Partie I - Chapitre 17
Chapitre 17
- Puisque je te dis que Celestina était blonde quand elle a chanté « Un dîner baveux au Chaudron baveur » !
- Mais non ! Elle a changé de couleur après ses vingt ans, or c'est sa première chanson !
Lily fit une grimace à Margaret en désignant Val et Jenny qui se disputaient et elle gloussa. Les deux autres filles se retournèrent et les fusillèrent du regard.
La rousse afficha un visage innocent.
- C'est fou, j'étais persuadée que Celestina avait les cheveux verts !
- Ah, Lily, tu es désespérante, râla Val en secouant la tête. A se demander si tu as une vie en dehors de tes devoirs.
- Hum ... non.
- Val, commenta Jenny, je crois qu'on va devoir l'étouffer sous une tonne de Sorcière Magazine.
- Si tu fais ça, je les mangerais.
- Quoi ! Tu sais le prix que ça coûte ? Espèce de ...
- Chuuuuut !
Les quatre filles dévisagèrent la petite brune qui venait de les interrompre si grossièrement. Elle était collée contre le mur avec une autre fille, brune aussi, et leur faisait signe de se cacher.
Jenny prit aussitôt son air de conspiratrice et s'exécuta, bientôt suivie des autres filles. Elles s'approchèrent à petits pas des deux autres, en quatrième année à Gryffondor d'après Lily.
Des éclats de voix leur parvinrent alors :
- Ça fait deux jours qu'on parle à peine, on a plus rien à se dire et ...
- Ça arrive à tout le monde, Frank ! Ce n'est qu'une mauvaise passe, et je ne vois pas en quoi ça devrait te pousser à rompre !
Lily échangea un regard triomphant avec Margaret : Frank et Lucy étaient vraisemblablement en bonne voie pour rendre Alice tout à fait heureuse.
Un soupir se fit entendre puis le jeune homme reprit :
- Une mauvaise passe qui dure depuis presque un mois ? On ne s'est jamais autant disputé que depuis la rentrée des vacances de Noël !
- Frank ...
Lucy éclata en sanglots mais Lily ne pouvait s'empêcher de jubiler intérieurement.
Cependant elle commençait à s'en vouloir quelque peu pour leur séance d'espionnage et elle se pencha au-delà de Val et Jenny pour tirer l'une des Quatrième Année par la manche. Elle lui fit un signe de tête vers l'arrière et la fille prit un air suppliant. Lily désigna son badge du doigt en fronçant les sourcils.
La petite brune finit par tapoter l'épaule de son amie et elles reculèrent, suivies des amies de Lily.
- Bon, murmura la préfète en les entraînant un peu plus loin, vous avez de quoi alimenter les potins pour la soirée alors retour à la Salle Commune, et fissa.
- Mais il va encore se passer des choses intéressantes ! gémit la plus grande, aux yeux bruns lumineux.
- Peut-être, mais ça ne vous regarde pas.
- Vous non plus, rétorqua la plus petite.
- En fait si. Et pas d'impertinence. Allez, oust ! Ou je vous colle.
Les deux filles grommelèrent quelques mots peu amènes envers leur préfète mais obtempérèrent.
- Qu'est-ce que t'es reloue, commenta Jenny en lui donnant un coup de coude.
- Mais non, je nous laisse le champ libre. On va voir Alice ?
- Nous oui, mais tu n'es pas censée avoir un tour de garde et un devoir d'Arithmancie à finir avant ? fit remarquer Margaret.
La rousse roula des yeux atterrés vers elle.
- Ce n'est pas vous qui vous plaigniez que je travaille trop ?
- C'est ça ou devoir supporter le grattement de ta plume à trois heures du matin. « Allez, oust !»
Lily gémit mais Val et Jenny se liguèrent contre elle en croisant les bras.
Pour une fois, la préfète et meilleure élève de sa classe dut assumer sa réputation.
Lily finit juste à temps son devoir et dut avouer que ses amies avaient eu raison de la forcer à le faire. Mais le fait qu'elles n'étaient toujours pas revenues ne contribuait en rien à la rendre de bonne humeur.
Elle commença donc sa ronde avec l'intention d'étriper tout élève se trouvant hors de son dortoir. Cependant sa colère céda peu à peu la place à l'inquiétude car une atmosphère étrange pesait sur le château ce soir-là.
Une lueur argenté suintait des vitres, due à la lumière de la demi-lune sur la neige gelée. Même les flambeaux peinaient à chasser les ombres.
La jeune fille se sentait terriblement mal à l'aise. Le château, d'habitude si familier, lui paraissait soudain étranger. Il lui semblait entendre des grincements sur son passage mais lorsqu'elle tournait la tête, tous les heaumes des armures étaient immobiles, même si elles semblaient se tenir plus droites que d'habitude. Les personnages des tableaux chuchotaient entre eux, jetant de temps à autre des regards suspicieux vers la préfète.
Lily se mit à siffloter en espérant que cela la réconforterait.
Alors qu'elle bifurquait dans un autre couloir, un fracas se fit entendre derrière elle, suivi d'un rire caquetant.
La jeune fille sursauta et revint sur ses pas, le cœur battant à tout rompre. Un éclair argenté fila contre le mur de pierre et disparut dans les entrailles du château, laissant derrière lui une armoire en pièces sur le sol.
Lily pesta tout bas contre Peeves et s'empressa de remettre l'ordre d'un coup de baguette. Elle reprit sa marche, à présent tout à fait terrifiée car les portraits avaient cessé de parler. Ils se contentaient de la dévisager.
Encore dix minutes à ce régime et elle se précipiterait dans la Salle Commune sans plus se soucier des délinquants et de ce que McGonagall pourrait bien en penser.
Mais les événements l'empêchèrent de s'exécuter.
Le calme pesant qui régnait sur le château se cristallisa en un cri strident qui déchira l'air nocturne.
Les portraits se mirent à crier, hurlant qu'ils l'avaient bien dit, que quelque chose était arrivé. L'adrénaline électrisa le corps de Lily et elle se mit à courir vers l'origine du cri, sans même penser que cela pourrait être dangereux.
Les personnages des tableaux couraient en même temps qu'elle, d'autres criaient après les malotrus qui les bousculaient. Elle se raccrocha au bras d'une armure pour tourner sans perdre de vitesse et l'arracha au passage. Il tomba derrière elle avec un bruit de vaisselle brisée, mais elle n'y prêta pas attention.
Elle avait la sensation que la guerre qui menaçait Poudlard venait brusquement de s'abattre en ses murs, et cela la terrifiait.
Le claquement de ses talons sur la pierre résonnait, lui donnant l'impression qu'elle courait sans but, seule. Des sanglots lui parvinrent enfin, la ramenant à la réalité.
Elle s'arrêta, hors d'haleine, au milieu d'un couloir. Une petite forme rampait péniblement sur les dalles, cherchant apparemment à s'éloigner de quelque chose qui se trouvait dans le couloir perpendiculaire.
Lily leva sa baguette et, repassant des sortilèges défensives dans sa tête, elle s'approcha. Une petite fille vêtue d'une robe de chambre rose tourna brusquement le visage vers elle, les joues brillantes de larmes. Ses sanglots redoublèrent et elle leva un bras comme pour se protéger.
Lily baissa aussitôt sa baguette et se précipita vers elle.
Elle s'agenouilla et tenta de lui sourire.
- Je suis préfète, tu vois ? Dit-elle en désignant son insigne. Je ne te ferai pas de mal.
Un éclair passa dans les yeux de la petite au mot de « préfète » et elle sembla légèrement se détendre.
Voyant cela, Lily reprit :
- Est-ce que tu es blessée ? C'est toi qui as crié ?
Aussitôt ses yeux bleus s'agrandirent et elle tourna furtivement son regard vers l'autre couloir, se recroquevillant de nouveau sur elle-même.
La jeune fille se leva lentement et se dirigea vers l'endroit qui attirait tant la petite. Elle se colla contre le mur et, sa baguette prête, risqua un regard vers le couloir.
Un homme était étendu sur le sol, les bras en croix, les yeux grands ouverts sur le vide. Une baguette abandonnée gisait près de lui.
Lily plaqua la main sur sa bouche pour retenir un hurlement et s'écarta brusquement. Elle tomba au sol et tenta de contrôler sa respiration. Elle ne devait pas perdre le contrôle, pas perdre le contrôle... Les pleurs à côté d'elle lui firent relever la tête. Elle n'était pas seule. Elle devait être forte.
Elle s'approcha de la petite fille et la prit dans ses bras. Le cerveau engourdi, elle ne parvenait pas à réfléchir correctement.
Il y avait un homme mort à deux mètres d'elles.
A Poudlard. Un homme était mort.
Elle ouvrit brusquement les yeux en retenant un juron. S'il y avait un mort à Poudlard, c'était qu'il avait été assassiné. Un meurtrier rodait dans le château.
Elle s'écarta de la petite fille et la prit par les épaules. Celle-ci la dévisagea, les yeux rouges et gonflés.
- Écoute-moi. Je sais que c'est horrible et ... (sa voix trembla et elle ferma un instant les yeux pour se reprendre). Il faut qu'on prévienne un professeur, mais je ne peux pas te laisser seule. Tu dois être forte d'accord ? Tu vas venir avec moi et ...
- Emma ! Emma, tu es là ?
La petite fille jaillit de l'étreinte de Lily, qui tourna des yeux éberlués vers le couloir par lequel elle était elle-même arrivée.
Un grand garçon aux cheveux châtains légèrement bouclés courait dans leur direction ... Les mêmes cheveux que sa petite protégée, constata Lily en les regardant se serrer l'un contre l'autre.
Le garçon s'agenouilla devant la petite et, la secouant comme un prunier, il lui posa les mêmes questions que Lily quelques instants plus tôt.
- J'ai rien, balbutia-t-elle d'une petite voix fluette, mais Will ... il y a ... là-bas, il y a ...
Elle se tut, incapable de continuer, et le garçon porta son regard vers la direction qu'elle indiquait. Ce faisant ses yeux rencontrèrent ceux de Lily et elle reconnut enfin le préfet de Poufsouffle.
La jeune fille se leva et lâcha, trop sonnée encore par l'événement pour penser à avoir du tact :
- Il y a un mort dans le couloir.
Il pâlit et se releva à son tour.
- Reste-là, murmura-t-il à Emma.
Il s'avança dans le couloir et la jeune fille le vit se crisper.
- J'allais chercher Dumbledore. Reste avec elle.
Lily courait de nouveaux dans les couloirs.
Elle avait eu un mal fou à partir, terrifiée à l'idée d'être seule dans le château alors qu'un assassin rôdait, incapable de se sortir de l'impression qu'elle était dans un mauvais rêve. Alors qu'elle arrivait devant la gargouille qui gardait l'entrée du bureau du directeur, l'image du cadavre s'imposa à son esprit et l'identité de la victime lui parût évidente : c'était le professeur Laverlane.
Elle était trop sur le choc pour l'avoir reconnu tout de suite, mais maintenant qu'elle y repensait, elle était sûre d'elle.
Secouée, elle s'appuya contre le mur. Qui pourrait bien vouloir faire du mal à Laverlane ? Cela n'avait aucun sens.
Le regard perdu dans le vide, elle avait complètement oublié ce qu'elle venait faire là.
Un bruit de pas la tira brusquement de son abattement. Elle sursauta et sortit sa baguette, les mains tremblantes.
Le professeur Dumbledore la dévisagea, un air aimable sur le visage.
- Miss Evans ? Me cherchiez-vous ?
- Professeur, j'étais ... je faisais ma ronde et j'ai entendu crier ... Le professeur Laverlane, il est ... mort, assassiné, une fille l'a trouvé et ...
Le directeur s'avança vers elle à grands pas et la saisit par les épaules.
- Miss Evans. calmez-vous, ordonna-t-il d'un ton doux. Dites moi calmement ce qu'il s'est passé.
Elle cligna des yeux plusieurs fois et se rendit compte qu'elle avait terriblement envie de pleurer.
- Le professeur Laverlane est mort.
La bouche du directeur se pinça et, pour la première fois, Lily songea qu'il devait être très âgé. Il pâlit et se voûta légèrement.
- Mort ? Répéta-t-il. Vous en êtes sûre ?
- Je l'ai vu. Au quatrième étage.
- Vous avez parlé d'une petite fille. De qui s'agit-il ?
Lily lui expliqua ce qu'il s'était passé et, comme elle était calmée, il lâcha ses épaules.
- Bien. Je vais y aller. Miss Evans, je vais vous demander d'être courageuse encore quelques minutes.
Elle hocha la tête, même si elle ne souhaitait que retourner dans son lit.
- Vous irez prévenir le professeur McGonagall. Dites-lui qu'elle doit amener tous les élèves de sa maison dans la Grande Salle immédiatement. Puis vous irez voir le professeur Slughorn pour lui transmettre le même message, ainsi qu'au professeur Flitwick. A celui-ci vous direz également qu'il faut mettre en place les protections supplémentaires, il comprendra. Faites attention à vous. Si vous voyez quelque chose de suspect, faites demi-tour. Ne prenez pas de risques inconsidérés, c'est bien clair ?
Lily l'écouta et acquiesça, à peine rassérénée par son ton toujours aussi calme. Elle découvrait un chef, un homme qui ne fléchissait pas sous les épreuves mais les affrontait comme il pouvait. Il gardait la tête froide, l'esprit fonctionnel. Pour la première fois, Lily aperçut, derrière la figure du gentil vieillard, l'homme qui avait défait Grindelwald. Celui qui terrifiait le Seigneur des Ténèbres.
***
James battit des paupières en luttant pour ne pas s'endormir sur son livre de Divination. Il n'était pas encore minuit mais il tombait de fatigue. Seuls quelques Septième Années étaient encore là, penchés sur leurs parchemins.
Il se leva en bâillant, décidé à abandonné Silvalune et ses devoirs.
Il se figea en plein étirement devant l'entrée en trombe de McGonagall. Ses yeux parcourent la salle presque vide et se posèrent sur le jeune homme.
- Potter. Allez me chercher Mr. Lupin immédiatement, réveillez-le si besoin est.
Comme il continuait à la dévisageait, elle claqua des mains.
- Tout de suite !
Il partit comme une flèche vers le dortoir, trop fatigué pour contester. Deux minutes plus tard il redescendait avec Remus qui achevait difficilement d'enfiler un t-shirt.
- Professeur ? Bâilla-t-il.
- Mr. Lupin, réveillez tous les garçons et faites les descendre dans la Salle Commune. Qu'ils se couvrent. S'ils refusent, dites leur que c'est moi qui monte.
Le jeune homme hocha la tête et disparut dans l'escalier.
James, lui, était suffisamment réveillé pour se rendre compte que leur professeur était plus pâle que d'habitude, le visage défait.
- Professeur ? Que se passe-t-il ?
- Vous le saurez plus tard, Potter.
Trente minutes plus tard, la Maison entière se dirigeait vers la Grande Salle. Alors que James et ses amis allaient entrer, le professeur Etrog les intercepta. Comme il était professeur d'arithmancie, James le connaissait peu. Cependant il était à peu près certain qu'il n'avait jamais le regard aussi froid qu'à cet instant.
- Qu'est-ce qu'il y a ? interrogea-t-il, sur la défensive.
- Suivez-moi. Le directeur vous demande. Tous les quatre.
Les jeunes gens se jetèrent un regard surpris. Aucun d'eux n'avait fait une quelconque bêtise récemment. Que se passait-il ?
Avant qu'aucun d'eux n'ait pu poser la question, le professeur fit volte-face et s'engagea dans les escaliers quatre à quatre.
Les quatre jeunes gens le suivirent jusqu'au quatrième étage. Un brouhaha leur parvint lorsqu'il s'engagèrent dans le couloir et ils aperçurent un attroupement, composé d'adultes et d'élèves.
Un jeune homme qui devait avoir leur âge était assis par terre, une petite fille en robe de chambre dans ses bras. Le professeur Silvalune et une autre qui, d'après James, enseignait l'étude des Moldus, se trouvaient là et discutaient avec le professeur Dumbledore.
En face d'eux, adossée à un mur, se trouvait ... Evans. James pesta intérieurement tandis que Sirius lui donnait un coup de coude. Il fusilla celui-ci du regard, qui lui fit un clin d'œil égrillard.
Il s'apprêtait à lui balancer une injure mais le professeur lança :
- Ils sont là.
Toutes les têtes se tournèrent vers eux. Ils avaient tous le visage fermé.
Après un instant de silence pesant, le directeur appela :
- Mr. Potter, voulez-vous venir, je vous prie ?
Le jeune homme obtempéra, se demandant ce qu'on pouvait bien lui vouloir.
Dumbledore tourna dans un couloir perpendiculaire et s'arrêta. James le rejoignit et se figea. Le professeur Laverlane gisait là, sans aucun doute mort.
- Professeur, qu'est-ce que ... balbutia-t-il sans pouvoir terminer sa phrase.
- Il a été vraisemblablement assassiné, répondit le vieil homme d'une voix plate.
Puis il leva la main montra une baguette à James.
- Avec ceci.
La respiration du jeune homme se bloqua. C'était sa baguette.
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