Partie I - Chapitre 18
Chapitre 18
- Nous avions pris la description de votre baguette après qu'elle a disparu, et cela semble correspondre. C'est bien votre baguette, Mr. Potter ?
- Oui, balbutia James, mais Professeur, jamais je n'aurais ... Je n'ai pas...
Il passa la main dans ses cheveux, ses yeux faisant la navette entre sa baguette et le directeur.
- Professeur, supplia-t-il, vous savez que je n'ai pas fait ça...
Les yeux bleus d'Albus Dumbledore s'adoucirent.
- Je le sais, Mr. Potter. Malheureusement ce n'est pas moi qu'il va falloir convaincre. Mais croyez bien que je vous défendrai.
- J'étais dans la Salle Commune toute la soirée, reprit James d'une voix faible sans savoir ce qu'il disait, tout le monde peut l'attester, et ...
- Tout le monde hein ? Interrompit une voix bourrue. Qui nous dit que tu ne les a pas ensorcelés, payés ou menacés ?
James tourna la tête vers l'entrée du couloir. Un homme s'avançait vers eux. Ses cheveux châtains mi-longs tendaient vers le roux et si au premier abord on aurait pu le croire corpulent, James était persuadé qu'il était en fait tout en muscles. Une cicatrice courait le long de sa joue, et une autre partait de son sourcil gauche pour remonter vers ses cheveux. Deux yeux vert-mousse le scrutaient, mauvais.
- Alastor, salua Dumbledore. Merci d'être venu aussi vite.
- C'est une urgence, rétorqua le dénommé Alastor en secouant la main comme pour dire que ce n'était rien. Vos professeurs patrouillent pour chercher un intrus ?
Le directeur hocha la tête et l'homme marmonna « Bien », avant de s'agenouiller près du corps de Laverlane.
James ne pouvait s'empêcher de le regarder parce que c'était un phénomène comme il n'en avait jamais vu. Dumbledore se pencha vers lui et murmura :
- Alastor Maugrey, Auror.
En comprenant que c'était lui qui allait possiblement l'arrêter pour meurtre, le jeune homme le trouva tout de suite moins fascinant. Il détourna le regard et fit un pas pour aller s'asseoir par terre contre un mur. Un pas seulement.
- On ne bouge pas ! Rugit Maugrey, sa baguette pointée vers lui.
James tomba en avant, pétrifié, tandis que Dumbledore s'exclamait :
- Alastor enfin !
- Quoi, « enfin » ? Les meurtriers ne bougent pas, ne font aucun geste suspect, ou je les pulvérise.
Il y eut un silence, et James se demanda s'il allait passer la nuit sur la pierre froide du château, avec comme seule vision le dallage du couloir.
- Nous devrions discuter de cela calmement avec les élèves, proposa finalement Dumbledore d'une voix ferme.
- Très bien. Mais je ne vois pas l'intérêt étant donné que nous avons déjà le meurtrier.
- Alastor, libérez-le. Il viendra avec nous dans mon bureau.
Il y eut encore un silence puis, enfin, Maugrey s'exécuta.
***
Lily suivit Dumbledore sans vraiment réaliser ce qu'il se passait. A côté d'elle marchait le préfet de Poufsouffle, portant dans ses bras sa petite sœur endormie. Derrière eux se trouvaient James et ses trois amis, escortés par Maugrey et Etrog.
Lorsque Siruis, Remus et Peter avaient demandé pourquoi ils étaient là, on leur avait répondu qu'ils pourraient tout aussi bien avoir tué le professeur Laverlane. En effet soit James avait fait semblant d'avoir perdu sa baguette pour ne pas attirer les soupçons, soit l'un de ses amis l'avait volée pour faire accuser James ou ne pas être accusé.
Lily fronça les sourcils. Ce raisonnement était insensé : pourquoi James aurait-il donné la description de sa baguette ? Et ses amis auraient pu voler la baguette de quelqu'un d'autre, cela aurait été moins suspect.
Lily n'envisageait même pas que Remus ou Peter aient pu faire ça. Quant à Sirius et James ... Elle les détestait, mais cela lui paraissait tout aussi invraisemblable.
Elle soupira de frustration. Il était également impensable que quelqu'un ait voulu du mal à Laverlane. Et pourtant il était mort.
Alors qu'ils montaient les uns après les autres les escaliers de pierre menant au bureau de Dumbledore, Lily comprit soudain que désormais tout lui semblerait invraisemblable, pour la simple raison que son monde venait de voler en éclats. Plus rien ne serait comme avant.
Une légère douleur la ramena à la réalité et elle observa son bras droit, étonnée d'y trouver de profondes marques rouges en forme de croissant de lune. Elle ne s'était même pas rendu compte qu'elle s'était fait mal.
De nouveau plongée dans ses pensées, il fallut que Dumbledore lui tapote l'épaule.
Elle leva les yeux vers lui et il sourit :
- Vous êtes une jeune fille courageuse, Miss Evans. Il faut tenir le coup, d'accord ?
Lily hocha la tête et se rendit compte que ses yeux brûlaient terriblement.
- Voulez-vous bien allez vous asseoir ? Nous avons beaucoup à faire et le plus tôt nous commenceront, le plus tôt nous auront fini.
Il tendit la main vers la lourde porte en chêne de son bureau, dans lequel le garçon de Poufsouffle la regardait, sa petite sœur dans ses bras. Lily les rejoignit et s'assit sur une chaise sortie de nulle part – ou de la baguette de Dumbledore.
Tous s'installèrent, sauf Maugrey qui entreprit de soulever tous les objets du bureau de Dumbledore – en somme beaucoup de choses, cherchant on ne savait quoi. Le professeur Etrog resta debout derrière les quatre garçons, ressemblant à un agent du MI6 dans sa robe noire de sorcier.
Dumbledore passa derrière son bureau et posa les mains à plats dessus. Il les scruta les uns après les autres, ses yeux bleus les passant aux rayons X par-dessus ses verres en demi-lune. Lily se tortilla sur son siège, mal à l'aise.
- Je ne vous ferai pas de discours, annonça-t-il finalement d'une voix ferme mais douce. Ce qui s'est passé ce soir est dramatique, aussi je vous demande d'être sincère, même si cela implique d'avouer certaines entorses aux règlements. (Il jeta un regard appuyé à Potter et ses amis). Je crains également que vous ne deviez rester éveillés encore quelque temps. Je propose que nous commencions par entendre ce que les Hardley ont a nous dire. Je suis désolé, vous allez devoir réveiller votre sœur.
Toutes les têtes se tournèrent vers les deux élèves de Poufsouffle. Le garçon eut l'air gêné et il tapota la joue de sa sœur jusqu'à ce qu'elle ouvre les yeux. Puis il se racla la gorge et raconta sa soirée :
- Je devais faire ma ronde ce soir, Emma le savait. Il lui arrive d'avoir des moments de ... euh ... détresse depuis ...( Il regarda le directeur d'un air suppliant et celui-ci hocha la tête). Bref, elle m'a trouvé. Je n'ai pas ... je n'ai pas osé la gronder pour ça. Elle est restée un peu avec moi puis j'ai réussi à la convaincre d'aller se coucher. Après qu'elle soit partie j'ai entendu quelqu'un crier et j'ai pensé que c'était elle, alors je suis venu.
Il déglutit et resserra les bras autour de sa petite sœur. Celle-ci regardait tout autour d'elle avec de grands yeux, les joues terriblement pâles. Lily lui sourit, mais cela eut pour seul effet de la faire blêmir encore plus.
- Miss Hardley, demanda doucement Dumbledore, pouvez-vous nous dire pourquoi vous avez crié ?
Il fallut plusieurs minutes de cajoleries de la part de son frère pour qu'elle accepte de parler :
- Je rentrais au dortoir, dit-elle d'une petite voix fluette, quand j'ai vu le professeur Laverlane.
Sa voix trembla et son frère lui frotta le bras pour l'engager à continuer.
- J'ai crié parce que quand je rêve de papa et maman je les vois comme ça.
Cette fois ce fut au tour du préfet de pâlir. Il attira la tête de sa petite sœur contre sa poitrine et ils restèrent l'un contre l'autre en silence.
Lily détourna les yeux avec l'impression de violer leur intimité mais ce faisant elle croisa le regard de Potter. Il haussa un sourcil et elle rougit avant de fixer le bureau.
Ensuite, ils durent tous raconter leur soirée, James et ses amis insistant sur le fait que de nombreux élèves les avaient vus dans la Salle Commune.
Lily commença à bâiller quand Remus raconta exactement la même chose que Sirius juste avant lui et elle s'endormit tout à fait lorsque ce fut au tour de Peter.
Un bruit sourd la réveilla en sursaut. Maugrey avait pris la place de Dumbledore, les deux mains sur le bureau. Son visage était tordu par la rage. En face de lui se dressait James, les poings serrés, sa chaise renversée sur le sol.
- Je ne l'ai pas tué !
- Ne mens pas, mon garçon ! J'en ai envoyé des bien plus expérimentés que toi à Azkaban !
- Pourquoi j'aurais fait ça hein ? Je ne suis pas un criminel !
Lily crispa les doigts sur les bords de sa chaise. Elle n'avait jamais vu James perdre son calme de cette façon, et c'était effrayant.
Une longue main fine se posa sur l'épaule du jeune homme et l'obligea à s'asseoir.
- Alastor. Il suffit.
La rousse se tendit un peu plus. Jamais elle n'avait entendu le directeur parler aussi sèchement.
Potter plongea la tête entre ses mains et Black posa une main sur son épaule.
Lily ferma les yeux. Peut-être qu'elle rêvait. Laverlane lui donnerait un travail supplémentaire le lendemain parce qu'elle s'endormirait en cours et James serait toujours aussi arrogant, aussi sûr de lui.
- Aucun d'eux n'a la puissance requise pour jeter un tel sortilège, vous le savez bien !
La jeune fille grimaça lorsque ces quelques mots de Dumbledore lui parvinrent. Non, elle ne dormait pas.
***
- Il semblerait que nous soyons dans une impasse.
Le bureau de Dumbledore était plein à craquer d'élèves, étant donné que des Septièmes Années avaient été réveillés pour assurer que James et ses amis étaient tous restés dans la Salle Commune presque jusqu'à minuit. Remus, Peter et Sirius avaient quitté James depuis à peine dix minutes lorsque McGonagall était arrivée. Il semblait donc qu'aucun d'eux n'ait pu commettre le meurtre. Tous les élèves dévisageaient à présent leur directeur, attendant qu'il annonce la suite des événements.
Il caressa sa barbe d'un air pensif et finalement se tourna vers Maugrey.
- Je crois qu'ils peuvent aller se coucher.
L'Auror se renfrogna et croisa les bras sur sa poitrine. James lâcha un soupira agacé en se demandant de quel droit il imposait sa loi à Dumbledore. Les yeux de Maugrey se braquèrent sur lui et le jeune homme se tassa au fond de sa chaise. « Peut-être parce que c'est un fou furieux », songea-t-il.
- Très bien, abdiqua finalement Maugrey. Mais je reste au château.
Dumbledore hocha la tête et fit signe aux élèves de se lever. Le professeur Etrog prit la tête de la colonne pour les conduire jusque dans la Grande Salle. Cependant au moment où James allait refermer la porte derrière lui, Maugrey beugla :
- Vigilance constante ! Vous ne m'aurez pas !
James sursauta et s'empressa de claquer le battant avant de rejoindre les autres. « Un véritable fou furieux ».
Il se plaça à côté de Sirius, plongé dans de sombres pensées.
- James ?
Il tourna la tête vers les yeux bleus de son ami qui le regardait, l'air sombre.
- Ils ne peuvent pas t'inculper, tout le monde t'a vu dans la Salle Commune. On va trouver qui a fait ça.
James lui adressa un pâle sourire et lui donna un petit coup d'épaule pour le remercier de son soutien.
***
Lily ne comprit pas tout de suite où elle était lorsqu'elle se réveilla. Elle avait les yeux bouffis après avoir fondu en larmes dans les bras de Val, vers deux heures du matin. Elle avait l'impression de voir le corps de Laverlane sous ses paupières closes. La sensation que la mort était collée à sa peau la poursuivait.
« Bref », songea-t-elle en se redressant dans son sac de couchage, « une mauvaise journée en perspective ».
Les élèves purent rejoindre leurs dortoirs avant de redescendre pour le petit-déjeuner. Lily entendait les gens chuchoter sur son passage, tandis que d'autres pointaient du doigt James et sa bande.
Tous savaient qu'il s'était passé quelque chose de grave, mais seules les personnes mises en cause en connaissaient la teneur. Lily frémit en arrivant dans la Grande Salle remise en ordre en constatant que Dumbledore se tenait devant la table de Professeurs. Qu'allait-il leur dire ?
Tous les élèves furent envoyés cherchés et bientôt la salle résonna du bruit des conversations. Cependant lorsque le directeur leva la main le silence s'installa aussitôt.
- Bonjour à tous, chers élèves.
Le regard bienveillant de Dumbledore traversa la salle.
- J'aimerais vous dire que vous avez tous dormi ici-même seulement parce que j'ai eu une crise de folie et qu'il m'a semblé amusant de procéder ainsi. Cependant, la vie n'est pas toujours si amusante qu'on peut le penser, malgré tous les efforts que nous pouvons fournir. La réalité finit toujours par nous rattraper. J'ai essayé de protéger ce château des attaques du monde extérieur autant que possible, mais la Magie Noire a fini par entrer en ces murs, sous sa forme la plus terrible. La Mort. Hier soir, le Professeur Patrick Laverlane a été assassiné.
Un murmure horrifié parcourut la salle et quelqu'un éclata en sanglots.
- Nous ignorons l'identité du meurtrier. Nous ne savons rien, sinon qu'un homme bon a été tué. Quoiqu'il ait pu vous dire, je sais qu'il aimait chacune de ses classes, chacun de ses élèves plus ou moins turbulents. Il n'avait d'autre aspiration que de transmettre son savoir, sa passion pour la botanique. Certains vous diront que c'est un souhait bien modeste, voire médiocre. Répondez leur que c'était un beau choix, car c'était ce qu'il aimait. Élèves de Poufsouffle, vous savez quel homme c'était. Il lui arrivait quelque fois de perdre son calme, et certains en ont fait les frais. Mais je suis persuadé que ce n'est pas ce que vous retiendrez de lui. Vous vous souviendrez de la façon dont il voyait la beauté dans chaque objet, chaque être vivant. Aux yeux du Professeur Laverlane, personne n'était inutile. Tout le monde avait sa place. Il est une victime parmi tant d'autres de cette guerre, un martyr de plus. Quand l'heure des choix sera venue, n'oubliez pas qu'un homme bon a été tué.
Sur cette parole énigmatique, il fit un signe au professeur McGonagall qui lui apporta un gobelet de jus de citrouille. Il le leva et dit :
- Au Professeur Laverlane.
Tous les élèves firent de même et le directeur, après avoir chuchoté quelques mots à son adjointe, sortit à grands pas de la salle, suivi par le chuchotement des élèves.
Le professeur McGonagall prit la place du directeur et commença :
- Chers élèves, la journée se déroulera normalement malgré les événements...
***
Une atmosphère pesante plana sur le château ce jour-là. Il n'y eut pas d'éclats de rire, pas plus que de galopades d'élèves en retard dans les couloirs. Personne n'avait envie d'être exubérant. Chacun sentait que ce n'était pas le moment.
James était d'autant moins enclin à rire que le regard des autres élèves le suivait dans le château. Désormais tout le monde savait, de source plus ou moins sûre, que Laverlane avait été tué avec la baguette de James.
Le soutien de ses amis l'aidait, mais il n'avait pas l'habitude d'être observé pour un acte si affreux. D'habitude, il lisait l'admiration dans le regard des gens. Pas le dégoût.
Le pire était que Maugrey errait dans les couloirs, promenant son regard perçant sur chacun, semblant les accuser chacun leur tour, et plus spécialement James. Il le suivit dans un couloir d'un cours à l'autre, attendant apparemment qu'il tue quelqu'un ou qu'il ait une crise de folie. Ce que le jeune homme ne tarderait pas à faire si l'Auror continuait son petit jeu.
Heureusement celui-ci avait également une enquête à mener. Le couloir où le corps avait été trouvé était évidemment fermé et Maugrey y disparaissait régulièrement.
Au déjeuner, on leur annonça qu'une cérémonie aurait lieu en l'honneur du professeur Laverlane.
A seize heures, tous se retrouvèrent près du Lac Noir. La neige couvrait toujours le parc et il faisait terriblement froid. Une petite estrade avait été montée à la va-vite sur les berges du Lac. Dumbledore s'y trouvait déjà lorsque James et ses amis arrivèrent. A ses côtés se trouvait une petite sorcière aux cheveux blancs. Elle se tenait droite malgré l'âge marquant ses traits, mais son visage était ravagée par les larmes.
Lorsque tous les élèves furent là, le directeur la présenta comme la mère de Laverlane. Il lui laissa la parole, et elle leur parla du bonheur que son fils avait à enseigner, du fait que les enfants ne devraient jamais mourir avant leurs parents.
James n'écouta que d'une oreille, trop occupé à fuir le regard de Maugrey. Une main sur son épaule le fit sursauter.
Il haussa les sourcils en voyant que c'était Mrs. Laverlane qui souhaitait lui parler.
- Le Professeur Dumbledore m'a dit les soupçons qui pèsent sur vous, commença-t-elle d'une voix plus ferme qu'il ne l'imaginait.
Il se tendit en se demandant si elle allait l'invectiver pour avoir assassiner son fils, mais elle se contenta de sourire.
- Je suis sûre qu'il n'en est rien. Mon fils avait des ennemis, et il me semble impossible qu'un élève ait fait cela. Je vous soutiendrai si les choses empirent pour vous.
Son sourire s'élargit un peu plus, quoiqu'il fut toujours empreint de tristesse.
- Je crois avoir déjà entendu parler de vous. Il me semble que vous n'étiez pas l'élève le plus sage.
James prit un air coupable et fit une grimace.
- Oh ne vous inquiétez pas ! Au fond, il vous aimait bien, comme tous ses élèves.
Elle lui tapota de nouveau l'épaule et conclut :
- Ne vous inquiétez pas. Si vous dites être innocent, alors je vous crois.
- Merci Madame, balbutia le jeune homme en retrouvant enfin sa langue. Je suis désolé pour votre fils.
Elle hocha la tête, et s'en alla.
James lança un regard triomphant à Maugrey, qui l'épiait toujours, campé sur ses deux pieds, les mains derrière le dos.
Il était innocent, et il serait bien obligé de se rendre à l'évidence.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top