III - Chapitre 28
AAAAAH !!! Je suis terriblement en retard !! Je suis désolée ! La vie à la fac c'est terrible (tellement terrible que maintenant j'écoute du rap allemand, et c'est entièrement la faute de la fac) ! Je finis tard le soiiir et du coup j'ai pas le teeeeeemps et je suis désoléééée
D'autant plus désolée que vous êtes de plus nombreux à lire cette fic, si je ne m'abuse, et c'est un peu ouf ! Chaque semaine j'ai entre 120 et 150 notifs, ça fait chaud au coeur. Vous êtes fantastiques en tout cas et je vous aime fort !
Après tout ce sentiment, place au chapitre !
Chapitre 28
Edgar Bones souffla un rond de fumée, son cigare à la main. Maugrey le suivit du regard mais il se perdit bien vite dans l'épais brouillard qui obscurcissait son minuscule appartement londonien.
- Ça t'arrive de dormir chez toi ? Interrogea soudain Edgar, les yeux fixés sur un point derrière Maugrey.
- C'est ici chez moi, maugréa-t-il sans se retourner.
- Alors pourquoi est-ce que tu gardes cette photo ?
L'Auror se laissa aller dans son fauteuil en cuir et sirota son whisky tranquillement avant de répondre :
- Parce que je suis un vieux grincheux sentimental.
Il savait très bien de quoi était en train de parler Edgar : une photo en noir et blanc, représentant un manoir immense, et trois personnes devant qui agitaient la main. Cette photo avait été prise bien longtemps auparavant. Tellement longtemps qu'il lui arrivait d'oublier que le manoir existait toujours, jusqu'à ce qu'il doive y retourner.
- J'imagine que ce n'est plus tout à fait l'endroit tranquille que c'était.
- Cette bande de gamins fait un bruit de tous les diables, confirma Maugrey. Ils sont beaucoup trop optimistes pour leur propre bien.
Edgar eut un sourire amusé alors qu'il portait son cigare à sa bouche.
- Ou tu es trop pessimiste.
- Je fais cette guerre depuis le début, moi.
- Tu travailles trop, Alastor.
- Travailler ? Releva-t-il avec un haussement de sourcil. C'est la guerre. Je n'appelle pas ça du travail, mais seulement un service nécessaire.
- Hmmpf.
- Tu as trouvé quelque chose, au Magenmagot ?
Bones souffla la fumée par le nez avant de répondre d'un ton morne :
- Rien. Rien du tout. Ils ont tous des alibis en béton, pour Trafalgar Square comme pour le trois mars.
- Forcément. Les espions ne vont pas sur le terrain.
Maugrey eut un sourire espiègle – le premier depuis une éternité – avant d'ajouter :
- Comme toi.
Bones sourit à son tour.
- Comme moi. Je suis trop vieux pour aller me battre.
- On a le même âge.
- Tu es Auror. Moi je m'empâte sur mon siège du Magenmagot depuis des années.
- Si tu buvais et fumais moins, ça irait mieux.
Il secoua la main pour éloigner les sermons de l'Auror et reprit :
- Je n'ai trouvé chez aucun d'entre eux une bonne raison de rejoindre Voldemort. Pas de mort mystérieuse, d'antécédents familiaux étranges, ni quoi que ce soit d'autre. Tu sais ce que ça veut dire ?
- Que des gens parfaitement raisonnables le rejoignent.
- Exactement. La force brute est une chose, Alastor, mais si on a se retrouve avec une bureaucratie révoltée sur les bras, on ne s'en sortira pas. Je sais que tu ne laisseras jamais un Mangemort poser ne serait-ce qu'un orteil dans le Ministère, mais qu'allons-nous faire s'ils sont déjà là ?
Maugrey prit une profonde inspiration avant de se lever. Il alla jusqu'à la fenêtre et contempla la rue déserte – déserte, à par une ombre solitaire qui s'évanouit bien vite dans la nuit. Il fit la moue.
- On fait sauter le Ministère.
- Et nous avec ?
- Et nous avec.
- Tu parles au figuré, n'est-pas, Alastor ?
Il se retourna et sourit à son vieil ami – un sourire de prédateur.
***
- J'en ai marre, d'accord ? Marre que tout le monde passe avant nous, que tu n'en ai rien à faire de notre mariage, marre que tu sois prêt à te sacrifier pour sauver la terre entière mais que tu ne puisses même pas venir chez mes parents ! Ça suffit, Londubat ! Je sais que c'est difficile, je sais que la mort de Terry est dure, ça l'est pour moi aussi, mais si tu ne m'annonces pas d'ici trente secondes que tu laisses tomber ce stupide tour de garde inutile pour venir avec moi je te fais bouffer ma bague de fiançailles par les yeux !
Sirius regardait Alice, bouche bée, tout comme les deux autres personnes assises autour de la table. C'était la première fois qu'il la voyait comme ça. Ethel, près de lui, avait l'air très fière de son amie. Quant à Frank, il donnait l'impression d'avoir été assommé par un troll.
- Je...
Alice retira sa bague d'un geste sec et le jeune homme s'empressa de se lever pour attraper le bijou et le lui repasser au doigt.
- Je viens, assura-t-il piteusement.
- Parfait ! J'aime mieux ça !
Elle sortit de la cuisine en claquant la porte, laissant un silence pesant derrière elle. Sirius le rompit bien vite en éclatant de rire et il alla donner une tape sur l'épaule de Frank.
- Dans dix minutes ça ira mieux !
- T'es sûr ?
- Mais oui !
- T'y connais rien en filles, Black.
- Va rejoindre ta dulcinée au lieu de m'insulter, sinon j'ai peur qu'il arrive des choses bizarres à tes yeux.
Frank s'exécuta avec un gémissement alors que Sirius allait se rasseoir près d'Ethel.
- Ils ne sont pas déjà allés chez les MacMillan il y a quelques temps ? Releva-t-elle.
- Ils devaient mais ils ont été attaqués, rappela-t-il. Merlin, tu avais déjà vu Alice comme ça ?
- Une ou deux fois seulement, sourit-elle. En général à cause de Frank, mais elle se contentait de s'énerver devant moi. J'imagine qu'elle a fini par en avoir marre.
Sirius secoua la tête, les yeux fixés sur la porte derrière laquelle les fiancés venaient de disparaître.
- Il faut dire qu'il a une sacrée tendance à en faire beaucoup trop pour l'Ordre.
- Il est consciencieux. D'ailleurs, tu n'es pas en retard ?
Sirius consulta la pendule de la cuisine avant de jurer.
- C'est parce que tu refuses de venir avec moi !
- Tu n'as pas besoin de moi, souligna-t-elle.
- Allez ! Je dois me rattraper pour l'autre fois ! Ethel, s'il-te-plaît ! Je ne te demande pas de leur parler, juste de m'accompagner !
Elle se mordit l'intérieur de la joue puis secoua la tête.
- Non, Sirius, désolée.
Il savait en général se montrait horriblement têtu mais il avait bien vite compris qu'Ethel était imperméable à son acharnement, aussi se leva-t-il avec une moue déçue.
- Très bien. A plus tard.
Sans attendre de réponse, il quitta la cuisine, attrapa sa cape sur le canapé du salon et sortit sous une fine pluie qui annonçait le printemps. Mais alors qu'il allait atteindre le portail, une porte claqua derrière lui et un cri lui parvint :
- Sirius ! Attend !
Un sourire étira lentement ses lèvres et il se retourna. Ethel courait vers lui, son écharpe volant derrière son épaule. Elle s'arrêta près de lui, le souffle court, les yeux pétillants.
- Alors Ethel, un petit changement de dernière minute ?
- Eh bien... un peu d'imprévisibilité ne fait pas de mal, répliqua-t-elle en saisissant la grille pour l'ouvrir. Tu viens ?
Il franchit la limite du terrain du manoir et transplana en riant, certain de retrouver Ethel à Pré-au-Lard quelques secondes plus tard. Elle se matérialisa en effet près de lui et ils s'engagèrent dans la rue principale, déjà envahie par les élèves de Poudlard.
- Tu es en retard, annonça-t-elle en désignant un petit groupe qui attendait devant les Trois Balais.
- Tant pis ! Je rêve ou ils ne sont que trois ?
Ethel fronça les sourcils, inquiète.
- J'ai bien l'impression. Je me suis peut-être trompée, peut-être que...
- Si, ce sont eux. Martin Ranger est là.
Il hâta le pas pour rejoindre les trois élèves. Martin lui tournait le dos mais une jeune Serdaigle aux cheveux châtains capta son regard et alerta ses camarades, l'air surexcité. Martin se retourna et adressa un grand sourire à son ancien coéquipier. Une deuxième fille se trouvait derrière lui : elle avait le visage couvert de taches de rousseur, des cheveux qui hésitaient entre le roux et le châtain, et un sourire complètement fou. Elle poussa Martin pour s'avancer et s'exclama, la main tendue :
- Salut ! Je suis Amanda Selteen ! Pas besoin de te demander qui tu es, évidemment.
Sirius la laissa secouer sa main dans tous les sens, amusé, mais sa dernière remarque l'alerta.
- On se présentera plus tard, allons nous mettre au chaud.
Il entra sans attendre de réponse, Amanda, Martin, la Serdaigle et Ethel sur ses talons. La serveuse, Rosmerta, lui fit un sourire aguicheur et hocha la tête quand il désigna le plafond. Il retrouva sans peine l'escalier qu'il avait emprunté pour la première fois un an plus tôt et mena les potentielles nouvelles recrues de l'Ordre au premier étage. Le salon où il les introduisit était aussi sale qu'avant. Amanda s'assit avec un sourire ravi tandis que Martin serrait vivement la main de Sirius.
- J'étais sûr que ce serait toi, Black ! Même si je pensais que tu viendrais avec tous les Maraudeurs.
- Et moi j'étais sûr que tu étais dans la combine ! Mais tu es le seul Gryffondor ? Et Anne ?
- Elle a un an de moins que moi, rit Martin. Je sais que tout le monde l'oublie tout le temps, mais ça l'exclut sur ce coup.
- Comment tu lui as expliqué ça ?
- On s'est disputé, grimaça-t-il. J'espère que ça ira mieux d'ici ce soir. Enfin, si je peux lui en parler ?
Sirius sourit.
- Bien sûr. Maintenant bouge toi, que je salue Mademoiselle... ?
- Sally, répondit la Serdaigle avec un sourire intimidé. Sally Bableton.
- Enchanté. Tu connais Ethel je présume ?
Sally hocha la tête après avoir jeté un regard à la jeune femme et s'empressa d'aller s'asseoir. Sirius ne put s'empêcher de remarquer qu'Ethel avait l'air mal à l'aise. Il voulut lui demander ce qui n'allait pas mais elle secoua la tête discrètement et prit place à son tour. Sirius considéra les quatre personnes autour de la table et s'aperçut qu'il n'avait absolument pas préparé son petit discours.
- Je ne suis pas sûre que la partie sur James qui a failli mourir les aie beaucoup encouragé.
Sirius gémit et avala une gorgée de Bièraubeurre.
- Tu aurais fait ça mieux que moi.
- Ce n'était pas si mal, assura Ethel. Et puis on n'est pas là pour faire de la propagande.
- Certes.
Amanda, Sally et Martin étaient sortis discuter de ce que Sirius venait de leur apprendre, comme lui-même l'avait fait avec ses amis un an plus tôt. Ethel le regardait avec un sourire amusé, sans doute parce qu'elle l'avait vu perdre ses moyens pour la première fois. Elle était plus à l'aise avec lui depuis cette nuit où ils avaient discuté. Il leur était arrivé à plusieurs reprises depuis de se retrouver ainsi, à des heures indues, pour discuter. Ethel se livrait plus facilement dans la pénombre, mais plus elle en disait et plus elle était ouverte avec lui en plein jour. Elle le montrait rarement devant les autres mais Sirius savait qu'il avait réussi à percer sa carapace, même s'il avait dû exposer ses propres faiblesses pour ça.
- Tu faisais une drôle de tête tout à l'heure, ça n'allait pas ?
- Revoir Sally m'a fait un drôle d'effet, expliqua-t-elle après un instant de silence. Ma vie à Serdaigle n'a pas forcément était très agréable.
Sirius retint de justesse sa remarque acerbe sur le fait que si elle avait fait plus d'efforts ça se serait sans doute mieux passé. Il n'avait toujours pas percé le mystère de cet isolement mais il préférait ne pas aborder le sujet de front tant qu'elle ne s'y décidait pas.
- Tu vas survivre à son intégration dans l'Ordre ?
- J'ai l'habitude d'éviter les gens, fit-elle remarquer d'un ton sec.
Sirius ne s'en formalisa pas : il préférait mille fois cette intonation là que sa voix neutre.
- Et puis on ne sait pas si elle va dire oui, ajouta-t-elle.
- Oh, je pense que si. S'ils sont parvenus jusqu'ici c'est qu'ils doivent être décidés. Je me demande pourquoi ils sont si peu nombreux.
- On était les recrues de la même année les plus nombreuses, souligna-t-elle.
- Mais pourquoi ça n'a pas continué ?
- La guerre est de plus en plus visible... Les gens ont peur. Peut-être qu'on ne se rendait pas vraiment compte de ce dans quoi on s'engageait.
Des images de Trafalgar Square et de leur affrontement avec Voldemort lui traversèrent l'esprit et il avala une gorgée de Bieraubeurre pour chasser la sensation d'étouffement qui lui serrait la gorge.
- Tu regrettes de t'être engagée dans l'Ordre ?
Ethel prit le temps de la réflexion, ses yeux posés sur le bois patiné de la table.
- Parfois. Mais en même temps, je ne sais pas ce que j'aurais fait sinon.
- Au hasard... médicomage ?
Elle sourit, comme elle le faisait toujours quand il évoquait Sainte-Mangouste et son travail là-bas.
- Oui, c'est sûr.
- Tu aurais soigné des victimes de la guerre, exactement comme tu le fais.
Un air songeur remplaça son sourire car elle n'avait jamais pensé à cela sous cet angle.
- Tu peux encore le faire, tu sais. Personne ne nous retient dans l'Ordre.
Elle secoua la tête.
- Tu sais très bien que je ne pourrais pas partir, pas plus que toi. Maintenant qu'on y a goûté ce serait juste... lâche.
- Complètement. Et puis tu serais privée de ma compagnie !
- En plus.
Le rire de Sirius s'étouffa dans sa gorge. Il était persuadé qu'elle allait rougir et ignorer l'allusion. Elle avait certes les yeux fixés sur la table mais elle enchaîna sur le même sujet :
- Si je n'avais pas intégré l'Ordre j'aurais perdu Alice, et puis toi. Je n'ai pas... je n'ai pas vraiment de famille alors...
- Il y a décidément beaucoup de parents indignes sur cette terre.
Elle eut un vague mouvement d'épaules et Sirius n'insista pas. Le silence s'installa, pesant, et seule l'arrivée des potentielles recrues le rompit. Martin marchait en tête, rayonnant. Amanda débordait aussi d'enthousiasme. Quant à Sally, elle avait l'air déterminé.
Le village se vida à dix-huit heures et Sirius et Ethel se retrouvèrent presque seuls aux Trois Balais. Les trois jeunes gens avaient dit oui, même s'il leur fallait encore rencontrer Dumbledore. Ils avaient posé quelques questions aux deux membres qu'on leur avait envoyé avant de rejoindre leurs amis. Sirius avait vu Martin et Anne se réconcilier de loin. Ethel ne lui avait plus vraiment adressé la parole depuis leur conversation mais il ne s'en formalisa pas. Il avait lui aussi ses sautes d'humeur – et il était bien plus enclin à l'indulgence dès qu'il s'agissait d'Ethel. Mais alors qu'ils prenaient un thé, elle lui sourit et lança comme si de rien n'était :
- J'aurais vraiment raté quelque chose en n'intégrant pas l'Ordre.
Il la fixa, impénétrable, bien conscient de ce qu'elle sous-entendait, puis plongea le nez dans son thé pour refréner une furieuse envie de l'embrasser qui n'aurait pas arrangé son cas. Il n'avait pas l'habitude de ce genre de retraite : d'habitude, les filles qui l'abordaient souhaitaient désespérément qu'il les embrasse. Dommage pour lui, il était en train de tomber amoureux, et ça ne marchait pas comme ça. Alors il la regarda à nouveau et dit simplement :
- Moi aussi.
Elle rougit cette fois-ci, bien consciente du petit jeu auquel ils s'adonnaient. C'était bien la première fois qu'ils flirtaient tous les deux... Une concession d'Ethel pour le silence qu'il savait observer quand la conversation l'exigeait, sans doute. Il sourit dans sa barbe en songeant que finalement, il était aussi démuni qu'elle dans cette situation. Il n'avait jamais flirté de la sorte, doucement, avec de vrais sentiments – et pas juste l'envie d'attirer une jolie fille dans un coin tranquille. Il gémit intérieurement : il allait finir comme James avec Lily.
***
Jenny rongeait son frein en maugréant. Margaret ignorait ce qui n'allait pas mais ce n'était pas le moment de poser de questions. Soudain, son amie renifla, frissonna, puis annonça d'une voix tendue :
- Détraqueurs en approche.
Margaret ouvrit la bouche pour dire qu'elle ne sentait rien mais le froid finit par pénétrer ses os.
- Bien repéré, commenta-t-elle, les yeux levés vers le ciel.
Malheureusement, le brouillard prenait déjà de l'ampleur, les plongeant dans un univers opaque et cotonneux. Elle se découvrit des tendances claustrophobes alors que sa vision se réduisait. Trois silhouettes noires, flottant à quelques centimètres du sol, apparurent. Jenny leva sa baguette, la gorge palpitante. Mais ils passèrent près d'elles sans s'arrêter, laissant malgré tout une traînée de peur derrière eux.
- Qu'est-ce qu'ils fabriquent ?
- Ils sont peut-être fidèles au Ministère, murmura Jenny.
- Le Ministère n'envoie pas de Détraqueurs patrouiller.
- Pourquoi sont-ils là alors ? Ils ne se sont même pas arrêter devant la maison !
Margaret jeta un coup d'œil à la bâtisse en brique derrière elle mais elle la distinguait à peine. C'était la maison d'un membre du Magenmagot, Stylney, qui s'était arrangé pour faire passer des tas de mesures favorables aux Nés-Moldus. L'homme ne souhaitait pas se faire protéger d'habitude mais il était actuellement gravement malade et il avait donc demandé l'aide de l'Ordre.
Les Détraqueurs s'éloignèrent, laissant deux jeunes femmes perplexes derrière eux.
- Peut-être qu'ils ne reçoivent des ordres de personnes.
- Un Détraqueur attaque tout ce qu'il peut, non ? Souligna Margaret.
- Mais alors pourquoi...
- Stupéfix !
Margaret se jeta au sol par réflexe mais le sort ne lui était pas destiné : Jenny s'écroula, le nez dans l'herbe détrempée. Son amie s'empressa d'élever un bouclier autour d'elles tout en cherchant frénétiquement leur attaquant. Un mouvement attira enfin son attention, bien trop près de la maison. Elle voulut attaquer mais un râle lui parvint alors, la forçant à se tourner vers le groupe de Détraqueurs qui revenaient vers elle, cette fois avec des intentions manifestement belliqueuses.
Pour une fois, elle se laissa aller à jurer, ranima Jenny d'un mouvement de baguette et la poussa vers la maison en criant :
- Il y a un Mangemorts là-bas, vas-y, je vais les retenir !
Jenny, encore à moitié assommée, tituba vers la maison. Merlin en soit remercié Mrs. Stylney semblait être quelqu'un d'intelligent, aussi pourrait-elle aider Jenny.
Mais pour le moment, Margaret avait d'autres soucis. Elle se concentra sur les Détraqueurs qui arrivaient à toute allure, invoqua le souvenir heureux d'une après-midi avec John, à Poudlard, et laissa filer la cigogne argentée qu'était son patronus. Elle étendit tout grand ses ailes, protégeant ainsi la jeune femme. Les Détraqueurs reculèrent, mais elle savait qu'ils allaient tenter de contourner le patronus. Il fallait qu'elle reste concentrée.
Les bruits de bataille qui lui parvenaient de la cuisine n'aidaient pas. Il y eut un cri de douleur typiquement masculin et elle espéra qu'il s'agissait du Mangemort et non de Stylney.
La lumière de son patronus faiblit et elle se concentra à nouveau. Mais évoquer l'image de John était difficile : la joie se teintait de nostalgie. Tout ça lui paraissait si lointain... Le visage de John commençait à s'effacer de sa mémoire, remplacé par une masse indistincte surmontée de cheveux blonds... châtains... Une cicatrice s'estompant dans le cou et...
Elle rougit brusquement en se rendant compte que c'était le visage de Remus qui prenait peu à peu la place de John dans son esprit et la cigogne disparut.
- Oh oh, laissa-t-elle échapper, le cœur palpitant de peur.
Le trouble avait suffi à créer une brèche et l'aura des Détraqueurs l'avait atteinte. Complètement paniquée à présent, elle regardait les trois créatures s'approcher d'elle sans réussir à esquisser le moindre geste. Il n'y avait plus l'image d'aucun garçon dans son esprit, seulement la peur insidieuse de la mort. Ou, plus exactement, la peur totalement irrationnelle qu'un troll des montagnes allait surgir pour lui écraser le crâne à coup de massue.
Elle gémit de terreur à cette pensée et recula d'un pas mais ne put aller plus loin. Le premier Détraqueur ouvrit la béance qui lui servait de bouche...
- Expecto patronum !
Un puma argenté jaillit à ses côtés et les Détraqueurs reculèrent. La douce chaleur que répandait l'animal rassura un peu Margaret, qui leva à nouveau sa baguette d'une main certes un peu tremblante et fit apparaît une brume argentée. C'était peu mais apparemment suffisant pour faire fuir les créatures. Margaret se retourna et vit Jenny, quelques mètres derrière elle, l'air farouche. Peut-être avaient-ils compris que le Mangemort avait échoué.
Les entrailles de Margaret se relâchèrent et elle laissa échapper un soupir soulagé.
- Tu l'as arrêté ?
- Non, elle s'est enfuie.
- Elle ? Tu as vu son visage ?
- Maggy, je sais reconnaître une fille quand j'en vois une... Il y a des choses qu'une robe de sorcier ne cachent pas.
Margaret s'autorisa un sourire avant de jeter un coup d'œil inquiet vers la maison.
- Et les Stylney ?
- Mr. Stynley est blessé mais ça va. Je l'ai arrêtée en bas de l'escalier mais elle m'a envoyée voler contre un mur et le temps que je reprenne mes esprits elle avait disparu.
- Elle ne devait pas être très déterminée.
- Du peu que j'ai vu et entendu, je pense qu'elle était très jeune. Et probablement terrifiée.
- Ouais, bah c'est pas la seule, marmonna Margaret. Je déteste les Détraqueurs.
- Comme tout le monde, soupira Jenny. Mrs. Stylney m'a dit qu'on ferait mieux de s'en aller.
- Comment ?
- Elle m'a dit qu'elle était parfaitement capable de se débrouiller contre une attaque du genre et qu'elle ne voulait pas nous retenir plus longtemps. De toute façon, il est plus de dix-neuf heures. On avait presque fini. Au moins on n'a pas besoin de trouver du monde pour nous remplacer.
Margaret faillit protester puis songea à la pile monstrueuse d'ordres de mission qui attendait au QG.
- Bon. Très bien.
- Mais je vais prendre un petit remontant avant.
- Comment ...
Il y eut un « crac » et Margaret se sentit happée dans un tourbillon. Ses pieds retrouvèrent finalement le sol et elle tituba un instant, nauséeuse.
- T'aurais pu prévenir, gémit-elle.
- Oh allez Maggy, c'est pas si terrible le transplanage d'escorte !
- Tu sais très bien que si, accusa-t-elle en la fusillant du regard. Où est-ce qu'on est ?
- Chemin de Traverse ! Regarde, le Chaudron Baveur est juste là.
Margaret se laissa entraîner dans l'établissement avec une grimace. Mais après tout, c'était toujours mieux que repartir dans une énième mission pleine de Détraqueurs.
La salle du Chaudron Baveur était presque vide – les gens s'attardaient peu dans les bars par les temps qui couraient. Aussi Margaret repéra-t-elle aussitôt le groupe de trois jeunes hommes qui buvaient de la Bièraubeurre en discutant d'un air sérieux.
- Oh non, gémit-elle.
- Mais qu'est-ce qu'ils font là ? S'exclama Jenny.
- La même chose que nous ?
Les trois garçons s'étaient retournés en entendant Jenny et Sirius leur faisait à présent des signes pour qu'elles les rejoignent.
- Dîtes, on est pas censés être débordés de demandes ? Releva Remus.
- On nous a renvoyées, expliqua Jenny en faisant un signe au serveur. Et vous ?
- On a pris des vacances, répondit Sirius alors qu'elle commandait deux Bièraubeurres.
Jenny se glissa près de lui tout en s'arrangeant pour pousser Margaret sur la banquette que Remus partageait avec Peter. Elle lui tomba pratiquement dessus et adressa une grimace à Jenny, qui se contenta de lui répondre d'un clin d'œil amusé.
- Vous avez fait du mauvais boulot ? Interrogea Peter en sirotant son verre.
- Non, on a juste eu affaire à une forte tête qui veut se défendre toute seule. Pourquoi cette réunion des Maraudeurs moins James ?
- Pour cracher sur James puisqu'il n'est pas là, rétorqua Sirius.
- Patmol, plaisante pas avec ça, réprimanda Remus à voix basse.
L'intéressé se racla la gorge après un silence. Margaret se tortilla, gênée. Sirius avait été un véritable zombie pendant la semaine où ils avaient cru que James allait mourir. Pour briser le malaise, elle interrogea :
- Ce n'est pas aujourd'hui que tu devais rencontrer les futures recrues ?
- On est partis tôt parce qu'on leur avait déjà tout dit, répondit-il avant de se lancer dans le récit de la réunion.
Tout ce qu'en retint Margaret fut qu'ils n'étaient que trois – et, accessoirement, qu'ils n'avaient pas répondu sur l'objet de cette petite réunion. Mais après tout, elle s'en fichait. Ils pouvaient parfaitement avoir envie de boire un verre entre amis.
Remus semblait penser la même chose qu'elle à propos du nombre des nouveaux arrivants car il souffla, tout en faisant tourner son fond de Bièraubeurre dans son verre :
- On est vraiment mal...
- Ouais, murmura-t-elle.
Il glissa un instant les yeux dans sa direction et sourit.
- Enfin, on le savait déjà. On est juste suffisamment fous pour être toujours là.
- C'est l'amour du risque, fit-elle avant d'avaler une gorgée de sa boisson.
- Il n'y a que Sirius qui est là pour ça, parce qu'il n'a pas de cerveau.
Elle pouffa. L'intéressé, plongé dans une conversation avec Peter et Jenny, n'avait pas entendu.
- Comme les crevettes ?
- Les crevettes n'ont pas de cerveau ?
- Plutôt un paquet de nerfs, je crois.
- Ben voilà, Sirius est une crevette.
Sa voix sonna dans le soudain silence de leur tablée et Margaret cacha son rire dans son verre alors que Sirius affichait un air offusqué.
- Lunard, je vais devoir te provoquer en duel.
- Tu sais bien que je te bats, répondit-il d'un ton tranquille tout en finissant son verre.
- Menteur.
- De toute façon, on sait tous que c'est moi le plus fort en duel, intervint Peter avec un sourire ravi.
- Je te rappelle que mordre ne compte pas.
Margaret sentit distinctement Remus filer un coup de pied à Sirius, qui glapit et jeta un regard assassin à son ami.
- C'est moi qui vais te mordre, Patmol.
Sirius haussa un sourcil sans répondre alors que Margaret, perturbée par leur ton sérieux, considérait d'un œil nouveau les discrètes cicatrices que Remus, aussi loin qu'elle s'en souvienne, avait toujours arborées. Elles finissaient par disparaître, mais d'autres les remplaçaient. A Poudlard il avait toujours une bonne excuse, mais il ne prenait plus la peine de se justifier depuis qu'ils avaient intégré l'Ordre. Après tout, ils récoltaient tous régulièrement de multiples plaies et contusions.
La conversation reprit sans qu'elle y prête vraiment attention, trop occupée à observer Remus. Ce n'est que lorsqu'il tourna vers elle un regard surpris qu'elle s'aperçut qu'elle le fixait. Elle rougit, plongea dans son verre et pria pour disparaître.
- Margaret ? Ça va ? Je ne mords pas vraiment tu sais.
Encore ce ton mortellement sérieux.
Elle osa releva les yeux vers lui et constata que son visage était aussi sérieux que sa voix. Quelque chose clochait.
- Je sais, répondit-elle finalement d'une voix douce. Il y a certaines choses à propos desquelles tu me mens mais pas celle là.
Il se figea. Merlin en soit remercié, les autres discutaient à nouveau sans leur prêter attention.
- Margaret...
- C'est pas grave, tu sais.
Il passa une main dans ses cheveux, comme Sirius et James le faisaient si souvent. Après un instant de silence, il désigna de la tête la porte qui menait sur le Chemin de Traverse.
- Sortons.
Margaret fut tellement surprise qu'elle se leva sans protester. Remus dit aux autres qu'ils revenaient vite et l'entraîna dehors sans tenir compte de leurs commentaires. Il y avait peu de monde dans la rue, même si on était samedi, pourtant Remus n'ouvrit pas la bouche avant qu'ils se trouvent dans une ruelle déserte occupée seulement par des poubelles et quelques oiseaux qui s'envolèrent à leur approche.
Remus s'arrêta, les mains enfoncées dans ses poches. Une mèche de cheveux châtains retombait sur son front.
- Margaret, je ... ça n'a rien à voir avec toi. J'ai juste... des problèmes.
- T'as surtout un problème de confiance, rétorqua-t-elle, acerbe.
Il releva les yeux, surpris de son ton. Un peu honteuse mais trop énervée pour s'arrêter, elle continua :
- Je suis ton amie, Remus. Pas comme les Maraudeurs, c'est sûr, mais ton amie quand même. On était ensemble à Liverpool, tu t'es arrangé pour détourner les Doloris sur toi, et malgré tout tu refuses de me faire confiance ?
- Tu ne comprends pas...
- Je ne suis pas idiote ! J'ai relevé certaines choses ! Tes absences, tous les mois, les blessures... J'ai vu certains cas à Ste-Mangouste, Lunard !
Il tressaillit comme si elle l'avait poignardé lorsqu'il entendit son surnom. Sans doute signifiait-il bien ce que Margaret pensait.
- Je ne suis pas idiote, répéta-t-elle plus doucement.
Il déglutit et articula :
- Je sais.
- Alors c'est vrai ?
Il ne parvint pas à soutenir son regard et c'est les yeux vissés sur les pavés irréguliers qu'il hocha la tête. Margaret prit une profonde inspiration. Se douter de la vérité et la voir confirmer étaient deux choses bien différentes. Être absolument certaine qu'un loup-garou se tenait devant elle était bien plus perturbant qu'elle ne l'aurait imaginé. Sans le vouloir, elle fit un pas en arrière.
Remus releva aussitôt la tête, le visage dur.
- Tu vois, articula-t-il, c'est pour ça que je ne fais pas confiance aux gens.
- Quoi ? Non, Remus, c'est pas...
Il était déjà parti, quittant la ruelle à grandes enjambées. Elle dut courir pour le rattraper mais il refusa de s'arrêter. La tête rentrée dans les épaules, il fixait obstinément la route devant lui sans tenir compte de ses supplications.
- Remus, je t'en prie, ce n'est pas ... S'il-te-plaît écoute-moi !
Elle l'attrapa par le poignet mais il se dégagea brutalement avant de lui faire enfin face.
- Ce n'est pas quoi, Margaret ? Éructa-t-il. De la peur ? Si. Je ne vais pas t'infliger ma présence puisque tu ne la supportes pas. Je ne suis pas idiot non plus, figure-toi. Je sais reconnaître les gens qui ont peur de moi, depuis le temps.
- J'ai été surprise !
- Surprise ? Tu avais deviné !
- Je n'en étais pas certaine ! L'entendre dire est différent et... Je t'en prie !
Mais il était déjà reparti. Il atteignit le Chaudron Baveur et claqua la porte derrière lui, laissant Margaret, la gorge serrée, sous le regard offusqué des quelques passants.
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