Partie II - Chapitre 2


Chapitre 2

Lily faisait tout son possible pour ne pas entendre le bavardage de ses trois amies. Elle fixait obstinément le livre de sortilèges posé devant elle en tentant de comprendre ce que voulait dire l'auteur par « transurbation momentanée des qualités supra-sensibles et intra-corporelles du sujet ». Elle décida finalement de passer outre et continua sa lecture, jusqu'à ce qu'elle se mette sa cuillère dans la joue au lieu de viser sa bouche. Elle marmonna un juron en essuyant le porridge qui commençait à dégouliner dans son cou et pinça les lèvres en remarquant le soudain silence autour d'elle.

- Ça ne vous arrive jamais d'avoir un moment d'inattention ? Interrogea-t-elle d'un ton badin en espérant que ses amies n'éclateraient pas de rire.

Peine perdue. Toutes les personnes présentes dans la salle se tournèrent vers elles et Lily entreprit de se cacher derrière son livre. Heureusement le courrier jugea bon d'arriver à ce moment-là et elle put refaire surface. Elle fit une nouvelle tentative pour ingurgiter son petit-déjeuner, sans lire cette fois-ci. Mais Merlin avait dû décider qu'elle ne viendrait pas à bout de son porridge : un minuscule hibou s'écrasa dans son assiette, éclaboussant la jeune fille et son précieux manuel. Jenny poussa un hurlement hystérique, couvert par le bruit que faisait les volatiles, alors que Lily laissait échapper une franche bordée de jurons. Le hibou, quant à lui, tentait de s'extirper de l'assiette de la rousse. A sa patte était attachée la Gazette du Sorcier, à présent illisible. Lily tenta d'attraper l'oiseau pour limiter les dégâts mais il battait des ailes en hululant joyeusement, toujours englué. Finalement, agacée, elle sortit sa baguette et marmonna : « Stupéfix ». Il retomba comme une masse dans l'assiette dorée, en faisant jaillir le peu de porridge qui y restait.

Avec une grimace de dégoût, Lily détacha le journal et fit mine de le jeter sur Jenny. Puis, elle prit le hibou et interrogea, pleine d'espoir :

- Val, tu sais comment on nettoie cette chose ?

- Beurk, non, répondit-elle avec une grimace. Les hiboux sont les volatiles les moins intéressants du monde. Mais réveille-le, s'il te plaît, ça me fait de la peine de le voir comme ça.

- Mince. J'espérais que tu t'en occuperais. Et non je ne le réveillerai pas, sinon c'est pour moi que tu auras de la peine.

- Ou pas ! rit la jeune fille. Et tu vas devoir te débrouiller toute seule !

Lily soupira et se leva :

- Vous voulez bien prendre mes affaires ? Je vous retrouve aux cachots.

Elle quitta la Grande Salle, son oiseau toujours inerte dans les mains. Alors qu'elle se dirigeait vers la volière, elle fut prise d'un sentiment de culpabilité en se rappelant ce que Val avait dit, et réanima l'oiseau. Il tenta aussitôt de s'envoler, mais ses plumes pleines de porridge l'en empêchaient. Lily le rattrapa avant qu'il ne s'écrase au sol et le tint fermement entre ses mains, tout en consultant sa montre. Elle allait être en retard à cause de ce stupide oiseau, et en plus elle était couverte de porridge. O joie, ô bonheur. La journée s'annonçait bien.

Elle monta aussi vite que possible les marches de la volière et ne put se départir d'un certain sentiment d'apaisement en arrivant au sommet. La petite tour dominait la lande derrière Poudlard, comme éloignée du monde, et le doux hululement des hiboux contrastait avec les hurlements habituels des élèves.

La jeune fille s'avança et se figea en apercevant un élève, debout près d'une des fenêtres. Sa haute taille et ses cheveux bruns en bataille le rendaient reconnaissable entre tous. James Potter ne l'avait pas entendue, occupé à fixer une lettre à la patte d'une chouette hulotte. Cependant étant donné le boucan que faisait le petit hibou dans ses mains, cela n'allait pas tarder. Hésitant encore sur le seuil de la pièce, elle en voulut soudain au jeune homme pour lui causer autant de tracas : pourquoi sa présence devait-elle autant lui importer ? Elle avait autant le droit que lui d'être là. D'un pas décidé, elle avança jusqu'à la vasque qui se trouvait au milieu de la volière. Alors qu'elle commençait à arroser le volatile tout en le tenant au-dessus du bassin, un bruit d'ailes se fit entendre. Distraite, elle s'absorba dans la contemplation de Potter qui observait sa chouette s'envoler à tire-d'ailes, les mains appuyées sur le rebord de la fenêtre. Le hibou de la Gazette profita de ce moment d'inattention pour tenter de s'échapper et planta ses serres dans la main de Lily. Celle-ci poussa un petit cri et le lâcha aussitôt. Elle se mit à sautiller d'un pied sur l'autre en secouant sa main douloureuse, tout en essayant de rattraper le hibou. Il lui fallut quelques instants pour se rendre compte qu'elle ne risquait pas d'aller très loin en procédant de la sorte mais lorsqu'elle s'en aperçut enfin, Potter avait déjà attrapé le rapace. Il souriait, goguenard.

- On ne peut pas tous avoir des réflexes de joueur de Quidditch, lança-t-il en s'approchant d'elle.

- Si ça doit nécessairement s'accompagner de stupidité je crois que je préfère m'en passer.

- Je suis arrivé en septième année, alors ça de ne doit pas être si violent que ça. Qu'est-ce que tu voulais à cette pauvre bête ?

- Hé, ne dis pas ça que comme si je la martyrisais, c'est elle qui m'a griffée !

- Sans doute parce que tu la martyrisais, raisonna James, l'air très content de lui.

- Non. Et rends-moi ce hibou, si tu es là seulement pour être désagréable.

Elle tendit les mains vers lui, bien décidée à se débrouiller sans Potter, mais il leva les bras en souriant de plus belle. Il était apparemment décidé, lui, à lui mettre des bâtons dans les roues. Quel imbécile ! C'était la première fois depuis cette scène au bord du lac qu'ils se parlaient autant, et Lily s'en serait bien passé. Elle détestait James Potter.

- Je suis toujours gentil et charmant voyons. Dis-moi juste ce que tu lui voulais et ensuite je le ferai. (Il grimaça) Enfin d'abord je vais le laver.

- Ah, tu n'es peut-être pas si bête que ça, commenta Lily en croisant les bras. C'est justement ce que je comptais faire.

- Avec un peu de chance ça n'a rien à voir avec mon intelligence et ce sont juste mes talents en divination qui s'éveillent enfin, après six années de dur labeur inutile à coups de feuilles de thé.

La jeune fille tenta de réprimer un sourire, mais c'était trop tard : James l'avait perçu. Il eut soudain l'air un peu plus joyeux et plongea énergiquement le hibou dans la vasque. Cela parut plaire particulièrement au volatile qui se mit à hululer en battant l'eau avec ses serres. Une moue perplexe se peignit sur le visage de Potter, et cette fois Lily grommela :

- Ce truc est insupportable. Je ne sais pas ce qu'ils font de leurs hiboux à la Gazette, mais j'ai dû hériter du fond du fond.

- Je pensais que c'était le tien, remarqua-t-il. C'est bien un truc de filles d'avoir un mini-hibou.

- Beurk, les filles que tu fréquentes doivent avoir très mauvais goût. Ah mais oui, suis-je bête, puisque ce sont tes amies.

Il lui jeta un rapide coup d'œil et rétorqua :

- C'était facile ça, Evans. Figure-toi que ce ne sont pas mes amies justement. Par Merlin ! Je vais lui couper la tête à ton hibou !

Celui-ci, presque entièrement débarrassé de son porridge, tentait de voler vers la liberté. Il avait encore le crâne couvert de nourriture, mais cela ne paraissait pas l'embêter. Potter abandonna finalement sa lutte acharnée contre l'instinct de survie et le hibou jaillit de ses mains comme une fusée, pour se prendre ensuite l'épaule d'une Lily prise au dépourvu. Elle n'en souffrit pas beaucoup, étant donné le gabarit du volatile, mais l'oiseau un peu plus. Qu'est-ce que c'était que ces oiseaux qui étaient apparemment incapables de faire trois mètres sans tomber ? La Gazette avait dû le recruter dans un élevage de hiboux de cirque.

Elle le ramassa en se demandant ce qu'elle allait bien pouvoir faire de cette calamité. Si elle le lâchait dans la nature, il ne reviendrait sans doute jamais à bon port. Une petite voix malicieuse lui chuchota que ce ne serait plus de son ressort mais une mini-Val courait partout dans sa tête en l'accusant d'avoir abandonné le pauvre bébé-chou aux Focifères et aux Pitiponks.

- Evans ? Tu es tombée amoureuse du hibou ou quoi ?

- Hein ?

Elle cligna plusieurs fois des yeux, brusquement ramenée à la réalité.

- Je te demandais si tu étais tombée amoureuse de cette sale bête, répéta Potter en haussant les sourcils.

- Non, mais comme il m'est plus sympathique que toi je préfère le regarder. Et je me demandais ce qu'on allait bien pouvoir en faire.

- Mangeons-le, proposa-t-il avec un sourire carnassier, les yeux pétillants pour une raison qui échappait totalement à Lily. Ses souffrances seront finies.

- Très bien, je te laisserai te débrouiller avec SOS animaux, rétorqua-t-elle en se creusant les méninges.

Si elle restait plus longtemps avec Potter elle allait faire une crise de nerfs.

- S... quoi ? Encore une référence moldue ?

- Comment ça « encore » ? J'en fais tant que ça ?

- Tu m'as parlé de Sherlock Holmes la dernière fois.

- Quand ça ? Je te rappelle qu'on ne s'adresse à peu près jamais la parole.

- En cinquième année.

- En cin...

Lily le dévisagea, sidérée.

- Et tu t'en rappelles encore ?

James haussa les épaules, mais il avait l'air un peu gêné.

- Bah oui, ça m'a interpellé. Bref, j'ai fini par trouver qui c'était. Alors, c'est qui SOS-Machin ?

La jeune fille lui expliqua en trois mots ce que c'était, ne parvenant toujours pas à s'en remettre. Pourquoi, par Merlin, Potter se rappelait-il aussi bien ce qu'elle lui avait dit deux ans plus tôt ?

- Mais en fait je parlais de Val, acheva-t-elle en tentant de se reprendre, c'est-à-dire d'arrêter de le fixer comme s'il avait un pingouin sur la tête.

- Argh. Ok, on annule l'opération brochette parce que cette fille est la plus tarée de toutes tes amies tarées.

- Elles ne sont pas tarées, protesta Lily.

- Bien sûr que si. Je suis sûr que c'est Val qui a eu l'idée de faire voler toutes les plumes des dortoirs des filles l'année dernière.

Lily leva les yeux au ciel

- Non, ça c'était moi.

James la dévisagea, stupéfait.

- Non ? Sérieusement ? C'était toi ? Tu as vidé les oreillers et pris les plumes de toutes les élèves ?

- Sois pas si étonné, je ne fais pas que travailler dans la vie. Et oui, on a absolument tout vidé. Avec un sort bien placé c'était rapide.

Le jeune homme pouffa et secoua la tête.

- J'en reviens pas. Le plus dégoûtant dans toute cette histoire c'est que vous avez tout rangé avant que McGonagall arrive.

- Qu'est-ce que tu crois, on n'est pas des bleus. Contrairement à toi.

- Je me fais rarement prendre, figure-toi. Sauf quand tu t'en mêles.

- Je ne suis pas préfète en chef pour rien.

- Si McGonagall apprend tes exactions, tu risques de ne pas le rester très longtemps.

- Si tu me balançais elle ne te croirait même pas, rétorqua Lily.

Elle leva la main pour chasser une mèche de cheveux qui l'agaçait et, ce faisant, aperçut sa montre. Huit heures quarante. Oups.

- On est salement à la bourre ! S'exclama-t-elle, horrifiée, en amorçant un mouvement vers la porte de la volière.

- Hé, on se calme, lança le jeune homme. Déjà, ne bouge pas. Tu es couverte de porridge.

Avant que Lily ait pu dire quoique ce soit, il sortit sa baguette et donna un petit coup sec dans l'air. Elle ne savait absolument pas en quoi consistait ce sort, mais en tout cas c'était efficace.

- Euh, merci, lâcha-t-elle, légèrement interloquée par l'aide gratuite que Potter venait de lui apporter.

- Je t'en prie. Bien, qu'est-ce qu'on a comme cours ?

Lily tergiversa quelques instants, puis décida finalement qu'il avait droit à un geste bon de sa part :

- Bouge-toi, et ensuite je te répondrai.

James la suivit docilement dans les escaliers, qu'elle dévala quatre à quatre. Par Merlin, elle détestait être en retard !

Alors qu'ils traversaient le hall au pas de course, elle reprit :

- Je te ferai remarquer qu'on est rentré depuis trois semaines et tu ne connais toujours pas ton emploi du temps !

- Non. Alors, qu'est-ce qu'on a ?

- Potions. Heureusement que tu as été gentil, Slug t'épargnera peut-être aussi.

- Ce cher Slug... Est-ce qu'il t'a déjà demandé en mariage ?

- Oh la ferme, abruti.

Ils arrivèrent aux cachots, essoufflés. James s'apprêta à frapper mais Lily posa une main sur sa poitrine pour le repousser, toqua à la porte et prépara son plus beau sourire pour ce cher Slughorn. Après avoir débité toute leur histoire, elle alla s'asseoir, ignorant les regards stupéfaits de ses amis. Elle détestait Potter, n'est-ce pas ?

***

James était euphorique. Il s'était fait reprendre trois fois par McGonagall parce qu'il n'écoutait pas, s'était renversé de la sauce dessus pendant le déjeuner et venait de faire passer des essais désastreux pour l'équipe de Quidditch, mais il s'en fichait. La seule pensée de Lily disant « on » le réjouissait au plus haut point. La dernière fois qu'ils avaient été aussi proche, c'était en cinquième année, avant qu'il ne recommence à la draguer sans aucune finesse vers la fin de l'année. Puis il y avait eu cette terrible dispute au bord du lac. James avait cru que c'était fini, qu'elle avait tué les minces espoirs qu'il conservait... Comme d'habitude, il s'était trompé. Evans le fascinait toujours autant en sixième année qu'elle ne le faisait autrefois et ne cesserait jamais de le faire. Il avait continué à essayer de la faire rire mais elle se contentait en général de l'ignorer ou alors le collait. En somme, c'était la plus longue conversation qu'ils aient eu depuis leur cinquième année. Une dizaine de phrases à propos d'un hibou, quelques sourires et un petit service rendu. Une façon banale de démarrer une amitié, même si cela venait six ans trop tard. James ignorait si cela allait accrocher ou non, mais il comptait bien essayer. Cette fois, Evans ne lui filerait pas entre les doigts.

Les cheveux humides après une douche bien méritée, il descendit dîner. Ses amis, ces traîtres, avaient refusé de l'attendre en prétextant qu'il mettait toujours trois heures à prendre une douche. Ce qui était tout à fait faux.

Il les retrouva à table, riant aux éclats. Peter était en train de raconter, à coups de grands gestes et d'exclamations, une histoire à propos d'un sorcier malvoyant et d'une goule. Sirius était plié en deux, le nez dans son assiette, Remus effondré sur son épaule.

- J'ai l'air d'avoir raté quelque chose d'épique, commenta James en se glissant près de Peter, qui avait l'air très fier de lui.

- Oh ouais, t'as raté la meilleure histoire de l'année, répondit Sirius en poussant la tête de Remus de son épaule.

- T'en fais pas James, je te la raconterai ce soir, le rassura Peter joyeusement.

- Merveilleux ! Merci Queudver.

Le blond se contenta de sourire, ravi, puis interrogea avidement :

- Comment étaient les essais de Quidditch ?

- Absolument affreux. Il y avait une large majorité de filles qui étaient là juste pour glousser, apparemment, un Deuxième Année qui ne sait pas tenir sur un balai et un Cinquième Année qui avait peur de se salir.

- C'est tout ? Aucun n'était potable ?

- Si, une fille de Cinquième Année, mais elle s'est mise à me draguer quand je l'ai retenue alors ça m'a énervé, et je l'ai virée. Du coup il ne restait plus qu'un Quatrième Année qui manque un peu de pratique, mais je pense qu'il peut être vraiment bon. Par contre, il nous manque toujours un batteur.

- Tu prends ça vachement au sérieux, commenta Remus en mordant dans une pomme.

- Tu me le reproches ? Sourit James en se servant de frites ; les trois garçons ne l'avaient pas du tout attendu pour manger. Si on perd la Coupe cette année, McGonagall va faire en sorte que je ne quitte pas Poudlard vivant.

- Ah, ne parle pas de quitter Poudlard, pitié, supplia Lunard en grimaçant. Ça va être terrible.

- Oh le bébé-chou, il ne veut pas quitter sa maison ! Se moqua Sirius.

- Tu sais très bien pourquoi ce sera terrible, rétorqua son ami en le fusillant du regard.

- Oh allez, je plaisante Lunard, calme-toi.

Ils commencèrent à se chamailler et James saisit son assiette pour reprendre des frites. L'entraînement l'avait affamé alors qu'il n'avait même pas volé. La conclusion de cette histoire, c'était qu'être capitaine de Quidditch était à se flinguer.

Il baissa les yeux sur son assiette pour y mettre de la nourriture et ...

- Aaaah !

L'assiette retomba en cliquetant contre la table alors que James la regardait avec des yeux hallucinés. Sans se rendre compte que ses amis le dévisageaient comme s'il était devenu fou, il posa prudemment ses doigts sur la vaisselle et retint son souffle lorsque les lettres dorées apparurent de nouveau. « Quinze octobre, la dame au chapeau pointu ». D'abord surpris, James ne ressentait plus à présent que le frisson de l'aventure. Tout excité, il regarda le message disparaître, se creusant déjà les méninges. Qu'est-ce que cela pouvait bien signifier ? Y avait-il un fantôme avec un chapeau pointu ou bien...

- Euh, James ? Tout va bien ?

Il braqua son attention sur Sirius, qui le considérait comme un psychiatre observant un fou potentiellement dangereux.

- Il vient de se passer un truc de dingue. J'ai...

Le jeune homme s'interrompit brusquement en sentant sa langue se coller à son palais. Il ne lui fallut que quelques instants pour comprendre : « Langue de plomb ».

La sensation passa et James marmonna à voix haute, de plus en plus intrigué :

- Langue de plomb. Ouah, c'est la première fois que je le subis, c'est vraiment pas agréable.

Remus et Peter joignirent leur expression intriguée et assez effarée à celle de Sirius. James haussa les épaules et recommença à manger en toute insouciance.

- Me regardez pas comme ça, je ne peux pas vous expliquer de toute façon.

- J'ai l'impression que cette conversation n'a pas grand sens, commenta Peter à voix basse.

- Elle n'en a même aucun, renchérit Remus.

James cessa de prêter attention à ce qu'ils racontaient. Il cherchait mentalement une dame au chapeau pointu mais ne trouvait rien. Et, par Merlin, d'où venait ce message ? Pourquoi sur son assiette ? Et pourquoi le sortilège de Langue de plomb ? Le message était apparu lorsqu'il avait touché la vaisselle, donc il devait lui être destiné à lui seul, sinon il aurait été visible dès le début du repas. Que pouvait-on lui vouloir ? Pourquoi le quinze octobre, et pas tout de suite ? Il avait l'impression d'être dans un jeu d'énigmes, un peu comme dans ces histoires de Sherlock Holmes qu'il avait lu durant l'été, à cause d'Evans.

Un juron étouffé le tira de ses réflexions et il fronça les sourcils en direction de Sirius, qui clignait des yeux devant son assiette. Il tourna la tête vers son ami et fit simplement :

- C'est bizarre. Très, très bizarre.

***

- Cet endroit est vraiment devenu déprimant, commenta Jenny en jouant distraitement avec ses haricots verts.

- Quoi, Poudlard ? Interrogea Margaret avant d'avaler ses frites.

- Non, le Groenland.

Lily promena son regard sur la Grande Salle et dut s'avouer que Jenny avait raison.

- Toutes ces places vides, c'est terrible, fit-elle.

- Ouais. Même Potter et Black ont arrêté de faire n'importe quoi. Où va le monde, je vous le demande.

- Oh, ça m'étonnerait qu'ils aient arrêté pour longtemps.

L'expression distraite de Jenny s'effaça pour faire place à un gros sourire et elle s'exclama :

- Mais c'est vrai que vous êtes meilleurs amis maintenant !

- Jenny, tu es insupportable ! Je t'ai déjà expliqué que tout ce que j'ai raconté à Slug est vrai ! On ne se roulait pas un patin dans un placard !

Val et Margaret pouffèrent et la rousse les fusilla du regard.

- Lily, rit Jenny, quand vas-tu comprends que ça ne sert à rien de te défendre ? Tant que Potter sera dans les parages à te regarder quand tu passes, je ne te lâcherai pas !

- Jenny, Jenny, Jenny... soupira Lily, tu n'as pas changé depuis qu'on est entrées à Poudlard.

- Eh non ! Merveilleux, hein ? Je trouve que la constance est une valeur plutôt pas mal par les temps qui courent.

- Je suis entièrement d'accord, lança une voix indubitablement masculine derrière la blonde.

Lily sentit son visage se vider de son sang et leva lentement les yeux du visage de son amie, qui semblait sur le point d'exploser tant elle avait envie de rire. La jeune fille n'aperçut que le dos de Potter, qui s'éloignait en compagnie de ses amis, mais c'était largement suffisant pour la faire mourir de honte. Aucun doute qu'il avait tout entendu. Il tourna alors la tête vers elle, un petit sourire indéchiffrable sur les lèvres, puis disparut derrière les portes.

- Jenny. Je vais t'étriper.

- Pourquoi est-ce que j'ai l'impression que cette situation se répète en permanence ? Gloussa la coupable.

- Parce que tu parles en permanence de Potter ! Je parie que tu es encore amoureuse de lui.

- Peuh, bien sûr que non. Je préfère les hommes plus mûrs.

Lily la dévisagea, légèrement interloquée, jusqu'à ce qu'elle agite les mains devant son nez :

- Eh ! Je rigole ! On se détend la préfète !

- Tu es vraiment hyper bizarre comme fille, commenta Lily. Et ...

Elle fut interrompue par un soudain raclement de chaise juste à côté d'elle. Surprise, elle dévisagea Margaret qui regardait son assiette comme si elle allait la mordre. Prudemment, elle en approcha les doigts et sembla cesser de respirer.

Lily consulta ses deux autres amies du regard et s'aperçut que Jenny était dans le même état que Margaret.

- Val ? Murmura-t-elle. Qu'est-ce qu'il se passe ?

- Aucune idée. Tu crois que les assiettes ont des pouvoirs hypnotiques ?

- Ça m'étonnerait.

- Les filles, est-ce que vous connaissez le...

La voix de Magaret s'interrompit brusquement et elle sembla chercher son souffle quelques instants, les yeux écarquillés. Le malaise passa et elle balbutia :

- Je ne comprends pas ce qu'il se passe...

- Maggy, tu as vu les...

Comme Margaret un instant plus tôt, Jenny fut incapable de continuer sa phrase. Lily, taraudée par la curiosité et une certaine excitation, baissa les yeux sur son assiette. Apparemment, tout venait de là. Elle approcha sa main et la posa dessus. Aussitôt des lettres apparurent sur le pourtour : « Douze octobre, par une froide nuit d'été ».

La jeune fille releva la tête et son regard passa de Jenny à Margaret, qui discutaient du sortilège de Langue de plomb. Aussi resta-t-elle silencieuse, l'esprit en ébullition : qu'est-ce que tout cela pouvait bien vouloir dire ?

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