Partie III - Chapitre 26
Chapitre 26
James avait la gorge sèche. Il avait trop chaud, et mal au dos. Mal au flanc, aussi. Mal au crâne. Mal partout. Néanmoins, il fit un effort pour ouvrir les yeux. Après un instant de réflexion, il comprit qu'il était dans sa chambre, au QG. La lumière d'après-midi passait entre les rideaux tirés. Il tourna difficilement la tête, aperçut ses lunettes sur la table de nuit et les chaussa. Satisfait de cette légère amélioration, il tendit la main en grognant et attrapa le verre d'eau posé près de lui. Au moins, il avait moins soif.
Il se redressa dans son lit mais ce simple effort lui donna la nausée. Il ferma les yeux un instant. Il avait sauté de la falaise... et il avait survécu. L'ombre d'un sourire étira ses lèvres. Par Merlin, il avait survécu.
Un bruit de pas le ramena à la réalité. Alors qu'il ouvrait les yeux, la porte s'ouvrit et Lily entra, un plateau dans les mains. Elle leva les yeux et croisa son regard. Tout son corps se tendit.
- Salut, coassa-t-il.
- Oh mon Dieu, hoqueta-t-elle avant de ressortir brusquement de la chambre.
James voulut se lever mais une douleur atroce dans le dos l'en empêcha. Sa tête tournait à nouveau. Il entendit Lily poser le plateau avec fracas dans le couloir, ainsi qu'un sanglot étouffé. Quelques instants plus tard, elle entra à nouveau, les yeux rouges mais maîtresse d'elle-même – du moins en apparence. Cette fois-ci, il remarqua les ecchymoses qui marquaient son visage, ainsi que la cicatrice qu'elle arborait sur la joue gauche.
- Ça va ? S'inquiéta-t-il de cette horrible voix éraillée.
Elle ne répondit pas et s'assit sur le bord du lit avant de poser sa main sur sa joue un instant, puis de prendre son pouls. Ses épaules se détendirent et James crut qu'elle allait se remettre à pleurer.
- Qu'est-ce que tu fais ?
- Chut.
Elle tendit le bras pour attraper une fiole sur la table de chevet et la lui tendit.
- Avale ça.
Il s'exécuta sans même grimacer. La douleur dans son dos s'atténua un peu. Toujours sans un mot, Lily souleva son t-shirt et tâta son flanc droit, juste au-dessus de la hanche, là où un gros pansement cachait sa blessure.
- Ça te fait mal ?
- Non, ça va, répondit-il machinalement tout en cherchant à croiser son regard, mais elle l'évitait.
- Bien. Je vais aller te chercher quelque chose pour te redonner des forces.
James l'arrêta alors qu'elle s'apprêtait à se lever et attrapa son menton entre ses doigts pour l'obliger à le regarder. Dès que ses yeux verts croisèrent les siens, ils s'emplirent des larmes.
- Lily...
- Tu es vivant, souffla-t-elle.
Elle porta vivement sa main à ses lèvres pour réprimer un sanglot.
- Je suis désolé de t'avoir fait peur.
- De m'avoir fait peur ? Seigneur, James, on a tous cru que tu allais y passer.
Un rire légèrement hystérique la secoua. James posa sa main sur la sienne pour la calmer.
- Moi aussi, assura-t-il. C'était quitte ou double.
- Quoi, te jeter du haut de cette falaise ?
- Ouais.
Il se racla la gorge. Il se sentait horriblement mal. Il ne se rappelait pas avoir déjà été dans une forme physique aussi déplorable.
- Comment tu as fait ? Interrogea Lily d'une voix tremblante. Tu n'aurais jamais dû survivre à ça, surtout dans l'état dans lequel tu étais.
James secoua un instant la tête. Il se rappelait tout ce qui s'était passé mais tout lui semblait complètement surréaliste. A ses souvenirs de l'enlèvement de Minchum s'ajoutaient des images éparses et incohérentes : il se rappelait avoir vu sa mère.
Comme son silence s'éternisait, Lily se leva brusquement.
- Je vais te laisser te reposer, balbutia-t-elle. Excuse-moi, je n'aurais pas dû te brusquer.
- Non ! C'est moi, je...
Il secoua la tête.
- Tout est tellement confus...
- Tu as failli mourir, James, souffla Lily en se rasseyant. C'est normal.
Une larme coula le long de sa joue et elle l'essuya d'un geste rageur.
- Ne pleure pas, Lily, murmura-t-il. Tout va bien.
- Tout va bien ? Hoqueta-t-elle. Tu ne te rends pas compte, tu...
Elle prit une profonde inspiration, plongea un instant son visage entre ses mains, puis demanda :
- Raconte-moi ce qu'il s'est passé, je te dirai ensuite ce que tu as raté.
James hocha la tête puis fouilla du regard autour de lui. Une baguette était posée sur la table de chevet, mais ce n'était pas celle qu'il cherchait.
- J'ai dû la perdre, murmura-t-il.
- Perdre quoi ?
Lily avait relevé la tête et elle le dévisageait, avide de savoir.
- Ma baguette.
- Elle est juste là, dit-elle doucement comme si elle pensait qu'il avait perdu l'esprit. Voldemort l'a abandonnée avant de transplaner.
- Non, pas... pas celle-là. La deuxième.
Elle fronça les sourcils.
- La deuxième ?
- Tu ne te rappelles pas ? En cinquième année, on m'a volé ma baguette...
- Et tu en as eu une nouvelle, réalisa-t-elle. Tu veux dire que, tout ce temps...
- Je l'ai toujours gardée, confirma-t-il. Je l'ai toujours eu avec moi depuis qu'on a intégré l'Ordre. Elle est moins puissante que l'autre mais c'est toujours utile. Et puis je crois que la force du désespoir l'a rendue plus puissante, hier.
- Hier ? Releva Lily. C'était il y a six jours, James.
Il ouvrit la bouche, prêt à s'étonner, mais la referma bien vite en haussant les épaules. Après tout, il n'avait aucune idée de ce qu'il s'était passé à partir du moment où il avait touché terre.
- Qu'est-ce que tu as fait ? De quel sort est-ce que tu t'es servi ?
- Je me suis métamorphosé en poisson.
Lily ouvrit de grands yeux stupéfaits.
- Quoi ?
- Je me suis...
- Tu tombais en chute libre et tu as réussi à te métamorphoser ? Coupa-t-elle, éberluée. Blessé comme tu l'étais ?
Il haussa à nouveau les épaules, gêné. Il s'était simplement débrouillé pour survivre.
- C'était ça ou une mise à mort en bonne et due forme. Je te l'ai dit, c'était quitte ou double. Je ne pensais pas que j'y arriverais.
- Tu es... complètement fou, James. Complètement dingue. Tu...
Elle passa une main dans ses cheveux, toujours stupéfaite.
- Ça fait une semaine qu'on cherche comment tu as fait mais jamais... on n'aurait jamais pensé à ça.
- Et ensuite ? Pressa-t-il. Tu as dit que tu me raconterais !
Lily cessa de le dévisager pour porter son attention sur la fenêtre, sur laquelle s'écrasait de grosses gouttes de pluie. Elle prit une profonde inspiration.
- Tu as sauté de cette falaise, commença-t-elle à voix basse. J'étais persuadée que tu étais... mort. (Sa voix s'étrangla, mais elle continua malgré tout.) Sirius ne voulait pas le croire, il est parti à ta recherche. Il t'a retrouvé échoué sur la plage, inconscient. On l'a rejoint, Benjy et moi, et comme tu étais dans un sale état, on a appelé Marlène. On a bien fait parce que quand on a réussi à te ranimer, tu étais en état de choc. On a bien cru que ça allait te tuer. Sans Marlène...
Elle frissonna, le regard dans le vide. James remarqua enfin les énormes cernes qui marquaient son visage.
- Tu avais perdu beaucoup de sang à cause de ta blessure au flanc et ta chute a quand même dû être violente, malgré ta forme de poisson. Marlène a réussi à te ramener à un état stable et on t'a amené au QG sur un brancard qu'on a suspendu aux balais. Au début tu étais seulement inconscient, mais bien vite tu as commencé à avoir de la fièvre. Tu as déliré pendant presque trois jours. Tu... tu ne me reconnaissais pas, tu prenais Marlène pour ta mère. Là encore, tu as failli y passer. Tu n'avalais plus rien, tu... on arrivait à peine à te faire boire.
- Lily...
- C'était toujours à cause du choc, d'après Marlène, coupa-t-elle. Finalement la fièvre est tombée, mais tu étais de nouveau inconscient. Tu étais tellement faible...
Elle tourna enfin la tête vers lui et il vit l'inquiétude qui la rongeait.
- Je suis tiré d'affaires, maintenant, sourit-il.
Apparemment, c'était la chose à ne pas dire. Lily le dévisagea quelques secondes, puis fondit en larmes. Elle se leva précipitamment et quitta la pièce malgré ses appels.
***
Lily claqua la porte de la chambre de James derrière elle et rentra de plein fouet dans Sirius. Alarmé, il la tint à bout de bras jusqu'à ce qu'elle balbutie :
- Il s'est réveillé... James, il s'est réveillé.
- Quoi ? Comment il va ? Il t'a parlé ?
- Il va bien, hoqueta-t-elle.
- Alors pourquoi est-ce que tu pleures ? Souligna-t-il, perplexe.
Lui-même rayonnait de joie : James allait s'en sortir.
- Parce qu'il va bien ! Sanglota-t-elle. Parce qu'il était mort et... il m'a souri, Sirius. Il m'a souri. Il va bien.
Elle se laissa glisser par terre, cacha son visage contre ses genoux, et pleura son soulagement, sa fatigue, son angoisse. Sirius, n'y tenant plus, s'était engouffré dans la chambre. Lorsqu'elle fut un peu calmée, elle se redressa mais ne put se résoudre à entrer à nouveau dans la pièce. Elle allait forcément se remettre à pleurer or elle ne voulait pas inonder de larmes James, qui avait besoin de repos – et non de la réconforter alors que c'était lui qui avait presque passé la baguette à gauche. Finalement, elle se détacha du mur et chancela jusqu'au bout du couloir pour aller annoncer la bonne nouvelle aux autres, dans l'espoir que leur joie lui permettrait d'arrêter de penser au fait que James avait failli mourir. Après avoir trébuché un bon nombre de fois dans l'escalier, elle parvint saine et sauve au rez-de-chaussée.
Benjy, Emmeline, Alice, Jenny et Peter, assis dans la cuisine, tournèrent un regard inquiet vers elle quand elle arriva. Elle posa une main sur le mur pour se soutenir et souffla :
- James s'est réveillé. Il va bien.
Le silence dura encore un instant, le temps qu'ils assimilent ce qu'elle venait de dire, puis ce fut l'explosion. Ils parlaient tous en même temps, se coupaient la parole, riaient... Lily se serait sans doute évanouie si Alice n'était pas venue la prendre dans ses bras. Tout le monde s'était raccroché à la vie de James pour tenter d'oublier que Terry était mort et dans l'espoir d'avoir enfin une bonne nouvelle. Sans eux, Lily n'aurait jamais tenu le coup. Elle se laissait aller à présent et pleurait dans les bras de Benjy, qui avait pris le relais d'Alice. Elle venait de passer la pire semaine de sa vie.
Elle avait épargné à James les détails de son combat contre la mort ; les vomissements, les heures passées à le veiller, à essayer de faire tomber la fièvre avec des potions qu'il refusait d'avaler, à changer ses draps et ses vêtements trempés de sueur toutes les trois heures, à l'écouter hurler dans son délire... Et surtout, tous ces jours à croire qu'il n'allait pas s'en sortir.
Marlène était restée au QG tout ce temps, à batailler aux côtés de James. Elle n'avait jamais donné de faux espoirs à Lily mais avait fait tout ce qu'elle avait pu. Elle dormait pour le moment, mais elle allait enfin pouvoir rentrer chez elle.
Benjy écarta doucement Lily de lui et essuya ses joues trempées de larmes avec un sourire.
- Qu'est-ce que tu fais là, Lily ? Va le rejoindre !
- Sirius est avec lui, renifla-t-elle.
- On s'en fout de Sirius, il n'est pas amoureux de lui ! Allez, vas-y !
Attirés par la clameur, d'autres personnes étaient arrivées dans la cuisine. Il y avait Remus, Ethel, Frank, Margaret... Lily crut voir des bouteilles de champagne alors qu'elle gagnait l'escalier pour suivre le conseil de Benjy. Elle s'arrêta devant la porte de James, le cœur battant. Elle avait tellement de choses à lui dire.
Elle poussa le battant et trouva Sirius en train d'écrire une lettre avec l'aide de James qui était retombé dans ses oreillers, affreusement pâle. Ils relevèrent la tête de leur travail en l'entendant entrer et James tendit aussitôt la main vers elle. Elle s'empressa de franchir la distance qui les séparait pour entrelacer ses doigts aux siens et crut qu'elle allait encore se mettre à pleurer.
- Qu'est-ce que vous faites ? Interrogea-t-elle d'une voix légèrement tremblante.
- C'est pour Fleamont, expliqua Sirius, mais on finira plus tard. Je vous laisse !
Il quitta la pièce en sautillant, ce qui arracha un rire à Lily. James, lui, ne la quittait pas des yeux.
- Désolée d'être partie comme ça, renifla-t-elle. Ça fait juste beaucoup d'émotions. Mais pour toi aussi, tu... tu dois être épuisé.
Pour toute réponse, il posa sa main libre sur sa joue et attira son visage vers le sien. Elle se laissa faire, trop surprise pour réagir. Il posa ses lèvres chaudes sur les siennes et Lily s'agrippa aussitôt à lui sans pour autant lui rendre son baiser. Elle tremblait trop pour ça.
- Je suis vivant, Lily, murmura-t-il avant de l'embrasser à nouveau. Tout va bien. Grâce à toi, et Marlène. Sirius m'a raconté tout ce que tu as fait.
- Je l'aurais fait cent fois pour te sauver, souffla-t-elle avant de lui rendre enfin son baiser.
Elle y mit trop de passion sans doute, trop de force. Ils basculèrent en arrière et James gémit de douleur, mais il l'empêcha de s'écarter. Elle sentait sa poitrine qui se soulevait violemment sous elle alors que ses lèvres cherchaient avidement les siennes. Son cœur battait à tout allure, plus vif qu'il ne l'avait été depuis une semaine.
Lorsqu'il la laissa enfin s'éloigner, le souffle court, son visage avait même repris quelques couleurs.
- J'ai cru que je ne pourrais plus jamais faire ça. J'ai cru tellement de fois cette semaine que tu allais mourir, je...
- Je suis un battant, affirma-t-il avec l'ombre d'un sourire. Je n'allais pas t'abandonner comme ça.
Elle sourit à son tour, par pur mimétisme. Voir James sourire était sans doute l'une des choses qui lui aurait le plus manqué.
- Un battant bien amoché.
Il haussa les épaules mais grimaça aussitôt.
- Ouais, tiens, pourquoi j'ai aussi mal au dos ?
- Tu as fait un plongeon de trente mètres, après t'être déjà bousillé le dos en sautant de balai, et on pense que tu as été projeté contre un ou deux rochers parce que tu avais le dos couvert d'entailles. Ta forme de poisson explique que ça ne t'ait pas ...
Elle s'interrompit brusquement, la gorge serrée.
- Tu m'as fait tellement peur, hoqueta-t-elle. J'ai cru que je t'avais perdu.
Il secoua la tête et caressa doucement sa joue.
- Mets-moi une laisse la prochaine fois.
Elle gloussa de façon hystérique face à sa piètre tentative d'humour et enfouit son visage contre son cou.
- Lily ?
- Oui ?
- Promet-moi que tu vas recommencer à m'insulter très bientôt.
Elle pouffa à nouveau en secouant la tête.
- Non ? S'étonna-t-il.
- Espèce d'imbécile.
Il rit un peu tout en lui caressant le dos.
- Je t'aime, tu sais ?
- C'est pour ça que tu n'avais pas le droit de me faire un coup pareil. Plus jamais, Potter ! Je t'aime beaucoup trop pour accepter que tu meures.
Il appuya sa joue contre ses cheveux.
- D'accord.
***
Remus ouvrit la Gazette du Sorcier, bien conscient de tous les regards avides fixés sur lui, et se racla la gorge. Il leur avait fallu une semaine pour dégotter enfin le bon numéro du journal – celui qui avait été tiré deux jours après les événements.
- J'imagine que les petites annonces ne vous intéressent pas ?
- Nous fait pas poireauter, Lunard ! S'exclama Sirius.
L'interpellé sourit et commença :
- « Mon Ministre, ce héros ».
Il y eut quelques ricanements autour de la table. Le seul à ne pas trouver ça drôle était Benjy.
- « Ce vendredi 3 mars, Harold Minchum, Ministre de la Magie, a été enlevé par les partisans de Vous-Savez-Qui. »
- Vous-Savez-Qui ? Releva Fabian. Qu'est-ce que c'est que ce surnom ?
- « Il est en effet inutile de nommer le très célèbre ennemi principal de la Grande-Bretagne », poursuivit Remus, « qui a cette fois commis l'acte insensé d'enlever l'homme le plus important du pays. En exclusivité pour La Gazette du Sorcier, Harold Minchum raconte. »
- Je ne sais pas qui a écrit ça, mais c'est vraiment un sale troll, commenta Sirius en posant ses pieds sur la table.
Ethel asséna une tape sur son genou et il s'empressa de reprendre une pose plus conventionnelle.
- Vous voulez bien arrêter de m'interrompre ? Râla Remus. On arrive à la partie intéressante en plus.
- Est-ce qu'il faut réveiller Lily ? Interrogea Peter.
Tous les regards se portèrent sur la jeune femme qui dormait affalée sur la table. Il s'était écoulé plusieurs heures depuis qu'elle leur avait annoncé que James était tiré d'affaires mais elle ne s'était pas accordée de repos avant cette petite réunion dans la cuisine pour entendre ce que Minchum avait raconté.
- Si tu la réveilles, je t'arrache les orteils un à un, prévint Benjy sans bouger de sa chaise, les bras croisés sur sa poitrine.
- Si tu m'approches, je te mords, rétorqua le petit blond.
- Oh ! Je peux lire ? Merci ! « J'ai quitté le Ministère aux alentours de vingt-et-une-heures pour rentrer chez moi, explique Mr. Harold Minchum, choqué par les événements. Alors que j'étais dans mon salon des cris ont retenti dans le jardin et j'ai compris qu'on attaquait les membres de la Brigade Magique à qui on avait confié la surveillance de ma résidence. J'adresse d'ailleurs toutes mes condoléances à la Brigade Magique pour les pertes qu'elle a subies. Je lui serai à jamais reconnaissant pour l'aide précieuse que m'ont apporté Priss Boyley et Adam Hulver. »
- L'hypocrite ! S'exclama Emmeline. Je suis sûre qu'il ignorait leurs noms !
Remus lui adressa un regard noir et continua :
- « Avant que j'aie pu me lancer dans la bataille, j'ai senti ma maison trembler. Tout s'est effondré autour de moi alors qu'elle se détachait du sol et je crois avoir été assommé par un objet ou un meuble arraché du sol. Quand j'ai repris conscience pour la première fois, je me trouvais dans une cuisine délabrée, gardé par deux hommes. J'ai bien sûr tenté de me défaire de mes liens mais ils m'ont aussitôt forcé à avaler une potion qui m'a fait sombrer dans l'inconscience à nouveau. Lorsque je me suis réveillé pour la seconde fois, j'étais dans une pièce toute aussi miteuse que la cuisine et j'entendais des bruits de lutte à l'extérieur. Je n'étais plus entravé et je n'ai eu aucun mal à me jeter sur le seul homme qu'on avait assigné à ma garde, un petit Mangemort à qui j'ai réussi à arracher sa baguette. Je l'ai immobilisé et... »
- Il l'a tué ! Coupa Peter avec véhémence.
Tous se tournèrent vers lui, surpris. Il avait bien sûr raconté sa version des faits mais il ne s'était pas attardé sur le sort du Mangemort qui gardait le Ministre.
- Quand je suis arrivé dans la pièce, il était au sol, le crâne ouvert, et il pissait le sang, expliqua-t-il. Il y avait une table juste à côté de lui, c'est possible qu'il se soit ouvert le crâne dessus en tombant, mais dans tous les cas Minchum ne s'est pas contenté de l'immobiliser, et je suis sûr qu'il le savait très bien.
- Pas étonnant qu'il n'en ait rien dit, ça ne fait pas très bon genre en politique, commenta Gideon. De toute façon, il a brûlé avec la maison, non ?
Peter hocha sombrement la tête et reporta son attention sur Remus, qui chercha un instant sa ligne du regard avant de reprendre :
- « Je l'ai immobilisé et je suis sorti. Là je suis tombé... »
- Littéralement, intervint Peter, déclenchant des rires autour de la table.
- « ... Sur deux jeunes gens envoyés par le Ministère. Je les ai conduits hors de la maison... »
- Le sale menteur ! S'exclama Benjy. Sans nous il serait resté planté là !
- « ... sous le feu continu des sortilèges et maléfices jetés par les Mangemorts... »
- Ça c'est vrai, confirma Peter. Il s'est bien défendu. Oui, oui, pardon, continue !
- « ... et j'ai enfin pu transplaner au Ministère en compagnie de l'un des deux jeunes hommes dont j'ai parlé. De là, j'ai pu gérer la crise en compagnie du chef du Bureau des Aurors, Alastor Maugrey, et du directeur de Poudlard, Albus Dumbledore. »
- N'importe quoi, râla Fabian, il s'est caché dans son bureau et on a dû s'assurer que personne ne parviendrait jusqu'à lui. Heureusement j'ai pu refiler cette tâche à un type de la Brigade.
- C'est tout ? Interrogea Margaret.
- Après il part dans un hommage aux victimes larmoyant.
- Quand je pense qu'on a risqué notre peau pour sauver cet imbécile, marmonna Benjy. Heureusement que Lily n'a pas entendu ça.
- Dis-toi que c'était pour le Ministère, dit Gideon en lui assénant une tape sur l'épaule.
Il grogna pour toute réponse.
- Ce journal n'est vraiment qu'un ramassis d'âneries, commenta Fabian en se levant à la suite de son frère. Qui parie pour une attaque ce soir ?
- Ce soir ? S'exclama Margaret, catastrophée. Mais il est vingt-deux heures passées !
- Oui, parce que c'est bien connu que les gentils petits Mangemorts se couchent à vingt-et-une heure trente, railla Fabian. Il n'y a rien eu depuis ce matin.
Remus soupira en refermant le journal alors qu'un débat animé commençait autour de lui. Depuis l'enlèvement du Ministre, les attaques éclaires s'enchaînaient. Les Mangemorts cherchaient à les avoir à l'usure. Le matin-même, Frank et Alice avaient été pris par surprise alors qu'ils se rendaient chez les parents de la jeune fille. Ils s'en étaient sortis sans problème mais avaient été un peu ébranlés.
- J'imagine que James dort.
Remus tourna la tête vers Sirius qui s'était penché vers lui, l'air suppliant.
- Évidemment qu'il dort ! T'avises pas d'aller le déranger, Patmol. Je te rappelle que toi au moins tu as pu le voir.
Sirius lui accorda ce point avant de soupirer.
- Bah, il sera toujours là demain. Au moins maintenant on en est sûrs.
Remus hocha sombrement la tête et son regard dériva jusqu'à Lily, qui dormait toujours malgré le brouhaha. Il distinguait à peine son visage pâle sous sa masse de cheveux roux.
- Qui se dévoue pour porter Lily jusqu'à son lit ?
- Je suis handicapé, rappela Sirius en désignant la cicatrice rose qui lui barrait le bras.
- T'as surtout la flemme.
- T'as qu'à utiliser un sortilège de lévitation !
- Tu sais aussi bien que moi que c'est très désagréable.
- Je sais ça, moi ?
- Tu ne te rappelles pas de toutes les fois où j'ai dû te ramener comme ça au Snargalouf, cet été ?
Sirius secoua la tête, amusé, et Remus lâcha un soupir désespéré avant de se lever. Il fut obligé de réveiller Lily pour réussir à la porter mais elle se rendormit aussitôt dans ses bras, la tête appuyée contre son épaule.
***
Lily passa devant la porte de James et sourit en entendant les voix animées de tous les Maraudeurs. James, coupé en permanence par ses amis, racontait à grand renfort d'exagérations son plongeon depuis la falaise.
- Il a l'air en forme, commenta une voix grave derrière elle.
Elle se retourna et fit face à Benjy.
- Tu parles, il a dormi treize heures cette nuit, encore quatre ce matin, et je suis sûre que sa conversation avec les Maraudeurs l'aura tellement épuisé qu'il va dormir jusqu'à ce soir.
- Une vraie loque, commenta-t-il avec un air amusé.
- Ouais. C'est pour ça que je pensais l'envoyer chez son père. Le pauvre me supplie de le laisser voir son fils depuis une semaine. En plus si James reste ici, il va vite commencer à culpabiliser parce qu'il ne va pas en mission et ça va devenir intenable.
Il la scruta un instant de ses yeux sombres puis sourit.
- Tu le connais par cœur, hein ?
Elle haussa les épaules, gênée, puis se dandina d'un pied sur l'autre.
- Benjy... Merci pour tout. Ton soutien cette semaine malgré tout ce que vous avez eu à faire et quand... quand James a sauté.
Ce fut à son tour de prendre un air gêné. Il détourna le regard et enfonça ses mains dans ses poches.
- Je t'en prie, articula-t-il finalement.
- Heureusement que tu étais avec nous, là-bas. J'ai cru à plusieurs reprises que tu allais tous nous faire tuer mais tu maîtrisais la situation.
- J'ai plus l'habitude que toi ou James. Tu sais, tu devrais aller chez le père de James avec lui.
Surprise par le changement de conversation, Lily ne put que le dévisager en haussant les sourcils.
- Tu as autant besoin de repos que lui et si tu le laisses partir seul, tu vas passer ton temps à te ronger les sangs.
- Mais on a besoin de moi ici, protesta-t-elle.
- On a surtout besoin d'avoir des gens frais et dispos, Lily.
- Mais...
- Personne n'ira penser que tu négliges ton devoir en partant avec James, insista-t-il sans lui laisser l'occasion d'en placer une. Ça fait une semaine que tu dors à peine et que tu ne manges rien... Tu as autant besoin que lui de t'éloigner d'ici.
Lily se mordit la lèvre, tentée. Mais avant qu'elle n'ait pu répondre, la porte du convalescent s'ouvrit avec fracas et Sirius déboula dans le couloir, James sur le dos.
- Yiha ! Rugit le porteur. Convoi d'urgence vers les toilettes !
Il s'en alla en courant dans le couloir alors que James riait aux éclats. Peter les suivait en poussant des hurlements.
- Sirius ! S'écria Lily, paniquée. Fais attention ! Mais... Remus, s'il-te-plaît !
Le jeune homme, qui venait de sortir de la chambre, lui adressa un grand sourire.
- T'inquiète, je gère !
Ayant dit, il s'élança à la suite de ses amis en poussant des cris de cow-boy. Lily, désespérée, les regarda s'agglutiner au bout du couloir. Au bout de quelques instants, la voix de Sirius retentit à nouveau :
- Bah alors Cornedrue, tu sais plus pisser debout ?
- Ferme la Patmol ou je te pisse dessus.
- Ah non, ça c'est mon domaine.
Tous les Maraudeurs hurlèrent de rire à cette répartie alors que Benjy et Lily échangeaient un regard perplexe.
- J'ai l'impression qu'ils ont du mal avec la notion de repos, commenta-t-elle.
Benjy pouffa puis lui donna une bourrade amicale.
- Réfléchis à ce que je t'ai dit. On veut tous retrouver notre mégère préférée.
- Hé !
Il rit franchement en s'éloignant dans le couloir.
- J'adore te faire des câlins et te tendre des mouchoirs, Evans, mais t'entendre gueuler c'est encore mieux !
Elle secoua la tête alors qu'il disparaissait dans l'escalier. Benjy avait été un soutien énorme pendant cette semaine, remplaçant Sirius qui était trop accablé pour lui venir en aide. Elle ne comptait même plus le nombre de fois où elle s'était effondrée en larmes dans ses bras.
Elle chassa ces souvenirs douloureux de son espritet entra dans la chambre de James pour lui faire part de ses projets une foisque Sirius l'aurait ramené – de préférence en un seul morceau.
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