était Saijo.

   Elle sortit avec son père de la pièce et referma la porte derrière eux. Saijo se leva lentement avant de manquer s'effondrer mais Sao le rattrapa.

- Reposons-nous.

    Le benjamin acquiesça. Ils se recouchèrent tous les deux l'un contre l'autre et s'endormirent.

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    La troisième partie, beaucoup plus longue cette fois ^^ j'espère qu'elle vous plaira, bonne lecture ^^

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