III - Chapitre 27
Chapitre 27
- Ce n'est pas la peine de protester, j'ai déjà dit à ton père que tu passerais deux semaines chez lui !
- On a besoin de moi ici !
- Ah oui ? Et comment ? Tu comptes charger sur le dos de Sirius ?
Le teint blême de James se colora d'une teinte malsaine, à mi-chemin entre le rouge et le jaune, et il détourna le regard.
- Quinze jours, James, asséna Lily. Quinze jours de repos total, c'est tout ce que je te demande. Bon sang, c'est toi qui devrais demander ça, pas moi !
Il grommela, le regard toujours posé sur la porte.
- De toute façon, je te traînerai jusque là-bas si tu ne te décides pas à te bouger. J'ai même préparé tes affaires.
- Lily ! Protesta-t-il en la regardant à nouveau. Je ne suis pas un bébé !
- Tu te comportes comme tel !
Il la fusilla du regard puis balança ses jambes dans le vide pour poser ses pieds sur le parquet. Lily s'aperçut que ses mains agrippées à la couverture tremblaient.
- Je ne suis même pas capable de me lever sans avoir envie de vomir, marmonna-t-il.
- C'est bien pour ça que je te dis que tu as besoin de repos !
- Ça va, j'ai compris ! Je vais y aller sans que tu aies besoin de me traîner à Godric's Hollow par le peau du cou !
Il se redressa, furieux, et Lily eut juste le temps de l'attraper avant qu'il ne s'écroule par terre. Il jura, ses doigts crispés sur les bras de Lily. Il ne se rendait sans doute pas compte qu'il lui faisait un mal de chien.
- Tu viens avec moi ? Interrogea-t-il d'un ton rogue.
- Vu comme tu es insupportable, j'hésite, rétorqua-t-elle, aussi énervée que lui.
Ils s'affrontèrent un instant du regard, mais James finit par capituler.
- Si je dois m'exiler deux semaines, j'aimerais autant que tu viennes avec moi, articula-t-il sans la regarder.
- Bien, répondit-elle vivement. On part dès que tu seras prêt.
Elle le lâcha et sortit à grands pas de la pièce, les nerfs à vif. Son épuisement moral et ses nuits sans sommeil ne l'aidaient pas à être patiente avec James. Elle claqua la porte derrière elle et prit une profonde inspiration. Par Merlin, elle ne pouvait pas le laisser comme ça, il allait se fracasser le crâne par terre.
Elle ouvrit à la volée le battant et le trouva assis sur la chaise, près du lit, la tête entre les mains. Prise de remords, elle alla s'agenouiller devant lui.
- Je suis désolée, James, dit-elle doucement. J'imagine que ça doit être difficile pour toi, mais ça l'est aussi pour moi. Dans deux semaines ça ira déjà beaucoup mieux.
Il releva la tête et poussa un soupir à fendre l'âme.
- Ouais. Désolé.
Elle lui vola un baiser, ce qui eut le mérite de lui arracher un sourire, puis se leva pour tenter de trouver ses chaussures.
Ils quittèrent le QG une heure plus tard après une descente des escaliers ardue et un tas d'au-revoir. Lily transplana, James agrippé à son bras – il l'avait harcelée pour transplaner seul mais elle avait tenu bon. Il ne manquerait plus qu'il se désartibule. Quand leurs pieds touchèrent terre devant la maison des Potter, Lily crut que James allait vomir mais il préféra tourner de l'œil. Elle ne put qu'adoucir un peu sa chute. Lorsqu'il ouvrit les yeux, quelques secondes après, il articula faiblement :
- C'était très désagréable.
- Tu m'étonnes. Allez, debout champion !
Elle l'aida à se remettre sur pieds, glissa son bras sous le sien en abandonnant leur sac sur le trottoir et s'avança vers la maison. Avant qu'ils n'atteignent la porte d'entrée, celle-ci s'ouvrit et Fleamont Potter s'avança sur le perron. Il avait pris une journée de repos pour accueillir son fils.
Lily se mordit la lèvre en prenant conscience qu'elle ne l'avait pas vu depuis plus d'un an. Elle aurait dû essayer d'aller le voir avec James. Il lui sembla terriblement vieilli. Il avait maigri et il grisonnait aux tempes.
James se détacha d'elle pour avancer à pas prudents vers son père, qui le dévorait du regard, cherchant à s'assurer qu'il n'était plus à l'article de la mort. Il franchit finalement la distance qui le séparait de son fils et le serra farouchement contre lui. Lily se souvenait de lui comme d'un homme peu expansif, mais les mésaventures de son fils avaient brisé le détachement qu'il s'imposait habituellement. James, qui était pourtant plus grand que son père, sembla disparaître dans son étreinte. Lily entendit Fleamont murmurer :
- Mon fils... mon petit garçon.
***
Lily, juste après avoir posé leurs affaires dans le hall, s'exclama qu'elle avait des courses à faire, du monde à voir, qu'elle voulait se promener, bref, qu'elle voulait sortir, et elle quitta la maison. Resté seul avec son père, James eut soudain l'impression d'avoir dix ans à nouveau même si Fleamont avait repris contenance, passé le premier moment d'émotion. Il avait toujours été un père affectueux, bien sûr, mais sans être porté sur les effusions. James avait donc été bien plus troublé qu'il ne l'avouerait jamais par l'étreinte de son père, lorsqu'il était arrivé. Il avait l'habitude de l'inquiétude de Lily mais pas de celle de son père. Sans doute s'inquiétait-il depuis qu'il avait rejoint l'Ordre, mais il ne l'avait jamais montré.
James se laissa tomber sur le canapé, fatigué par le transplanage et sourit quand son père s'assit sur la table basse.
- Maman te tuerait si elle te voyait assis là, commenta-t-il.
Une lueur espiègle brilla dans le regard de son père mais s'évanouit bien vite alors qu'il posait ses coudes sur ses genoux.
- Ta mère te tuerait si elle savait les risques que tu prends.
James fronça le nez.
- Tu comptes me sermonner ?
- Non. Tu es adulte, James, et ce n'est pas ton vieux père qui va t'empêcher de faire ce que tu veux. Je te demande juste de faire attention, pour toi, et pour tous ceux qui tiennent à toi.
- Je n'avais pas franchement envie de sauter de cette falaise, fit-il remarquer.
- Tu veux bien me raconter ? Quand Lily m'a écrit elle ignorait tous les détails de l'affaire.
- Elle t'a écrit ? Je veux dire, avant sa lettre d'hier ?
Fleamont eut un sourire amusé.
- Étant bien plus sensée que toi, oui. Je pense que c'est la première chose qu'elle a faite quand elle a eu un peu de temps.
- Elle t'a inquiété pour rien, protesta James.
- Libre à toi de penser que ta possible mort ne représente rien, Jem, répondit paisiblement son père, mais l'usage de ce surnom qu'il n'avait pas utilisé depuis des années renseigna James sur ce qu'il en pensait.
- Papa...
- Tu veux bien m'expliquer comment mon imbécile de fils a réussi à se tirer de ce mauvais pas ?
James eut un sourire amusé mais s'aperçut que son père, bien qu'il tentât de plaisanter, le scrutait d'un air sérieux. Il était un miraculé, songea-t-il, même s'il avait du mal à se considérer comme tel.
Il se lança donc dans le récit de cette sinistre nuit du trois mars, mais s'aperçut bien vite que relater les faits à son père était beaucoup plus difficile que faire un récit burlesque à ses trois meilleurs amis. Il buttait sur les mots, se rendant enfin compte de l'horreur qu'avait été ces quelques heures. Il n'y avait pas vraiment pensé jusque là. Ou plutôt il n'y avait plus pensé. Tout était bien présent à son esprit quand il s'était réveillé, puis Lily lui avait annoncé que tout cela s'était produit une semaine plus tôt. Inconsciemment, il avait oublié sa peur, Voldemort et sa baguette pointée vers lui, sa certitude qu'il allait mourir. Il avait préféré tout cacher dans un coin de sa mémoire pour ne penser qu'au fait qu'il était vivant, que le Ministère n'était pas tombé, qu'il avait fait son devoir.
Quand Marlène était passée l'examiner une dernière fois avant de rentrer chez elle, elle s'était montrée aussi optimiste que d'habitude, joyeuse et pleine d'esprit. Il avait surtout eu l'impression de se remettre d'une mauvaise grippe. C'était aussi pour ça qu'il se sentait si ridicule d'être aussi faible. Mais alors qu'il parlait de ses blessures à son père, de son plongeon, de sa métamorphose, il comprit que Lily avait eu raison lorsqu'elle lui avait dit qu'il n'aurait jamais dû survivre.
Il s'interrompit soudain alors que l'une des images récurrentes de son délire s'imposait à lui : sa mère, penchée sur lui. Il secoua la tête et reprit son récit.
- Et puis je me suis réveillé, conclut-il d'une voix morne, les yeux baissés sur ses genoux.
Ses mains tremblaient légèrement et il les cala sous ses cuisses, agacé. Lorsqu'il regarda son père, il s'aperçut qu'il avait saisi son geste.
- Ça arrive souvent à ceux qui ont frôlé la mort, tu sais.
- Trembler comme un morveux ? Articula James entre ses dents serrées.
- Trembler comme quelqu'un qui a failli mourir ! Bon sang, James ! Tu méritais bien ta place chez les Gryffondors, avec ton orgueil mal placé !
Le jeune homme se renfonça dans le canapé, surpris par l'éclat de voix de son père. Il ne lui avait pas parlé sur ce ton depuis des années.
- Sauf que ce n'était pas la première fois ! Protesta-t-il. J'ai déjà été menacé par des Mangemorts et...
- On t'a mis une baguette sous le nez, on ne t'a pas annoncé ton exécution avant que tu ne te jettes dans le vide !
Fleamont se leva pour faire quelques pas furieux dans la pièce, semblable à son fils dans sa colère.
- Tu n'es pas faible, James, tu n'es pas impotent, et tu n'es pas insignifiant, reprit-il d'une voix plus calme en le regardant. Tu as eu l'incroyable courage de tenter la pire des folies dans l'espoir de survivre et pour ne pas mourir de la main de Voldemort. Mieux encore, tu t'en es sorti. Si tu étais faible, James, si tu étais un lâche, tu serais six pieds sous terre à l'heure qu'il est, et Voldemort se féliciterait de t'avoir tué. Tu as le droit d'être fatigué parce que tu as été incroyable, tu as le droit de te reposer, de te plaindre, de te laisser dorloter par Lily et par Bathilda. La seule chose que tu n'as pas le droit de faire, c'est de ne pas être en paix avec toi même sous prétexte que tu es convalescent.
James cligna plusieurs fois des yeux puis finit par hocher la tête. Fleamont se laissa à nouveau tomber sur la table basse et passa sa main dans ses cheveux. Il s'éclaircit la gorge, gêné par son éclat, avant d'ajouter :
- J'insiste sur la partie « te laisser dorloter ». Lily a besoin de s'occuper de toi pour cesser de s'inquiéter à tout instant.
James ravala sa fierté pour acquiescer.
- Bien. Tu veux un deuxième petit-déjeuner ?
- Je n'ai pas très faim.
Son père prit un air horrifié.
- Par Merlin, tu es maigre comme jamais et tu m'annonces que tu n'as pas faim ? Tu as toujours faim !
Il haussa les épaules avec une grimace dépitée.
- Cet appétit a intérêt à revenir vite parce que je compte bien te gaver comme une oie et Lily sera sans doute d'accord avec moi là-dessus.
James gémit et son père se mit à rire, mettant définitivement de côté la légère dispute qu'ils venaient d'avoir.
***
Lily ferma sans bruit la porte d'entrée et passa la tête dans le salon. Un sourire étira ses lèvres quand elle avisa Mr. Potter, assis sur la table basse avec une tasse de café à la main, occupé à veiller son fils qui dormait sur le canapé. Un plateau plein de crêpes en train de refroidir et de confitures patientait près de Fleamont, qui sourit à Lily.
- Je suis allé préparer un petit-déjeuner et quand je suis revenu il dormait déjà.
- Oui, il a tendance à faire ça, répondit-elle en s'avançant dans la pièce.
James dépassait évidemment de partout : ses jambes étaient passés par dessus l'accoudoir et son bras gauche pendait à moitié dans le vide. Quant à ses lunettes, elles étaient tombées par terre. Lily posa son manteau sur l'accoudoir d'un fauteuil et s'y laissa tomber avec un soupir. Elle était trop fatiguée pour être intimidée par Fleamont, même si c'était la première fois qu'elle se trouvait seule avec lui depuis bien longtemps.
- Une crêpe ? Proposa-t-il affablement.
- Non merci.
- C'était bien la peine que j'achète autant de provision si aucun de vous ne mange correctement, râla-t-il.
- Désolée. C'est l'angoisse.
Il posa un regard doux sur elle.
- J'imagine. Et je présume que James n'aide pas vraiment.
- Il n'est pas un patient très... patient, grimaça-t-elle.
- Ne te laisse pas marcher sur les pieds sous prétexte que tu t'inquiètes pour lui.
- Oh, ne vous en faîtes pas, on s'est disputés ce matin.
Fleamont eut un petit rire.
- Voilà qui ne m'étonne pas. A quel sujet, si je puis me permettre ?
- Il ne voulait pas venir ici.
- Merlin, voilà qui n'est pas très gentil pour son vieux père !
- Oh ça n'avait aucun rapport avec vous ! S'empressa-t-elle de corriger. Il veut juste se rendre utile et ça l'énerve de ne rien pouvoir faire.
- Je sais bien, Lily, ne t'inquiète pas, la rassura-t-il avec un sourire, mais il redevint brusquement sérieux. Je ne suis pas sûr qu'il se rende bien compte de tout ce qui lui est arrivé.
- Oh, je ne pense pas. Je crois qu'il n'a presque aucun souvenir des trois jours qu'il a passé à délirer. C'était ... horrible. Mais, pardon, vous n'avez sans doute aucune envie de parler de ça...
Fleamont posa une main apaisante sur son genou pour l'empêcher de se lever.
- Raconte-moi, Lily. Ça ne me dérange pas.
Elle hocha la tête en se mordillant la lèvre et reprit :
- Il ne reconnaissait personne. Il prenait... il prenait Marlène pour sa mère, il me repoussait à chaque fois que j'essayais de lui parler parce qu'il voulait la voir. Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais il est maigre, il est affreusement maigre... il n'a pratiquement rien avalé en trois jours, il... il vomissait à chaque fois qu'on essayait de lui donner à manger, et même quand on voulait le faire boire. Il mourait sous mes yeux et je ne pouvais rien faire du tout parce qu'il ne me laissait même pas approcher !
Lily enfouit son visage entre ses mains pour que Fleamont ne voit pas les larmes dans ses yeux. Après un instant de silence, il murmura :
- Non, il ne se rend absolument pas compte. Merci, Lily. Pour tout ce que tu as fait pour lui.
Elle secoua la tête, son expression toujours cachée par ses mains.
- Je n'ai rien fait du tout. C'est Marlène qu'il faut remercier.
- Tu es restée auprès de lui tout ce temps. Sirius me l'a dit. Il t'admire beaucoup, tu sais. Lui-même n'arrivait pas à rester auprès de James.
- Ça le rendait fou, confirma-t-elle sans tenir compte de sa remarque sur l'admiration de Sirius. Et moi ça me rendait malade. Sans Marlène...
- Qui est Marlène ? Tu ne m'as pas vraiment dit de qui il s'agissait.
Lily se décida enfin à lever les yeux et croisa le regard de Fleamont, si semblable à celui de James. Elle jeta un coup d'œil au jeune homme endormi avant de répondre :
- Marlène McKinnon. Si son implication dans cette affaire pouvait rester entre nous... C'est la femme de ...
- Gary McKinnon ? Compléta-t-il. Vraiment ? Merlin, voilà qui est inattendu !
- Vous connaissez Mr. McKinnon ?
- Oh, comme tout le monde au Ministère. Il nous arrive de prendre un café ensemble ; un homme charmant. Oui, j'imagine qu'il n'a pas envie que tout le monde sache que sa femme fait partie de l'Ordre du Phénix. J'ignorais qu'elle était Médicomage.
- Elle ne l'est pas. Enfin, elle ne l'est plus. Mais elle est très douée.
- En effet, commenta Fleamont d'un ton pensif en regardant son fils. Il y a eu d'autres blessés, ce soir-là ?
- Oui, mais pas aussi gravement que James. A part... Terry Dundoe, bien sûr.
Lily s'aperçut avec une pointe de culpabilité qu'elle n'avait pas songé au jeune homme depuis une semaine, trop préoccupée par James. Elle le connaissait à peine mais c'était un membre de l'Ordre.
- Que lui est-il arrivé ?
- Il est mort.
Fleamont cligna plusieurs fois des yeux à cette annonce un peu brutale alors que Lily se tortillait sur son siège, mal à l'aise.
- Tu le connaissais bien ?
- Non... non pas du tout, mais c'était le meilleur ami de Frank Londubat et ça l'a beaucoup affecté.
- Londubat ? Releva Fleamont avec un sourire. Le fils d'Augusta ?
- Vous la connaissez ?
- Tout le monde connaît Augusta Londubat ! Nous sommes amis ; des amis d'enfance. Elle a quatre ans de plus que moi et elle a agonisé d'injures un Selwyn qui m'avait fait un croche-pied, lors de mon arrivée à Poudlard. Un grand moment.
- Qui sont les Selwyn ? Interrogea Lily, trop heureuse d'échapper à leur conversation trop difficile.
- Une famille de Sang-Purs, comme les Londubat.
- Et les Potter.
- Oh, mais nous ne comptons pas !
- Comment ça ?
- Peut-être as-tu déjà entendu des gens dire à James qu'il était un traître-à-son-sang ? Oui ? Eh bien voilà, nous avons été déchu de notre statut de Sang-Pur à part entière.
- Vous faisiez partie du registre des Sang-Pur ?
Fleamont secoua la tête avec un sourire.
- Non, jamais. Nous sommes une famille trop modeste. Et je dois dire que je ne me suis jamais senti spolié d'un quelconque droit. Le registre des Sang-Pur est une aberration pure et simple.
- Comment ça ?
Il ouvrit la bouche pour répondre puis secoua la tête.
- C'est une longue histoire très compliquée, ma chère Lily. Je te la raconterai quand tu seras plus reposée, si ça t'intéresses vraiment. Pour l'instant, tu devrais vraiment goûter à ces crêpes ! Si Bathilda débarque et qu'elle nous trouve en conférence historique alors que tu es plus pâle qu'un fantôme, je vais me faire tirer les oreilles.
***
- Tu peux m'expliquer ce que tu fais là ?
Lily cessa de vider son sac et leva la tête vers James qui attendait, une main appuyée sur l'encadrement de la porte.
- Oh, tu es réveillé ! On a cru que tu allais dormir toute la matinée.
- Ouais, réveillé, c'est moi, coucou, qu'est-ce que tu fais là ?
- Je range mes affaires.
- Non, mais... dans cette chambre. Là-bas. Je veux dire, ma chambre est là-bas.
Elle haussa un sourcil.
- Tu sais que tu racontes n'importe quoi ?
- Je viens de me réveiller. Je déteste faire la sieste.
Lily pouffa et alla s'adosser au chambranle de la porte.
- Je sais que ta chambre est là-bas.
- Alors pourquoi tu n'y es pas ?
- T'es pas franchement en état de me faire des propositions du genre, Potter, fit-elle remarquer avec un faible sourire.
- Non, je... pas ça. Mais c'est débile de rester là.
- Tu as besoin de repos, James, pas que je te donne des coups de pied dans mon sommeil.
- Tu ne fais pas ça, et j'en ai marre qu'on me dise que j'ai besoin de repos, j'ai besoin de toi. Repos, toi, c'est la même chose. Dodo, même lit, tout ça. Sieste. Je déteste la sieste.
Avec une moue à mi-chemin entre l'inquiétude et l'amusement, Lily se rapprocha de lui et posa un instant ses lèvres sur les siennes.
- Tu as de la fièvre, commenta-t-elle.
- Tu sais ça en m'embrassant ? Tu embrassais tous tes patients ? C'est dégoûtant Lily.
- Bien sûr que non. Va te coucher, James.
- Mais sieste, geignit-il, je viens de faire la sieste, je déteste la sieste !
- Je ne te demande pas de dormir, juste de te mettre dans ton lit, assura-t-elle en le poussant vers sa chambre.
- Comment tu sais que j'ai de la fièvre juste en m'embrassant ?
- Tu as les lèvres sèches.
- Tu devrais m'embrasser encore... tu sais, juste pour vérifier.
- Qu'est-ce qu'on a dit sur les propositions indécentes, mon chéri ?
- C'est toi qui m'a dit de me mettre dans mon lit, protesta-t-il alors qu'elle le forçait à s'allonger.
- Parce que tu as de la fièvre.
- Pourquoi j'ai de la fièvre ? Je croyais que c'était fini. Lily, je veux pas être encore malade.
- Ça doit être le transplanage, ce n'est rien du tout. Je ne sais pas si ça va te consoler mais tu n'es pas en train de délirer, tu es juste dans le coton parce que tu viens de te réveiller. Même si la fièvre ne doit pas aider.
- Ça veut dire que je suis un peu stupide, hmm ? Je te retiens, Evans.
Lily s'assit sur le bord du lit et se pencha pour déposer un baiser sur son front. James passa un bras autour de sa taille pour l'empêcher de bouger, toute envie de débiter des absurdités évanouie. Pendant un moment, il profita de la chaleur de sa joue posée sur son front, de ses lèvres qui s'égaraient parfois sur sa peau, de son pouce qui caressait doucement sa joue.
- Tu n'es pas stupide du tout, murmura-t-elle finalement.
- Tu viens t'installer ici, hein ?
Elle fit glisser ses lèvres jusqu'aux siennes avant de répondre, un sourire dans la voix :
- Ça dépend, tu seras sympa ?
- Je ne garantie rien.
- Tant pis. Je t'accepte même avec tes sautes d'humeur.
- Je suis très flatté. Ça veut dire que tu viens ?
Elle se redressa et sourit. James regrettait déjà sa chaleur. Son père avait raison : ce n'était pas si désagréable de se faire materner – tant qu'il n'y avait ni Prewett ni Maraudeur pour se moquer de lui.
- D'accord. Mais seulement parce que si je dis non tu vas venir dormir dans mon lit toutes les nuits de toute façon.
- Peut-être bien, concéda-t-il. Mais mon lit est beaucoup plus confortable. Et puis c'est un accomplissement en soi.
- Comment ça ?
- Lily Evans dans mon lit !
- James Potter dans son lit ?
- Lily. Evans. Dans le lit de James. Potter. De quoi rendre Poudlard fou.
- Poudlard sait qu'on sort ensemble.
- Poudlard d'il y a cinq ans ! Et James d'il y a cinq ans. Ça flatte ses hormones d'adolescent.
Lily pouffa.
- Tu recommences à dire n'importe quoi.
- Parce que m'allonger ne m'a pas aidé à éloigner ma ... vasitude.
- Ce mot n'existe pas.
- Si. Mais seulement pour les gens qui sortent de leur sieste. Où est-ce que tu vas ?
- Chercher mes affaires. J'ai toute une armada de potions pour toi.
- Beurk. Je présume qu'elles sont toutes imbuvables ?
- Correct, Potter ! On va faire baisser cette fièvre.
- Puisque je suis condamnée à avaler des trucs dégoûtants, je peux avoir quelque chose pour mon dos aussi ?
- Nope, répondit Lily depuis le couloir, tu ne peux prendre cette potion que toutes les douze heures.
James laissa échapper une flopée de jurons et Lily lui fit les gros yeux en entrant dans la pièce, son sac à la main.
- Si tu continues, je te lave la bouche au savon.
- Donne moi cette horreur, qu'on en finisse, râla-t-il en tendant la main.
Il avala avec force grimaces le produit puis tapota son lit. Le goût âcre de la potion l'avait tout à fait réveillé.
- Viens là, Lily que j'achève mon plus grand rêve.
Elle alla s'allonger près de lui avec un petit rire et il commenta d'un ton extatique :
- Lily Evans, dans mon lit. Je peux...
Il s'interrompit, l'estomac noué, et Lily se redressa sur un coude pour le regarder.
- Tu peux quoi ?
- J'allais dire mourir en paix, mais maintenant que j'ai tenté l'expérience je n'ai pas très envie de recommencer.
Lily devint encore plus pâle qu'elle ne l'était en l'entendant. Elle retomba sur le matelas pour enfouir son visage contre son cou et marmonna :
- Te voilà devenu bien raisonnable depuis ce matin.
- Papa m'a engueulé.
- Un saint homme.
- A propos de ce matin... je suis désolé.
- Tu t'es déjà excusé.
- Sauf que je n'étais pas sincère.
Un rire sans joie et légèrement étouffé lui parvint.
- C'est beau de l'admettre.
- Lily...
- Je sais.
Elle soupira et fit glisser un peu plus sa main sur son ventre pour se rapprocher de lui. Le silence tomba. James cherchait quoi dire, gêné. Finalement, Lily eut un petit rire :
- Lily Evans, dans ton lit. Tu devrais écrire à Sirius pour lui annoncer ça.
- Tu veux qu'il nous rejoigne ?
- Hmm. Espèce de sombre imbécile.
- Je te rappelle que c'est toi qui a proposé qu'on fasse un trouple.
- Je n'ai aucune envie de te partager avec Sirius.
- Ce n'est pas toi qu'on doit partager ?
- Demande à Remus ce qu'il en pense.
- Lily ! Tu ne vas pas t'y mettre ! Non, arrête de rire, c'est pas drôle du tout ! Lily !
***
- James Potter, tu as une mine affreuse !
Lily considéra le t-shirt de James qui flottait sur son dos trop maigre et grimaça. Bathilda avait malheureusement raison.
- Sérieusement, on dirait qu'un troll des montagnes t'a allégrement piétiné. Fleamont, qu'est-ce qu'on va faire de ce garçon ?
L'interpellé, adossé à la porte de la cuisine, haussa les épaules avec un sourire.
- Le gaver jusqu'à le faire éclater ?
James gémit.
- Mais j'ai pas faim !
- De pire en pire, soupira Bathilda. Va t'asseoir, mon garçon ! Tu es en train de devenir tout vert.
- Eh, protesta-t-il tout en se faisant pousser par son père dans le salon, c'est faux.
- Tu as passé l'après-midi debout sous prétexte de nous prouver que tu allais parfaitement bien, alors si, c'est vrai, tu deviens vert, commenta Fleamont.
- Mais...
- Tiens, mange ça.
- Papa !
Bathilda eut un petit sourire puis se tourna enfin vers Lily. Celle-ci ne put s'empêcher de faire une petite grimace d'excuse car elle savait très bien ce que la Sorcière allait lui dire. Après l'avoir examinée un instant, elle laissa tomber son verdict :
- Toi aussi, tu as une mine affreuse. Viens là ma petite Lily.
Sans trop comprendre ce qu'il lui arrivait, Lily se retrouva pressée contre l'ample poitrine de Bathilda. Le premier instant de gêne passé, elle lui rendit son étreinte. Elle ne s'était pas rendue compte jusqu'ici à quel point elle avait besoin du soutien d'un adulte – un vrai, pas quelqu'un comme elle à peine sorti de l'enfance. Bathilda avait beau être beaucoup plus petite qu'elle, c'était tout de même réconfortant.
L'illustre Sorcière la lâcha finalement et prit un air sévère.
- J'ignore d'où viennent ces bleus et cette vilaine cicatrice, mais je suis sûre qu'une simple potion les ferait partir, et tu le sais aussi, ce qui signifie... ?
- Que je ne me suis pas soignée, répondit Lily piteusement.
- Parfaitement. Alors tu vas t'asseoir avec Jamie, et tu ne bouges plus.
- Mais...
- Lily, tu me dois une faveur pour n'être pas venue voir la vieille femme que je suis depuis un an.
Lily ouvrit la bouche pour protester mais se résigna à entrer dans le salon en traînant les pieds sous le regard autoritaire de Bathilda. Elle se laissa tomber sur une chaise près de celle où était installé James, devant la longue table en bois qui se trouvait au fond de la pièce. Le couvert était magnifiquement dressé – sans doute pour fêter le retour du fils miraculé. James contemplait la table d'un air atterré, même s'il était un peu moins vert.
- Tu crois qu'on peut encore s'enfuir ? Murmura-t-il à sa voisine
- Je suis peut-être vieux et décrépi, Jem, mais je ne suis pas sourd, lança Fleamont en s'éloignant vers la cuisine.
- Vous comptez nous sortir votre vieillesse à tout bout de champ pour nous faire obéir ? Interrogea James. Vous n'êtes vieux ni l'un ni l'autre.
- Nous cachons bien notre jeu, expliqua Bathilda en se laissant tomber sur une autre chaise. Pour combien de temps êtes-vous là ?
- Une quinzaine de jours, répondit aussitôt Lily.
- Ou plutôt une dizaine, corrigea James.
- Une quinzaine, insista-t-elle sans le regarder.
Le regard amusé de Bathilda alla de l'un à l'autre.
- Une...
- Une quinzaine, conclut d'un ton ferme Fleamont en posant un saladier sur la table.
James fusilla du regard son père mais Lily lui adressa un regard reconnaissant. Il lui sourit avant de faire un clin d'œil à Bathilda, qui pouffa de rire en attrapant les couverts à salade.
- Ça me laissera donc largement le temps de donner des cours d'histoire de la Magie au petit Jamie pour qu'il rattrape tout le retard accumulé pendant ces huit dernières années.
- Si tu fais ça, je fugue, prévint la victime. Sans nourriture ! Ah ! Ça vous en bouche un coin, hein ?
- Si tu fugues, je te retrouverai et je te traînerai jusqu'ici en te tirant par les oreilles, annonça Lily d'un ton tranquille.
- Dis-moi, Fleamont, intervint Bathilda, ils ont perdu tout sens de l'humour depuis l'an dernier ?
- Ils sont seulement devenus un peu stupides, confia-t-il à voix basse.
- Merci de ton soutien, papa.
- C'est pour ça qu'un peu d'histoire de la Magie ne leur fera pas de mal.
- Tilda !
Lily se mit à rire en même temps que Fleamont, et James et Bathilda suivirent bien vite.
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