Partie III - Chapitre 17
Chapitre 17
Big Ben venait à peine de sonner deux coups, et déjà les hurlements résonnaient dans la nuit froide. 1979 commençait par ce qui promettait d'être un sacré massacre. Gideon tentait de faire fuir le plus de Moldus possible mais les hommes avaient tendance à ne pas écouter un traître mot de ce qu'on leur racontait quand ils paniquaient. Certains couraient même droit vers les Mangemorts. Les sortilèges et maléfices fusaient à travers la foule, trop imprévisibles, trop violents pour que Gideon et Emmeline puissent faire quelque chose. Il vit à peine la jeune femme envoyer un patronus au QG, trop occupé à hurler à un homme qui poussait une femme devant lui de dégager.
Une femme atterrit avec un bruit écœurant près d'eux alors qu'il parvenait enfin à faire bouger le couple dans la bonne direction. Gideon entendit la femme gémir et il jura. Il n'avait pas le temps. Pas le temps de l'emmener en lieu sûr, pas le temps de sauver tout le monde. Alors qu'il perdait de précieuses secondes à se demander ce qu'il devait faire, une jeune fille se matérialisa près de lui.
- Dites-moi ce que je dois faire, dit-elle simplement.
Surpris, Gideon considéra son visage constellé de taches de rousseur et se cheveux blonds mal coiffés. Elle n'avait pas de baguette.
- Tu es une sorcière ?
Elle secoua la tête sans manifester le moindre étonnement.
- Emmène-la à l'abri, et fais ça avec tous les blessés que tu trouveras. Fais attention à toi. Si tu trouves du monde pour t'aider, tant mieux.
Elle hocha la tête et se pencha pour redresser la blessée, qui poussa un cri de douleur. Mais la jeune fille ne se démonta pas et l'obligea à se lever.
- Comment tu t'appelles ? Demanda Gideon avant qu'elle ne s'éloigne.
- Carrie.
- Bonne chance Carrie.
- A vous aussi.
Mais il était déjà parti, fendant la foule en direction du groupe de Mangemorts. Sur l'estrade, l'animateur était mort. Son sang coulait le long des planches pour s'égoutter sur le sol. Gideon évita de justesse un sort, mais se maudit pour ne pas l'avoir arrêté lorsqu'il entendit un hurlement de douleur derrière lui. Il leva le bras pour contre-attaquer mais il craignait de blesser des Moldus. Il fit apparaître son patronus, persuadé qu'aucun renfort n'était arrivé, puis reprit sa course. Un autre sortilège faillit le frapper alors qu'il courait toujours vers les capuches noires. Il leva la tête et aperçut l'un de ses adversaires perché sur l'estrade ensanglantée. Il se rua vers lui en poussant les personnes qui se trouvaient sur son chemin et monta sur les planches d'un bond. Le Mangemort attendait. Gideon pouvait presque deviner son sourire amusé sous sa capuche. Aucun doute qu'il s'agissait de ce bon vieux Selwyn. Un ennemi de longue date.
- Comment ça va, Prewett ?
- Mieux que toi, Selwyn.
- Désolé, on a interrompu votre petite fête.
- On s'amuse toujours plus quand tu es dans les parages.
- Tu veux danser un peu ?
Un éclair argenté obligea Gideon à faire un peu de côté mais il riposta aussitôt. Selwyn n'eut qu'à se pencher un peu pour éviter le sortilège.
- Je préférerais passer aux choses sérieuses, si ça ne t'ennuie pas, commenta Gideon avec flegme.
Cette fois, le maléfice visa sa tête. Il le contrecarra d'un coup de baguette, un sourire narquois sur les lèvres
- C'est tout ?
Le Mangemort enchaîna aussitôt les sortilèges, que Gideon évita en songeant que pour une fois, il aurait mieux fait de le neutraliser sans s'amuser. Il attrapa le micro abandonné pour le balancer sur son adversaire, qui fut obligé de porter sa main devant son visage. Gideon en profita pour l'attaquer : un sortilège le faucha en le blessant à la jambe. Gideon crut qu'il allait pouvoir l'immobiliser et l'assommer mais une douleur fulgurante dans les côtes l'empêcha de réagir. Il se plia en deux avec un grognement de douleur et eut juste le temps d'apercevoir Selwyn glisser de l'estrade. Il jura entre ses dents. Un sort effleura le haut de son crâne, puis un cri couvrit les hurlements des Moldus :
- Expelliarmus !
Gideon aperçut la tignasse de Potter au milieu de la foule. L'air perdu, il tenait deux baguettes. Le Mangemort qu'il venait de désarmer s'enfuit sans demander son reste. Potter aurait dû l'arrêter, mais il semblait complètement dépassé par la situation. Partout, des gens fuyaient en criant. Des sirènes commençaient à retentir, signe que la police n'allait pas tarder à se manifester. La situation allait de mal en pis.
- Potter ! Hurla Gideon malgré la douleur qui pulsait dans ses côtes. Par ici !
Le jeune homme reprit ses esprits, courut vers l'estrade et rejoignit le sorcier d'un bond. Gideon para juste à temps une attaque tandis que James traversait la scène en courant. Il sauta de l'autre côté, atterrit avec souplesse et se rua dans le même élan vers deux Mangemorts qui torturaient un homme d'âge mûr sous les yeux de sa fille d'une dizaine d'années qui sanglotait.
Malgré la douleur, Gideon descendit à son tour pour désarmer d'un geste trop brusque un Mangemort : la baguette s'échappa des mains de son propriétaire pour se planter dans son œil. Son hurlement fut une douce musique aux oreilles de Gideon, qui arbora un sourire carnassier avant de l'immobiliser pour de bon, avec l'espoir insensé que personne ne viendrait le libérer avant la fin de la bataille. Bataille qui promettait d'être longue.
***
Lily ignora les corps inanimés qui gisaient au sol et attaqua le Mangemort qui se trouvait dans sa ligne de mire. Il s'écroula au sol avec un gargouillement, ce qui permit à Lily de rejoindre le groupe qui résistait aux Mangemorts. Elle constata avec soulagement qu'ils étaient aussi nombreux que leurs assaillants. Parmi eux se trouvait Marlène McKinnon, qui lançait des sortilèges d'une rare puissance. Lily l'avait aperçue quelques fois et avait trouvé qu'une aura de douce folie l'entourait. A présent, elle était simplement terrifiante.
- Attention !
Lily se jeta au sol et roula entre les pieds des combattants alors qu'une jeune femme blonde paraît un sortilège. C'était sans doute elle qui avait crié. Lily ne prit pas le temps de la remercier, trop occupée à reprendre son offensive. Du coin de l'œil, elle aperçut Margaret faire irruption dans la salle, vite suivie par Peter et Remus, qui semblait sur le point de vomir. Grâce à eux, trois Mangemorts furent mis hors d'état de nuire. Autour de Lily, certains sorciers attaquaient sans relâche tandis que d'autres les protégeaient tant bien que mal. Peu à peu, ils reprirent du terrain. Très vite, Lily constata avec soulagement que le nombre de Mangemorts à terre était plus nombreux que celui d'invités. Il ne resta bientôt plus qu'une quinzaine de Mangemorts debout. L'un d'eux cria quelque chose d'incompréhensible et ils disparurent tous dans un craquement sonore.
Le silence qui suivit fut assourdissant. Finalement, un rire légèrement hystérique le rompit. Aussitôt, tout le monde se mit à parler. Une dizaine de personnes se rua vers les Mangemorts immobilisés tandis que d'autres s'approchaient des corps étendus au sol.
- Ça va ?
C'était la jeune femme blonde qui avait protégé Lily. Elle lui tendit la main tout en se présentant :
- Sylvia Blithe.
- Lily Evans. Merci pour tout à l'heure.
- Je vous en prie. Vous travaillez au Ministère ? Je ne vous ai jamais vue avant.
Prise au dépourvu, Lily ne sut quoi répondre. Le regard inquisiteur de la jeune femme ne l'aidait pas.
- Non, je... On m'a prévenue, c'est tout.
Sylvia la considéra un instant en silence avant de hausser les épaules.
- Ne prenez pas cet air paniqué. Je suis une Langue-de-Plomb, vous savez. Je ne chercherai pas à vous extorquer vos secrets.
Soulagée, Lily hocha la tête, avant d'annoncer :
- Je vais aller voir si on a besoin de moi là-bas.
Mais alors qu'elle avançait à travers la salle de bal dévastée, un éclair argenté éclaira l'entrepôt et un cerf lumineux s'avança au milieu d'eux. Lily n'avait jamais vu le patronus de James, mais il ne faisait aucun doute que c'était le sien.
- Trafalgar Square, vite, annonça le cerf avec la voix du jeune homme.
Lily n'hésita qu'un instant avant de transplaner.
Elle déboula au milieu de la débandade en même temps que Margaret, Peter et Remus. Ils échangèrent un regard affolé avant de se séparer. Les Moldus étaient enfin presque tous partis, mais les morts et les blessés s'amoncelaient sur le sol. Lily réprima un haut le cœur tout en évitant un sortilège. La lumière d'un réverbère éclaira soudain le visage de son agresseur, qui avait perdu sa capuche, et elle reconnut l'un des Mangemorts qui avaient attaqué l'entrepôt. C'était donc là qu'ils avaient fui. Elle jura contre elle-même, se maudissant d'avoir cru qu'ils vaincraient si facilement.
A l'autre bout de la place, elle aperçut des voitures de police immobilisées. La lueur orangée qui les entourait indiquait que quelqu'un les avait arrêtées, ainsi que leurs occupants. Au milieu des corps, Lily aperçut une frêle silhouette qui soutenait un blessé bien plus grand qu'elle. Elle voulut l'aider mais un sort l'en empêcha en effleurant sa jambe. Un cri de douleur lui échappa. Elle resta malgré tout d'aplomb et fit face à son adversaire. Mais sa baguette était déjà levée, sa bouche ouverte sur les premiers mots d'une formule :
- Avada Ked...
Un sortilège le percuta en pleine poitrine et il s'écroula. Lily, choquée, tourna son regard vers celui qui avait attaqué le Mangemort, persuadée de trouver un membre de l'Ordre. Mais c'était un Mangemort, qui retira sa capuche d'un geste précipité. Elle croisa ses yeux noirs et se figea. Il dit quelque chose que Lily ne put entendre mais il semblait la supplier de partir. Elle raffermit les doigts sur sa baguette, bien consciente du fait qu'elle aurait dû l'attaquer. Mais après tout, il venait de lui sauver la vie.
Elle secoua la tête et fit volte-face pour se jeter à nouveau dans la bataille. Elle entendit alors un cri sur sa gauche et frémit en reconnaissant la voix de James déformée par la douleur. Elle se précipita aussitôt vers lui. Il se battait en duel avec un petit Mangemort, qui compensait visiblement sa taille par la puissance de ses sortilèges. Le bras droit de James pendait lamentablement le long de son corps et il était réduit à tenir sa baguette de sa main valide. Il se trouvait donc dans l'incapacité quasi-totale de viser. Un nouveau sort l'atteignit et du sang gicla de sa cuisse.
Ravalant son horreur, Lily envoya le Mangemort voler plus loin. Il s'écrasa au sol dans un craquement sinistre, qui eut le mérite de détourner l'attention du Mangemort que Peter affrontait. Le petit blond s'empressa de l'immobiliser avant de chanceler. Il était couvert de sang.
- Avada Kedavra !
Le temps sembla s'arrêter alors que Lily se tournait vers James. Son cœur cessa de battre quelques instants, quelques terribles instants où elle crut que c'était James qui était visé. Mais le cri venait de plus loin. Un homme que Lily n'identifia pas s'écroula.
- JEREMIAH !
C'était la voix de Frank, qui attaqua le Mangemort avec violence. Lily chancela. Elle avait croisé Jeremiah Dawney, l'un des meilleurs amis de Frank, une ou deux fois tout au plus, mais c'était malgré tout un membre de l'Ordre.
Un sortilège effleura le crâne de James, ramenant Lily à la réalité. Les deux jeunes gens se ruèrent vers un petit groupe qui se battait. Alors que la jeune fille sautait par-dessus un corps inanimé, il y eut un éclair et l'obscurité tomba brusquement sur la place. Quelqu'un venait de faire sauter l'électricité de la ville.
Il y eut un instant de flottement avant que les sorts ne se remettent à fuser. Mais personne n'y voyait plus rien. A la lumière des sortilèges qui passaient, Lily distingua Jenny, qui jetait tout un tas de maléfices devant elle dans l'espoir d'atteindre son adversaire. Plus loin, Gideon se battait toujours. Sa haute silhouette fut la dernière chose que vit Lily avant qu'un sortilège ne la percute de plein fouet.
***
Marlène eut un pincement au cœur lorsqu'elle vit partir les plus jeunes membres de l'Ordre. Dans un coin, les Aurors rassemblaient les Mangemorts qu'on avait capturés. Ailleurs, des personnes valides faisaient le tour de l'entrepôt pour s'occuper des blessés. C'était du moins l'intention : Marlène ne voyait en fait personne s'attarder près des corps.
La jeune femme prit une profonde inspiration et se dirigea vers Sylvia Blithe, qui se trouvait agenouillée près d'un homme étendu au sol. En s'approchant, elle reconnut Slyte. Il avait l'air aussi éthéré dans la mort que dans la vie.
- Je pensais qu'il avait fui, commenta Marlène.
- Moi aussi. Eh bien, il a rejoint les esprits. Et le Ministre ?
- J'ai envoyé un message à mon mari il y a peu, il va sans doute bientôt nous rejoindre avec Minchum.
Blithe lui jeta un regard amusé en l'entendant appeler le Ministre de la Magie de façon aussi familière. Marlène lui adressa un bref sourire avant de se redresser. On commençait à aligner les morts sous l'horloge, qui indiquait minuit vingt. Bientôt, onze corps furent couchés sous les lourdes aiguilles dorées. Finalement, c'était assez peu comparé au nombre d'invités présents. Mais Marlène ne doutait pas que beaucoup d'entre eux se trouvaient à Ste Mangouste, affreusement blessés.
Un craquement se fit entendre puis Minchum fit irruption. A part son costume froissé, il semblait en pleine forme. Derrière lui se trouvait Gary McKinnon, lui aussi en un seul morceau. Inquiet, il chercha le regard de sa femme, qui hocha simplement la tête. Il se détendit légèrement avant de se diriger vers le groupe d'Aurors qui entouraient les Mangemorts arrêtés – sept, soit leur plus grosse prise depuis une éternité. Mais ce n'était toujours pas suffisant d'après Marlène.
Minchum s'approcha de Marlène en se tamponnant le front avec un mouchoir d'un blanc immaculé. Il avait un regard de bête traquée.
- Par Merlin, murmura-t-il, je n'arrive pas à croire que notre petite soirée ait ainsi tourné au drame...
- Je crains que ce ne soit pas le dernier.
- Vous ne devriez pas rester là, madame, lança-t-il comme s'il venait de la remarquer.
Marlène pinça les lèvres.
- J'ai combattu aux côtés de vos Aurors, souligna-t-elle.
- Vraiment ?
Sa surprise agaça profondément la jeune femme. Elle prit sur elle pour ne pas lui jeter un sort, bien consciente que les Aurors n'auraient sans doute pas apprécié. De plus, le monde de la magie avait besoin de lui, même s'il n'était plus qu'une loque depuis quelques temps.
- Vous allez devoir faire un discours, rendre hommage aux victimes, reprit-elle pour changer de sujet.
- Ce n'est pas à vous de me dire ce que je dois faire, Mrs. McKinnon, répondit-il en se drapant dans sa dignité.
- Alors agissez et je n'aurai plus besoin de vous le dire !
Son éclat de voix attira l'attention de quelques personnes, qui tournèrent la tête vers eux. Rouge d'embarras aussi bien que de colère, Minchum lui adressa un regard furieux.
- Votre mari est l'un de mes collaborateurs les plus importants, Mrs. McKinnon, mais cela ne vous donne aucun droit !
La mention de son mari fit rendre conscience à Marlène qu'elle ferait mieux de se tenir à carreaux pour lui, aussi battit-elle aussitôt en retraite.
- Veuillez m'excuser. C'est le choc de l'attaque, je suis un peu sur les nerfs...
Elle parvint sans problème à mouiller ses yeux de larmes, reprenant le rôle de femme fragile et frivole qu'elle endossait souvent lorsqu'elle était en société. Minchum se radoucit quelque peu et posa une main compatissante sur son bras.
- Vous devriez aller retrouver vos enfants.
- Je vais... je vais attendre mon mari.
Sa bouche se crispa légèrement. A croire qu'il n'avait pas envie qu'elle traîne dans leurs pattes. Peut-être que son numéro de petite chose fragile ne le convainquait pas tout à fait. Tant pis pour lui. Sans attendre d'autre réaction de sa part, elle se dirigea vers son mari. En approchant, elle s'aperçut qu'il était en pleine discussion avec un homme de taille moyenne au visage sévère. Autour d'eux, les Aurors se balançaient d'un pied sur l'autre, mal à l'aise.
- On ne peut pas les mettre à Azkaban en attendant leur jugement !
- Et pourquoi pas ? Ils sont coupables, personne ne peut le nier. Ils y seront envoyés de toute façon.
- Vous savez comme moi que cela va contre les procédures !
- Nous sommes en guerre, McKinnon, et les prisons du Ministère laissent filer leurs occupants en permanence !
- Et nous sommes toujours dans un État de droit, Croupton !
Marlène se fustigea intérieurement pour ne pas l'avoir reconnu tout de suite. Il s'était fait pousser la moustache depuis la dernière fois qu'elle l'avait vu. Croupton avait failli avoir le poste de Gary et depuis qu'on le lui avait refusé, il s'incrustait en permanence dans les affaires de son mari. L'homme était habile et Gary ne pouvait rien lui reprocher sans avoir l'air de lui en vouloir personnellement.
- Mais s'ils continuent à s'échapper, le Ministère finira pas tomber ! Parfois, il faut savoir prendre les bonnes décisions.
Gary prit une profonde inspiration avant de se tourner vers les Aurors.
- Hargreaves, mettez les dans les cellules du Ministère.
Hargreaves hocha la tête tandis que Croupton prenait un air digne, comme si Gary ne venait pas de faire fi de ses conseils. Marlène s'inquiéta de ce qu'il allait bien pouvoir faire pour arriver à ses fins mais la légère pression que son mari exerça sur son bras la ramena à la réalité.
- Marley ? On peut rentrer, si tu as fini ici.
La jeune femme mourait d'envie de dire oui. Elle était épuisée. Malheureusement, elle savait que la nuit n'était pas finie.
- Rentre sans moi. On va sans doute avoir besoin de moi.
Gary lui adressa un regard soucieux mais il hocha la tête. C'était l'inconvénient d'être marié à une sorcière de talent : on avait toujours besoin d'elle.
- Les enfants voudront te voir demain matin.
- Je serai là, promit-elle. Je ne vous oublie pas.
Elle prit délicatement son visage entre ses mains pour l'embrasser. Lorsqu'elle s'écarta, elle croisa le regard de Sylvia Blithe et se demanda pour la millième fois si les Langues-de-Plomb étaient si solitaires qu'ils semblaient l'être. Après un dernier coup d'œil pour son mari, elle transplana à Trafalgar Square.
***
Tout s'était arrêté d'un coup. Une voix avait tonné dans l'obscurité, un craquement sonore avait suivi. Puis la lumière était revenue sur Trafalgar Square. Au milieu de la place, Albus Dumbledore tenait un petit objet rectangulaire d'une main, sa baguette dans l'autre. Lorsqu'il le vit, James s'écroula, soulagé. Il avait mis Lily à l'abri lorsqu'elle avait été blessée puis avait fait en sorte de survivre, malgré son bras inutilisable et son inquiétude envers Lily.
La grande place de Londres fut un instant plongée dans le silence alors que tous les combattants, hébétés, baissaient leur baguette. Au bruit des combats succéda les gémissements des blessés. Moldus comme sorciers gisaient pêle-mêle sur la place londonienne.
- Que ceux qui peuvent se rendent à Ste-Mangouste, annonça Dumbledore d'une voix forte mais calme. Nous nous occuperons des autres ici-même. Rassemblez les Mangemorts devant l'estrade.
Comme James était capable de marcher, il ne jugea pas nécessaire de se rendre à Ste-Mangouste. Il devait s'occuper de Lily, qu'il avait laissée près de la façade du musée. En se dirigeant vers elle, il aperçut un Peter toujours couvert de sang qui aidait Jenny à soutenir Gideon. Jenny semblait à peu près indemne, contrairement à Gideon qui était pâle comme la mort. Il fut pris d'une toux subite et James, en même temps que les deux autres, s'aperçut qu'il venait de cracher du sang. Il s'écroula, entraînant Jenny et Peter dans sa chute. James se précipita vers eux en s'excusant en pensée auprès de Lily.
Peter leva un regard perdu vers lui lorsqu'il s'approcha mais Jenny ne sembla même pas s'apercevoir de sa présence. Elle caressait doucement les cheveux trempés de sueur de Gideon. Lorsqu'elle finit par lever son visage vers James, il fut frappé par son air inquiet qui la vieillissait. Les yeux débordants de larmes, elle l'implorait silencieusement de faire quelque chose. Gideon fut secoué d'une nouvelle quinte de toux qui tacha les pavés de sang.
James fouilla l'endroit du regard en plissant les yeux dans l'espoir de tomber sur Margaret, Ethel, n'importe qui capable de les aider. Comme si Merlin l'avait entendu, il aperçut Marlène McKinnon qui se dirigeait vers eux. Il n'ignorait pas que c'était une sorcière immensément douée.
La jeune femme était blême. Malgré cela, elle s'agenouilla près de Gideon sans hésiter.
- Allonge-le, ordonna-t-elle à Jenny d'une voix douce.
Lorsqu'elle s'exécuta, James s'aperçut qu'elle avait les mains tremblantes. La respiration de Gideon se fit sifflante lorsqu'il se retrouva sur le dos et il ouvrit un œil.
- Oh, Marley.
- Salut Gideon, sourit la sorcière tout en passant sa baguette au-dessus de son corps.
- C'est la bonne, cette fois ?
- Oh non ! On va devoir te supporter encore un bout de temps, même si tu as fait tout ce qu'il fallait pour que ce soit grave. Maintenant tais-toi. Je vais t'arranger pour qu'on puisse t'emmener à Ste Mangouste.
- Je déteste Ste Mangouste, gémit-il avant que sa voix ne soit étouffée dans un gargouillis écœurant.
Jenny porta une main à ses lèvres. James aperçut une larme couler le long de sa joue mais il était trop épuisé pour la réconforter. De toute façon, seul Gideon serait à même de le faire. Deux minutes et beaucoup d'incantations plus tard, Marlène aida Jenny à remettre Gideon sur ses pieds. Il semblait proche de l'inconscience.
- Demande à le faire admettre tout de suite auprès d'un Médicomage, conseilla Marlène, même s'ils sont sans doute débordés. Dis-leur qu'il a un poumon perforé.
Jenny pinça les lèvres tout en hochant la tête. L'instant d'après, ils avaient disparu.
- Ce n'est pas dangereux de transplaner quand on est blessé ? Interrogea James d'une voix faible.
- Si, acquiesça Marlène, mais il est parfois bien plus dangereux de perdre du temps à se déplacer de manière moins brusque. Lequel d'entre vous est le plus amoché ?
Peter et James échangèrent un regard avant de se désigner mutuellement. La jeune femme eut un sourire triste.
- Peter, c'est ça ? C'est ton sang, tout ça ?
- Presque pas. Je n'ai que quelques égratignures.
- Et toi tu as un bras déboîté, lança-t-elle à l'attention de James. On va donc s'occuper de toi d'abord. Assieds-toi.
James faillit lui dire qu'il fallait surtout rejoindre Lily mais son ton était tellement autoritaire qu'il n'osa pas la contrarier.
- Vous êtes Médicomage ? Interrogea-t-il alors qu'elle tâtait doucement son bras.
- Je l'ai été. J'ai été à la tête du service des blessures magiques à Ste Mangouste pendant quelques mois puis je suis tombée enceinte alors j'ai cédé ma place.
Elle dit tout cela d'un ton qui s'efforçait d'être joyeux et James lui en fut reconnaissant.
- Vous connaissez bien Gideon ?
- Nous étions ensemble à Poudlard. C'est un grand ami, tout comme Fabian, même s'il a un an de moins que nous. Attention, ça va faire mal.
D'un geste rapide, elle attrapa son poignet d'une main en pointant son épaule avec sa baguette. Elle tourna son bras vers l'extérieur d'un geste sec tout en murmurant une formule et son épaule se remit en place dans un craquement. James tressaillit à peine. Il souffrait tellement depuis qu'il avait été blessé que tout son côté gauche était comme engourdi.
- Je te donnerai une potion quand on rentrera au QG mais tu devrais être complètement rétabli dans moins de vingt-quatre heures.
Il n'avait même pas fini de la remercier qu'elle était déjà en train de s'occuper de Peter. Cinq minutes plus tard, il put enfin attirer son attention pour lui parler de Lily et ils se dirigèrent vers la façade du musée. Maintenant que son cerveau n'était plus embrumé par la douleur, il était de plus en plus inquiet.
Ils la trouvèrent là où il l'avait laissée, parfaitement à l'abri. Elle était terriblement pâle et un peu de sang s'écoulait d'une plaie sur sa tempe, mais c'était tout. James se rassura légèrement lorsqu'il posa son pouce contre son cou pour sentir son pouls battre régulièrement, mais il eut un mal fou à déglutir lorsqu'il vit l'air soucieux de Marlène.
- Tu ne sais pas ce qui l'a frappée ?
- Aucune idée. C'était une lumière violette.
- Et elle s'est effondrée aussitôt ?
Il acquiesça et elle tâta doucement le front de la jeune fille.
- Enervatum, tenta-t-elle, mais rien ne se passa.
- Elle a peut-être une autre blessure, ou...
- Non, je ne pense pas. Il n'y a pas de sang, rien... Rien ne semble l'empêcher de se réveiller. Je pense qu'il s'agit d'un maléfice qui plonge la victime dans un coma artificiel qui peut devenir définitif si on n'agit pas assez rapidement.
James blêmit et elle s'empressa de le détromper :
- Quand je dis rapidement c'est trois jours, ne t'inquiète pas ! Il faut juste qu'on rentre au QG et je lui donnerai les potions qu'il faut. Elle se réveillera demain soir.
A peine rassuré, il se pencha pour déposer un baiser sur le front de Lily. Sa peau était chaude sous ses lèvres.
- Je peux la ramener tout de suite ?
- Bien sûr, mais je ne pourrai pas te rejoindre avant un moment. Il y a tellement à faire ici... Et ce pauvre Jeremiah.
Le jeune homme se figea. Dans son inquiétude pour Lily, il avait complètement oublié Jeremiah, qui était mort à quelques mètres de lui seulement. C'était la première fois qu'un membre de l'Ordre mourait depuis qu'ils en faisaient partie. Il déglutit et hocha la tête.
- Vous n'avez qu'à me dire ce qu'il faut lui donner.
- Je ne préfère pas, James. Les dosages sont très précis et...
- Je ne suis pas un empoté !
Elle posa une main apaisante sur son bras.
- J'en suis sûre. Mais il s'agit de plantes dangereuses et il faut être très prudent. Je n'ai pas le temps de tout t'expliquer. Rentre, mets-la à l'abri et veille sur elle. C'est ce que tu as de mieux à faire pour l'instant. Je t'assure qu'elle ne coure aucun danger pour le moment. Je viendrai m'occuper d'elle dès que possible, je te le promets.
Sous le pouce de James, le pouls de Lily battait toujours régulièrement. Il tenta un instant de tenir tête au regard à la fois autoritaire et doux de Marlène mais abdiqua finalement. Il souleva Lily, grimaça légèrement lorsque son poids appuya sur son bras droit encore sensible, et transplana après avoir remercié la jeune femme.
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