Partie IV - Chapitre 9

Chapitre 9

Lily tira les couvertures à elle. Il faisait terriblement froid. La pièce sentait le renfermé. Quelque chose clochait. L'esprit embrumé par le manque de sommeil, elle parvint à soulever ses paupières lourdes et contempla le damas bleu nuit du lit à baldaquin.

Godric's Hollow.

Elle se redressa brusquement, jeta un coup d'œil affolé à la place vide près d'elle, puis au lit d'Harry, vide lui aussi. Dans sa panique, elle s'emmêla les jambes dans les draps et il lui fallut un temps fou pour s'extirper du lit. Elle sortit en courant de sa chambre, le cœur battant à tout rompre, dérapa dans les escaliers et évita la chute de justesse. Parvenue saine et sauve au rez-de-chaussée, elle tourna sur elle-même au milieu du salon tout en appelant son mari.

- Lily ?

Elle se retourna vivement et vit enfin James, qui se tenait dans l'encadrement de la porte, une poêle pleine de pancakes à la main. Il la dévisageait, l'air confus.

- Harry ? balbutia-t-elle. Où... où est-il ? Il n'était pas dans son lit, où...

- Juste là. Dans la cuisine.

Il s'écarta un peu et Lily vit effectivement son fils, allongé dans son transat.

- Oh, Merlin.

Elle vacilla et dut s'appuyer sur le canapé pour ne pas tomber. James, toujours aussi perplexe, tendit sa poêle vers elle et proposa faiblement :

- Un pancake ?

Sans tenir compte de son intervention, Lily s'assit sur le dossier du canapé et appuya un instant ses paumes sur ses yeux.

- J'ai cru qu'il vous était arrivé quelque chose.

- Oh, ne t'en fais pas, je t'aurais réveillée si on était sur le point de mourir.

- James ! gémit-elle. Ce n'est pas drôle !

- Désolé. Je suis trop fatigué pour savoir ce qu'il est approprié de dire ou non.

Lily releva la tête et détailla le visage de James. Derrière ses lunettes on pouvait distinguer de larges cernes. Il était pâle et un pli soucieux barrait toujours son front. Il passa sa main libre dans ses cheveux avant de lui adresser un petit sourire.

- Pancake ? réitéra-t-il.

- James, pose les stupides pancakes et fais-moi un câlin.

Il s'exécuta avec un petit sourire. Lily glissa une main dans ses cheveux, les yeux fermés, et inspira profondément. Elle sentait le cœur de James battre à un rythme régulier contre ses côtes. Apaisée, elle déposa un baiser dans sa nuque. Elle put entendre le sourire dans sa voix lorsqu'il demanda :

- Ça va mieux ?

Elle le repoussa légèrement pour le regarder.

- Mieux. Pas bien, mais mieux.

- Je sais, grimaça-t-il. Tu vas voir, mes pancakes te feront progresser vers le « bien ». Rajoute un câlin avec Harry par-dessus et on y est presque.

Lily caressa du pouce sa joue couverte d'un début de barbe, l'ombre d'un sourire sur les lèvres. Elle l'embrassa brièvement puis s'échappa de son étreinte pour aller attraper la poêle, posée sur la table basse. De retour dans la cuisine, elle s'accroupit pour déposer un baiser sur le crâne de son fils, qui contemplait le carrelage d'un air fasciné. Elle devait s'efforcer d'être calme pour lui. Pour l'avoir déjà expérimenté durant les semaines précédentes, lorsque James tardait à rentrer, elle savait que Harry était capable de sentir son inquiétude et chouinait alors sans arrêt. Merlin en soit remercié, il ne s'était jamais réellement réveillé durant la nuit précédente. Maintenant qu'ils étaient installés, cachés, et Harry bien réveillé, Lily se devait de maîtriser son inquiétude. La première étape pour ce faire était d'accepter de le perdre de vue.

- Quelle heure est-il ? interrogea-t-elle en se redressant.

- Pas loin de onze heures, répondit James en apportant l'assiette pleine de pancakes sur la table.

- Oh, Merlin, tu as un peu dormi quand même ? s'écria-t-elle, horrifiée, tout en attrapant un pancake tiède.

- Deux heures, à peu de choses près. Harry s'est réveillé un peu avant sept heures.

- Merci de t'être occupé de lui.

- Pour être tout à fait honnête, je n'ai pas très bien dormi. Ce n'est pas très grave puisque je vais pouvoir faire la sieste cet après-midi ! C'est fabuleux d'être en vacances.

Lily attrapa la cafetière et s'installa en face de lui. Elle lutta contre l'envie de répondre que ce n'était en rien des vacances, que c'était affreux, et Merlin qu'allait-il faire de leur temps ?, et répondit plutôt :

- Tu vas enfin pouvoir donner son bain à Harry.

James renonça à mordre dans son pancake pour lui adresser un regard désespéré.

- Mais Lily ! J'ai peur de le laisser glisser !

- Je te montrerai comment on fait. Ce n'est pas si compliqué. Et tu n'as plus aucune excuse pour y échapper !

- Ma peur de noyer notre bébé n'est pas suffisante ?

- Absolument pas.

Il grommela et se servit une tasse de café, qui n'était sans doute pas la première.

- Très bien. Mais je ne change pas sa couche de la journée.

- Merlin, tu es vraiment un bébé. Vendu.

Satisfait, James entama enfin son pancake puis reprit, la bouche pleine :

- Il faut qu'on demande à Peter d'aller voir Bathilda.

- On ne peut pas faire ça, elle saura que c'est le gardien. Il faut qu'il lui écrive l'adresse et que quelqu'un d'autre lui remette le message.

James déglutit bruyamment et dit, les yeux fixés sur le petit Harry :

- Je déteste l'idée de devoir mentir à tant de gens. Surtout à tant d'amis.

- Je sais. Moi aussi.

- Est-ce qu'on peut le dire à Remus ?

- James... Sirius ne devrait même pas être au courant.

- Il a volontairement accepté de servir de leurre, je pense qu'on peut difficilement lui retirer le droit de savoir, fit-il remarquer d'un ton un peu sec.

- C'est vrai. Il n'empêche qu'on ne peut rien dire à Remus. Ni à Margaret, ni à Bathilda. Nous sommes quatre à savoir qui est le gardien du secret et c'est bien suffisant.

- Mais les Maraudeurs...

- On n'est plus à Poudlard !

Ils se figèrent tous deux, aussi pris de court l'un que l'autre par son éclat de voix. Comme s'il percevait la tension entre ses parents, Harry se mit à pleurer au même instant. Lily s'empressa de le prendre dans ses bras et fit quelques pas dans la cuisine sans oser regarder James. Finalement, elle lança :

- Excuse-moi. Je n'aurais pas dû te parler comme ça.

- Pas grave, marmonna-t-il.

Il fixait les tourbillons créés dans sa tasse de café par la rotation de sa cuillère. Lily voyait à sa mâchoire crispée qu'il était énervé. Elle était cependant à peu près sûre que ce n'était pas contre elle.

- On va demander à Peter de passer voir Bathilda, dit-elle doucement.

- Ouais.

- Il faut qu'on voie comment on va s'organiser. On ne peut pas sortir faire des courses, et on ne peut pas franchement se faire livrer. On va sans doute devoir passer par elle.

- Hmm.

- Où est-ce que tu as trouvé les ingrédients pour les pancakes, d'ailleurs ?

- Je me suis débrouillé avec les denrées non périssables qui restaient ici.

- Malin, ce garçon.

Cette remarque lui arracha un petit sourire. Il se leva alors et vint enlacer sa femme et son fils.

- Ça va être difficile, murmura-t-il.

- Est-ce que tu ne disais pas que la seule chose qui compte c'est qu'on soit à l'abri ?

- Ça l'était cette nuit. Maintenant je suis redevenu moins paniqué et plus égoïste.

- Pas grave. Je t'aime quand même.

Il rit doucement et reprit sa place à la table du petit-déjeuner avant de s'exclamer :

- Devine ce qu'il y a dans les pancakes !

Lily se rassit en face de lui, Harry dans ses bras, et commença à énumérer une liste d'ingrédients tout en s'attendant au pire.

***

La mission assignée à Margaret n'était censée durer que de minuit à huit heures du matin. Elle ne rentra finalement au QG qu'à treize heures bien tassées. Épuisée, elle monta au deuxième étage sans prendre la peine d'avaler quelque chose. Elle jeta un coup d'œil machinal dans la chambre de Lily et James, dont la porte avait été laissée béante. Son attention fut attirée par l'absence du lit de Harry, qu'on voyait normalement lorsque le battant était ouvert de la sorte. Intriguée malgré son épuisement, elle fit un pas à l'intérieur de la pièce, tout en frappant sur le panneau de bois.

L'écho de son coup résonna dans la pièce vide. Bouche bée, elle considéra l'armoire grande ouverte qui laissait voir ses entrailles vides, tout comme les tiroirs de la commode. Le secrétaire avait été débarrassé de son amas habituel de parchemins. Nul jouet, couche ou petit chausson ne traînait plus sur le tapis élimé.

Lily et James étaient partis.

Ce qui n'avait strictement aucun sens. James était rentré de mission la veille, avant qu'elle-même ne parte. Margaret avait passé l'après-midi avec Lily et Harry, et son amie n'avait manifesté nulle intention de quitter le QG dans l'immédiat. Elle savait qu'ils avaient pour projet de se trouver une maison bien à eux dans un avenir proche mais aux dernières nouvelles ils n'avaient même pas entrepris de recherche. Bien que l'idée lui semblât absurde, elle se sentit blessée que Lily ait quitté ainsi le QG sans lui en faire part.

La jeune femme sortit à reculons de la pièce vide, à présent aussi triste que fatiguée. Lily était sa plus proche amie. Elle adorait passer ses moments de détente au QG avec elle – encore plus depuis l'arrivée du petit Harry, qui était un bébé si mignon. Rien ne serait plus comme avant maintenant qu'elle était partie.

- Maggy ?

Elle se retourna lentement pour faire face à Remus, qui semblait aussi épuisé qu'elle. Il jeta un coup d'œil dans la chambre vide puis lui adressa un sourire triste.

- Viens, je vais t'expliquer.

- Alors il y a une explication ? s'exclama-t-elle tandis que la boule qui lui serrait le ventre se dénouait un peu. Ils ne sont pas juste partis sans prévenir personne parce qu'ils ne nous aiment plus ?

- Oh, Merlin, bien sûr que non ! répondit-il tout en l'entraînant dans sa chambre, où il la fit asseoir dans un fauteuil devant la cheminée. Ils n'auraient jamais fait une chose pareille.

- Tu les a vus ?

- Non, mais Sirius oui. C'est lui qui m'a expliqué. Ça paraît un peu absurde mais... C'est suffisamment vraisemblable aux yeux de Lily et James pour qu'ils aient tout quitté.

- Dans ce cas, il faut sans doute leur faire confiance, dit doucement Margaret.

Remus hocha la tête, installé dans le fauteuil jumeau, puis expliqua prudemment :

- Il y aurait apparemment eu une prophétie, qui désigne Harry comme une menace pour Voldemort. Il a donc décidé de les traquer.

- Pa... Pardon ? balbutia-t-elle. Harry ? Bébé Harry ? Quatre kilos, cinquante-cinq centimètres ? Ce Harry ?

- Je sais, c'est absurde, admit-il en haussant les épaules.

- Quel est le texte de la prophétie ?

- Je ne sais pas.

De plus en plus confuse, Margaret appuya son front contre sa main.

- Tu as dit qu'ils avaient tout quitté... Où sont-ils ?

- Je ne sais pas non plus.

- Quoi ? s'exclama-t-elle en se redressant. Mais Sirius...

- M'a dit qu'il pourrait sans doute m'en dire plus bientôt mais que c'était tout ce qu'il pouvait me donner comme information pour le moment.

- C'est complètement dingue, cette histoire.

- Pourtant il paraît que c'est vrai.

- Comment savent-ils qu'on les traque ?

- Dumbledore.

- Evidemment, marmonna-t-elle. Alors il a juste débarqué comme ça, leur a annoncé qu'on voulait les tuer et ils ont décidé de plier bagage ?

Remus haussa une nouvelle fois les épaules.

- Je sais, ça paraît aberrant. Il faut croire qu'il y avait de vraies bonnes raisons. Plus tangibles qu'une bête prophétie.

- Comment vont-ils faire pour l'Ordre ?

- Je ne sais pas, répéta-t-il une troisième fois. Sirius non plus.

- Est-ce qu'on va les revoir ?

Le visage de Remus se contracta légèrement et c'est d'une voix étouffée qu'il répondit :

- J'espère.

Il avait l'air si perdu, si blessé par cet abandon que Margaret ne put que mettre sa propre incompréhension de côté. Elle tendit la main pour lui frotter l'épaule et dit doucement :

- Je suis sûre que oui. J'imagine qu'ils sont en sécurité maintenant. Il faut se concentrer là-dessus.

- Ouais, tu as sans doute raison. Ça fait juste un drôle d'effet. J'ai l'impression qu'ils sont morts.

- Remus !

- Quoi, c'est vrai ! La seule raison pour laquelle une chambre se retrouve désertée comme ça c'est que quelqu'un est mort. Je déteste ça.

Il se leva sur ces derniers mots et alla se planter devant la cheminée. Après un instant d'hésitation, Margaret quitta son siège et l'enlaça, la joue pressée contre son dos. Elle ne tint pas compte de son mouvement de surprise et répondit :

- Moi aussi. Il faut faire confiance à Sirius, il t'a dit qu'il t'en dirait bientôt plus, non ? D'ici quelques jours c'est sans doute Lily et James qui nous expliqueront tout ça eux-mêmes.

- Sans doute, soupira-t-il avant de se dégager de son étreinte.

Il se retourna, les joues rouges, et passa sa main dans ses cheveux. Margaret retint un sourire attendri.

- Maintenant, si tu veux bien m'excuser, je vais aller me coucher. Je suis épuisée.

- Tu fais bien. Gideon veut parler à toutes les personnes disponibles dans dix minutes, va te cacher avant d'être coincée pour trois heures dans la salle de réunion !

Margaret fila sans demander son reste.

***

Peter était en avance pour la réunion annoncée par Gideon deux heures plus tôt. Il avait mal entendu et était arrivé trente minutes trop tôt. Ce n'était pas vraiment sa faute : il avait un mal fou à se concentrer depuis qu'il était devenu le gardien du secret de Lily et James. Comme cela faisait moins de vingt-quatre heures, il espérait que la situation allait finir par s'arranger.

Assis à un bout de la table, il gravait des formes géométriques sur le bois à l'aide de sa baguette, qui fumait légèrement. Il aimait ce genre d'occupation. Cela lui permettait de ne pas penser. Moins il pensait, moins l'image de l'Homme s'imposait à son esprit.

L'Homme, c'était le Mangemort qui le hantait – littéralement. Il le retrouvait partout, toujours à des endroits, à des heures inattendues. Il ne lui demandait jamais rien de précis ; Peter pouvait choisir ce qu'il allait dire. Pour le moment, l'Homme se contentait de petites informations sans trop d'importance. Il assurait toujours que ce serait la dernière fois. Peter ignorait à quel moment il avait cessé de le croire, et à quel moment il avait compris qu'il ne pouvait plus s'en sortir sans perdre la vie, la liberté, ou l'estime de tous ses amis. Sans doute à peu près au moment où il avait réalisé que le camp des Mangemorts était plus fort que le leur. Il détestait cette idée, mais il l'avait admise. C'étaient les faits.

Sa baguette dérapa et creusa un profond sillon dans le bois, assorti d'une petite flamme. Peter s'empressa de l'éteindre, le cœur battant un peu plus vite après cette petite décharge d'adrénaline. Il aurait eu l'air malin s'il avait mis le feu à la table. Alors qu'il contemplait la trace de brûlure, il songea que ce petit incident était assez similaire à sa situation actuelle. Il laissait derrière lui le sillon calciné mais presque invisible de sa trahison... Puis viendrait un jour où il se retournerait pour se rendre compte qu'il avait déclenché un incendie. La question était de savoir s'il serait du côté des flammes ou bien en sûreté. Il ne savait même pas de quel côté il voulait être.

Épouvanté par cette idée, il recula bruyamment sa chaise et entreprit de faire les cent pas dans la pièce. Il ne voulait pas être sauvé. S'il déclenchait une catastrophe, il mériterait de payer. Merlin, s'il trahissait Lily et James...

Sa baguette lui échappa des mains alors qu'il fixait le parc dégoulinant de pluie le voir. Il n'aurait pas à trahir. L'Homme ne saurait jamais qu'il était le gardien. Il allait continuer à donner des informations sans conséquence. Ce n'était pas si grave. Il n'y aurait pas d'incendie, jamais. Il allait protéger Lily et James. Avec l'Ordre, ils allaient gagner la guerre. S'en sortir. Tout irait bien.

Peter sursauta violemment lorsque la porte alla claquer contre le mur. Gideon fit son entrée, rapidement suivi de William et Remus. Ils discutaient avec animation du départ de Lily et James. Peter ramassa sa baguette et alla s'asseoir près d'eux. Officiellement, il avait été mis au courant en même temps que Remus. Alors que William s'exclamait une nouvelle fois que ça n'avait aucun sens, Gideon abattit sa main sur la table et rugit :

- On s'en fiche ! Je ne veux plus entendre parler de cette histoire ! On a d'autres choses à faire que de s'occuper de la vie des Potter !

William se renfonça dans son siège en grommelant, Remus afficha un air contrit et Peter continua à jouer avec sa baguette tout en tentant de cacher à quel point Gideon le terrifiait. Satisfait du calme revenu, celui-ci reprit :

- Bien. C'est vraiment tout ce qu'on peut rassembler dans ce QG ?

- Tout le monde est en mission, fit remarquer William d'un ton morne.

- C'est aussi bien. Avec James en moins, il va falloir mettre les bouchées doubles.

- Tu dis ça comme si James faisait le même nombre de missions que trois personnes.

- Non. Je dis simplement que nos effectifs se réduisent de plus en plus et que rien qu'une personne en moins, c'est un sacré handicap. Potter avait pour habitude de couvrir le secteur centre-est pour les patrouilles de contrôle, quelqu'un peut prendre le relais là-dessus ?

Peter s'empressa de lever la main. Les patrouilles de contrôle étaient faciles. Ils quadrillaient méthodiquement le territoire de quelques districts pendant toute une semaine, la plupart du temps sans jamais rien croiser d'inhabituel. C'étaient les missions préférées de Peter, même si c'étaient les plus ennuyeuses.

- Parfait, marmotta Gideon tout en griffonnant quelques mots sur un bout de parchemin. Tu commences ce soir. Il devait participer à la réception du chef de brigade de la gendarmerie magique française, demain après-midi. Lupin ?

- Je suis réquisitionné au Ministère.

- Je prends ta place au Ministère, si tu veux, s'empressa de proposer William.

- Et pourquoi ne pas directement prendre la mission de Potter ? releva Gideon avec un brin de sarcasme.

William rougit tandis que Remus et Peter ricanaient. Alors qu'il allait accepter à contre-cœur, Remus intervint et échangea sa garde avec lui.

- Hardley, tu te retrouves donc en mission de nuit dans trois jours pour une exfiltration par bateau.

- Ça a un rapport avec l'arrivée du chef de brigade ? interrogea-t-il.

- Tu verras bien, répondit brièvement Gideon. Merlin, Potter aimait prévoir ses missions à l'avance. Dites à tous ceux que vous croiserez que j'ai du boulot pour eux. Désolé les enfants mais je crois qu'on va pouvoir passer aux journées à trente-six heures.

- C'est déjà le cas la plupart du temps, fit remarquer Remus. Ça fait des semaines qu'on enchaîne.

- Envie de te plaindre auprès du syndicat, Lupin ? Fais gaffe, c'est Maugrey le président.

William s'esclaffa, inconscient de tout tant qu'il était assuré de voir Carrie le lendemain.

- Très amusant, marmonna Remus.

- Je trouve aussi. Si vous voyez Margaret, dites-lui qu'on va avoir besoin d'un renouvellement du stock de potions. Evans était censée s'y coller.

- Elle ne peut pas le faire depuis là où elle est ? demanda Peter.

Gideon braqua son regard perçant sur lui.

- Si tu sais où la trouver, je t'en prie va lui demander. On m'a dit de ne plus compter sur eux, c'est ce que je fais.

Peter hocha la tête, les joues rouges. Remus le fixait avec attention. Dès que Gideon eut quitté la pièce, il interrogea avidement :

- Tu sais où ils sont ?

- Merlin, non, répondit-il d'une voix qui ne tremblait pas. Mais Sirius a l'air de dire qu'on va bientôt avoir de leurs nouvelles, alors...

Remus marmonna quelque chose qui ressemblait à « marre d'entendre toujours la même chose » puis quitta la pièce sans dire un mot. William adressa un regard perplexe à Peter.

- Il a l'air un peu sur les nerfs.

Peter se passa machinalement la main dans les cheveux avant de répondre :

- C'est juste que... c'est une première dans l'histoire des Maraudeurs. Ça fait des années qu'on vit au même endroit, qu'on se dit tout... Alors que James soit parti comme ça, sans un mot, ça fait un drôle d'effet.

William hocha la tête avec un sourire compatissant avant de se lever à son tour pour lui asséner une tape sur l'épaule.

- Allez, je suis sûre qu'ils vont bientôt se manifester.

Peter le regarda partir en songeant que Remus avait bien raison. Il attendit une dizaine de minutes puis quitta le QG pour se rendre à Godric's Hollow, fier de cette première journée passé sans que personne ne le soupçonne. Il devenait très bon en mensonge. Peut-être trop.

***

- Rien à faire Lily, la chaudière ne fonctionne pas !

James, allongé sous la dite-chaudière, attendit en vain une réponse de sa femme. Avec un grognement, il jeta sa clef à molette et s'extirpa tant bien que mal de dessous la machinerie. Agacé et couvert de poussière, il considéra l'objet de ses soucis avec un regard noir. Ce problème de chaudière l'avait empêché de donner son bain à Harry, de se laver, mais aussi de faire la sieste. Il avait essayé tout ce qu'il pouvait, armé d'outils moldus, mais rien n'y faisait. Il allait devoir recourir à la magie, seulement il n'y connaissait rien en sorts de bricolage. Il avait peur de faire exploser la maison.

- Lily ! appela-t-il à nouveau.

Comme il n'obtenait toujours aucune réponse, il s'extirpa du minuscule réduit où se trouvait la chaudière et gagna le salon, où il trouva Lily en grande conversation avec Peter.

- Lily, gémit-il. Tu m'as abandonné !

Sa femme se retourna pour lui adresser un sourire contrit alors que Peter lui faisait un petit signe de la main.

- La chaudière est toujours aussi récalcitrante ?

- Ouais. Notre dernier espoir est Bathilda ; si mes souvenirs sont bons c'est une vraie mécano. Sinon on se lavera à l'eau froide.

- Vous ne pouvez pas réchauffer l'eau à l'aide de la magie ? releva Peter.

Lily et James le dévisagèrent, atterrés. Cette idée ne leur avait pas traversé l'esprit un seul instant. James vint s'échouer à côté d'eux sur le canapé et s'affala sur sa femme.

- Trop de fatigue, gémit-il.

Elle tapota sa tête puis résuma pour lui :

- On est en train de chercher comment donner l'adresser à Bathilda sans que ce soit Peter qui aille lui donner.

- Envoie ta chouette, grommela-t-il. Je doute qu'elle soit interceptée entre la maison et celle de Tilda.

- Certes. Je fais ça tout de suite.

Lily se leva souplement, sans se soucier de son mari qui s'écrasa sur le canapé.

- Hé ! protesta-t-il, sans obtenir aucune réponse, si ce n'est un gloussement amusé de la part de Peter.

Il se redressa en grommelant et interrogea :

- Comment ils ont pris la chose, au QG ?

- Nos amis sont assez perplexes... Je crois que Remus a vraiment besoin de vous voir. Gideon s'en fiche. Ah, il aimerait que Lily continue à faire des potions.

- Ça doit pouvoir se faire, si on nous envoie les ingrédients et les ustensiles nécessaires. Papa avait pas mal de matériel mais pas autant que ce qu'on avait au QG.

- Je vais voir ça, assura Peter.

- Et toi ? Ça va ?

Le petit blond haussa les épaules, l'ébauche d'un sourire sur le visage.

- Fatigué, comme tout le monde.

- Mais par rapport au secret, et...

- Ça va, coupa-t-il. Je t'assure que ça va. J'ai été un peu pris de court cette nuit, mais maintenant ça va.

James scruta un moment son regard, à la recherche du moindre signe de détresse, mais il semblait serein.

- Très bien. Encore merci, Queudver.

Son ami lui asséna une petite tape sur l'épaule avant de brandir sa plume et son parchemin.

- Alors, à qui est-ce que vous voulez donner l'adresse ?

Tandis qu'ils planifiaient la façon dont ils allaient pouvoir faire venir leurs amis à Godric's Hollow, la porte d'entrée s'ouvrit soudain. Bathilda fit irruption dans le salon avant même que James n'ait eu le temps de tirer sa baguette de sa poche.

- Petit Jamie !

Mû par les réflexes acquis grâce à l'Ordre, il leva tout de même sa baguette vers elle et interrogea sèchement :

- Qu'est-ce que tu me reproches toujours de faire quand j'entre chez toi ?

- Taper sur ce pauvre crapaud, répondit-elle avec une pointe d'agacement dans la voix. Tu m'as demandé de venir et c'est comme ça que tu m'accueilles ? Oh, tiens, salut Peter !

James rangea sa baguette et lui adressa un sourire un peu crispé.

- Excuse-moi. La situation est un peu tendue. Assieds-toi, tu veux ?

Alors qu'il lui expliquait tant bien que mal ce qu'il s'était passé, Lily fit à son tour son entrée dans le salon, Harry dans les bras. Bathilda cessa aussitôt de l'écouter et bondit vers la jeune femme, qui l'enlaça en riant. Le bébé se mit à pleurer, et la vieille femme s'empressa de le prendre contre elle.

- En fait, tu t'en fiches de ce que j'ai à te dire ? commenta James.

- Vous êtes en sûreté ici et vous avez besoin que je fasse les courses pour vous, c'est tout ce que j'ai retenu.

- C'est suffisant, pouffa Lily, qui semblait aux anges depuis qu'elle avait vu Bathilda.

James secoua la tête, aussi atterré qu'amusé. Sirius arriva une heure plus tard, des sacs de provisions dans les mains. Il passa une partie de la soirée avec eux, tout comme Bathilda. Peter dut les quitter rapidement pour assurer sa patrouille de nuit. Pour James et Lily, ce fut durant quelques heures comme si rien n'avait changé. Lorsque Sirius et Bathilda les quittèrent, le silence retomba sur la maison mais James s'y sentait déjà plus à l'aise.

Une fois la vaisselle faite, il trouva sa femme assise devant la cheminée où achevaient de se consumer quelques bûches, perdue dans ses pensées. Elle avait été gaie toute la soirée mais à présent son visage n'exprimait que la détresse. Il s'assit près d'elle et elle lui adressa un petit sourire triste.

- Désolé, je n'ai pas de chocolat chaud.

- Hein ?

Il rit face à son air perplexe et passa un bras autour de ses épaules.

- Tu ne te rappelles pas ? Début janvier 1978, après une épique bataille de boules de neige...

- Oh, Merlin, souffla-t-elle en rejetant la tête en arrière avec un petit rire. Ça me paraît tellement lointain.

- Ça ne fait même pas trois ans.

- On est complètement fous. Par Morgane, on s'est mariés alors qu'on était ensemble depuis moins d'un an et demi.

- C'est vrai que quand y réfléchit bien, c'est un peu fou, commenta-t-il. Je me demande pourquoi nos parents nous ont laissé faire.

- Parce qu'on est tous les deux très bornés ?

- Probablement.

Il déposa un baiser sur sa tempe puis lui fit un clin d'œil.

- Mais je ne regrette rien.

Elle lui sourit tendrement avant de l'embrasser.

- Ça aussi, ça me semble familier, murmura-t-il.

- James, la ferme.

- Si on voulait vraiment recréer cette soirée on devrait s'arrêter d'ici quelques sec...

Lily l'embrassa à nouveau pour l'empêcher de continuer. Ils basculèrent sur le tapis en pouffant comme des adolescents. Les bûches eurent beau craquer, ils ne se séparèrent pas.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top