Partie III - Chapitre 54

Chapitre 54

James roula sur le côté, à mi-chemin entre la veille et le sommeil. La sensation de vide à ses côtés força son corps à s'éloigner de l'inconscience et il grommela vaguement. Comme personne ne lui répondait, il ouvrit un œil. Il commençait tout juste à faire jour et Lily n'était pas là.

Une inquiétude soudaine le propulsa en position assise. Lily n'était tout de même pas partie en mission ? Saisi par cet affreux soupçon, il se leva en hâte, se prit les pieds dans les draps et s'écroula par terre en faisant un bruit de tous les diables.

- Aïe, marmonna-t-il, la joue pressée contre le tapis.

Il roula sur le dos en tâchant d'ignorer la douleur qui se répandait dans le bras sur lequel il s'était rattrapé et entreprit de se relever. Alors qu'il sortait avec précaution ses jambes des couvertures, la porte s'ouvrit et livra passage à une Lily qui traînait des pieds.

- Tu es là ! S'exclama-t-il, soulagé.

- Mmmh.

- Ça va ?

- Non.

- Qu'est-ce que...

Elle se laissa tomber sur le lit.

- Les joies de la grossesse.

- Oh. Euh...

Avant d'éclaircir cette déclaration, James jugea préférable de remettre les couvertures sur le lit et d'en couvrir sa femme, qui s'enroula dedans sans même avoir remarqué que le tout – James y compris – s'était retrouvé à terre. Il entreprit ensuite de réanimer le feu dans la cheminée. Alors qu'il s'y efforçait, Lily demanda d'une voix étouffée :

- C'est toi qui as fait tomber quelque chose ?

- Oui. Moi-même.

Elle pouffa. Au moins réussissait-il à la faire rire, même à ses dépens.

- Bravo.

Le bois s'enflamma joyeusement et James se redressa.

- Ça va aller, pour nous rendre à Godric's Hollow ?

- Je suis enceinte James, pas gravement malade.

- En attendant tu es enfouie au fin fond d'un lit après m'avoir dit que ça n'allait pas, rétorqua-t-il en allant s'asseoir sur le bord du lit.

- Je suis enceinte James, répéta-t-elle, sa couverture remontée jusqu'au nez, ne te fie pas à ce que je raconte.

- Est-ce que tu comptes commencer toutes tes phrases comme ça maintenant ?

- Dès que j'aurai besoin de me justifier, oui.

- Tu profites de ton état, Lily-Jolie.

Elle sortit un peu son visage pour lui sourire, les yeux plissés.

- C'est bien possible.

Comme Lily ne semblait pas décidée à bouger, il se glissa à nouveau sous les couvertures. Comme d'habitude, elle colla ses pieds gelés contre ses jambes. Comme d'habitude, James ne fit aucun commentaire.

- Est-ce que Maugrey a fini par te dire à quoi il te destinait ? Interrogea-t-il alors qu'elle se calait contre lui avec un soupir d'aise – aise que sa question fit s'évaporer aussitôt.

- Oui, mais je te le dirai plus tard, répondit-elle finalement. Ça ne va pas te plaire.

- Alors dis-le moi tout de suite.

- Je n'ai pas envie que tu sois en colère chez ton père.

- Si tu ne me le dis pas je vais m'inquiéter, Papa le verra, tu devras cracher le morceau et on se disputera au milieu de son salon.

Elle le fusilla du regard dans la lumière croissante du jour.

- Ce qui m'agace le plus c'est que je sais que tu as raison, marmonna-t-elle.

- Alors ?

Elle soupira profondément avant de s'expliquer :

- Je vais me faire passer pour une assistante au Ministère. Maugrey a besoin d'une oreille, de quelqu'un qui n'éveillera pas la méfiance. Je dois me faire passer pour une bête petite secrétaire qui se chargera d'apporter le café – apparemment c'est trop demander à ces Sorciers d'utiliser leur baguette pour avoir une tasse. Il espère que tu me prêteras ta cape pour que je laisse mes oreilles traîner là où elles ne devraient pas pendant mes heures de pause.

Elle se tut finalement mais James ne répondit rien, trop sidéré. Comment diable l'Auror avait-il pu penser que cela fonctionnerait ?

- James ?

- C'est... stupide, articula-t-il finalement. Il y a certainement des gens de Poudlard qui travaillent là-bas et qui te reconnaîtront, et puis comment est-ce que tu vas justifier ta grossesse ? Et si tu es découverte ? Tu...

- Eh, calme-toi. Je vais changer d'apparence pour l'occasion...

- Quoi ?

- ... Et j'arrêterai dès que je ne pourrai plus cacher mon ventre.

- C'est hors de question.

- N'essaie même pas de me dire ce que je dois faire. Ça ne servira qu'à m'énerver.

- Mais c'est dangereux et...

- Bien sûr que non.

Ses yeux verts brillaient d'une lueur dangereuse. Ne trouvant pas d'argument valable, James préféra se taire.

- Je dois commencer le 2 janvier, reprit Lily. A partir de là j'aurai mon logement à Londres et on ne pourra pas se voir afin de ne pas mettre en danger ma couverture.

James se redressa avant de lancer d'une voix sèche :

- Il fallait le dire si tu en avais assez de moi.

Elle s'assit à son tour pour répondre :

- Tu sais bien que ça n'a aucun rapport. J'obéis aux ordres, c'est tout.

- Mais...

- James, on a besoin de moi là-bas. Qu'est-ce que tu veux que je fasse d'autre, de toute façon ? Les stocks de potion ne s'épuisent pas si vite que ça et Maugrey pourra bientôt se débrouiller tout seul pour sa rééducation, au rythme où il va.

Toujours en proie à un sentiment de trahison, il refusait de la regarder.

- Tu pourrais rester ici. Avec moi.

- Je doute que ça dure plus d'un mois, soupira-t-elle. Tu crois vraiment que je ne préférerais pas passer ma grossesse auprès de mon mari ?

Il se décida finalement à tourner les yeux vers elle, l'observa une bonne minute puis demanda :

- Comment est-ce qu'il compte te déguiser ?

- On se disait que je pourrais me teindre les cheveux et les couper.

- Non !

Surprise par sa véhémence, elle se recula légèrement.

- Hein ?

- Pas tes cheveux, gémit-il.

L'air agacé qui était peint sur le visage de Lily depuis plusieurs minutes disparut soudainement alors qu'elle riait tendrement, quoi qu'avec une once d'incrédulité.

- J'ignorais que tu étais aussi attaché à mes cheveux.

- Quiconque s'approchera de toi avec des ciseaux devra d'abord me passer sur le corps, grommela-t-il avant de se laisser à nouveau tomber sur le dos dans le lit. Merlin, rien ne va dans cette affaire !

- Peut-être, mais ça va se passer comme ça. Alors si tu veux faire la tête, libre à toi, mais je m'en vais dans quinze jours. Et j'irai déjeuner toute seule avec ton père.

- Eh, le sang d'abord, il me laissera entrer plutôt que toi.

- Je suis enceinte de son petit-enfant alors nous partageons les mêmes liens du sang, rétorqua-t-elle en lui donnant une pichenette sur le nez. Ne cherche pas, tu ne peux rien contre une femme enceinte.

- Je te déteste.

- C'est faux.

Il soupira profondément.

- Malheureusement pour moi, c'est toi qui as raison.

Elle sourit et, cette fois, au lieu de le frapper, lui donna un baiser.

- Alors on peut se préparer pour aller déjeuner avec ton père ?

***

Remus était rien moins qu'à l'aise avec l'idée de ne plus œuvrer dans l'anonymat. Les yeux fixés sur l'enseigne de la Gazette qui se balançait dans le vent du froid de décembre, il serra le parchemin qui se trouvait au fond de sa poche et prit une profonde inspiration. Tout ce qu'il lui fallait faire était entrer là-dedans, donner son parchemin et quelques mornilles.

Il traversa la rue et poussa la porte. Dans la petite pièce lambrissée, une Sorcière entre deux âges à l'air jovial travaillait en chantonnant. Remus s'approcha du comptoir, le regard attiré par les unes de journaux qui tapissaient les murs. La Sorcière dut toussoter pour qu'il reporte son attention sur elle.

- Je peux vous aider ? Offrit-elle.

- J'aimerais publier ça, s'il-vous-plaît, expliqua-t-il en tendant le parchemin.

La femme le déroula et admira le phœnix qui y était dessiné.

- C'est très impressionnant ! C'est vous qui l'avez fait ?

- Non, un ami. Je vous dois combien ?

Remus paya le prix annoncé tout en observant le mur derrière la réceptionniste : une porte menait probablement à la rédaction de la Gazette. Encore derrière devait se trouver les presses.

- Tout est bon, annonça la Sorcière en le regardant bizarrement.

Le jeune homme revint à la réalité, gêné de s'être attardé sans raison. Il quitta l'établissement, non sans repérer l'emplacement des fenêtres. Après avoir fermé la porte, il fit quelques pas, s'engagea dans la ruelle qui bordait les locaux de la Gazette et passa à genoux sous la fenêtre. Une fois sûr qu'on ne pouvait le voir de la rue, il utilisa un sort de Désillusion et attendit.

Il fallut dix minutes à l'homme pour sortir. Il marchait d'un pas nonchalant, les mains enfoncées dans les poches de sa cape. Remus s'était lui-même déplacé de la sorte assez souvent pour savoir qu'il serrait probablement sa baguette entre ses doigts. Il sortit donc de la ruelle et entreprit de suivre l'homme. De temps en temps, celui-ci se hissait sur la pointe des pieds pour voir au-dessus de la tête des quelques passants qui se trouvaient là. Ils gagnèrent la ruelle principale du Chemin de Traverse, retrouvant ainsi une foule un peu plus dense. Sans doute découragé par ce fait, l'homme s'arrêta, fouilla un instant la masse du regard puis pivota sur ses talons. Remus put alors distinguer son visage : la trentaine tout au plus, les cheveux châtains, les pommettes hautes. Sans doute aurait-il eu l'air altier sans la peur qui semblait tapie au fond de ses yeux verts. Yeux qui étaient justement fixés sur Remus.

Le jeune homme jura intérieurement tout en baissant les yeux sur son corps. Il était toujours invisible, mais sa présence était perceptible, sans doute à cause de la façon dont les rayons du soleil jouaient sur une vitre.

Les deux hommes se dévisagèrent quelques instants. Le sortilège de dissipa brusquement alors que Remus se préparait mentalement à l'attaque. L'homme sursauta lorsqu'il apparut pleinement ; seulement, il sursauta en brandissant sa baguette.

Remus para sans difficulté mais fut trop long à répondre ; un autre sortilège l'obligea à faire un pas de côté. Il se morigéna tout bas : il n'avait pas le droit de se sentir désolé pour cet homme qui n'était visiblement pas un Mangemort. S'il l'avait attaqué, c'était qu'il travaillait pour Voldemort. Il n'y avait rien d'autre à savoir. Maugrey l'avait prévenu que cela risquait d'arriver et lui avait donné un ordre simple : l'arrêter et l'empêcher de continuer à servir de taupe à la Gazette.

Il tenta donc un sortilège de Stupéfixion mais sa cible se jeta au sol et une pauvre Sorcière aux bras chargés de sac s'écroula à la place. Remus jura, tout haut cette fois-ci, et chargea l'homme. Celui-ci, occupé à se relever, poussa un cri de surprise qui s'acheva en gargouillement lorsqu'il se trouva immobilisé au sol par la magie. C'est seulement alors que Remus se rendit compte de la cohue qu'ils avaient créé ; des gens de la Gazette couraient partout, des Sorciers aidaient la victime collatérale – qui allait apparemment bien –, et quelqu'un revenait en courant, un agent de la Brigade Magique sur les talons. Remus grogna : au moins avait-il réussi à attirer l'attention sur lui.

Tout en s'assurant que sa victime était bien immobilisée, il se redressa et attendit que l'agent de la Brigade arrive jusqu'à lui.

- Qu'est-ce que ce bazar ? Vociféra-t-il en lui postillonnant copieusement dessus.

- Je... je travaille pour l'Ordre du Phénix, répondit Remus en se frottant la nuque, tout en s'obligeant à hausser la voix sur la fin de sa phrase. Cet homme travaillait pour les Mangemorts.

Un « Oh ! » scandalisé traversa la foule alors que quelques employés de la Gazette hurlaient au scandale.

L'homme de la Brigade tortilla sa moustache d'un air perplexe. Il jeta un coup d'œil à l'homme incriminé, puis à Remus.

- L'Ordre du Phénix ? C'est un racontar.

Sans mot dire, Remus lui tendit un parchemin signé de la main de Maugrey et de Minchum. C'était son contrat de recrutement – dont il n'avait appris l'existence que deux jours auparavant. Il était à peu près certain que Maugrey avait juste copié la signature du Ministre. Cependant, cela suffit à impressionner l'agent, qui le lui rendit avec un petit hochement de tête.

- Je vais devoir vous demander de m'accompagner pour que vous me disiez d'où viennent vos soupçons sur cet homme.

Remus, qui n'avait pas prévu qu'il devrait se justifier, paniqua légèrement.

- Ah vraiment ? Articula-t-il d'une voix un peu trop aiguë.

Un mouvement dans la foule attira son attention : la femme qu'il avait frappé par erreur était en train de se relever, aidée par une autre Sorcière. Plantant là le brigadier, il se précipita vers elle pour se répandre en excuses. Du coin de l'œil, il vit le brigadier se pencher pour examiner l'homme à terre. Sur une dernière excuse, Remus lâcha la main de la Sorcière rouge de confusion et s'enfonça dans la foule sans tenir compte des murmures étonnés. Le temps que le brigadier se mette à crier, il avait transplané.

***

Lily, les mains enfoncées dans les poches de sa cape, inhala une bouffée d'air froid tout à fait bienvenue. La nausée qui l'avait taraudée toute la matinée sembla enfin disparaître. Elle jeta un coup d'œil vers la porte mais James ne semblait pas décidé à sortir. Ils allaient encore être en retard à Godric's Hollow.

Alors qu'elle commençait à faire les cent pas pour se réchauffer, une silhouette fit son apparition à la grille. Quelques pas en avant lui permirent de reconnaître Remus, qui semblait passablement perturbé. Inquiète, Lily s'avança à sa rencontre.

- Remus ? Tout va bien ?

Le jeune homme chassa les mèches de cheveux qui lui tombaient sur le front avec un petit sourire fatigué.

- Très bien. J'ai juste failli être emmené au poste.

C'était si inattendu que Lily se mit à rire.

- Au poste ? Poste de police moldue, tu veux dire ?

- La Brigade Magique. Tu crois que je vais recevoir un hibou du Ministère pour délit de fuite ?

- Tu veux dire, comme quand quelqu'un faisait de la magie hors de Poudlard ?

Il hocha la tête d'un air si misérable que Lily rit à nouveau, quoi que sans moquerie.

- Je ne pense pas. De toute façon, nous avons plus ou moins tous les droits.

Il lui sourit timidement.

- Espérons. Où est-ce que tu vas ?

- On va annoncer la nouvelle à Fleamont – enfin, si James se décide à venir.

Le sourire de Remus s'adoucit et ses yeux papillonnèrent un bref instant jusqu'au ventre de Lily. Les gens avaient beaucoup trop tendance à faire ce genre de choses, depuis quelques temps.

- Je suis tellement content pour vous, dit-il, sans doute pour la cinquième fois depuis dix jours. Voir votre famille se construire, c'est vraiment...

Ne trouvant pas de mot adéquat, il lui pressa simplement la main. Lily n'arrêtait pas de se demander si l'émotion visible de Remus à chaque fois qu'il était question de ce bébé ne venait pas du fait qu'il s'interdisait l'espoir d'avoir un jour une famille. A chaque fois, elle se promettait qu'elle mettrait son bébé dans les bras du lycanthrope le plus souvent possible.

- James arrive, l'informa-t-il en lâchant ses doigts. Bon appétit !

- Merci.

Lily se retourna pour regarder son mari approcher alors que Remus continuait son chemin vers le manoir. Les deux jeunes hommes échangèrent quelques mots puis James la rejoignit enfin.

- Tu en as mis un temps, râla-t-elle alors qu'il lui prenait la main.

- Quelque chose à faire, répondit-il seulement.

- Il est bientôt treize heures, fit-elle remarquer.

- Papa mange à n'importe quelle heure, rétorqua-t-il.

- Ce n'est pas une raison.

Sur ce, elle le planta là et transplana. Elle atterrit dans la forêt qui bordait Godric's Hollow, celle où James et Sirius allaient s'entraîner au Quidditch lorsqu'ils étaient encore à Poudlard. Lily sourit en se remémorant la fois où James avait menacé de la jeter dans l'étang, alors que celui-ci n'existait même pas. Elle n'arrivait pas à croire que cela était arrivé deux ans plus tôt.

Un « Crac » retentit près d'elle, la tirant de ses pensées.

- Tu es partie trop vite, grommela James tout en reprenant son équilibre.

- Parce que tu as mis trop de temps à quitter le QG, rétorqua-t-elle avant de prendre le chemin du village.

- J'avais une bonne raison ! S'écria-t-il.

Il hâta le pas pour la rattraper et lui saisit la main. Elle lui jeta un regard torve.

- N'essaie pas de m'amadouer. Tu as un problème avec la ponctualité, c'est tout.

James se contenta de marmonner en fouillant dans sa poche au lieu de fournir une réponse appropriée. Lorsqu'il eut trouvé ce qu'il cherchait, il le lui fourra sous le nez. Lily s'arrêta net, à la grande satisfaction de James. Il agita un peu plus le paquet cadeau devant son visage, jusqu'à ce qu'elle se décide à s'en saisir.

- Qu'est-ce que c'est que ça ? Noël est dans dix jours, tu sais.

Malgré son étonnement, elle ne pouvait s'empêcher d'être ravie – et surtout très curieuse.

- Ce n'est pas pour Noël.

- Ah ?

- Merlin, Lily, ouvre-le et arrête de poser des questions !

Elle lui adressa un sourire espiègle avant de s'exécuter. Le pauvre garçon avait visiblement eu un mal fou à emballer son cadeau, quoi que ce fût. Elle déchira joyeusement le papier cadeau avant de regarder avec curiosité la petite boîte noire. S'ils n'étaient pas déjà mariés, elle aurait peut-être cru qu'il la demandait en mariage. Souriant à cette idée, elle ouvrit l'écrin. Son visage s'éclaira lorsqu'elle vit la paire de boucles d'oreille qui s'y trouvait ; les émeraudes, enveloppées dans un fin filin d'or, renvoyaient le même éclat que sa bague de fiançailles.

Elle secoua la tête, sidérée par la taille des pierres.

- Elles te plaisent ? Interrogea James d'un ton ravi.

- Merlin, bien sûr qu'elles me plaisent ! Mais pourquoi ... ?

Il haussa les épaules, un tendre sourire sur les lèvres.

- Parce que tu m'offres quelque chose d'inestimable et que je n'ai pas d'autre moyen de te remercier.

- Oh, James, souffla-t-elle en posant sa main sur sa joue, ça n'a rien de...

- Si, coupa-t-il. Tu ne t'en rends peut-être pas compte parce que c'est toi qui le portes, mais je t'assure que c'est ... C'est quelque chose pour lequel je te serai éternellement reconnaissant.

Lily secoua légèrement la tête. Ce qu'elle lisait dans ses yeux la dépassait quelque peu. A vrai dire, à part lorsqu'elle était malade, elle avait du mal à réaliser qu'elle était enceinte. Ne sachant quoi répondre, elle l'embrassa.

- Tu n'aurais pas dû, souffla-t-elle.

- Je t'assure que si, répondit-il, son front pressé contre le sien.

Elle s'écarta, toujours légèrement incrédule, pour mettre les boucles d'oreille.

- Tu es trop lente, plaisanta-t-il.

- Mon adorable mari nous a déjà mis affreusement en retard en me faisant un cadeau, alors au point où j'en suis, plaisanta-t-elle.

Il lui adressa un grand sourire, fourra la boîte vide dans sa poche puis lui reprit la main pour l'entraîner à grands pas vers le village, tout en babillant gaiement sur la façon dont ils allaient l'apprendre à Fleamont.

Les rues de Godric's Hollow étaient animées, éclairées par les lumières joyeuses de décorations de Noël. Lily songeait avec nostalgie qu'ils n'auraient pas besoin, cette année, de décider s'ils passaient les fêtes avec ses parents ou ceux de James. Malgré tout, la peine était bien moins forte qu'avant – ils avaient eu trop à faire depuis la mort des Evans. Surtout, Lily avait conscience de la précarité de leur vie. A chaque mort, elle se rendait un peu plus compte à quel point leur vie ne tenait qu'à un fil. Pour cette raison, elle souhaitait passer de joyeuses fêtes auprès de sa famille, même si celle-ci n'était plus composée que de son mari, de son beau-père... et de leur bébé à naître.

Ils passèrent devant la maison de Bathilda en se promettant d'aller la voir plus tard puis remontèrent l'allée qui menait à la maison des Potter. Comme à son habitude, James entra sans frapper.

- Papa ? Appela-t-il joyeusement tout en aidant une Lily hilare à se débarrasser de sa cape.

Alors qu'il l'accrochait à la patère, des bruits de pas dans l'escalier retentirent et Fleamont fit son apparition. Il leur adressa un grand sourire, mais Lily comme James eurent du mal à le lui rendre.

Il était maigre, terriblement maigre. Ses cheveux pourtant si bruns autrefois étaient parsemés de plus en plus de gris et son teint était d'une blancheur maladive.

Il serra son fils dans ses bras sans s'apercevoir de leur malaise, puis ce fut le tour de Lily.

- Je suis content de vous voir ! S'exclama-t-il alors que les deux jeunes gens tâchaient de reprendre contenance. Ça faisait un temps fou.

- Ouais, désolé, balbutia James. On a eu quelques ennuis.

Le sourire de Fleamont fana aussitôt.

- Vous étiez à la bataille d'Inverness, n'est-ce pas ?

James hocha la tête avant de faire un signe de tête vers la cuisine :

- On peut t'aider ?

- Tu changes de sujet, grommela Fleamont.

- Pas du tout.

Fleamont passa dans la cuisine tout en ébouriffant les cheveux de son fils et entreprit de lui détailler le menu. Lily sourit ; il se mettait toujours en quatre lorsqu'ils venaient lui rendre visite. Alors qu'elle observait les deux hommes Potter, l'inquiétude grandit en elle. Fleamont n'était pas au mieux de sa forme depuis la mort de sa femme, jamais cela n'avait atteint de telles proportions. Bathilda saurait sans doute leur dire exactement comment il allait. En attendant de pouvoir lui parler, la meilleure solution était sans doute de faire comme si de rien n'était. Elle les rejoignit donc dans la cuisine, un sourire sur les lèvres.

Après le déjeuner, ils s'assirent dans le salon pour prendre un café. Ils n'avaient toujours pas annoncé la nouvelle à Fleamont ; comme d'habitude, James n'osait pas se lancer. Lily avait décidé de le laisser se débrouiller et somnolait, appuyée contre lui. Son oreille capta pourtant un bout de phrase qui la poussa à ouvrir les yeux :

- ... as mangé ta chaussette de Noël.

- J'avais neuf mois ! Protesta James.

- Il n'empêche que c'était très drôle, pouffa Fleamont.

Lily donna un coup de coude à James. Il lui répondit par un coup de genou, aussi lui donna-t-elle un nouveau coup dans le côtes. Il émit un drôle de bruit, à mi-chemin entre l'exclamation de douleur et l'éclaircissement de gorge. Satisfaite, elle attendit qu'il parle enfin.

- En parlant de bébé, papa...

Fleamont leva les yeux de son café et croisa le regard de Lily. Il écarquilla les yeux.

- Je n'ai encore rien dit ! Protesta James.

- Ta ... Ta femme est un livre ouvert, balbutia-t-il. Merlin, je...

- Est-ce que je peux au moins le dire ?

Lily leva les yeux au ciel.

- Vas-y, imbécile.

- Tais-toi, harpie, rétorqua-t-il en déposant un baiser sur le sommet de son crâne. Tes insultes ne gâcheront pas ma belle humeur, parce que nous allons avoir un bébé !

La jeune femme ne comptait plus le nombre de fois où elle l'avait entendu dire cette phrase, pourtant il parvenait à y insuffler toujours autant d'émerveillement et d'euphorie.

- Merlin, répéta Fleamont.

Il avala son café cul-sec avant de reprendre :

- Eh bien, félicitations les enfants ! Même si je dois dire que l'idée de James avec un bébé est assez terrifiante...

- Hé ! Protesta l'intéressé alors que Lily riait.

- Désolé mon garçon, mais tu n'as jamais été capable d'avoir un poisson rouge.

- Parce qu'ils ne sont pas amusants.

- Oh, Merlin, marmonna Lily en enfouissant son visage dans le pull de son mari.

- Bon courage Lily, commenta Fleamont en levant sa tasse vide vers elle.

- Vous serez mis à contribution, l'avisa-t-elle.

- A ta place j'éviterais, tu as vu comme mon seul enfant à tourner ?

- Vous êtes insupportables, siffla James. A chaque fois c'est la même chose, vous vous liguez contre moi !

- Tu es une cible si facile, plaisanta Fleamont. Pour quand est prévu le bébé ?

- Début août, dit Lily en se redressant. On en saura plus la semaine prochaine, je dois aller faire quelques examens.

Son beau-père hocha la tête, un sourire sur les lèvres. Sa surprise retombée, il semblait à présent seulement en proie à l'émotion.

- Un bébé, murmura-t-il. Cela fait si longtemps qu'il n'y a pas eu de bébé dans cette maison.

Son regard tomba sur son fils et il se resservit rapidement de café, le nez baissé. Lily ne put s'empêcher de sourire ; il était comme son fils, prêt à tout pour ne pas montrer qu'il avait envie de pleurer.

Lily et James prirent congés peu après, bien décidés à parler à Bathilda. Alors qu'ils se disaient au revoir sur le pas de la porte, Fleamont serra Lily dans ses bras et lui murmura :

- Prends bien soin de lui.

La jeune femme s'écarta, incertaine quant à ce qu'il voulait dire. Parlait-il du bébé, de James ? Mais avant qu'elle n'ait pu lui demander, il se tourna vers James, lui dit quelques mots en riant puis les poussa vers la rue.

- Filez ! Bathilda attend sans doute que vous veniez depuis que vous êtes arrivés ici.

Lily voulut résister mais James la tirait par la main. Elle finit par se laisser faire tout en se raisonnant ; Fleamont parlait certainement du bébé. Il n'y avait rien à comprendre. Elle chassa donc et événement de son esprit et se laissa écraser contre l'opulente poitrine de Bathilda, chez qui James était entré sans prendre la peine de frapper.

La Sorcière laissa enfin Lily respirer et l'observa de haut en bas, les sourcils froncés.

- On a une nouvelle pour toi, s'exclama fièrement James.

- Lily est enceinte, c'est ça ? Interrogea-t-elle d'un ton blasé qui fit se décomposer James.

- Mais comment tu l'as deviné ? Gémit-il.

Bathilda leva les yeux au ciel, les mains posées sur les hanches.

- Tout d'abord, je ne vois pas trop ce que vous auriez pu m'annoncer d'autre. Ensuite, tu as pris de la poitrine, ma chérie.

Lily devint cramoisie alors que James regardait dans la direction indiquée par Bathilda d'un air intéressé.

- Ah... Ah oui ? Balbutia la jeune femme. Peu... Peut-être.

- Quoi ? S'offusqua James. Et tu ne me l'as pas dit ?

Elle lui envoya un léger coup de poing dans l'estomac qui eut pour seule conséquence de le faire rire, ainsi que Bathilda. La vieille sorcière les entraîna dans son salon. Celui-ci n'avait pas du tout changé depuis la première fois où Lily y avait mis les pieds – pas plus que la propriétaire des lieux, d'ailleurs. Comme d'habitude, elle leur proposa un café trop fort que Lily refusa poliment en faisant croire que le café lui faisait horreur depuis qu'elle était enceinte. James n'y coupa cependant pas et lui adressa des regards meurtriers tout en sirotant l'infâme breuvage.

Il redevint pourtant bien vite sérieux pour demander à Bathilda :

- Qu'est-ce qui arrive à Papa ?

La Sorcière se rembrunit aussitôt.

- Pour être honnête, je n'en sais trop rien. Je m'assure qu'il se nourrisse correctement, et pourtant il me paraît plus maigre de jour en jour... Je crois qu'il dort à peine. Il... Il ne s'est jamais remis de la mort de ta mère, James.

Le jeune homme baissa les yeux, les mains crispées sur ses genoux.

- Je sais.

- Il est mort d'inquiétude pour vous deux, en plus. L'hiver n'aide pas non plus.

James hocha doucement la tête.

- Il est allé voir un médicomage ?

- Il s'y refuse. Il m'assure qu'il va très bien.

- C'est n'est pas le cas, murmura-t-il. Merlin, ce n'est pas le cas du tout !

- Il est adulte, Jamie, répondit doucement Bathilda. Il peut se gérer tout seul.

- Apparemment pas, grogna-t-il.

- Je ne pense pas qu'il soit malade, tu sais. Il est juste un peu...

- Déprimé ? Acheva James.

Il soupira profondément et passa la main dans ses cheveux.

- Peut-être que le fait d'être bientôt grand-père va lui remonter le moral, reprit-il.

- J'espère, souffla Bathilda en pressant sa main.

Lily, la main posée sur son ventre, les considérait en silence. Elle se rappela du sourire de Remus, de l'air joyeux de Sirius, de l'émotion dans la voix de Margaret, des larmes dans les yeux de James... Jamais elle n'aurait cru que ce bébé pourrait être aussi porteur d'espoir. Mais après tout... Il était le symbole d'une nouvelle vie, du futur qu'ils auraient après la guerre.

- Je suis sûre que ça ira, dit-elle. Je viendrai le voir plus souvent, puisque je ne fais plus de mission. Peut-être que ça lui fera plaisir.

James releva la tête et lui sourit.

- Merci, Lily.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top