Partie III - Chapitre 48
Chapitre 48
Les jours défilaient à une vitesse ahurissante alors qu'ils se préparaient à l'assaut contre les géants. Maugrey ne cessait de le leur répéter : la préparation était la clef. Ils ne devaient rien laisser au hasard pour avoir le dessus.
Lily préparait activement toutes sortes de potions. Tenaillée par l'inquiétude, elle en avait raté plus d'une. Pour autant, les armoires se remplissaient et, à mesure que passaient les jours, la jeune femme voyait les stocks grossir avec satisfaction. Mais plus elle entassait les potions, plus elle prenait conscience du temps qui passait. Le mois d'octobre fila, et bientôt il ne leur resta plus que deux jours.
Lily se glissa sur une chaise près de son mari, dans la salle de réunion. La plupart des membres de l'Ordre qui habitaient au QG étaient présents. On comptait également Marlène, les Londubat, Benjy et Emmeline.
- Tu en as mis du temps, souffla James alors que Maugrey échangeait quelques mots avec Marlène.
- Une solution de force à finir. Qu'est-ce qu'il a dit ?
- Pas grand-chose pour le moment.
- Tu crois qu'il va daigner nous expliquer le plan ou on l'apprendra sur le tas ?
- Sur le tas, c'est bien plus marrant.
- Pas sûre que ça plaise à nos nouvelles recrues, commenta Lily en jetant un coup d'œil à Sally et Amanda, qui observaient leurs aînés, l'air angoissé.
- Ça dépend desquels, ajouta James en désignant du pouce Martin, qui essayait de faire gober des cacahuètes à Sirius.
- Merlin, ces garçons n'ont rien dans la cervelle.
- Tu me comptes dans le lot ?
- Évidemment.
Il pouffa et lui vola un baiser.
- Potter !
Ils sursautèrent tous les deux et levèrent les yeux vers Maugrey, qui les regardait d'un air mauvais.
- Ce n'est pas le moment, grogna-t-il.
- Ce n'était p...
Lily écrasa la pied de James avant qu'il n'ait pu aller plus loin et Maugrey se détourna pour s'adresser à toute l'assistance.
- Je suis martyrisé, geignit James dans un murmure.
- Chut ! Siffla Lily au moment où Maugrey annonçait :
- Voilà le plan : Les Géants sont cantonnés au pied des Highlands. Ça n'a pas été difficile à découvrir, vu le nombre de plaintes pour dégradation que les Moldus enregistrent en ce moment. On pense que les Mangemorts attendent une occasion favorable pour lancer une attaque sur Inverness, mais on ne sait pas quel sera l'élément déclencheur, donc on va prendre les devants. Dans deux jours, au crépuscule, nous lancerons l'assaut. Quand je dis « nous », c'est le Bureau des Aurors au complet, exceptés les Aurors affectés à la surveillance du Ministre, et l'Ordre. Je vous rappelle l'objectif : avoir les Mangemorts qui servent de médiateurs avec les Géants. C'est bien connu, une fois qu'on élimine le chef, c'est la déroute. Ces hommes mis hors d'état de nuire, les Géants reculeront.
Il s'interrompit, le temps de sortir d'une sacoche une liasse de feuilles qu'il fit circuler autour de lui. Il y avait deux papiers différents ; sur l'un était dessiné un homme brun, affublé d'une courte barbe et d'un nez proéminent. Sur l'autre, on voyait un homme nettement plus âgé, aux longs cheveux gris ramenés en catogan et au visage ridé. Chaque membre de l'Ordre prit un exemplaire.
- On est certains que ce sont eux, alors ne vous gênez pas. Ce sera votre rôle principal : les intercepter coûte que coûte, même si vous devez en amputer un pour l'empêcher de s'enfuir.
- Il plaisante, hein ? Murmura James à l'oreille de Lily, qui se contenta de hausser les épaules.
- Mes Aurors seront là pour s'occuper des géants ; ils sont formés pour ça. Si l'un d'eux vous gêne, jetez-lui quelques sortilèges cuisants avant de passer votre chemin, un Auror prendra le relais. Il y aura une tente pour les blessés, on vous indiquera où. Je compte sur nos soigneuses si jamais on a besoin de vous là-bas, mais il y aura des Médicomages de Ste-Mangouste. C'est clair ?
Un concert de grognements lui répondit.
- Des questions ?
Remus fut le premier à s'exprimer :
- Pourquoi le crépuscule ?
- Les sortilèges se voient moins de loin à ce moment-là. Une question de lumière, ne m'en demande pas plus.
- Il trouve juste ça plus héroïque, souffla James.
Lily pouffa, ce qui lui valut un regard mauvais de la part de Maugrey. Sa mauvaise humeur fut heureusement détournée par la question de Margaret :
- Voldemort compte vraiment attaquer les villes moldues ?
- Bien sûr. Le Secret Magique n'a aucune valeur pour lui, étant donné qu'il veut assujettir les Moldus.
La jeune femme se renfonça dans son siège, l'air apeuré.
-Vous êtes sûr que les Mangemorts qu'on cherche seront là ? Interrogea Peter.
- Ils n'ont pas quitté les lieux depuis une semaine, même s'ils campent un peu à l'écart des Géants. Ils rappliqueront forcément.
- Et si d'autres Mangemorts arrivent ? Enchaîna Sirius.
- Bon sang Black, je ne vais quand même pas t'apprendre le protocole quand on tombe sur un Mangemort ?
- On n'a jamais fait d'entraînement avec un géant nous courant après, persifla-t-il.
- Les Géants ne sont pas ton affaire.
- Dommage qu'ils soient tellement imposants qu'ils seront forcément mon affaire.
- Si tu continues, je te jette tout seul dans la mêlée en guise d'avertissement pour insubordination, marmonna Maugrey.
Sirius croisa les bras sur sa poitrine, une expression butée peinte sur le visage. James murmura :
- En même temps, il n'a pas complètement tort.
- Mais je ne vois pas trop ce que Maugrey pourrait nous dire de plus, fit remarquer Lily. L'attaque est dans deux jours, de toute façon.
- Il aurait pu nous parler du plan plus tôt, par exemple.
- Ce n'est pas dans les habitudes de la maison.
- D'autres questions ? Aboya Maugrey.
- On y va comment ? Lança James.
- On vous donnera les coordonnées le jour-même. Pour le reste, tu sais transplaner.
- Ou pas, railla Remus à l'autre bout de la table.
- La ferme, crétin !
Une quinzaine de regards perplexes se fixèrent sur Sirius, qui avait affreusement pâli. A côté de Lily, James se mit à glousser de façon incontrôlable alors que Remus donnait des coups de coude à son ami.
- Allez, raconte-leur.
- Espèce de ... Tu avais juré de ne rien dire !
- Il faudra bien leur expliquer de toute façon.
- Sirius ne sait pas transplaner ? Intervint Jenny, interloquée.
- Il ne sait plus transplaner, corrigea Peter.
Tout le monde continua à fixer Sirius, dans l'attente d'une explication. Lily perçut du coin de l'œil le départ de Maugrey, auquel Marlène emboîta le pas. Son attention fut attirée par Sirius, qui se racla la gorge et expliqua d'une petite voix :
- Je me suis désartibulé il y a quelques semaines et j'ai laissé mon pied gauche derrière moi.
Fabian et Gideon éclatèrent du même rire tonitruant, vite rejoints par Benjy et Martin. Les filles secouaient la tête avec un sourire amusé tandis que Remus et Peter, hilares, entouraient leur meilleur ami malchanceux. Ethel, assise auprès de Sirius, lui tapotait gentiment la main. Quant à James, il était écroulé de rire sur la table. Lorsque Lily en eut assez, elle lui tapota l'épaule et interrogea :
- C'est pour ça qu'il prend tout le temps la moto maintenant ?
- Oui, pouffa James dans le brouhaha qui suivit la déclaration de Sirius. Il est terrifié à l'idée de transplaner à nouveau.
- Il va bien falloir qu'il s'y résolve.
James haussa les épaules, toujours hilare, avant de hurler à l'attention de Sirius :
- Les 3D, Black !
Remus et Peter hurlèrent de rire et Lily se leva avec un soupir, bien consciente du fait qu'on n'obtiendrait plus rien des Maraudeurs avant au moins une heure. Elle gagna l'infirmerie dans l'intention de vérifier l'intensité du feu sous son chaudron, mais une voix lui parvint alors qu'elle se trouvait sur le palier. Elle s'arrêta et fut vite rejointe par William.
- J'étais un peu submergé par l'agitation, en bas, expliqua-t-il avec un sourire contrit. Les Maraudeurs ont toujours la même énergie.
- Merlin, ne m'en parle pas.
Il lui emboîta le pas le long du couloir du premier étage et observa avec intérêt l'infirmerie, tandis qu'elle procédait à ses vérifications. Satisfaite, elle s'assit sur l'un des lits et sourit en voyant la curiosité de son ami.
- On dirait que tu n'as jamais mis les pieds dans une salle de potion, commenta-t-elle.
- Ça fait bien longtemps, à vrai dire. Les seules potions dont je me rappelle sont les cocktails des bars clandestins où j'allais, aux États-Unis.
- Quelle vie ça a dû être !
- Je te retourne le compliment. Vous avez dû vivre beaucoup de choses, en une année auprès de l'Ordre.
- Plus que je n'en aurais souhaité, grimaça-t-elle.
- Le mariage compense ? Tenta-t-il.
- Pas du tout, pouffa-t-elle. Si on avait pu en arriver là sans vivre la moitié de ce par quoi on est passé, ça aurait été parfait.
- A qui le dis-tu, soupira-t-il en s'asseyant à son tour sur le lit.
Comprenant qu'il parlait de la mort de ses parents, Lily interrogea :
- Comment va Emma ?
- Oh, fidèle à elle-même ! Changer d'air lui a fait du bien. Elle s'est fait tout un tas d'amis Moldus, à tel point qu'on se demande parfois si elle ne va pas délaisser la magie pour aller vivre comme tout le monde. Quand je vois ce qui se passe ici, je suis plutôt soulagé à l'idée qu'elle n'ait aucune envie de quitter les États-Unis.
- Comment se sont passées tes missions, jusque-là ?
Lily l'écouta lui raconter avec humour les quelques opérations qu'il avait effectuées pour l'Ordre, souriant et riant avec lui. Des bruits de pas dans l'escalier la ramenèrent à la réalité et elle sauta du lit en s'excusant :
- Il doit être tard, je devrais aller me coucher. Will, je suis désolée de ne pas avoir pris le temps de discuter plus avec toi, depuis que tu es arrivé. Il y a James et...
- Je sais, coupa-t-il. Même quand vous vous détestiez vous passiez déjà un temps fou ensemble.
Elle le fusilla du regard et il éclata de rire.
- Merlin, Sirius avait raison ! Vous êtes incroyables, tous les deux. Allez, bonne nuit Lily.
Il se leva à son tour et sortit dans le couloir, les mains enfoncées dans ses poches. Lily le suivit en fulminant, bien décidée à demander à Sirius ce qu'il était allé raconter sur leur compte.
***
- Je ne veux pas !
- Il n'y a aucun risque en transplanage d'escorte.
- Ça reste du transplanage.
- Sirius, tu ne vas pas pouvoir éviter de le faire toute ta vie ! C'est le moyen de transport le plus pratique du monde.
- Et le plus dangereux.
- Tu as vu ta moto ?
- N'insulte pas la moto !
Ethel se campa devant lui, les bras croisés.
- N'essaie de pas détourner la conversation : tu vas partir en transplanage d'escorte avec moi et tout ira bien. Et ensuite, tu apprendras à nouveau à transplaner tout seul.
- Jamais ! Clama-t-il.
- Si, trancha-t-elle. Et maintenant mets tes chaussures, on part bientôt.
Il se traîna jusqu'au bord de son lit pour s'exécuter, la mine renfrognée, lorsqu'il s'aperçut qu'Ethel s'apprêtait à sortir de sa chambre.
- Ethel !
- Oui ?
- Si tu m'embrassais ça me donnerait du courage.
Elle rougit mais se dirigea vers lui et prit délicatement son visage entre ses mains. Habitué à ce qu'elle se défile, Sirius la fit basculer sur le lit sans tenir compte de ses protestations et glissa un bras autour de sa taille, ravi.
- Sirius, protesta-t-elle en s'écartant légèrement. On part bientôt.
- Justement, autant en profiter.
Elle fronça le nez, hésita une seconde puis l'embrassa à nouveau. Il voulut faire glisser sa main dans son dos, sous ses vêtements, mais elle attrapa son poignet et replaça sagement ses doigts sur ses hanches.
Ethel finit par se détacher de lui et passa tendrement ses doigts dans ses cheveux.
- Tu veux bien transplaner, maintenant ?
- Il va bien falloir, grommela-t-il.
La jeune femme se redressa et entreprit de refaire sa queue de cheval. Sirius en profita pour lui voler un nouveau baiser, avant de sauter du lit et s'enfuir en courant, non sans avoir pris le temps d'attraper ses chaussures.
Dans le salon, il trouva les autres membres rassemblés. Certains déambulaient d'un air inquiet, d'autres se rongeaient les ongles, d'autres encore se goinfraient de chocolat. Il prêta à peine attention à Lily et James, qui se chamaillaient dans un coin. Tout guilleret, il entreprit de mettre ses chaussures sans se laisser gagner par l'humeur noire des autres.
Remus se laissa tomber à côté de lui, une tablette de chocolat blanc bien entamée à la main.
- Je croyais que le chocolat blanc était réservé aux situations de crise extrême ? Interrogea Sirius en achevant de faire ses lacets.
- Ce n'est pas une situation de crise extrême, selon toi ? Interrogea Remus avant de lui tendre un carré.
- Ce n'est jamais qu'une mission parmi d'autres.
- Quand je pense que c'est toi qui as failli te faire virer de l'Ordre parce que tu trouvais cette mission dangereuse. Rappelle-moi quand c'était... Il y a deux jours ?
- Je me passerai de tes sarcasmes, merci, rétorqua Sirius en se drapant dans sa dignité.
- Laisse-moi deviner, tout baigne avec Ethel ?
- Exactement !
Remus lui asséna une tape dans le dos, amusé.
Lorsqu'ils quittèrent enfin le QG, la belle humeur de Sirius était retombée. Il s'agrippa au bras d'Ethel et se laissa entraîner jusque dans les Highlands. Ils atterrirent dans une clairière entourée de hauts pins. Sirius commenta :
- On dirait la Forêt interdite.
- Ça doit t'évoquer de bons souvenirs alors, lança Martin, qui se dandinait d'un pied sur l'autre.
- Silence, souffla Benjy, qui semblait tendu à l'extrême.
Les deux jeunes gens s'exécutèrent. Dans le calme retrouvé, ils commencèrent à entendre des voix. Elles roulaient comme le tonnerre au-dessus des arbres. Sirius déglutit difficilement. Les Géants n'étaient pas loin.
Soudain, une femme émergea du sous-bois. Sa cape noire, marquée du symbole des Aurors, l'identifiait comme l'un des membres du Bureau. Elle s'approcha de Benjy sans un regard pour les autres, ses cheveux noirs ramenés en arrière en un chignon sévère. Elle échangea quelques mots avec le jeune homme puis disparut à nouveau. Fenwick se tourna alors vers eux et chuchota :
- Les Aurors sont en formation autour du campement des géants. Nous allons nous diriger vers celui des Mangemorts, qui est cinq-cents mètres plus loin. Il est entouré de barrières magiques assez faibles mais qui les ont quand même empêchés de savoir combien exactement ils sont, alors préparez-vous. Et n'oubliez pas notre objectif. Plus vite on les trouve, plus vite la bataille sera terminée.
Gideon s'approcha de Benjy et ajouta sur le même ton :
- Quand les Géants s'enfuiront, redoublez de vigilance. Ils pourraient très bien vous marcher dessus dans leur panique, sans en avoir l'intention.
Benjy marque son assentiment d'un hochement de tête puis il reprit :
- La tente infirmerie est située à un kilomètre, droit dans cette direction (il tendit le bras vers le sud). Elle est dissimulée, aussi cherchez la souche fendue au milieu. Une personne à l'intérieur vous fera entrer. On va y aller, maintenant. Je ferai une pause dans les bois, le temps que tout le monde se regroupe. Cela voudra dire que nous serons à quelques mètres seulement du campement. Quand je repartirai, chargez avez moi. Inutile d'essayer de faire dans la discrétion, ils nous verront de toute façon. Hardley, Lupin, Fabian et Vance, restez en arrière le temps de faire sauter leurs défenses puis rejoignez-nous. C'est clair ?
Le petit groupe hocha la tête. Benjy leur adressa un bref sourire puis il se détourna et s'enfonça d'une démarche silencieuse dans les bois. Le groupe suivit en formation dispersée. Chacun tentait de ne pas trop faire craquer les brindilles mais c'était difficile. Le jour commençait à baisser et les rayons du soleil qui frôlaient l'horizon les aveuglaient par intermittence. Enfin, Benjy s'arrêta et l'Ordre se massa derrière lui, laissant les quatre membres désignés à l'arrière du groupe.
A l'avant, Fenwick prit une profonde inspiration, leva sa baguette et chargea au pas de course.
***
James en connaissait un peu plus sur les guerres mondiales, depuis qu'il fréquentait Lily et que l'une de ses occupations favorites était de discuter avec elle jusqu'à l'aube. Il avait toujours été horrifié par les descriptions qu'elle lui faisait du front, pendant la Première Guerre mondiale. Ces assauts frontaux contre l'autre camp lui paraissaient stupide. A présent qu'il se trouvait au milieu de l'un d'eux, il trouvait cela carrément suicidaire.
Le camp mangemort apparut dans leur champ de vision, brouillé par les sorts de protection. Une silhouette noire, sans doute la sentinelle, se leva d'un bond et donna l'alerte. Sans attendre de renforts, il prit pour cible Benjy et Gideon, qui se trouvaient en première ligne. Ils esquivèrent sans mal alors que d'autres Mangemorts arrivaient. A cause de la magie, James ne distinguait qu'une masse noire grandissante ; il était impossible de les dénombrer.
L'Ordre attaqua, mais les traits de magie rebondissaient sur le dôme protecteur du campement. Heureusement les attaques des quatre membres restés à l'arrière ne tardèrent pas ; sous l'afflux conjugués de leurs efforts, le dôme ondula, fragilisé. Une attaque de Peter passa au travers et un cri de douleur se fit entendre. James eut un sourire narquois. Ces imbéciles n'avaient pas dressé de boucliers, trop sûrs de leur barrière. Lui-même était protégé par Margaret, qui cria soudain :
- Je prends le relais !
Il hocha la tête et arrêta brusquement ses attaques. Pendant une fraction de seconde, ils furent sans défense. Un sort passa à deux doigts de la tête de James au moment même où il rétablissait un bouclier. Il jura.
- Ils sont bons.
Maggy ne répondit pas, trop occupée à viser la tête d'un Mangemort blond à l'air crétin. Alors qu'il se faisait cette réflexion, James réalisa soudain que le dôme de protection était en train de rendre l'âme. Il distinguait à présent nettement leurs adversaires : le Mangemort blond, une femme grassouillette aux cheveux roux, un homme grisonnant et les deux Mangemorts dont ils avaient auparavant vu le portrait.
Du coin de l'œil, James vit Benjy et Gideon se jeter en avant, dans l'intention manifeste de les prendre à parti. Mais le dôme n'avait pas tout à fait cédé et ils furent projetés un arrière. Gideon percuta Amanda de plein fouet et ils roulèrent au sol. Un choc particulièrement violent sur son bouclier obligea James à reporter son attention sur ce qu'il se passait. Margaret grimaçait, apparemment touchée par la violence du sortilège qui les avait percutés.
Alors que James allait lui proposer de prendre sa place, le dôme vola soudain en éclats. Un Mangemort s'écroula avec un hurlement, les mains plaquées sur son visage. Plusieurs Membres de l'Ordre tentèrent de les désarmer mais ils résistèrent. Malgré cela, ils se trouvèrent bien vite encerclés, submergés par la supériorité numérique de leurs adversaires. Un autre Mangemort tomba, immobilisé. James se détendit un peu ; jamais il n'aurait cru que ce serait si facile.
Il avait à peine formulé cette pensée qu'un tronc s'effondra sur l'une des tentes des Mangemorts. Tous, même leurs ennemis, levèrent les yeux. Un immense pied se souleva un nouvelle fois, obscurcissant un peu plus le ciel déjà sombre. Sans plus se soucier des ennemis humains, ils se mirent tous à courir pour échapper au Géant, qui écrasa une bonne partie du campement.
- Mais qu'est-ce que foutent les Aurors, bon sang ? Hurla Fabian quelque part derrière James.
Au même moment, trois d'entre eux déboulèrent dans la clairière. Un flot de sortilèges percuta le Géant, qui poussa un cri et tenta de balayer ses agresseurs d'un grand mouvement de bras. James n'en vit pas plus car un sortilège le cueillit au niveau de l'épaule et l'envoya contre un arbre. Il gémit et se releva avec difficulté. La terre trembla alors, le faisant chuter à nouveau. Il leva les yeux pour constater qu'une horde de géants déboulait vers eux. Les Aurors venaient à peine à bout du premier, qui vacilla et s'écroula sur l'un de ses congénères. D'autres Aurors affluaient, se glissant entre les jambes des Géants en les harcelant jusqu'à ce qu'ils soient assommés. Malheureusement, James ignorait combien de temps ils pouvaient mettre un Géant hors d'état de nuire.
Il repensa à ce que Maugrey et Benjy leur avaient dit : leur objectif avant tout. Il devait trouver les médiateurs.
Il se releva pour de bon, les doigts fermement serrés sur sa baguette. Les Membres de l'Ordre avaient été dispersés. Au loin, il aperçut la chevelure rousse de Lily, qui semblait aux prises avec un Mangemort. Il lutta contre l'impulsion qui lui dictait de courir vers elle ; se déplacer était devenu une question de vie ou de mort et il devait se montrer prudent.
Une énorme main couverte de poils et de cicatrices arracha un arbre juste à côté de lui. Il sursauta et attaqua aussitôt le Géant, qui sembla à peine sentir quelque chose. Il se pencha en avant, jusqu'à ce que son œil globuleux et injecté de sang se trouve au niveau de James. Une mèche de cheveux couleur mousse balaya son front et il balbutia :
- Gumain.
Il étira ses lèvres en un sourire édenté et tendit la main vers lui. Sans plus réfléchir, James visa son œil et partit en courant. Le Géant poussa un cri de rage et de douleur en se redressant. Le jeune homme n'en vit pas plus, trop occupé à éviter les pieds qui s'abattaient en tous sens et les gros doigts qui cherchaient à l'attraper.
« C'est le travail des Aurors », se répétait-il, « évite-les et trouve les Mangemorts. Trouve les Mangemorts et se sera fini ».
Pourtant, la panique montait en lui. Cela s'arrêterait-il vraiment ? La forêt avait été envahie par le chaos et il craignait que les Géants, pris au milieu des conflits humains, ne tuent tout le monde sur leur passage.
Il trébucha sur une racine et faillit s'étaler dans les feuilles mortes. Devant lui, Emmeline, Marlène et Remus tentaient de venir à bout d'un Mangemort qui se battait avec l'énergie du désespoir. Un sortilège le blessa et il tomba à genoux. Marlène le ligota du bout de sa baguette alors que Remus et Emmeline assuraient ses arrières. Au même moment, deux doigts aussi épais que des troncs d'arbres saisirent Emmeline par la taille et la soulevèrent dans les airs.
***
Un hurlement parvint aux oreilles de Lily, qui se tenait cachée derrière un arbre, mais elle n'y prêta pas attention. Elle prit une profonde inspiration et quitta sa cachette, sa sacoche pleine de potions et de remèdes serrée contre elle. Un sortilège carbonisa le bout de ses cheveux alors qu'elle attaquait la femme rousse. Celle-ci se déplaçait avec une agilité incroyable pour une femme de sa corpulence – et faisait preuve d'une férocité tout bonnement écœurante. Lily ne parvenait pas à en venir à bout car elle ne pouvait lancer que des sorts défensifs, dans l'espoir d'éviter les maléfices d'une violence inouïe que la femme lui lançait. Elle avait reconnu quelques Doloris qu'elle avait évité de justesse, mais la plupart des attaques qu'on lui lançait lui étaient inconnues. Elle reconnaissait pourtant leur caractère éminemment brutal à leurs couleurs, qui se dégradaient du violet au noir le plus profond.
Elle parvint finalement à lancer une attaque, qui se solda par un échec cuisant. Autour des deux femmes, les géants piétinaient sans qu'elles y prêtent la moindre attention. Un nouveau maléfice obligea Lily à rouler au sol. Elle forma un bouclier aussitôt, mais l'attaque suivante perça ses défenses et lui brûla l'épaule. Portée par l'adrénaline, elle sentit à peine la douleur et tenta de se relever, sa baguette tendue pour tenter de se protéger. Au même instant, Maugrey déboula dans son champ de vision et attaqua sans attendre. Cette fois-ci, la Mangemort ne menait plus du tout le combat. Elle parvenait à peine à esquiver les attaques de l'Auror, qui finit par la blesser au bras.
Derrière lui, Lily tentait de reprendre ses esprits. Tandis qu'elle se redressait, la Mangemort la visa soudain. Maugrey se jeta en avant pour dresser un bouclier devant elle, se découvrant par la même occasion. La femme n'hésita pas une seule seconde ; alors que Lily criait un avertissement, elle visa l'Auror. Le maléfice percuta l'une de ses jambes et il chuta avec un cri de douleur. Furieuse, Lily voulut se jeter sur la Mangemort mais celle-ci profita du passage d'un Géant pour s'enfuir, dissimuler par sa jambe.
Lily se précipita sur l'Auror, qui tentait tant bien que mal de se redresser. Sa jambe gauche ruisselait de sang ; il y en avait tellement que Lily n'arrivait pas à distinguer la blessure. Il jura en retombant et la jeune femme s'agenouilla près de lui.
- Ne bougez pas ! On va regard...
- Ne pas bouger ? On va se faire écraser ! Bon sang, bouge ton petit cul, Evans ! Mets-toi à l'abri !
Lily le fusilla du regard, se redressa, l'attrapa par le bras et le tira vers elle. Elle retomba aussitôt.
- Il faut vous emmener à l'infirmerie ! Cria-t-elle par-dessus le vacarme des combats.
- L'infirmerie ? Qu'est-ce que j'ai dit, Evans ? Sans le chef, l'armée tombe ! Alors maintenant fous le camp et va te rendre utile ailleurs !
Furieuse mais incapable de lutter contre la fureur de l'Auror, la jeune femme obéit. Elle fit volte-face, prête à se jeter dans la bataille, mais une soudaine panique l'enracina dans le sol.
Les Géants étaient partout. Trop prise par son combat, elle l'avait à peine remarqué. Ils déracinaient les arbres, tentaient d'écraser les Aurors, attrapaient des silhouettes gesticulantes avant de les secouer dans tous les sens. Les Aurors, minuscules pantins, s'agitaient entre leurs pieds. Quelques Géants étaient au sol et se faisaient piétiner par leurs congénères, mais ils ne cessaient s'affluer.
Un énorme pied s'abattit juste devant Lily, qui recula précipitamment avec un cri de surprise. Le Géant passa son chemin, mais Lily s'aperçut qu'il tenait quelqu'un dans son poing. Elle serra les dents et faillit se jeter à sa poursuite, seulement, Maugrey hurla derrière elle :
- Les Mangemorts, Evans !
Après avoir hurlé un assentiment, elle raffermit saprise sur sa baguette et se mit à courir entre les jambes des Géants.
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